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  • 23/05/2025
GRAND DÉBAT / Guerre à Gaza : Israël de plus en plus isolé

« Le récap » par Bruno Donnet

Benyamin Netanyahou et son gouvernement ont lancé une opération de « conquête » de la bande de Gaza. Depuis le lundi 19 mai 2025, et après 78 jours de blocus imposé par Israël, seuls 300 camions d'aide humanitaire ont pu entrer à Gaza. Un chiffre dérisoire face aux besoins des 2,1 millions d'habitants. 22 % des gazaouis sont aujourd'hui en situation de « catastrophe alimentaire », le niveau 5 (le plus élevé) de la classification des crises alimentaires établie par le Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire (IPC), qui regroupe des experts issus d'une quinzaine d'agences des Nations unies. Face à cette urgence, les pressions internationales sur Israël se multiplient. L'Union européenne a annoncé qu'elle réexaminerait son accord d'association avec Israël, en vigueur depuis 2000. De son côté, le Royaume-Uni a suspendu les négociations relatives à un accord de libre-échange. Acculé, Benyamin Netanyahou a déclaré le 22 mai : « Pour préserver notre liberté d'action opérationnelle et permettre à nos meilleurs alliés de continuer à nous soutenir, nous devons éviter une crise humanitaire ». Il a ajouté : « S'il existe une possibilité de cessez-le-feu temporaire pour ramener d'autres otages - et j'insiste sur ce point : une trêve temporaire - nous y sommes prêts ». Un nouveau cessez-le-feu à Gaza est-il à prévoir ?

Invités :
- Vincent Hugeux, essayiste, journaliste indépendant et enseignant à Sciences Po,
- David Rigoulet-Roze, rédacteur en chef de la revue « Orients Stratégiques », chercheur associé à l'IRIS,
- Stéphanie Latte Abdallah, historienne, directrice de recherche au CNRS et co-autrice de « Gaza, une guerre coloniale » (Actes Sud),
- Alain Rozenkier, Président de l'association « La Paix maintenant ».

GRAND ENTRETIEN / Philippe Claudel : Trump, Musk, Poutine, le nouveau far west

Avec « Wanted », Philippe Claudel signe une dystopie satirique mettant en scène un duo caricatural : Donald Trump et Elon Musk, alliance absurde du pouvoir politique et financier. Le récit débute par une conférence de presse dans le Bureau ovale et dégénère en crise géopolitique mondiale après la mise à prix de la tête de Vladimir Poutine par Elon Musk. Ce geste entraîne une série d'assassinats, une escalade diplomatique et l'effondrement des repères moraux. Philippe Claudel dénonce la vulgarité, l'imprévisibilité et l'arrogance de ces figures dominantes, tout en questionnant le langage vidé de son sens et vulgaire propre à l'élite trumpienne. Par l'humour et la fable, Philippe Claudel veut alerter sur la dérive totalitaire de ce duo improbable à la tête de la première puissance mondiale. Jusqu'où Donald Trump et Elon Musk seraient-ils prêts à aller pour garder le pouvoir ?

Grand invité : Philippe Claudel, écrivain, Président de l'Académie Goncourt, auteur de « Wanted » (Stock)

LA SÉANCE DE RATTRAPAGE / Bisbilles, port du voile et session extraordinaire

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Transcription
00:00:00...
00:00:05Bonsoir à tous. Ravis de vous retrouver
00:00:07dans Ca vous regarde. Bonsoir, Philippe Claudel.
00:00:10Vous signez un roman désopilant qui s'inspire grandement
00:00:13de ce qui fait notre actualité, les déclarations
00:00:16à la fois improbables et imprévisibles
00:00:18de Donald Trump et d'Elon Musk.
00:00:20Wanted, c'est le titre de votre ouvrage.
00:00:23Elon Musk a pris la tête de Vladimir Poutine.
00:00:25Le grotesque et l'absurde sont au pouvoir.
00:00:28Autant en rire, vous nous direz si c'est votre parti pris.
00:00:31Mais avant cela, on se penchera sur la situation à Gaza
00:00:34et sur la pression diplomatique qui s'accroît sur Israël.
00:00:37Que cherche Benyamin Netanyahou avec cette nouvelle offensive militaire ?
00:00:41Pourquoi la France et l'Europe ont changé de ton vis-à-vis d'Israël ?
00:00:45Le soutien de Donald Trump à l'Etat hébreu est-il vraiment indéfectible ?
00:00:49On en débattra ce soir avec nos invités.
00:00:51Enfin, la séance de rattrapage,
00:00:53tout ce qu'il s'est passé cette semaine à l'Assemblée
00:00:56de Macronistes en colère, vous le verrez.
00:00:59Voilà pour le sommaire.
00:01:00Philippe Clodel, êtes-vous prêt ?
00:01:02Je vous suis. On y va. C'est parti.
00:01:04Générique
00:01:05...
00:01:14Des camions d'aide humanitaire
00:01:16entrent enfin dans Gaza, mais au compte-goutte,
00:01:19Israël poursuit son offensive militaire,
00:01:21malgré la pression croissante de la communauté internationale.
00:01:24La pression va-t-elle faire reculer le gouvernement israélien ?
00:01:28Donald Trump va-t-il durcir le ton ?
00:01:30Quel avenir pour le peuple palestinien à Gaza ?
00:01:32On en discute ce soir avec Stéphanie Latte-Abdallah.
00:01:35Vous êtes historienne,
00:01:36vous êtes anthropologue du politique,
00:01:39spécialiste du Moyen-Orient et des sociétés arabes,
00:01:41directrice de recherche au CNRS.
00:01:43Vous venez de coécrire le livre
00:01:45Gaza, une guerre coloniale, paru chez Acte Sud.
00:01:48Alain Rosanquier, bonsoir.
00:01:51Vous êtes sociologue et vous présidez en France
00:01:53l'association La Paix Maintenant
00:01:55et vous avez co-signé, il y a quelques jours à peine,
00:01:58une tribune qui appelle à reconnaître l'Etat palestinien.
00:02:01David Rigoulet-Rose, bonsoir.
00:02:03Vous êtes chercheur associé à l'IRIS,
00:02:05spécialisé sur la région du Moyen-Orient
00:02:07et rédacteur en chef de la revue Orient Stratégique.
00:02:10Vincent Huges, bonsoir.
00:02:12Vous êtes essayiste, enseignant à Sciences Po
00:02:14et journaliste indépendant.
00:02:16Vous connaissez très bien cette région.
00:02:18On commence avec le récap de Bruno Donnet.
00:02:23Musique de générique
00:02:26...
00:02:31Bonsoir, Bruno.
00:02:32Bonsoir, Clément.
00:02:33Dans votre récap, ce soir, Bruno,
00:02:35un Premier ministre israélien de plus en plus isolé.
00:02:38Regardez bien ces images. Elles sont un symbole
00:02:41hautement symptomatique. Hier, 87 camions chargés
00:02:43de farine, d'aliments pour bébés et d'aides humanitaires
00:02:47en tous genres ont été autorisés par Israël
00:02:49à entrer dans Gaza après 80 jours de blocus.
00:02:52C'est un symbole d'ouverture, certes,
00:02:54mais c'est surtout la conséquence
00:02:56de la très forte pression internationale
00:02:59que subit Israël. Écoutez, par exemple,
00:03:01comment le chef de la diplomatie française
00:03:04a qualifié la situation à Gaza cette semaine.
00:03:07-"Elle est insoutenable
00:03:09parce que la violence aveugle,
00:03:11le blocage de l'aide humanitaire par le gouvernement israélien
00:03:14ont fait de Gaza un mouroir, pour ne pas dire un cimetière."
00:03:17Car c'est bien la politique de Benjamin Netanyahou
00:03:21qui est aujourd'hui dans le viseur.
00:03:23En France, les attaques sont arrivées de toutes parts.
00:03:26Le ministre des Affaires étrangères,
00:03:28c'est le président du Sénat,
00:03:29qui l'a très fermement condamné hier matin.
00:03:32-"On est en train d'assimiler Israël
00:03:34à la seule politique de Netanyahou,
00:03:37une politique dont je considère
00:03:39qu'aujourd'hui, elle est devenue insupportable,
00:03:42notamment à Gaza. Vous connaissez mon engagement."
00:03:45La pression est forte en France,
00:03:46mais elle l'est également dans toute l'Europe.
00:03:49À l'initiative des Pays-Bas, l'Union européenne
00:03:52menace désormais de réexaminer son association avec Israël,
00:03:56une démarche validée par le Quai d'Orsay.
00:03:58-"Nous avons soutenu cette initiative
00:04:01et j'appelle la Commission européenne
00:04:04à faire cet examen, à instruire cette demande."
00:04:07Pris dans cet énorme tourbillon diplomatique,
00:04:10Netanyahou a fait part de son agacement
00:04:13et il s'en est notamment pris au Premier ministre britannique,
00:04:16canadien, mais également à Emmanuel Macron.
00:04:19Vous ne serez pas surpris d'apprendre que le Hamas
00:04:21a remercié le président Macron et les premiers ministres
00:04:25d'avoir exigé qu'Israël mette immédiatement fin
00:04:27à sa guerre à Gaza.
00:04:29Le Premier ministre israélien, Bruno,
00:04:31qui semble être lâché par son plus puissant allié.
00:04:34Donald Trump vient de lui infliger
00:04:36une spectaculaire série de camouflets.
00:04:38Il a négocié directement avec le Hamas
00:04:40la libération de cet homme.
00:04:42Il s'appelle Edan Alexander,
00:04:44c'est un otage israélo-américain
00:04:46qui est resté détenu pendant 583 jours.
00:04:49Deux, il a conclu un cessez-le-feu avec les Houthis du Yémen.
00:04:52C'est un groupe terroriste
00:04:54qui a juré l'éradication d'Israël, rien que ça.
00:04:57Et trois, il a levé les sanctions
00:04:59qui pesaient sur un grand ennemi d'Israël, la Syrie.
00:05:03Je vais ordonner l'arrêt des sanctions contre la Syrie
00:05:07pour leur donner une chance de grandeur.
00:05:10Bref, Benjamin Netanyahou n'a jamais été aussi seul qu'aujourd'hui.
00:05:14Il lui reste encore une grosse couleuvre à avaler,
00:05:17puisque dans moins d'un mois,
00:05:19la France devrait annoncer à l'ONU
00:05:21qu'elle reconnaît officiellement un Etat palestinien.
00:05:25Merci beaucoup, Bruno Donnet.
00:05:27Je commence par vous, David Rigoulet-Rose.
00:05:30On vient d'entendre le ministre français des Affaires étrangères
00:05:33comparer Gaza à un mouroir, à un cimetière,
00:05:36mais les victimes civiles sont là depuis le début.
00:05:38Qu'est-ce qui a provoqué ce changement de ton
00:05:41en France et en Europe ?
00:05:42Ça coïncide avec l'annonce officielle
00:05:45de l'opération militaire dite chariot de Gideon,
00:05:48qui est supposée être une opération pour,
00:05:51je cite, puisque les mots ont été utilisés,
00:05:54de conquête de l'enclave,
00:05:55ce qui n'était pas le cas jusqu'à présent.
00:05:58Donc il y a un changement de paradigme
00:06:00qui, effectivement, aura des conséquences
00:06:02encore plus importantes en termes humanitaires.
00:06:05C'est une anticipation d'une situation
00:06:07qui est déjà catastrophique et qui devient insoutenable.
00:06:10Ce qui explique les changements des éléments de langage,
00:06:13qui sont, effectivement, ils n'ont jamais été aussi fermes
00:06:17de la part des ministres français,
00:06:19mais au sens large, plutôt, des Européens.
00:06:22C'est pas forcément ça qui fera bouger Netanyahou,
00:06:25puisque vous évoquiez le fait des camions qui sont entrés,
00:06:28qui ont eu son goût d'eau, mais c'est un signe
00:06:31que c'est la pression américaine, c'est Donald Trump.
00:06:34Ça lui pose un problème, Donald Trump.
00:06:36Donc, effectivement, il y a eu un coup de fil
00:06:39entre Marco Rubio et Benjamin Netanyahou,
00:06:41qui a été plutôt sec
00:06:44et qui est vraisemblablement à l'origine, effectivement,
00:06:47de cette inclination qui a fait comprendre
00:06:51à Benjamin Netanyahou, et il a reconnu de lui-même
00:06:53qu'il y avait un risque de famine, ce qu'il avait nié jusqu'à présent.
00:06:57On parlera de la pression des Etats-Unis,
00:07:00de la position de Donald Trump,
00:07:01mais j'aimerais qu'on reste un peu, d'abord,
00:07:04sur la France, l'Europe, Vincent Hugeux.
00:07:06Vous partagez l'analyse de David Rigaud-Lerose.
00:07:09Je me pose aussi une question sur le poids des opinions publiques.
00:07:13Je dis les opinions publiques.
00:07:14D'abord, on ne peut pas, hélas,
00:07:16parler d'une posture homogène de l'Europe.
00:07:19Vous avez, vis-à-vis de ce conflit, comme vis-à-vis de d'autres,
00:07:22plusieurs Europes avec des lignes de faille anciennes.
00:07:25Il va de soi que l'Allemagne et l'Autriche,
00:07:28pour ne citer que ces deux pays,
00:07:30qui estiment, à bon droit sans doute,
00:07:32avoir contracté une sorte de dette inextinguible
00:07:35vis-à-vis d'Israël.
00:07:37Je fais, évidemment, allusion à l'épisode de la Shoah.
00:07:40Ils seront toujours très réticents, en termes de sanctions,
00:07:43et notamment sur la question du contrat d'association
00:07:46et de son hypothétique suspension.
00:07:48Il y a un désaccord explicite.
00:07:50Vous avez un deuxième pôle de résistance,
00:07:52en Europe, c'est l'Europe centrale,
00:07:54où vous retrouvez une fraternité en illibéralisme
00:07:57avec des personnages comme le Hongrois Victor Orban,
00:08:00le Slovaque Robert Fitzhaug,
00:08:02ou le Premier ministre tchèque.
00:08:05Et eux, s'il vous plaît,
00:08:06ils se trouvent plutôt dans une logique
00:08:08qui est post-soviétique.
00:08:10Ils étaient alignés sur la ligne plutôt pro-arabe de Moscou
00:08:13au temps de l'Union soviétique, de l'URSS,
00:08:16et ensuite, ils ont pris un virage
00:08:18plutôt atlantiste et pro-américain.
00:08:20L'Europe ne parle pas d'une seule voie,
00:08:22puisque là, en l'occurrence,
00:08:24la mise en garde la plus ferme,
00:08:26qui reste mesurée,
00:08:27elle émane de la France d'Emmanuel Macron,
00:08:29du Royaume-Uni, Kirstarmer,
00:08:31et du Canada, qui est de plus en plus
00:08:33un pays européen.
00:08:34Stéphanie Latta-Bdellac,
00:08:36comment est perçu ce changement de ton diplomatique de la France,
00:08:39ces pressions croissantes du Royaume-Uni, du Canada,
00:08:42du côté du monde arabe ?
00:08:44Je pense que c'est quelque chose qui est attendu de longue date,
00:08:47qui arrive assez tard, en fait,
00:08:49par rapport notamment aux opinions publiques arabes,
00:08:53des sociétés civiles très mobilisées,
00:08:55contrairement au gouvernement,
00:08:57qui, finalement, le sont relativement peu
00:08:59dans le monde arabe.
00:09:00Et donc, en fait, il y a aussi le fait
00:09:02que la question du génocide, aujourd'hui,
00:09:05est de plus en plus admise, en fait,
00:09:08par les juristes, par les historiens.
00:09:10Le fait que cette nouvelle opération soit lancée
00:09:14et qu'il affiche officiellement une volonté de transfert,
00:09:18et le transfert fait partie, aussi,
00:09:21des qualifications pour le génocide,
00:09:24fait qu'il y a aussi, sans doute,
00:09:27cette crainte aussi de complicité, en fait, de génocide,
00:09:30qui peut être mise en cause.
00:09:31Il a été mis en cause sur une complicité
00:09:33de crime de guerre et de crime contre l'humanité,
00:09:36qui l'a fait reculer sur certains points.
00:09:38Donc, je pense que c'est quelque chose qui est important,
00:09:42qui va être bien accueilli,
00:09:43mais il y a une grosse attente de,
00:09:45est-ce que les actes vont suivre les maux ?
00:09:48On arrive juste au stade des maux,
00:09:50après plus de 53 000 morts
00:09:52et l'écrasement de la bande de guerre.
00:09:54On va évoquer l'acte possible qui pourrait être engagé
00:09:57côté européen, mais d'abord, Alain Rosanquier.
00:10:00Il faudrait qu'il y ait une évolution, aussi,
00:10:03du point de vue de l'opinion publique arabe, d'une part,
00:10:06et de la position des grandes puissances
00:10:08à l'égard de cette opinion publique.
00:10:10Il faut voir que Macron, par exemple,
00:10:13dès le départ, après le 7 octobre,
00:10:15a une position absolument irréprochable
00:10:17de solidarité à l'égard d'Israël,
00:10:19de solidarité à l'égard des familles d'otages,
00:10:22et c'est la France qui est la première
00:10:24à réaliser une cérémonie d'hommage aux otages,
00:10:27Macron, dans les premiers jours, s'étant rendu sur place.
00:10:30Effectivement, il y a d'abord...
00:10:31Les choses ont commencé au 7 octobre,
00:10:34de ce point de vue-là. Il y a eu cette attaque,
00:10:36cette tentative d'extermination de la part du Hamas
00:10:39qui ne pouvait créer qu'un sentiment de sympathie
00:10:42à l'égard d'Israël, de la population israélienne,
00:10:45je ne parle pas de la politique du gouvernement,
00:10:48ce qui a expliqué un peu la position
00:10:50des grandes puissances européennes,
00:10:52dans un premier temps. Ensuite, étant donné...
00:10:55Et donc, il ne faut pas oublier d'où partent les choses
00:10:58et qui est responsable, y compris du martyr
00:11:02que vit la population palestinienne à Gaza,
00:11:05auquel le Hamas a tout fait pour que ce martyr se produise
00:11:09et rien fait pour essayer de prendre d'avance
00:11:12des mesures de précaution, car il savait bien
00:11:15qu'après le 7 octobre, il y aurait une répercussion,
00:11:19il y aurait des actes de vengeance
00:11:21de la part du gouvernement israélien.
00:11:23Il n'y avait donc pas besoin d'être grand clair
00:11:26si on souhaitait protéger sa population,
00:11:28de prendre un certain nombre de mesures,
00:11:31ce qu'il n'a bien entendu pas fait,
00:11:33et Israël est tombé dans ce piège que le Hamas lui a tendu,
00:11:36et on voit le résultat aujourd'hui,
00:11:38où l'opinion publique s'est renversée,
00:11:40d'une solidarité, d'une empathie à l'égard du gouvernement israélien.
00:11:44Israël devient aujourd'hui un pays
00:11:47qui est mis au banc des nations,
00:11:50comme vient de le souligner un des leaders
00:11:52de l'opposition israélienne.
00:11:54Ce risque d'isolement d'Israël sur la scène internationale,
00:11:57c'est quelque chose qui peut faire pression sur le gouvernement,
00:12:01peut-être via l'opinion publique israélienne ?
00:12:04C'est un élément qui va jouer,
00:12:06qui va être repris dans le cadre des conflits,
00:12:09des oppositions à l'intérieur de la société israélienne.
00:12:12Faire plier Netanyahou seulement, non, c'est pas ça.
00:12:16Il faudra effectivement passer des mots aux actes,
00:12:20et avec un rôle très important de Trump,
00:12:22on aura l'occasion d'y revenir.
00:12:24Une partie de l'opinion publique, dont on ne parle pas beaucoup,
00:12:28qui est opposée à la politique de Netanyahou,
00:12:30aussi bien sur le plan du développement
00:12:34de l'illibéralisme qu'il est en train de générer,
00:12:38et plus récemment, sur la façon dont la guerre est menée.
00:12:41Il y a eu des manifestations d'Israéliens
00:12:44à la frontière de Gaza pour demander l'arrêt
00:12:46de ces opérations et la libération des otages,
00:12:49parce qu'on se rend compte que cette guerre répond aussi
00:12:53à des intérêts politiques particuliers de Netanyahou
00:12:56et que ça dépasse les guerres nécessaires
00:12:58de défense de l'Etat d'Israël.
00:13:00J'aimerais juste avoir un mot, je sais pas de qui,
00:13:03sur cet accord d'association entre l'Union européenne et Israël,
00:13:07qui va être revu par l'Europe, peut-être vous, David Rigoulet-Rose.
00:13:11C'est un vrai levier, ça ?
00:13:12Il faut rappeler ce que c'est que cet accord.
00:13:15En fait, il remonte à novembre.
00:13:17Il a été signé en novembre 1995.
00:13:18Il est rentré en application en juin 2000.
00:13:21C'est un accord, globalement, de livre-échange
00:13:23sur un certain nombre de secteurs agricoles, industriels,
00:13:27qui fait que l'Union européenne est le premier partenaire commercial
00:13:30d'Israël. En soi, effectivement, c'est un accord important,
00:13:34mais par-delà l'accord lui-même, il y a aussi
00:13:36des coopérations scientifiques, technologiques,
00:13:39qui ne sont pas soulignées souvent, mais qui sont importantes.
00:13:42Et cet accord, effectivement, comme le disait Vincent Hugueux,
00:13:46le problème, c'est la position des Européens.
00:13:48C'est-à-dire que Kajakalas a dit qu'il allait réévaluer...
00:13:51-"Le chef de la diplomatie européenne."
00:13:54-"Réévaluer", ça veut pas dire remis en cause.
00:13:56Il va pas être caduque.
00:13:58Donc, c'est...
00:13:59-"Vous n'en attendez pas grand-chose de ce côté-là."
00:14:02-"Si, c'est un signalement politique qui est fort."
00:14:05C'est pas négligeable, mais après,
00:14:07effectivement, il y a les divisions européennes,
00:14:09notamment entre un pays comme l'Espagne et l'Allemagne,
00:14:13que vous évoquez, qui sont très importants.
00:14:15Ca n'est pas anodin, au sens où Benyamin Netanyahou
00:14:18peut parfaitement feindre l'indifférence,
00:14:21voire le mépris.
00:14:22Ca a un poids, ne serait-ce que par la dimension commerciale,
00:14:25économique qui vient d'être mentionnée.
00:14:28Dominique de Villepin, ancien Premier ministre,
00:14:31ancien ministre des Affaires étrangères,
00:14:33disait l'autre jour que ça ne suffirait pas
00:14:35qu'il faudrait y ajouter deux autres mesures volontaristes.
00:14:39La suspension de toute livraison militaire et paramilitaire,
00:14:42y compris les technologies duales,
00:14:44ces technologies civiles,
00:14:45qui peuvent être détournées à des fins militaires.
00:14:48Troisième élément, il disait que le mandat
00:14:50de la Cour pénale internationale visant Benyamin Netanyahou
00:14:54ne suffit pas et qu'il devrait être étendu
00:14:56à tous les acteurs politiques et militaires de ce carnage.
00:15:00Mais on y reviendra, et je ne veux pas préempter
00:15:02cette partie de nos échanges. Il est clair qu'il y a un acteur
00:15:06et un seul qui peut, s'il le veut vraiment,
00:15:08infléchir la posture de Netanyahou, c'est Donald Trump.
00:15:11On va en parler. Je me tourne vers vous, Philippe Claudel.
00:15:14Vous n'êtes pas spécialiste de la région du Moyen-Orient,
00:15:17vous êtes écrivain, romancier, mais vous avez un regard
00:15:20sur cette répétition de l'histoire,
00:15:22cette incapacité de deux peuples à coexister en paix.
00:15:25Je suis citoyen du monde, je n'ai pas d'expertise,
00:15:28mais je suis un passionné de géopolitique
00:15:31et tout ce qui agite la planète,
00:15:32aujourd'hui, on le sait, a des conséquences
00:15:35sur nos vies quotidiennes.
00:15:37Moi, je suis à l'image de beaucoup,
00:15:38Alain Rosenkirch le rappelait,
00:15:40c'est-à-dire que dans un premier temps,
00:15:43il y a cette sidération, cette attaque du 7 octobre.
00:15:46On ne pouvait être qu'effroyablement saisis
00:15:48par ce qui s'est passé. J'ai pu voir,
00:15:50comme beaucoup de nos élus parlementaires,
00:15:53un montage d'images, de ces images.
00:15:55Vous les avez regardées ?
00:15:56Oui, je les ai regardées. Je voulais, à un moment,
00:15:59écrire quelque chose sur cela. Il me semblait
00:16:02que les mots étaient importants.
00:16:04Aujourd'hui, l'image est un peu dévaluée
00:16:06parce qu'à force d'être, comment dirais-je,
00:16:09une civilisation d'images, on perd le sens de la réalité
00:16:12entre fiction et réel.
00:16:13Tout devient presque tout à fait irréel.
00:16:17Donc, j'ai vu ces images,
00:16:18qui sont proprement insoutenables,
00:16:20et bien entendu, on ne pouvait être
00:16:23qu'avec Israël, qui avait subi ce massacre,
00:16:26ces jeunes gens enfauchés, ces familles, etc.
00:16:29Et puis, il y a eu, voilà, tout ce qu'on sait depuis
00:16:32et cette logique d'une destruction massive,
00:16:35des civils qui sont tués, qui sont affamés.
00:16:40Moi, vous savez, ça me fait penser
00:16:42à un très bel ouvrage nécessaire d'un écrivain allemand
00:16:45qui s'appelait Sebald, qui avait écrit un texte
00:16:48sur la destruction des villes allemandes
00:16:50à la fin de la guerre. La guerre était perdue
00:16:52pour le régime nazi, et pourtant, les Alliés ont bombardé,
00:16:56ont détruit des villes, ont tué des dizaines de milliers
00:16:59de populations civiles. Pourquoi ?
00:17:01La question se posait. Et là, cette logique, c'est la même.
00:17:04On se demande pourquoi.
00:17:06Et en valeur absolue, tout ça est injustifiable.
00:17:10Qu'est-ce qui peut justifier qu'on massacre,
00:17:12qu'on affame, qu'on assoif des populations civiles ?
00:17:16On est dans une logique qui dépasse le simple entendement
00:17:19avec des leaders, que ce soit Poutine en Russie
00:17:22ou Netanyahou en Israël,
00:17:24qui, pour des volontés internes de maintien de leur pouvoir,
00:17:28se lancent dans des opérations qui excèdent leur but premier.
00:17:32On va s'arrêter plus en détail sur cette nouvelle opération militaire
00:17:36qui a été déclenchée par Netanyahou pour en comprendre
00:17:39ses objectifs et prendre la mesure de ses conséquences.
00:17:42On voit cela avec Marco Pommier.
00:17:44Musique intrigante
00:17:46...
00:17:48-"C'est une offensive sans précédent."
00:17:51Sur ces images, l'armée israélienne communique
00:17:54sur ses avancées au sol dans l'enclave palestinienne.
00:17:57Opération baptisée
00:17:59les chariots de Gédéon.
00:18:01L'objectif est clair,
00:18:03conquérir et contrôler toute la bande de Gaza.
00:18:06-"À la fin de ce processus,
00:18:09toute la bande de Gaza sera sous le contrôle
00:18:12de la sécurité israélienne
00:18:13et le Hamas sera complètement vaincu."
00:18:16-"Vaincre le Hamas et ramener tous les otages
00:18:19enlevés le 7 octobre 2023.
00:18:22Avec cette campagne militaire de grande ampleur,
00:18:25Tsaïl semble vouloir occuper Gaza durablement
00:18:28en déplaçant plus de 2 millions de Palestiniens
00:18:31dans le sud de l'enclave,
00:18:33entre la frontière de l'Egypte et le corridor de Mourag,
00:18:37le haut commissaire de l'ONU pour les droits humains,
00:18:40mettant garde contre un nettoyage ethnique.
00:18:42Alors que la crise humanitaire s'aggrave,
00:18:44cette semaine, Israël a autorisé des camions d'aide alimentaire
00:18:49à entrer dans l'enclave après avoir imposé un blocus total.
00:18:53Pendant deux mois et demi, ici, dans ce camp de réfugiés,
00:18:56des paquets de pain sont distribués,
00:18:58pas suffisants pour nourrir toute une famille.
00:19:01-"Nous leur demandons d'ouvrir les points de passage
00:19:04et de permettre l'entrée de médicaments pour les enfants,
00:19:07de nourriture, de fruits, de pain et de farine,
00:19:10de n'importe quoi, pour que les gens et les enfants puissent manger,
00:19:13car ils sont tous mal nourris, ont perdu du poids."
00:19:16-"Des enfants qui souffrent de malnutrition,
00:19:19des Gazaouis désespérés qui se battent pour manger,
00:19:22comme ici, à Hanounias d'Ebumeh,
00:19:25l'ONU dénonce des conditions inhumaines."
00:19:27-"Chacun des 2,1 millions de Palestiniens
00:19:31de la bande de Gaza est menacé par le risque de famine.
00:19:35Une personne sur cinq risque de mourir de faim."
00:19:39-"La famine, les bombardements, le quotidien des Palestiniens,
00:19:44dans un territoire dévasté par la guerre,
00:19:46selon le ministère de la Santé du Hamas,
00:19:49plus de 53 000 personnes sont mortes à Gaza,
00:19:52majoritairement des civils."
00:19:55Stéphanie Latta Abdallah,
00:19:56quel est l'objectif final de Benyamin Netanyahou ?
00:19:59Est-ce de vider Gaza de ces 2 millions de Palestiniens ?
00:20:03Si oui, comment anticipez-vous la réaction du monde arabe
00:20:06si ça va vraiment au bout ?
00:20:08-"Il paraît compliqué, difficile, en termes de faisabilité,
00:20:11d'enlever 2 millions de personnes.
00:20:13Ce qui est important pour comprendre ce qui se passe à Gaza,
00:20:17c'est de sortir de l'événement 7 octobre,
00:20:19sur lequel on revient systématiquement,
00:20:21si on veut, mais de comprendre ce qui se passe
00:20:24plutôt dans une perspective d'une structure.
00:20:26Aujourd'hui, le 7 octobre n'est pas arrivé dans un vide,
00:20:30c'est pas le moment zéro
00:20:32d'une histoire coloniale qui dure, en fait.
00:20:35Si on veut comprendre la politique israélienne menée
00:20:38par Netanyahou, aujourd'hui, elle est affichée.
00:20:41Aujourd'hui, ce qu'on trouve dans la bouche
00:20:44de journalistes, d'hommes politiques et autres,
00:20:46c'est...
00:20:49Nakba 2023, c'est une nouvelle guerre d'indépendance.
00:20:52Qu'est-ce que ça veut dire, une nouvelle guerre d'indépendance ?
00:20:56La guerre d'indépendance qui s'est soldée
00:20:58par 900 000 déplacés palestiniens, ça veut dire transférer et occuper.
00:21:02On peut voir que Netanyahou s'est rendu aujourd'hui
00:21:05à ce type d'options.
00:21:06Son option principale, c'est, s'il ne peut pas transférer
00:21:09tous les Palestiniens, parce que ça paraît compliqué,
00:21:12c'est les masser dans un certain endroit,
00:21:14dans un certain espace, qui serait majoritairement dominé
00:21:18par l'armée et par des organismes humanitaires militarisés,
00:21:22sociétés privées américaines, avec une gestion
00:21:25de cette bande de Gaza sous perfusion humanitaire,
00:21:28donc, en gros, pour empêcher la mort
00:21:30et maintenir un niveau de vie minimal,
00:21:32avec aucune, je veux dire, prise en compte
00:21:35de l'autodétermination des Palestiniens
00:21:38ou d'une quelconque société ou identité
00:21:40ou volonté politique.
00:21:41Et ça, c'est quelque chose qui, aujourd'hui,
00:21:44est affirmé très clairement.
00:21:46Les uns ou les autres ont l'air de le découvrir,
00:21:48mais ça n'est pas arrivé.
00:21:50Aujourd'hui, c'est un processus long,
00:21:52et, en tout cas, on sait, au moins depuis décembre 2023,
00:21:55qu'on s'oriente vers ce type de mécanismes
00:21:57qui visent directement la population civile
00:22:00et pas seulement ou uniquement le Hamas.
00:22:03Je pense qu'à ce stade, il faut mesurer
00:22:05l'impact des inhibiteurs, des projets délirants
00:22:09du promoteur immobilier Donald Trump.
00:22:12Je me souviens que,
00:22:13au fil de mes reportages dans la région,
00:22:15avec des représentants de la droite dure israélienne,
00:22:18la plus radicale du Likoud de l'époque,
00:22:21le rêve indépassable, c'était,
00:22:22s'agissant des Palestiniens de Sidi Jordani,
00:22:25ce qu'on appelle en hébreu l'optia yardenite,
00:22:27il n'y a pas d'État palestinien,
00:22:29où il existe déjà, c'est la Jordanie,
00:22:31on pousse tout le monde.
00:22:33Et il y avait le deuxième volet de ce plan,
00:22:36c'était l'expulsion des Gazaouis
00:22:39vers le Sinaï égyptien.
00:22:41Rappelons qu'il fut un temps, effectivement,
00:22:44où la bande de Gaza appartenait à l'Égypte.
00:22:47Mais les délires de la riviera
00:22:50de Trump ont, en quelque sorte,
00:22:53déverrouillé les démarches les plus démentes.
00:22:58Vous avez aujourd'hui des gens qui vous parlent
00:23:01de déporter un million de Gazaouis vers la Libye.
00:23:04C'est un pays que je connais bien,
00:23:06où je suis allé souvent.
00:23:08C'est 7 millions d'habitants.
00:23:09C'est comme si vous aviez, je sais pas,
00:23:12moins 9 millions de déplacés en France demain matin
00:23:15ou 46 millions d'Américains après-demain.
00:23:17En plus, c'est un pays totalement déchiré.
00:23:19Vous avez un maréchal autoproclamé, Khalifa Haftar,
00:23:22qui tient l'est et une partie du sud du pays.
00:23:25Et vous avez Tripoli, qui est, paraît-il,
00:23:27régentée par un pouvoir que soutient
00:23:30la Comédie internationale,
00:23:31mais qui était le théâtre, il y a encore quelques jours,
00:23:35de combats meurtriers.
00:23:36C'est pas crédible.
00:23:37Mais attendez, on a tout entendu.
00:23:39On a entendu parler de la Somalie, du Soudan.
00:23:42Et pourquoi pas revenir au rêve
00:23:44de certains Britanniques au temps de Theodor Herzl,
00:23:47donc avant même la création de l'Etat d'Israël,
00:23:50de dire qu'il y avait un espace en Ouganda
00:23:52qui avait vocation à accueillir l'Etat juif de demain ?
00:23:55J'aimerais qu'on parle de Donald Trump,
00:23:57parce qu'on lit un peu tout et son contraire en ce moment
00:24:00sur Donald Trump et sa position vis-à-vis de l'Etat hébreu.
00:24:04Comment vous analysez son comportement
00:24:06de ces derniers jours, de ces dernières semaines ?
00:24:09Depuis le début, Donald Trump a dit
00:24:11qu'il apporterait un soutien indéfectible
00:24:13à Ben Amin et Taniyeh,
00:24:15effet, là encore, des inhibiteurs,
00:24:17puisque, effectivement, ça laisse à penser
00:24:19qu'il y a une marge de manoeuvre illimitée.
00:24:22Les choses sont sûrement plus complexes, quand même.
00:24:25Même si le soutien est avéré,
00:24:27on peut pas le démentir,
00:24:29mais on a vu, à certains éléments que vous évoquiez,
00:24:32qu'il y avait quand même des prises de distanciation
00:24:35sur des points particuliers
00:24:36qui font pas forcément les affaires de Ben Amin et Taniyeh.
00:24:40D'ailleurs...
00:24:41L'Iran vis-à-vis du Yémen.
00:24:42L'Iran est le gros morceau, en réalité,
00:24:45parce que c'est ça, le fond du problème.
00:24:47Les autres éléments que vous avez évoqués
00:24:49sont des symptômes de ce refroidissement interpersonnel.
00:24:52Il y a, en toile de fond, un rêve de Donald Trump,
00:24:55depuis son premier mandat,
00:24:57c'est de parachever le processus d'Abraham.
00:24:59Le parachèvement serait d'intégrer l'Arabie saoudite,
00:25:02premier voyage, justement, extérieur de sa nouvelle mandature.
00:25:06Or, le problème, aujourd'hui,
00:25:07c'est que le soutien qu'il apporte à Netanyahou
00:25:10constitue une obstruction à la réalisation de son rêve,
00:25:13puisque le même Netanyahou ne veut pas offrir
00:25:16de perspectives politiques à la question palestinienne.
00:25:19Or, normalement, dans la possibilité
00:25:21d'une normalisation était effectivement intégrée
00:25:24cette variable qui, aujourd'hui, est hypothéquée.
00:25:27On voit bien que, du côté de l'administration américaine,
00:25:30ça grippe, ça irrite,
00:25:31parce que ça hypothèque, effectivement,
00:25:34son grand projet pacificateur au niveau régional
00:25:36et de développement économique de business
00:25:39avec les pétromarchies.
00:25:40Il y a ces dimensions géopolitiques.
00:25:42Parfois, il y a des choses toutes bêtes avec Donald Trump.
00:25:45Il fonctionne comme ça, on le sait.
00:25:47Ce site d'information américain, Axios,
00:25:50affirme que Donald Trump aurait demandé à Israël
00:25:52de finir sa guerre, d'accélérer la distribution
00:25:55de voir des enfants mourir dans les bombardements à Gaza.
00:25:58C'est une variable, une dimension
00:26:00qu'il faut prendre en compte dans le comportement de Macron.
00:26:03Il y a un problème d'image,
00:26:05qui, par rapport à sa personne,
00:26:08puisqu'il veut se présenter comme le bienfaiteur,
00:26:11le pacificateur, et que ça rentre en...
00:26:13Ca télescope, effectivement, cette représentation.
00:26:16C'est un problème pour lui.
00:26:18Pas pour Netanyahou, mais pour lui, quand même,
00:26:20ce qui explique les pressions qu'il a fait passer
00:26:23par le biais de Rubio.
00:26:25Effectivement, c'est une dimension qui peut jouer.
00:26:28Il faut se souvenir que Netanyahou est soutenu
00:26:30par l'Eglise évangélique, qui joue un rôle important
00:26:33dans son soutien, et que, dans une optique christique,
00:26:36cette dimension de mort d'enfant est quelque chose
00:26:39qui est susceptible d'agiter, d'éveiller des sentiments
00:26:44et de développer une empathie très forte.
00:26:46Ceci étant, je vous rejoins.
00:26:48L'important, c'est la gêne que Netanyahou,
00:26:50la politique actuelle du gouvernement israélien,
00:26:53entraîne par rapport au projet grandiose de Trump,
00:26:57s'agissant du développement économique,
00:27:00et actuellement, effectivement, il est un petit peu
00:27:03comme une arête dans la gorge de Trump,
00:27:05et il fera tout pour enlever cette arrête.
00:27:08Il y a déjà eu des pressions pour obtenir l'entrée
00:27:11de l'aide humanitaire, ce qui fait que Netanyahou
00:27:13a été obligé de se plier sans l'accord du gouvernement,
00:27:16alors que normalement, ça aurait été une décision
00:27:19du gouvernement israélien. Il n'est pas impossible.
00:27:22C'est des bruits qui circulent.
00:27:24D'ici quelque temps, Netanyahou torde à nouveau...
00:27:27Trump, pardon, torde à nouveau le bras de Netanyahou
00:27:31et impose l'arrêt des hostilités,
00:27:34moyennant la libération de tous les otages immédiatement,
00:27:38et la promesse, l'engagement qu'il avait déjà pris
00:27:41à l'égard d'Israël et que Netanyahou n'a pas voulu entendre,
00:27:44qu'il autoriserait Israël à reprendre les hostilités
00:27:48à la moindre violation du cessez-le-feu,
00:27:51de l'arrêt des hostilités par le Hamas.
00:27:54Donc...
00:27:56Voilà, il est clair que Trump peut avoir
00:27:59un rôle très important dans le développement.
00:28:03La contrepartie, c'est qu'il peut effectivement
00:28:06laisser carte blanche, puisqu'il a tordu le bras
00:28:09à Netanyahou, s'agissant de l'Iran,
00:28:11on en a parlé avec les négociations qu'il a engagées
00:28:14sans avoir de contact préliminaire avec Netanyahou,
00:28:17plus les outils, plus ces éléments.
00:28:19La contrepartie, ça peut être de laisser
00:28:22une carte blanche à Netanyahou, à Gaza.
00:28:24Je pense plutôt vers cette option que,
00:28:27dans un second temps, on aura de nouvelles pressions
00:28:30pour obtenir une évolution.
00:28:32J'aimerais qu'on évoque un peu la vie politique intérieure
00:28:36d'Israël, aussi, avec ce qui s'est passé cette semaine.
00:28:39L'ancien chef d'Etat-major adjoint de l'armée,
00:28:42qui est la tête d'un des partis de gauche,
00:28:44Yair Golan, qui est intervenu
00:28:46et qui a mis en cause directement
00:28:48cette nouvelle opération militaire israélienne.
00:28:51Et, évidemment, le gouvernement a été très violent
00:28:55dans sa réaction.
00:28:56Qu'est-ce qu'il représente, aujourd'hui,
00:28:59dans la société israélienne, quand il prend la parole ?
00:29:02Où en est la société civile, de ce point de vue-là ?
00:29:04Qui veut prendre la parole ?
00:29:06Je pense qu'il représente une force montante
00:29:09dans la société civile israélienne.
00:29:11Il est parti de rien.
00:29:14Les partis qu'il représente, le parti travailliste,
00:29:16n'avait même pas obtenu de député.
00:29:20Il était en dessous du seuil électoral.
00:29:22Le Mérèze, l'autre parti de gauche, était très affaibli.
00:29:26Et donc, ce camp-là a été très affaibli.
00:29:29Yair Golan,
00:29:32en prenant la direction de ces deux partis
00:29:35qu'il a fusionnés pour créer les Démocrates,
00:29:40est, effectivement, la force montante,
00:29:42qui reste minoritaire,
00:29:45ça, c'est clair, mais la force montante.
00:29:48Tous les sondages lui donnent un nombre de sièges
00:29:51qui croient de sondage en sondage,
00:29:53compte tenu à la fois de sa personnalité
00:29:55et du discours qu'il tient,
00:29:57de lutte contre les attaques,
00:30:00contre la démocratie israélienne,
00:30:02et également un certain langage de vérité
00:30:05s'agissant du conflit israélo-palestinien,
00:30:07à savoir que si la perspective
00:30:09est effectivement une solution à deux Etats,
00:30:12dans un premier temps,
00:30:13compte tenu de ce qui s'est passé le 7 octobre,
00:30:16qui n'était pas une guerre pour libérer la Palestine,
00:30:19mais une guerre lancée par le Hamas à vocation religieuse,
00:30:22l'intitulé de l'opération faisait référence à El Aqsa
00:30:25et non pas à la libération de la Palestine.
00:30:28C'est dans le cadre d'une vision islamiste
00:30:31au sens large de libération de la terre d'Islam
00:30:34de toute présence étrangère.
00:30:37La dimension de la libération de la Palestine
00:30:39s'est greffée là-dessus,
00:30:41et l'intitulé de l'opération du 7 octobre
00:30:43n'était pas la libération de la Palestine,
00:30:46c'est pas l'autorité palestinienne, le Fatah,
00:30:48qui a lancé cette opération,
00:30:50mais c'est dans cette optique-là...
00:30:52On va revenir sur ce qu'il se passe en Israël aujourd'hui.
00:30:56J'aimerais avoir votre point de vue, Vincent Hugeot.
00:30:59Il y a Yair Gholam...
00:31:00La parole circule, si possible.
00:31:02Il y a une évolution, oui.
00:31:04Il y a une évolution.
00:31:05Si jusqu'à présent, la société civile israélienne
00:31:08avait été mobilisée pour la défense de la démocratie,
00:31:11depuis quelques semaines, on sent,
00:31:13il y a des mots d'ordre permanents de fin de la guerre,
00:31:16il faut mettre fin aux hostilités et obtenir la libération des otages.
00:31:20Comme je vous le disais tout à l'heure,
00:31:22aujourd'hui, il y a quelques jours encore,
00:31:25une manifestation à Gaza...
00:31:26J'ai pas vu de mobilisation massive des Israéliens.
00:31:29Plusieurs centaines de militants.
00:31:31La moitié des réservistes n'ont pas répondu à l'appel.
00:31:35Oui, tout à fait.
00:31:36Il y a un puissant mouvement
00:31:39qui réprouve le choix maximaliste,
00:31:41la fuite en avant de Netanyahou et son orchestre.
00:31:45Vous avez en permanence des manifestations
00:31:48qui sont parfois et souvent animées, d'ailleurs,
00:31:51par des associations représentant les familles des otages.
00:31:54J'entendais, il y a 48 heures,
00:31:56la mère d'un des captifs toujours détenu par le Hamas,
00:31:59dire que ce qui guide les choix de Benyamin Netanyahou,
00:32:03ce sont ses intérêts politiques étroits
00:32:05et non pas le sort de nos enfants.
00:32:07J'ajoute un dernier point.
00:32:10A l'instar d'un Donald Trump,
00:32:12Netanyahou s'estime au-dessus de toutes les lois humaines,
00:32:15les lois internationales, évidemment,
00:32:17mais aussi de son propre pays.
00:32:19Il sait qu'en cas de chute de son gouvernement,
00:32:21il risque de passer des années dans les prisons de l'Etat d'Israël.
00:32:25Par ailleurs, vous avez un phénomène très intéressant.
00:32:29Il a écarté le patron du Shin Bet,
00:32:31la sécurité intérieure, récemment.
00:32:33Il a nommé son successeur en dépit du veto de la procureure générale
00:32:37et sans attendre le vertigue de la Cour suprême,
00:32:39qui est l'instance maximale du droit en Israël.
00:32:42Donc, je fais ce que je veux.
00:32:44Le mot de la fin sur ce sommet qui se profile vers la mi-juin,
00:32:47coorganisé par la France avec une partie du monde arabe,
00:32:51pour avancer vers la reconnaissance d'un Etat palestinien.
00:32:54Quelles sont les chances d'aboutir, à moyen terme, selon vous ?
00:32:58Je ne sais pas s'il y aura enfin cette reconnaissance
00:33:02de l'Etat palestinien, qui, à mon avis, est nécessaire,
00:33:05mais au-delà de ça, ce qui est important,
00:33:07c'est plutôt de voir ce qu'il y aura dans cet Etat.
00:33:10Il ne suffit pas de décréter...
00:33:12Il ne suffit pas de décréter un Etat.
00:33:14183 pays le reconnaissent, cet Etat palestinien.
00:33:17Pas grand-chose, parce que sur le terrain,
00:33:20il n'existe pas. On parle beaucoup du 7 octobre,
00:33:22mais ici, à Cisjordanie, il y a une annexion de jure,
00:33:25aujourd'hui, juridique.
00:33:27-"Déjuré".
00:33:28-"Déjuré", de la Cisjordanie,
00:33:30dans le sens où il y a, petit à petit,
00:33:32un passage au civil d'une administration,
00:33:34l'administration civile mal nommée,
00:33:37qui gère les affaires civiles en Cisjordanie,
00:33:40et qui, petit à petit, passe au civil.
00:33:42Et ça, c'est l'oeuvre de Bézalel Smotric.
00:33:44Donc, si vous voulez, c'est important,
00:33:46c'est un geste important, surtout par des pays qui comptent,
00:33:50notamment comme la France, mais il faut quand même
00:33:53avoir à l'esprit que ça doit être suivi, ensuite,
00:33:55par toute une série de mesures et de mises en oeuvre
00:33:58qui permettent à un véritable Etat palestinien
00:34:01d'avoir une souveraineté et une continuité territoriale.
00:34:04Merci à tous les quatre d'être venus débattre
00:34:07et nous éclairer sur ce conflit au Proche-Orient.
00:34:10Phil Clodel, vous restez avec nous,
00:34:12on va parler de vous et surtout de votre dernier roman,
00:34:15Wanted, c'est son titre,
00:34:16il y a question de Donald Trump, d'Elon Musk,
00:34:19et donc d'un contrat mis sur la tête de Vladimir Poutine.
00:34:22Les explications de Maïté Frémont.
00:34:25Si on vous invite, Philippe Clodel,
00:34:27c'est pour parler de votre nouveau roman, Wanted.
00:34:29Sur la couverture, Donald Trump, Elon Musk et Vladimir Poutine
00:34:34y apparaissent comme des hors-la-loi de l'époque du Far West.
00:34:38Musk soupira d'un air agacé.
00:34:40Je ferai un milliard de dollars à celui qui buterait
00:34:43ce fils de pute de Vladimir Poutine.
00:34:45Dès les premières pages, vous donnez le ton,
00:34:47la mise à prix de la tête d'un opposant.
00:34:49Dans un monde où l'outrance et la grossièreté sont devenus la norme,
00:34:53vous décidez de vous attaquer à l'actualité géopolitique
00:34:57venue d'Amérique du Nord,
00:34:59avec le langage si particulier de Donald Trump.
00:35:02« Tous les dirigeants du monde n'ont pas mon QI, loin de là.
00:35:06C'est dur de négocier avec des cons. Très dur, je peux vous le dire.
00:35:09Moi, je suis un génie, tout le monde le sait.
00:35:11Je suis très loin au-dessus.
00:35:13Faites-moi confiance, ce n'est pas parce que je suis seul
00:35:15que je vais les laisser me baiser. »
00:35:17Vous livrez là une dystopie délirante
00:35:19qui tourne en dérision les puissants de notre époque,
00:35:22vous, Philippe Claudel, président de l'Académie Goncourt,
00:35:26vous, l'écrivain de nombreux romans
00:35:28pris Renaudot notamment pour « Les âmes grises ».
00:35:31Et depuis 20 ans, vous tissez une oeuvre traversée par la mémoire,
00:35:35« L'exil et la culpabilité ».
00:35:37Avec « Wanted », le lecteur lit une farce burlesque, certes,
00:35:41mais l'absurde et l'ironie peuvent être, semble-t-il aussi,
00:35:45Philippe Claudel, une redoutable arme de combat.
00:35:49À vous, la parole.
00:35:51Philippe Claudel, Maïté Frémont le disait,
00:35:53vous poussez l'absurde jusqu'à l'extrême dans ce roman.
00:35:56J'ai beaucoup ri, mais en tant que lecteur,
00:35:59j'en suis sorti un peu désorienté, presque mal à l'aise de rire
00:36:02à ce point.
00:36:03Qu'est-ce que vous avez voulu provoquer chez le lecteur ?
00:36:06Le rire, Clément, vous l'avez noté, vous l'avez éprouvé,
00:36:10et ça, je pense que c'était le but principal.
00:36:12C'est-à-dire que face à une situation mondiale
00:36:15générée par la deuxième investiture de Trump,
00:36:18j'ai eu le sentiment, moi le premier,
00:36:20que nous étions dans un sentiment de stupéfaction, de sidération.
00:36:24Tous les jours, tous les deux jours,
00:36:26il y avait des annonces délirantes de la part de ce président
00:36:29qui nous laissaient désarmés et surtout à tône et à faune.
00:36:34Et je me suis dit, mais qu'est-ce que peut un écrivain
00:36:37par rapport à ça, quand la réalité dépasse la fiction,
00:36:41quand il décrit une histoire qu'on n'aurait jamais osé imaginer ?
00:36:45Et après quelques semaines, comme ça, de catalepsie,
00:36:48je me suis dit qu'il y a peut-être quelque chose à faire.
00:36:52Je suis revenu aux fondamentaux de ce pays
00:36:54qui est les Etats-Unis d'Amérique.
00:36:56Sur quoi se sont bâtis les Etats-Unis ?
00:36:58Sur la violence, sur les armes,
00:37:00sur la dépossession de terres
00:37:02qui appartenaient à des peuples autochtones,
00:37:04sur la mort, le sang, l'argent,
00:37:06avec cette figure un peu mythifiée en Bailey par Hollywood,
00:37:10celle du chasseur de primes.
00:37:11Je me suis dit que Musk, Trump, ces êtres décomplexés,
00:37:14qui osent tout faire, qui osent tout dire,
00:37:16quelque part dans leur cerveau, que se passe-t-il ?
00:37:19Ne pourrait-il pas advenir qu'un jour,
00:37:22Musk, sous prétexte qu'il est l'homme le plus riche du monde,
00:37:25qu'il veut conduire les affaires du monde,
00:37:27offre 1 milliard pour mettre la tête de Poutine à prix ?
00:37:30C'est comme ça que c'est né.
00:37:32C'est un rire de révolte, de désolation, de résignation ?
00:37:35C'est quoi ?
00:37:37Non, c'est un rire de réappropriation.
00:37:39Ce qui m'a frappé, si vous voulez,
00:37:41dans toutes les annonces de Trump depuis qu'il est à nouveau au pouvoir,
00:37:45la réaction, même quand les annonces étaient absurdes,
00:37:48c'était quoi ? C'était l'analyse.
00:37:50On prenait...
00:37:51-"On veut rationaliser l'irrationnel".
00:37:53-...avec rationalité, en analysant dans les rédactions,
00:37:56dans les chancelleries, dans les gouvernements,
00:37:59alors qu'il aurait peut-être suffi d'un vaste éclat de rire
00:38:02pour le ramener à sa position et justement à qui il est,
00:38:05fondamentalement, c'est-à-dire un homme de télé,
00:38:09un entertainment, un homme de show et un dealmaker
00:38:13qui pense que toutes les affaires du monde
00:38:15peuvent se régler comme une transaction immobilière
00:38:18et avec un coup de poing sur la table.
00:38:20Vous montrez tout le grotesque de Trump et d'Elon Musk,
00:38:23mais ce grotesque, il est plébiscité, aujourd'hui,
00:38:26par beaucoup de gens.
00:38:27Beaucoup de gens trouvent ça cool qu'ils fassent un doigt d'honneur
00:38:31à tout ce qui a fondé nos démocraties jusqu'à présent,
00:38:34c'est-à-dire la raison, la morale, le respect des institutions,
00:38:37le respect des contre-pouvoirs.
00:38:39Pensez-vous qu'ils vont changer d'avis, ces gens-là,
00:38:42s'ils lisent votre livre ?
00:38:43Ou vont-ils pas juste rire et passer à autre chose ?
00:38:46Je ne suis pas dans leur cerveau,
00:38:48mais ce qui est net, c'est ce que vous avez dit,
00:38:51c'est-à-dire que Trump parle comme s'il était dans un salon
00:38:54ou dans un bar et qu'il réglait les affaires du monde
00:38:57en trois coups de cuillère à peau,
00:38:59avec les formules les plus vulgaires et la langue la plus simple.
00:39:03Il a l'impression, et peut-être que des gens l'ont,
00:39:05qu'il se met au niveau de tout le monde,
00:39:08mais c'est le niveau le plus vulgaire de l'humanité.
00:39:10Il y a une chose qui est très inquiétante, aujourd'hui,
00:39:14c'est qu'en fait, cet homme, il est absolument imprévisible.
00:39:17Tout à l'heure, on disait qu'on essayait de rationaliser,
00:39:20mais même son entourage, son proche entourage,
00:39:23est surpris par ses décisions, ses prises de parole.
00:39:26Donc, il faudrait pas le prendre pour quelqu'un
00:39:28qui est justement intelligent et qui utilise une langue simple
00:39:32parce qu'il a des idées claires.
00:39:34Je crois que c'est plus confus que cela,
00:39:36c'est plus inquiétant, et c'est en cela que, justement,
00:39:39l'idée que j'essaie de provoquer doit être salutaire,
00:39:42doit nous réveiller, et le grotesque dont vous parlez,
00:39:45il faut le pointer du doigt pour le dénoncer.
00:39:47Il y a une philosophe qui parle du grotesque de Donald Trump
00:39:51dans la presse, c'est Cynthia Fleury,
00:39:53et elle décortique les effets du grotesque de Trump
00:39:56dans l'opinion publique en expliquant comment,
00:39:58pour beaucoup de gens, ça légitime des comportements
00:40:01qui étaient jusqu'à présent réprimés, marginalisés,
00:40:04la contestation des faits, la remise en cause de la science,
00:40:08sexistes, homophobes.
00:40:09Avant, le ridicule pouvait tuer.
00:40:11On a l'impression qu'aujourd'hui, le ridicule,
00:40:14ça rend populaire, ça amène au pouvoir, finalement.
00:40:17Pour prolonger ce que vous venez de dire,
00:40:19les propos de Cynthia Fleury, le problème, aujourd'hui,
00:40:22c'est que ces énormités, ces absurdités,
00:40:24ces contre-vérités sont portées par le président
00:40:27de la première puissance du monde.
00:40:29Donc, évidemment que ça l'est légitime,
00:40:31mais c'est pas justement parce qu'aux yeux de certains,
00:40:35ça rend légitime toutes ces affirmations,
00:40:37ces absurdités, qu'il faut se courber devant elles,
00:40:40qu'il faut les accepter et qu'il ne faut pas les dénoncer.
00:40:43Je suis surpris que, dans toutes les prises de parole,
00:40:46notamment quand Trump énonce des contre-vérités,
00:40:48il n'y ait pas en face de lui une journaliste,
00:40:51un journaliste ou un contradicteur qui...
00:40:53Excusez-moi, vous faites erreur.
00:40:55Certains l'ont fait, Macron l'a fait,
00:40:57si vous vous souvenez, à un moment,
00:40:59quand il est à côté de Trump,
00:41:01quand Trump dit une absurdité sur l'aide américaine,
00:41:04le niveau d'aide américaine en milliards de dollars à l'Ukraine,
00:41:08Macron prend Trump par le bras
00:41:10et puis lui dit, to be frank, it's not true, etc.,
00:41:13et il rétablit la vérité, il redonne les vrais chiffres.
00:41:16Très peu le font. Pourquoi on ne le fait pas ?
00:41:18Pourquoi cet homme semble paralyser la Terre entière
00:41:21et, même avec ses absurdités les plus grandes,
00:41:24nous laisse pantois ?
00:41:25On a l'impression que vous vous êtes fait plaisir,
00:41:28que vous en aviez besoin, que c'était libérateur,
00:41:30c'était un geste d'hygiène mentale ?
00:41:32Absolument. Très égoïste, en prenant le temps,
00:41:35c'est un geste d'écriture et de libération.
00:41:37Ce qui me fait plaisir, c'est de voir que les gens le lisent
00:41:41comme ça, ça fait du bien de lire ça.
00:41:43Ce qui était nouveau pour moi, c'est d'écrire sur un absolu présent.
00:41:47Le livre, je l'ai écrit il y a quelques semaines.
00:41:49Ca fait référence à une actualité toute proche,
00:41:52notamment l'humiliation de Zelensky dans le bureau Oval.
00:41:55Les personnages sont des personnes, des êtres réels,
00:41:58qui deviennent personnages de romans
00:42:00et je pousse simplement l'hypothèse un peu plus loin,
00:42:03mais elle pourrait être crédible.
00:42:05J'aimerais qu'on s'arrête sur votre capacité
00:42:07à faire parler Trump et Musk comme il parle dans la vraie vie,
00:42:11votre capacité à provoquer des situations totalement improbables
00:42:14et donc réalistes désormais avec Donald Trump.
00:42:17C'est quoi votre technique pour parler le Trump ?
00:42:20Il suffit d'écouter le Trump.
00:42:21Vous avez décortiqué ses prises de parole, sa rhétorique ?
00:42:25Je suis un écrivain, c'est une éponge.
00:42:28On se nourrit du monde, on se nourrit des paroles des autres.
00:42:31Il y a quand même un fait qui est essentiel,
00:42:33et notre conversation le prouve,
00:42:35c'est que depuis quelques semaines,
00:42:37quelques mois, quelques années,
00:42:39ces personnes, Trump, Poutine, Musk,
00:42:41sont entrées dans nos vies.
00:42:43Ils sont chaque jour dans nos vies.
00:42:45On ne peut pas les mettre à la porte.
00:42:47Il suffit qu'on ouvre une télévision,
00:42:49un journal, une conversation entre amis.
00:42:51Tout le débat tourné autour de Trump.
00:42:54Cet espèce d'intrusion,
00:42:57de viol intime,
00:42:59de violence avec laquelle ils sont parvenus
00:43:01à entrer dans nos vies font qu'à un moment,
00:43:04leurs paroles infusent, et moi, c'était un vrai plaisir
00:43:07d'écouter, d'analyser comment ils parlent
00:43:09pour reproduire leur tigre de langage.
00:43:11C'est des êtres qui s'expriment avec très peu de mots,
00:43:14avec une décomplexion, avec une grande vulgarité,
00:43:17et qui pensent, en fait, qu'ils ont,
00:43:19et c'est ça qui est fascinant,
00:43:21qu'ils ont absolument raison.
00:43:23Il n'y a même pas l'hypothèse d'une contradiction
00:43:25ou d'une parole opposée.
00:43:27Il y a une espèce de féroce conviction à avoir raison.
00:43:31J'ai découvert que vous avez été punk
00:43:33dans votre jeunesse.
00:43:35On ne peut pas dire que Trump s'embarrasse
00:43:37des convenances, de la morale,
00:43:39et il porte une forme de radicalité
00:43:41qui peut faire imploser le système d'une certaine façon.
00:43:44Est-ce qu'il n'a pas un côté punk ?
00:43:46Non.
00:43:47Moi, je ne pense pas du tout.
00:43:49Je vous dis ça, mais en 2017,
00:43:51le chanteur des Sex Pistols,
00:43:52Johnny Rotten, voyait en Trump un ami potentiel
00:43:55et il avait dit qu'il y aurait peut-être une chance
00:43:58que quelque chose de positif sorte de cette situation
00:44:01parce qu'il terrifie les politiciens.
00:44:03Johnny Rotten.
00:44:04Il faudrait lui reposer la question,
00:44:06Johnny Rotten, aujourd'hui, en 2025.
00:44:08Je ne suis pas dans sa tête, mais si vous voulez,
00:44:11il y a quelque chose...
00:44:12Dans le mouvement punk, il y a une révolte,
00:44:15il y a une volonté de mettre un grand coup de pied
00:44:17dans les convenances,
00:44:19à la fois les convenances sociales, les politiques,
00:44:22les convenances musicales,
00:44:23mais en même temps, pour l'avoir vécu,
00:44:25il y avait une forme violente de tendresse.
00:44:28Et même si le slogan, c'était nos futurs,
00:44:31il y avait une forme d'espérance,
00:44:33il y avait une forme de sauvagerie amoureuse
00:44:37pour le monde, pour les êtres,
00:44:38pour basculer tout ça,
00:44:41faire que ça se casse la gueule,
00:44:43mais pour une sorte de bien-être individuel et collectif.
00:44:46Je ne vois pas ça chez Trump.
00:44:47On a beaucoup parlé de Trump, un peu moins d'Elon Musk.
00:44:50Vous me permettez une chose, Clément ?
00:44:52L'argent n'avait aucune place...
00:44:54C'était l'autre question, mais c'est un punk
00:44:57au service des milliardaires.
00:44:59L'argent n'existait pas pour les punks,
00:45:01alors que Trump, la seule motivation,
00:45:03et Musk et les autres, et Poutine,
00:45:05qui est un milliardaire, on ne le dit pas assez,
00:45:07c'est quelqu'un qui, de façon mafieuse,
00:45:10s'est accaparé des richesses considérables,
00:45:12l'argent est le centre de tout pour ces gens-là.
00:45:15L'argent, justement, l'homme le plus riche du monde
00:45:17qui se retrouve dans le bureau ovale de la Maison-Blanche,
00:45:20comment vous analysez cette situation ?
00:45:23Il est où, le pouvoir ?
00:45:24Est-ce que c'est le pouvoir de l'argent incarné par Musk
00:45:27qui s'appuie sur Trump,
00:45:29ou l'inverse ? On n'arrive plus trop à y voir clair.
00:45:32Vous vous faites dire à Musk que le vrai pouvoir,
00:45:35c'est pas lui qui l'a, qu'il n'est pas aussi puissant
00:45:38que les grandes puissances.
00:45:39C'est gagnant-gagnant.
00:45:41La collusion des deux, de Musk et de Trump,
00:45:44c'est l'un qui est revenu à la tête
00:45:46de la première puissance mondiale
00:45:48et l'autre qui a la première fortune mondiale.
00:45:51Sous ce prétexte et cette collusion et ce couple,
00:45:54ils pensent qu'ils peuvent régler les affaires du monde
00:45:57à leur avantage, c'est-à-dire, on l'a pas encore dit,
00:46:00mais c'est dans un souci très net, de faire exploser la démocratie.
00:46:04La démocratie, la règle démocratique,
00:46:06ne leur convient plus, à eux et à d'autres.
00:46:08On a vu comment les patrons des GAFAM s'agenouillaient
00:46:12alors qu'ils avaient été opposés à lui pendant plusieurs années.
00:46:15L'argent est le centre de tout, on est prêts à tout pour ça.
00:46:18Qu'est-ce qui est gênant dans cette quête de l'argent
00:46:21et dans la façon de le produire,
00:46:23c'est les règles de la démocratie, les lois, les règlements, etc.
00:46:27Donc, on voit qu'il y a des visions absolument égoïstes.
00:46:30Il y a quelque chose d'absolument autocentré
00:46:33chez Trump et chez Musk.
00:46:35La différence entre les deux, et Trump l'a bien rappelé,
00:46:38parce qu'on a quand même deux égos surdimensionnés,
00:46:41donc ils ne vont pas pouvoir cohabiter longtemps.
00:46:43Musk ne pourra jamais être président des Etats-Unis,
00:46:46il n'est pas né aux Etats-Unis.
00:46:48Les premiers petits grains de sable dans la machine apparaissent.
00:46:52Un mot avant de conclure.
00:46:53Ca fait plus de six mois que l'écrivain franco-algérien
00:46:56Boualem Sansal est incarcéré en Algérie.
00:46:59Six mois qu'avec d'autres écrivains,
00:47:01vous tentez de réveiller l'opinion pour faire pression sur le pouvoir.
00:47:04Cette figure de l'écrivain a longtemps été sacrée en France.
00:47:08Vous sentez aujourd'hui un mouvement de révolte
00:47:10dans l'opinion en faveur de Boualem Sansal ?
00:47:13Il y a un mouvement de contestation,
00:47:15de force d'énergie qui a toujours été là depuis le début.
00:47:18Pour Boualem, on se mobilise.
00:47:20Chez les Français, vous le sentez ?
00:47:22Chez les intellectuels écrivains français, oui.
00:47:25Plus largement, moi, j'ai toujours déploré
00:47:27que la communauté algérienne, qui est très importante dans notre pays,
00:47:31c'est la première communauté étrangère.
00:47:33Si on prend les enfants de cette communauté,
00:47:36où on atteint des millions de personnes,
00:47:38je regrette qu'elles ne se mobilisent pas plus
00:47:40pour un de leur double compatriote français et algérien.
00:47:43J'aimerais bien entendre un peu plus de monde, de voix.
00:47:46Mais les Français, dans leur ensemble,
00:47:48on a l'impression qu'il y a une forme d'indifférence.
00:47:51Je ne suis pas d'accord avec vous.
00:47:53De la situation de Boualem Sansal, de ce que peut faire Trump ?
00:47:56Je ne suis pas d'accord.
00:47:58Il y a vraiment un sentiment et une conscience.
00:48:00Boualem, beaucoup en parle, beaucoup le lisent,
00:48:03beaucoup le découvre.
00:48:04Pourtant, je dis toujours, parlons de lui, lisons-le,
00:48:07c'est le plus grand soutien qu'on puisse lui faire.
00:48:10Par rapport à Trump et à cette situation mondiale,
00:48:12il faut reprendre conscience d'une chose,
00:48:15c'est que nous sommes des citoyennes et des citoyens.
00:48:17Nous avons toutes et tous un pouvoir.
00:48:19Nous n'avons pas toujours le pouvoir de délégation.
00:48:22C'est à nous aussi à reprendre ce pouvoir
00:48:24et à dire fermement les choses.
00:48:26Merci, Philippe Claudel.
00:48:28Je rappelle le titre de votre roman,
00:48:30publié chez Stock.
00:48:31On va faire le point sur l'actu de la semaine à l'Assemblée.
00:48:34C'est la séance de rattrapage.
00:48:36Générique
00:48:38...
00:48:45Si vous n'avez pas tout suivi de l'actu de la semaine à l'Assemblée,
00:48:49vous êtes au bon endroit avec les bonnes personnes.
00:48:52Bonsoir à tous.
00:48:53David Revodalone, Stéphanie Despierre,
00:48:55Jean-Baptiste Daoulas.
00:48:57Vous êtes rédacteur en chef de la revue L'Hémicycle.
00:49:00Stéphanie, vous êtes journaliste à LCP,
00:49:02vous jouez à domicile.
00:49:03Jean-Baptiste, vous êtes un ancien de la maison,
00:49:06journaliste politique à Libération.
00:49:08Cette semaine à l'Assemblée,
00:49:09elle a d'abord été marquée par un gros coup de gueule des macronistes.
00:49:13Une porte-parole dans une coalition et dans le contexte politique
00:49:17ne devrait pas dire ça.
00:49:18Ce n'est pas parce qu'on a l'ivresse dès le lendemain de victoire
00:49:21qu'il faut se laisser aller à des commentaires
00:49:24indésagréables, déloyaux.
00:49:25Il y a, depuis quelques semaines, une offensive brutale
00:49:28de la droite réactionnaire, conservatrice,
00:49:30qui est incarnée par Bruno Rotailleau,
00:49:32qui a décidé de mener la guerre à ce qui est le macronisme.
00:49:36Qu'est-ce qui a déclenché cette colère des macronistes ?
00:49:38Ce sont des propos de la porte-parole du gouvernement,
00:49:41Sophie Primat, qui a dit que le macronisme serait terminé
00:49:45dans les prochains mois.
00:49:46Vous l'avez vu, ça a déclenché un tollé,
00:49:48même si le lien s'est un peu distendu
00:49:50entre les députés et le président de la République.
00:49:53Là, ça a resserré les troupes.
00:49:55David Rebonalone, comment il faut analyser ça ?
00:49:57Est-ce une simple gaffe de la porte-parole du gouvernement ?
00:50:00C'est un actif de la droite contre Emmanuel Macron.
00:50:03Je suis d'accord avec ce qui a été dit par Prisca Thévenoud.
00:50:06Une porte-parole sur la forme du gouvernement
00:50:09ne devrait pas dire ça.
00:50:10On s'aperçoit qu'il n'avait pas énormément de choses en commun
00:50:14et qu'il n'y a vraiment plus du tout, justement, de commun.
00:50:17Sur le fond, en réalité, elle a raison,
00:50:19le macronisme est bientôt fini,
00:50:21il est même un peu en deçà de la réalité,
00:50:23puisque depuis la dissolution, on voit que le président
00:50:27a quand même perdu beaucoup de ses marges de manoeuvre politique.
00:50:30Je pense qu'effectivement,
00:50:32il y a une offensive concertée de la droite...
00:50:34Qu'est-ce qui vous fait dire ça ?
00:50:36...qui est enardie. Je pense que, d'abord,
00:50:39Bruno Retailleau, dans la fin de sa campagne,
00:50:41avait quand même nettement pris ses distances avec le macronisme.
00:50:45Il avait bien fait valoir que lui faisait partie
00:50:47d'une entreprise politique bien distincte.
00:50:50Il l'avait fait dans un message adressé aux militants.
00:50:53Parce que son concurrent, qui l'a battu depuis,
00:50:55était dans une logique de rupture avec le macronisme
00:50:58et donc il était obligé de jouer cette carte.
00:51:00Depuis que le Congrès est gagné,
00:51:02je dirais que son assurance a encore gagné
00:51:05et que, désormais, il est obligé de jouer la rupture.
00:51:08C'est quelque chose qui va se développer
00:51:10dans les semaines et les mois à venir,
00:51:13puisque on va se rapprocher de la campagne présidentielle.
00:51:16Jean-Baptiste Daoulas.
00:51:17Il y avait une hypocrisie à la fois réjouissante et immense
00:51:20dans la guirlande de son qu'on a écoutée.
00:51:22La semaine dernière, il y a eu trois heures et demie
00:51:26qui ont, globalement, catastrophé, y compris dans son camp.
00:51:30Le Parti Renaissance a mis 24 heures
00:51:32à tweeter les meilleurs morceaux de l'interview présidentielle.
00:51:36Il n'y a pas eu de comité de soutien de Renaissance en direct.
00:51:39Les Jeunes avec Macron,
00:51:41l'association de jeunesse du Parti présidentiel,
00:51:44dans quelques mois, va annoncer son nouveau nom.
00:51:46De fait, la fin du macronisme,
00:51:48c'est les macronistes eux-mêmes qui, non seulement,
00:51:51en parlent le mieux, mais le pratiquent déjà aujourd'hui.
00:51:54C'est vraiment...
00:51:56Vraiment, faussement énervé, ce qu'on a entendu.
00:51:59C'est juste la réalité.
00:52:00Après deux quinquennats, un mandat, ça se termine,
00:52:03on change de leader, on en cherche un autre.
00:52:05C'est ça qui se passe.
00:52:07Un mot du début de semaine.
00:52:09On avait l'impression que, du côté des macronistes,
00:52:12on était plutôt contents de ce qui s'était passé
00:52:14du côté de la droite républicaine, de cette élection
00:52:17de Bruno Retailleau face à Laurent Wauquiez.
00:52:20Il y a eu un ouf de soulagement au niveau du gouvernement
00:52:24et ils estiment que Bruno Retailleau est plus fiable,
00:52:27plus sincère, plus franc dans ses convictions
00:52:29et plus gérable.
00:52:30Il y a moins de surprises, notamment à l'Assemblée,
00:52:33sur certains textes.
00:52:34Il y a eu ce ouf de soulagement.
00:52:36Deux jours plus tard, Sophie Primat met les pieds dans le plat.
00:52:40Je suis d'accord avec Jean-Baptiste,
00:52:42même si c'est surjoué.
00:52:43Ca n'arrange pas les relations au sein du gouvernement.
00:52:46Le principal bénéficiaire de cette opération,
00:52:49de cette élection de Bruno Retailleau,
00:52:51c'est François Bayrou.
00:52:52Il avait menacé, tonné, en disant que cette politique
00:52:55ne lui convenait pas et qu'il était possible
00:52:58que son groupe quitte la majorité...
00:53:00Enfin, la majorité, le socle commun,
00:53:02qui n'a plus rien de commun.
00:53:04C'est un petit sursis.
00:53:05Mais c'est reculé pour mieux sauter.
00:53:07Bruno Retailleau va prendre de plus en plus d'initiatives
00:53:10pour jouer la rupture.
00:53:12Il est obligé, pour jouer sa carte,
00:53:14de se démarquer du président.
00:53:15Il va la jouer comme Sarkozy avec Chirac
00:53:17en son temps, avant l'élection de 2007.
00:53:20La suite pour Bruno Retailleau ?
00:53:21Il y a eu un soulagement à court terme des macronistes.
00:53:24Ils se sont dit que le gouvernement ne tomberait pas.
00:53:27Mais en réalité, ce qu'ils voient,
00:53:29c'est que Bruno Retailleau devient un concurrent
00:53:32de plus en plus sérieux.
00:53:33Il y a ce côté vu à la télé qui fait qu'il a une sorte de percée
00:53:37dans les sondages qui lui fait atteindre les 15 à 16 %.
00:53:40Là où on entendait souvent Bruno Retailleau,
00:53:42c'est la droite Bellamy, entre guillemets,
00:53:45du nom de François-Xavier Bellamy,
00:53:47leur candidat aux européennes,
00:53:49qui avait fait 7 ou 8 %,
00:53:50ils se rendent compte que, sur un malentendu,
00:53:53il pourrait être plutôt un candidat sérieux
00:53:55qui priverait éventuellement,
00:53:57même si on est encore très loin de tout ça,
00:53:59un candidat du Bloc central d'accéder au 2e tour.
00:54:04Donc, ça commence à devenir un peu compliqué pour eux.
00:54:07Il y a aussi une forme de droitisation
00:54:09imprimée par Bruno Retailleau
00:54:11qui les force à courir après lui aussi.
00:54:13Philippe Clodel,
00:54:15avez-vous un mot, un regard à apporter sur ce débat ?
00:54:18Ca m'intéresse avec grande passion.
00:54:20Je voulais ajouter que Gérard Larcher
00:54:22en avait remis une couche aussi
00:54:24par rapport à ce qu'on vient de dire.
00:54:26Ce qui m'intéresse, c'est de voir ces différentes prises de parole,
00:54:30je les analyse comme une tentative
00:54:32de revitaliser une droite classique
00:54:34qui était quasiment inexistante.
00:54:36On essaye de lui redonner des forces
00:54:38de toutes les façons possibles,
00:54:40avec des déclarations qui peuvent parfois surprendre ou choquer.
00:54:43On va passer à l'autre actualité de la semaine,
00:54:46avec cette proposition de Gabriel Attal,
00:54:48qui a beaucoup fait réagir.
00:54:50Moi, je considère qu'une femme
00:54:52qui décide librement de porter le voile,
00:54:54c'est sa décision.
00:54:55Mais dans décider librement, il y a liberté.
00:54:58Où est la liberté d'une jeune fille,
00:55:00d'une fillette de 5, 6 ans,
00:55:02quand on la contraint à porter le voile ?
00:55:04Gabriel Attal veut interdire le port du voile
00:55:07chez les jeunes filles de moins de 15 ans.
00:55:09C'est en réaction à ce rapport sur l'antrisme des frères musulmans,
00:55:12examiné mercredi en Conseil de défense.
00:55:15Est-ce qu'il ne prend pas le risque
00:55:17de fracturer son propre groupe ?
00:55:18Un peu, mais je pense que le groupe est beaucoup plus à droite
00:55:22qu'il ne l'était, par exemple,
00:55:23qu'en 2018, au moment des débats sur la loi Asie d'immigration,
00:55:27et même qu'en 2022, on parlait tout à l'heure
00:55:30d'une droitisation, d'un discours qui infuse.
00:55:33Eh bien là, certains dénoncent une course à l'échalote
00:55:36de Gabriel Attal, qui, pour suivre Bruno Retailleau,
00:55:39s'engouffre et fait une proposition choc,
00:55:41beaucoup plus à droite de ce qu'on aurait pu croire
00:55:44être le barrissant du macronisme,
00:55:46même si on n'a toujours pas réussi à définir
00:55:48ce qu'est le macronisme.
00:55:50David Revodalone, votre regard sur cette proposition ?
00:55:53Il y a un lien avec le sujet précédent.
00:55:55D'abord, sur la fin du macronisme,
00:55:57on voit que les héritiers sont en train de se positionner
00:56:00pour être les principaux légataires
00:56:02de cet héritage électoral, espérer le faire fructifier.
00:56:05Et puis, Bruno Retailleau, encore lui,
00:56:07toujours sur le devant de la scène ces derniers jours,
00:56:10a quand même été le principal moteur
00:56:12de ce rapport sur les frères musulmans.
00:56:15La place Beauvau l'a fait fuiter dans la presse
00:56:17aux grandes dames de l'Elysée et du président Macron,
00:56:20qui en étaient forts maris.
00:56:22Donc, évidemment, il y a aussi une course à l'échalote
00:56:25derrière le ministre de l'Intérieur
00:56:27pour se positionner dans la perspective de 2027.
00:56:30Les deux sujets sont éminemment liés.
00:56:32Jean-Baptiste Daulas ?
00:56:33Ce qui est assez terrible dans ces propositions de Gabriel Attal,
00:56:37c'est qu'elle est à priori complètement inconstitutionnelle.
00:56:40C'est ce qui s'expliquait ce jour-là, également,
00:56:43qu'il y avait des juristes, des membres du Conseil d'Etat
00:56:46qui avaient été consultés.
00:56:47C'est difficile de voir une base constitutionnelle
00:56:50pour interdire des signes religieux
00:56:52pour les moins de 15 ans dans l'espace public.
00:56:55C'est extrêmement compliqué.
00:56:58C'est vraiment une sorte de fuite en avant
00:57:01et puis aussi de volonté d'être sur la photo ce jour-là.
00:57:05On était plutôt à l'Elysée avec ce Conseil de défense,
00:57:08Emmanuel Macron qui recate Bruno Rotailleau.
00:57:11Gabriel Attal a une forme de peur de l'effacement
00:57:14depuis qu'il a quitté Matignon il y a un an,
00:57:16contre son gré,
00:57:17et on voit cette volonté de refaire un peu le coup de la baïa.
00:57:21Il avait eu une sorte d'opinion...
00:57:23Il était ministre de l'Education nationale.
00:57:25...et de popularité.
00:57:26En tant que ministre, il avait visé le camis et la baïa.
00:57:29C'est le lieu où il avait profité.
00:57:31Il essaie de retrouver la martingale avec ça,
00:57:34même si, cette fois-ci, constitutionnellement,
00:57:37c'est compliqué.
00:57:38Il nous reste peu de temps.
00:57:40La question que tous les députés se posent,
00:57:42c'est s'ils seront en vacances fin juin,
00:57:44s'il y aura une session extraordinaire ?
00:57:47On se la pose à LCP, parce qu'on va couvrir tout ça.
00:57:50On devrait être fixés d'ici quelques jours,
00:57:52mais ce qui se profile, c'est une session extraordinaire,
00:57:5515 jours, au moins, peut-être trois semaines,
00:57:58jusqu'au 14 juillet, deux sessions à l'Assemblée nationale
00:58:01pour peut-être finir certains textes,
00:58:03car le calendrier est très chargé,
00:58:05et le gouvernement veut apporter des textes,
00:58:07par exemple, un texte sur le statut de l'élu,
00:58:10un accord entre patronat et syndicat sur les seniors,
00:58:13qui doit être transposé dans la loi.
00:58:15C'était pas du tout le plan initial.
00:58:17Patrick Mignola, il y a quelques semaines,
00:58:19considérait qu'il fallait pas de session extraordinaire,
00:58:23car ça fournissait une cartouche en plus.
00:58:25La motion de censure s'éloigne,
00:58:27et il y a beaucoup de textes à faire passer.
00:58:29On peut rajouter la loi sur l'audiovisuel,
00:58:31que Rachid Dadati espère faire adopter avant l'été.
00:58:35Est-ce que vous suivez un peu ce qui se passe à l'Assemblée ?
00:58:38Quel est votre regard ? Vous regardez les débats ?
00:58:41Oui, je les regarde pas tous, mais un certain nombre.
00:58:44Et, écoutez, ils sont à l'image de ce que je déplore parfois.
00:58:48Bon, ils sont souvent de qualité,
00:58:50mais si on regarde un peu ce qui dysfonctionne,
00:58:53c'est à l'image un peu de ce qui dysfonctionne
00:58:55dans notre société.
00:58:56Moi, ce qui me chagrine, c'est qu'on n'arrive plus à se parler,
00:59:00on n'arrive plus à s'entendre, on n'arrive plus à s'écouter.
00:59:03J'ai mes opinions, vous avez les vôtres.
00:59:06Vous le constatez, quand vous regardez les débats ?
00:59:08Oui, parce qu'on est dans une forme de surenchère spectaculaire,
00:59:12d'invectives, d'agressions verbales,
00:59:14de niveaux de langue qui s'affaiblit.
00:59:16Ca s'est un peu calmé, ces derniers temps.
00:59:19Oui, c'est vrai. Ca s'est un peu calmé.
00:59:21Mais, justement, il faudrait,
00:59:23et j'espère que c'est une tendance qui va s'accentuer,
00:59:26qu'on soit, par nos représentants et nos représentants nationaux,
00:59:30dans une conversation, dans un dialogue,
00:59:33dans un échange, parce qu'il ne faut pas oublier une chose,
00:59:36c'est que nous avons besoin, il est nécessaire,
00:59:39il est indispensable qu'on fasse société.
00:59:41Et faire société, c'est déjà quelque chose
00:59:43qui se construit sur le dialogue.
00:59:45Merci beaucoup, Philippe Claudel.
00:59:47Je rappelle le titre de votre roman,
00:59:49qui est sorti en librairie aux éditions Stock.
00:59:53Merci à tous les trois.
00:59:56C'est la fin de ça, vous regarde.
00:59:57Je vous souhaite un bon week-end à tous sur LCP,
01:00:00mais pas que, évidemment, et on se retrouve la semaine prochaine.

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