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  • 26/05/2025
Le soja, le cacao et l’huile de palme font partie, de manière directe ou indirecte, de notre alimentation quotidienne. Ce sont aussi les produits agricoles importés qui ont le plus fort impact environnemental et social. C’est une des conclusions du rapport, publié en avril 2025, par le bureau d’analyse le Basic pour Greenpeace France, l'Institut Veblen et Max Havelaar France.

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Transcription
00:00Générique
00:00Quel est l'impact social et environnemental des produits alimentaires importés ?
00:11On en débat avec Blaise Desbordes, bonjour.
00:13Bonjour.
00:13Bienvenue, vous êtes le directeur général de l'ONG Max Avelard France.
00:17Et Clément Ellari, bonjour.
00:18Bonjour.
00:18Bienvenue à vous aussi, vous êtes chargé de campagne forêt chez Greenpeace.
00:22Vous avez publié le mois dernier avec l'Institut Veblen un rapport,
00:26une étude menée par le bureau d'études Le Basique.
00:30Peut-être la leçon principale déjà, si on devait généraliser,
00:33puis ensuite on rentre dans le détail.
00:34Oui, je peux peut-être vous dire l'objet.
00:37L'objet, on voulait passer au scanner les importations françaises.
00:40Est-ce que ça va bien, ce que la France importe tous les jours en denrées alimentaires ?
00:44Est-ce que ça va bien sur le plan social, environnemental,
00:46au regard des grandes lois que l'Union européenne, depuis une dizaine d'années,
00:50essaye de passer pour être, je dirais, le leader mondial d'un commerce un peu plus équilibré ?
00:55Et donc ça, c'était l'intention.
00:56On a donc analysé tous les chiffres des importations françaises
00:59et les provenances, les pays,
01:01et analysé si sur le plan social, par exemple sur le travail forcé,
01:05le travail des enfants,
01:06ou sur le plan environnemental, la déforestation, le climat,
01:08il y avait un problème.
01:09Et là, le son, Thomas, c'est un peu cruel, un peu amer.
01:13C'est assez désastreux, on peut dire ça.
01:14C'est pas très bon. Dans une journée, par exemple, vous pouvez vous dire que votre jus d'orange du matin,
01:20votre riz basmati du midi, le parfum d'ambiance dans votre salle de bain pendant l'après-midi,
01:23le thé que vous prenez avec des amis, et enfin l'apéritif du soir avec les noix de cajou,
01:27tout ça, ça recèle des lourds impacts.
01:30La bonne nouvelle, c'est qu'il y a des solutions.
01:32Et on va évidemment détailler ces solutions.
01:36Si on regarde, Clément et Larry,
01:38les produits, vous en avez listé quelques-uns,
01:42mais les plus problématiques, vous diriez quoi, spontanément ?
01:46Dans le rapport, les calculs permettent de montrer les trois filières les plus impactantes.
01:52Et ce sont d'abord le soja, pour l'alimentation animale, que la France importe massivement,
01:58le cacao et l'huile de palme.
02:00C'est pas une grande surprise, ces trois filières-là,
02:02elles ont un impact particulièrement important d'un point de vue environnemental.
02:06Sur les questions socio-économiques, il y a d'autres produits qui peuvent poser problème
02:12en raison de questions de rémunération, notamment de travail forcé.
02:15On pense à la vanille, par exemple.
02:18On va en parler, mais restons sur l'impact environnemental.
02:21Et par exemple, le soja, c'est un produit que vous connaissez bien.
02:25Il est d'abord essentiellement produit pour l'alimentation animale, ce soja, en proportion ?
02:30Oui, tout à fait.
02:31La France importe 3,5 millions de tonnes de soja chaque année,
02:36quasiment uniquement pour nourrir les animaux dans les élevages industriels.
02:40Et ce soja vient majoritairement du Brésil,
02:43où il a un impact sur les écosystèmes et aussi sur les droits des populations,
02:48notamment des peuples autochtones.
02:50D'un point de vue environnemental, le rapport, il étudie l'impact sur le climat
02:54avec les émissions de gaz à effet de serre,
02:56qui est directement lié à l'impact sur les écosystèmes et les forêts,
03:00en particulier à déforestation,
03:02où le soja la participe aussi dans différents écosystèmes
03:05à la transformation et à la déforestation.
03:07Et puis l'impact sur l'eau, avec l'usage de l'eau d'une part,
03:11la consommation d'eau et puis la pollution de l'eau aussi,
03:13c'est-à-dire la quantité d'eau nécessaire à diluer les pollutions
03:16générées par la production, notamment par les engrais ou les pesticides qui sont utilisés.
03:20Est-ce que les agriculteurs ont des alternatives ?
03:23Parce que c'est toujours la question qu'on pose.
03:25Ok, on se dit qu'il faudrait moins importer de soja pour nourrir les animaux
03:30dans les fermes françaises, mais c'est quoi les alternatives ?
03:32Alors, clairement, pour changer de modèle et pour importer moins de soja du Brésil,
03:42c'est important de changer de modèle de production
03:43et d'adopter des pratiques plus agroécologiques
03:47dans lesquelles le soja importé du Brésil, avec ces impacts-là, n'a pas sa place.
03:52Il y a déjà des personnes qui produisent de cette manière-là.
03:54Il y a déjà des cahiers des charges qui interdisent notamment le soja OGM
03:57et le soja brésilien étant presque uniquement OGM.
04:01Il y a des producteurs qui s'en passent.
04:03Donc, au quotidien, il y a des personnes qui montrent que c'est possible de produire autrement.
04:07Ils montrent que c'est possible.
04:08Alors, si on parle du respect des droits humains, de la rémunération
04:11ou des conditions de travail, Blaise Desbordes,
04:14il y a pas mal d'exemples là aussi dans ce rapport.
04:18Je ne sais pas sur lesquels vous voulez parler.
04:20J'ai vu les tomates au Maroc, j'ai vu la production d'avocats au Pérou, au Kenya.
04:24Qu'est-ce que vous ciblez ? Qu'est-ce que vous dévoilez ?
04:27Je dirais l'impact majeur qui nous interpelle,
04:29c'est la grande pauvreté d'un certain nombre de producteurs et productrices
04:33qui font nos aliments importés.
04:36Vous avez cité les tomates.
04:37Tout à fait au Maroc, on a des cas de harcèlement, de travail forcé
04:41et surtout une grande pauvreté avec un niveau d'à peu près 50 à 60% seulement
04:45d'un revenu minimum vital.
04:47Le revenu minimum vital, c'est un outil très utile aujourd'hui.
04:50C'est des économistes qui calculent combien une personne,
04:53juste pour vivre avec la base, l'extrême base, a besoin.
04:57Et donc, par rapport à ce niveau, on calcule s'il le touche ou pas.
05:00Pour les tomates, ce n'est pas le cas au Maroc.
05:02Pour l'avocat, par exemple, au Pérou, au Kenya,
05:04la France importe massivement de ces deux pays.
05:06Non seulement on a les problèmes environnementaux qui ont été mentionnés,
05:09mais on a un revenu d'environ 55 à 60% là aussi
05:12de ce qui est nécessaire au niveau vital.
05:14Donc chaque fois que vous prenez un avocat,
05:16vous contribuez à la pauvreté et vous validez quelque part la pauvreté.
05:20Donc ce qu'on a su faire dans l'Union Européenne,
05:22dans un certain nombre de domaines, c'est de poser des seuils.
05:25Et donc vous questionniez les alternatives.
05:27Mais bien sûr qu'il faut aller vers des alternatives.
05:29On ne peut pas imaginer que la France, dans sa politique commerciale,
05:31fasse du dumping social et environnemental.
05:34Et l'Union Européenne, pareil.
05:35Or, le drame, c'est qu'après avoir développé des directives vraiment innovantes
05:40pour filtrer, je dirais, les importations qui rentrent dans l'Union Européenne,
05:44eh bien on est en train de détricoter ça,
05:46que ce soit sur le plan de la déforestation,
05:48le règlement a été repoussé,
05:50et très récemment encore, sur le plan de la vigilance des droits de l'homme,
05:53on demandait aux multinationales européennes d'avoir au moins un regard,
05:57au moins un regard de vigilance.
05:58Eh bien même ça, apparemment, ça ne convient plus aux autorités européennes.
06:01– La CS3D avec notamment une prise de parole d'Emmanuel Macron il y a quelques jours.
06:06– Justement, on va parler du règlement sur la déforestation
06:11afin de garantir qu'il y ait plus ou moins de déforestation dans nos assiettes.
06:16Peut-être on peut rappeler ce que dit, ou ce que disait, ou ce que dira, je ne sais pas,
06:20le règlement européen.
06:21– Oui, alors le règlement européen, il doit être mis en œuvre d'ici la fin de l'année,
06:25après un report d'un an environ.
06:27Ce rapport, il oblige les entreprises qui mettent sur le marché européen des produits,
06:31un certain nombre de produits à risque en particulier,
06:33donc ça couvre par exemple le soja dont on vient de parler,
06:36il oblige les entreprises à s'assurer que ces produits ne sont pas issus
06:40de terres déforestées après 2020.
06:42Et donc, il l'interdit, il a mis sur le marché des produits de ce type-là.
06:47Donc c'est une véritable avancée, ce n'est pas absolument parfait
06:49dans le sens où ça ne couvre pas d'autres types d'écosystèmes,
06:52mais c'est une véritable avancée qu'il est important de maintenir
06:55et qui doit être mis en œuvre d'ici la fin de l'année.
06:57– Donc c'est très contraignant, parce que c'est une interdiction dont on parle.
07:01Est-ce qu'il est en passe, on parlera de la CS3D après,
07:04mais du devoir de vigilance, est-ce qu'il est en passe d'être édulcoré,
07:07puisqu'il y a effectivement ce mouvement un peu général au niveau européen,
07:13dans la foulée des résultats des élections, ce n'est pas un hasard ?
07:17– Oui, alors ce qu'il faut rappeler aussi, c'est le constat,
07:20c'est que personne ne veut de déforestation dans son assiette.
07:23C'est le seul moyen de pouvoir…
07:24– Oui, mais on ne sait pas forcément.
07:25– Oui, mais justement, le seul moyen de s'en assurer,
07:27c'est de mettre en place des législations qui s'appliquent à l'ensemble de la filière
07:30et qui garantit qu'il n'y a pas de déforestation quand on consomme un de ces produits-là.
07:35Et donc ce règlement, aujourd'hui, il n'est pas remis en question au même niveau que la directive.
07:43et on compte bien faire en sorte qu'il soit maintenu,
07:47qu'il continue à s'appliquer de manière large et stricte pour qu'il n'y ait pas de retour en arrière.
07:52– Si je peux ajouter un mot sur les petits producteurs,
07:54vous savez que par exemple pour le café et le cacao, vous avez deux types d'agriculture.
07:59Une grande agriculture industrielle, de plein soleil, bourrée de pesticides, etc.
08:04Et puis une agriculture protétrice du climat, c'est celle que le commerce équitable notamment défend,
08:08que l'agriculture bio défend, qui a l'effet de petits producteurs pauvres.
08:11Donc appliquer le même règlement sur ces deux types, vous voyez, la différence.
08:15Pour une grande exploitation brésilienne, c'est facile de géolocaliser ces parcelles.
08:18Pour mille petits producteurs dans les montagnes du Tchapa, c'est plus compliqué.
08:21Donc nous, on demande quand même que d'ici le 1er janvier,
08:23l'Union européenne accompagne un peu mieux ceux qui protègent le climat et la biodiversité
08:27en faisant nos aliments du bon café et du bon cacao.
08:29– Dans le cadre de ce règlement RDBU dont on parle, d'accord.
08:33Et sur la CS3D, alors cette directive sur le devoir de vigilance des entreprises,
08:37comment vous avez réagi quand vous avez entendu le président de la République dire
08:40« Ah, peut-être que c'est trop compliqué ».
08:41– Très mal, on a réagi extrêmement mal et c'est l'ensemble.
08:44Il y a 160 organisations en France qui sont mobilisées et beaucoup plus en Europe.
08:47Il y a des entreprises, notamment le Mouvement Impact France que vous connaissez sans doute,
08:51dont je fais partie également, qui disent « Mais quel est ce contresens ? »
08:55– C'est une directive qui demandait de manière innovante et précurseur de regarder tout au long d'une chaîne.
09:02Les multinationales aujourd'hui ont des chaînes très très longues de sous-traitance
09:04et de regarder donc les atteintes aux droits de l'homme, d'avoir une vigilance, de faire un rapport là-dessus.
09:09C'était une obligation de moyens pour qu'on soit au moins conscient si oui ou non il y avait un problème.
09:14Et bien même cette vigie, même ce fanal dans l'obscurité et l'opacité des supply chains mondiales,
09:19maintenant on veut le détricoter.
09:20C'est très malheureux que le président français et le chancelier allemand aillent dans ce sens.
09:24Ce n'est pas gagné non plus parce que ce n'est pas simplement une interview qui permet de détruire une régulation européenne.
09:29Mais c'est un très mauvais signal.
09:30Je ne comprends pas pourquoi, alors que l'Union européenne avec le pacte vert avait esquissé le cadre régulateur de demain,
09:39on est en recul.
09:41Est-ce que véritablement le dumping social et environnemental est l'avenir de l'Union européenne ?
09:45Je ne crois pas.
09:46Merci beaucoup, merci à tous les deux et à bientôt sur Be Smart for Change.
09:50On passe tout de suite à notre rubrique Startup.

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