Avec Ophélie Roque, professeur et auteur de "Antisèches d'une prof" éd. de la Cité
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##LE_FACE_A_FACE-2025-05-20##
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NewsTranscription
00:00Midi 14h, André Bercoff.
00:03Eh bien, vous savez, quand j'étais à l'école, et oui, ça n'est pas d'hier, ça effectivement, ça ne me rajeunit pas,
00:10mais voilà, on avait, on attendait la prof, et on attendait la prof parce que la prof nous racontait des tas d'histoires et tout,
00:16et là aujourd'hui, on n'attend pas la prof, elle est là, et on va faire classe, et oui, vous avez tous fait classe, hein,
00:21vous avez tous fait classe, maintenant c'est vos petits-enfants, ou vos enfants, vous-mêmes, qui ne se rappellent pas de ces années d'école ?
00:29Eh bien là, la prof, elle est là, elle s'appelle Ophélie Roch, elle a écrit « Antisèche d'une prof »,
00:35« Poursuivre, survivre à l'éducation nationale », et je peux vous dire, parce qu'elle est là,
00:41elle a bien survécu, enfin, jusqu'à présent, ça a l'air plutôt d'aller, elle n'est pas effectivement sur une civière,
00:48elle n'est pas du tout en soins palliatifs, non, non, ça va, Ophélie Roch.
00:52Alors, vous avez écrit ce livre, « Antisèche d'une prof », c'est paru, ça vient de paraître aux presses de la cité,
00:58et je trouve que c'est un livre très drôle et très instructif, parce que, mais vous parlez de tout,
01:02c'est-à-dire, les situations des profs, des élèves, il y a tout, alors,
01:07depuis la sexualité à l'école, jusqu'à la sécurité en passant, par les gommes, les crayons, le matériel, tout, tout, tout.
01:16Alors, vraiment, rien de ce qui est scolaire ou ne vous est étranger.
01:21Et en fait, on a envie de vous dire, bon, écoutez, on va faire un petit cours, hein, d'une heure,
01:26d'ailleurs, je vous recommande, franchement, même si vous n'êtes plus à l'école, et surtout si vous n'êtes plus à l'école,
01:31lisez, parce que c'est un très joli portrait de ce qui se passe aujourd'hui.
01:35Et moi, je vais vous dire la première chose qui m'a frappé, Ophélie Roch, c'est qu'aujourd'hui, on dit,
01:40là, là, l'école, c'est fichu, c'est fini, vous avez vu, c'est la jungle, effectivement, et on sait qu'il se passe des choses terribles.
01:46On ne va pas rappeler Samuel Paty, on ne va pas rappeler les professeurs qui ont été assassinés ou égorgés,
01:51on ne va pas rappeler la violence, mais enfin, quand même, on vit, alors, est-ce qu'on exagère, effectivement,
01:57ou on irait dans un climat de rappel médiatique violent sur l'école ?
02:04Et puis, alors, surtout, on dit, oui, le pédagogisme, l'enfant roi, on l'a tué, on n'apprend plus rien,
02:10transmission du savoir terminée, le niveau monte, c'est faux, le niveau baisse, etc., etc.
02:14Or, quand on lit votre livre, eh bien, ce n'est pas du tout ce que vous dégagez.
02:18Alors, dites-moi, c'est vous qui vous trompez ou c'est les autres qui se trompent ?
02:22Ah non, ça ne peut pas être moi qui me trompe, je refuse de croire ça.
02:25Non, en vrai, ce livre, c'est un peu étonnant de la manière dont il a été fait, parce que ce n'était pas une volonté de ma part.
02:32C'est à force de raconter un peu des anecdotes, à droite et à gauche, que des gens ont dit,
02:37ah, mais ce serait sympa si tu pouvais un peu, je ne sais pas, les condenser, les choses comme ça.
02:40Des amis à qui vous parliez ?
02:42Oui, des amis, c'est quand même rigolo, et des amis qui n'étaient pas profs, d'ailleurs.
02:45En général, c'était souvent des gens qui ne travaillaient pas dans le milieu,
02:48qui trouvaient ça incroyable, ce qui se passait, ou tout simplement drôle.
02:51Et c'est vrai que c'est cette drôlerie, en fait, qui m'a donné envie de faire le livre,
02:55parce que je ne voulais pas faire quelque chose qui soit un recueil d'anecdotes.
02:58Ça aurait pu être valable en soi, je pense qu'il y en avait suffisamment pour faire plusieurs tomes.
03:02Mais je voulais faire un livre qui parte de chiffres concrets,
03:06c'est-à-dire que le livre est basé sur des rapports un petit peu pénibles, entre guillemets,
03:10les rapports d'État, sur des rapports où j'ai lu comment est le bâti scolaire en France,
03:16quel est l'état des climatiseurs...
03:18Oui, c'est intéressant, on parlait des tables, des bureaux...
03:21C'est vraiment un truc du concret, parce que je pense que trop souvent, les gens oublient cette partie-là.
03:26C'est vrai que souvent, on se concentre sur les problèmes,
03:28et on ne regarde même pas un petit peu ce qui nous entoure.
03:30Or, l'école, c'est quand même quelque chose où on passe quasiment...
03:33Pour les élèves, 8 heures par jour, pour les professeurs, parfois un peu plus, un peu moins, selon les journées.
03:38C'est quand même intéressant de partir de ce bâti, de partir de ces petits objets du concret,
03:43qui finalement, une gomme, ce n'est jamais qu'une gomme avec un élève.
03:45Et c'est ça que je voulais un petit peu dire dans le livre,
03:48c'est partons de chiffres officiels, sérieux, précis.
03:53Et derrière ça, derrière ce sérieux, cette précision, mettons la vie en fait.
03:57Parce qu'une chaise, ce n'est pas qu'une chaise.
03:59Une chaise, est-ce que c'est une arme de défense qu'un élève va utiliser contre un autre ?
04:02Est-ce qu'une chaise, ça va être un moment où elle va servir un petit peu de balançoire ?
04:07Est-ce qu'une chaise, elle va avoir 50 chewing-gums collés sous elle ?
04:10Est-ce qu'une chaise, elle va tout d'un coup se rompre en plein cours ?
04:15Par exemple, pour une petite anecdote, vous voyez, dans certains établissements,
04:20ils nous mettent une chaise de professeur, c'est-à-dire qu'il y a un petit coussin.
04:23Il ne faut pas non plus chercher trop loin, mais bon, on est loin du fauteuil de Gérard Larcher.
04:27Mais on a quand même un petit coussin, si vous voulez, pour un peu...
04:30Je précise qu'Ophélie Roch a peu de choses du point de vue distribution de cellules avec Gérard Larcher.
04:35Je le dis en passant.
04:37Oui, mais alors, c'est intéressant.
04:40Et vous parlez aussi, vous dites, regardez la salle des profs.
04:43Tout le monde est fini en fantasme quand on n'a jamais été prof sur la salle des profs.
04:47Qu'est-ce qui se passe ? Qu'est-ce qui se dit ? Pas grand-chose.
04:50Non, c'est un petit peu, en fait, un espace de...
04:53Mais c'est comme, en fait, je pense que les professeurs n'ont pas quitté parfois le statut d'élève, en fait.
04:59C'est-à-dire qu'on retrouve un petit peu exactement la même chose que dans une cour de récré version salle des profs.
05:04C'est-à-dire qu'on ne parle pas exactement des mêmes choses, mais comme partout, il y a des potins.
05:08Comme partout, qui prend du café, qui prend du thé ?
05:11Qui va voler dans les casiers des autres ?
05:13C'est exactement, finalement, le même microcosme qui fait que moi, quand c'est une reconversion,
05:19ça n'a pas été une vocation, le métier du professora.
05:21Et c'est pour ça aussi que j'ai un regard amusé dessus.
05:23C'est que c'est un regard qui est plein de tendresse,
05:26mais aussi, voilà, je n'ai pas été illusionnée par le métier.
05:29Mais alors, justement, qu'est-ce que vous faisiez avant ?
05:31Et qu'est-ce qui vous a amené à dire...
05:34Tu sais, je veux dire, prof, parce qu'aujourd'hui, on dit
05:36« Ouh là là, prof, c'est très compliqué, ne l'en croyez pas », etc.
05:39Expliquez-nous, vous étiez dans...
05:40Moi, j'avais fait les classes préparatoires littéraires.
05:43Après, j'avais fait l'école du Louvre.
05:45Et c'est au moment de travailler dans le milieu, un peu, du marché de l'art,
05:48je me suis aperçue qu'il manquait une veine sociale.
05:50Une veine que je connaissais par oui-dire,
05:53parce que ma maman me racontait souvent ses journées de travail
05:56et elle travaillait dans le social.
05:57Donc, du coup, j'avais plein d'anecdotes.
05:59Et quand j'ai commencé à travailler, je me suis dit
06:01« Mais c'est bien, cette fréquentation des œuvres d'art, je l'aime beaucoup. »
06:05C'est des moments que j'ai beaucoup appréciés
06:07et que j'apprécie toujours d'aller voir un musée, d'aller voir une expo.
06:10Mais en fait, il n'y avait pas le social, il n'y avait pas le côté humain.
06:13Et en fait, je trouvais que mes journées étaient quand même assez vides,
06:16assez creuses, il manquait finalement un petit peu le rugueux de l'humain.
06:21Et c'est vrai que je me suis dit « Si je veux tenter une reconversion,
06:25il faut le faire avant qu'il soit un peu trop tard. »
06:27Parce que je pense que c'est très compliqué
06:28de devenir prof à 40 ans du jour au lendemain.
06:30Et du coup, du jour au lendemain, j'ai un peu quitté les allées un peu feutrées
06:35des galeries des choses comme ça.
06:37Et vous avez subi des études ?
06:39Pas du tout.
06:40C'est du jour au lendemain, on m'a dit « En tant que contractuel,
06:44j'ai postulé tout simplement un CV. »
06:46Vous n'avez pas eu un diplôme spécifique ?
06:48J'avais des diplômes, j'avais des masters qui faisaient
06:51qu'en effet, j'étais potentiellement apte à devenir professeur.
06:55Mais l'académie, c'est le rectorat de Versailles qui m'a dit
07:00« Ok, on vous prend. »
07:01Et j'ai eu la réponse le jeudi comme quoi j'étais prise.
07:04Et le vendredi, j'avais une infectation dans un lycée professionnel du Val d'Argenteuil.
07:08D'accord.
07:09Ah oui, c'est du jour au lendemain.
07:10À 48 heures.
07:11Ah même pas, c'est 24 heures.
07:12On m'a appelé le matin en disant « Est-ce que vous êtes disponible l'après-midi ? »
07:16Ça y est, ça commence.
07:17Donc effectivement, vous avez un regard extérieur déjà.
07:21Mais je pense que c'est ce qui m'a sauvée.
07:22Et se jeter dans le bas, ça a été dur ou pas ?
07:24Ah oui, quand même.
07:25En fait, je vais répondre en deux temps.
07:27Ça a été dur parce qu'on fait mal le métier alors qu'on veut bien le faire.
07:30Parce qu'en fait, on n'a pas les codes et qu'on ne sait pas exactement
07:33qu'est-ce que ça veut dire être professeur.
07:34Parce que finalement, créer les cours, c'est la partie la plus simple.
07:37Le problème, c'est pas créer les cours, c'est comment on les explique,
07:40comment on gère une classe.
07:41Comment on transmet, comment on gère une classe,
07:43qu'est-ce qu'il faut faire, qu'est-ce qu'il ne faut pas faire.
07:45Et c'est toutes ces petites choses-là qui font qu'en fait,
07:48on est confronté du jour au lendemain à un métier qu'on ne connaît pas,
07:52qu'on ne comprend pas.
07:53Et c'est aussi aberrant finalement que si quelqu'un voulait devenir médecin
07:57et que du jour au lendemain, on disait, bah tiens, opère.
07:59Oui, on le ferait pas ça, franchement.
08:01On le ferait pas et pourtant, on confie nos enfants à des gens, vous voyez,
08:04qui n'en passent forcément, qui ont plein d'envie de bien faire.
08:09Moi, souvent, je trouve que les contrats actuels,
08:10ils arrivent avec une vraie envie de bien faire.
08:12Mais c'est vrai que c'est compliqué.
08:13Il faut des années de métier pour bien enseigner ou espérer bien enseigner.
08:17Et c'est vrai que je pense vraiment que la première année,
08:21on est plein de dynamisme et je pense que ça compense plein de faiblesses.
08:25Je pense que...
08:26Parce qu'on a l'envie de bien faire.
08:28Voilà, on a l'énergie, on a l'envie de bien faire.
08:30Et du coup, quand ça marche pas, on se dit pas, c'est la faute des élèves.
08:34On se dit, ah mince, j'ai pas du bien faire.
08:36Donc en fait, d'un côté, je pense que ça aide à avoir une entrée dans le métier
08:42qui soit une entrée, en fait, qui soit à la fois rude
08:45et en même temps, souvent, plein d'enthousiasme.
08:47Il y a souvent ces deux catégories...
08:49Enfin, ces deux sentiments, en fait, qui se complètent
08:52et ce qui fait, en fait, que ça aide à passer la transition
08:55de ce qui est un professeur...
08:57Et ce qui est intéressant dans votre livre, d'ailleurs,
08:59c'est que vous avez tout de suite pris le...
09:02Enfin, en tout cas, là, le parti pris de votre livre,
09:04c'est vraiment le quotidien.
09:06Et alors, vous racontez, effectivement, vous commencez...
09:08D'ailleurs, c'est bien parce que vous commencez...
09:10Parce que l'école, c'est toujours, comme d'autres,
09:12l'auberge espagnole du fantasme ou des fantasmes.
09:15Par exemple, effectivement, les fraudes foutent rien...
09:1716 semaines de vacances !
09:19C'est vrai, on se dit, mais...
09:21C'est bien quand même, le prof, ok, d'accord,
09:23ils sont peut-être pas payés comme des PDG,
09:25mais enfin, 16 semaines de vacances, 4 mois,
09:28c'est formidable, qu'est-ce qu'on aimerait faire ça ?
09:30Et vous vous dites, c'est plus compliqué que ça.
09:32Oui, c'est plus compliqué.
09:33Alors, bien sûr, je vais pas sur les deux mois de vacances d'été.
09:36C'est sûr qu'on a le temps de se reposer quand même.
09:38Si, attention, quand vous êtes professeur,
09:40on n'est pas en vacances le 1er juillet,
09:42on est souvent en vacances, et de plus en plus tard,
09:44on quitte souvent avec les examens qu'on doit...
09:47Mais vous reprenez pas forcément début septembre.
09:49Alors si, on quitte à peu près le 14 juillet,
09:53et on reprend même...
09:55Par exemple, l'année dernière, je me souviens de la date,
09:57c'était le 31 août, et l'année d'avant, c'était le 30 août.
09:59Donc vous voyez...
10:00Donc un mois et demi, vous dites, ça fait...
10:02Après, un mois et demi, soyons francs,
10:04ça laisse quand même le temps de se reposer un peu.
10:06Par contre, sur les vacances,
10:08qui sont les vacances un peu intermédiaires...
10:10On appelle les vacances scolaires.
10:12Voilà, les vacances, les 15 jours, par-ci, par-là,
10:14c'est très, très...
10:16C'est quasiment tout le monde...
10:18En fait, c'est là où vous corrigez les copies,
10:20vous faites les cours, vous changez les séquences.
10:22Faut pas croire, une séquence qui marche pas,
10:24par exemple, avec une classe,
10:26on va pas la refaire à l'identique.
10:28On va dire, là, il y a quelque chose qui s'est pas bien passé,
10:30il faut quand même faire les choses.
10:32Est-ce que, justement,
10:34Ophélie Ruck,
10:36je suis sûr que vous faites ça
10:38avec conscience professionnelle sans défaut,
10:40mais est-ce qu'il n'y a pas des gens qui se disent,
10:42comme partout, et pas que les professeurs...
10:44Oui, bon, écoute, ça marche pas très, très bien,
10:46mais je vais continuer comme ça, je veux pas m'amuser
10:48pendant, par exemple, mes 15 jours de vacances
10:50de Pâques ou de Noël du Lent
10:52à refaire complètement le logiciel.
10:54En fait, je pense que ça,
10:56bien sûr, il y en a qui doivent faire ça,
10:58mais j'ai envie de vous dire, ceux qui, en général,
11:00ont tendance à faire ça comme ça,
11:02c'est aussi parce que ce sont des professeurs qui ont beaucoup
11:04d'expérience derrière eux et de bouteilles,
11:06et que, d'une certaine manière, ils peuvent se le permettre.
11:08Vous voyez rarement,
11:10mais honnêtement, et je dis pas ça,
11:12Dieu sait que la profession a aussi plein de défauts,
11:14mais je n'ai jamais vu...
11:18Pourtant, j'ai pas mal bourlingué
11:20d'un établissement à l'autre, mais je n'ai jamais vu
11:22un jeune professeur
11:24dire, je ne fais rien pendant mes vacances.
11:26C'est souvent eux qui en font, et d'ailleurs, c'est pas forcément mieux,
11:28parce que c'est souvent eux qui en font trop,
11:30qui veulent trop bien faire,
11:32qui veulent absolument faire tout
11:34au mieux, et qui se mettent finalement dans
11:36des états de transe pas possibles
11:38parce qu'ils n'ont pas, finalement, fait la mise
11:40en page adéquate. Donc, j'ai envie de dire,
11:42ceux qui se permettent peut-être
11:44de prendre des vraies vacances, c'est ceux qui
11:46savent faire exactement le métier, qui ont déjà
11:48des cours qui sont d'une année à l'autre
11:50peaufinés, et qui, oui, peuvent se permettre, bien sûr.
11:52Encore une fois, c'est pas non plus le bail,
11:54ce métier, sinon je n'y serais plus après cette heure.
11:56C'est clair. Alors,
11:587 ans, justement, et vous avez
12:00fait plusieurs établissements,
12:02il faut le dire, et alors, justement,
12:04on va rentrer, juste après
12:06cette petite pause, on va rentrer dans le
12:08vif du sujet, dans l'inventaire, pas tout,
12:10parce qu'il nous faudrait 5h30 et plus,
12:12mais c'est très intéressant, parce que vous prenez
12:14vraiment des angles et des entrées
12:16qu'on ne prend pas d'habitude.
12:18On va en parler tout de suite.
12:20Alors, tous en classe,
12:22préparez, asseyez-vous bien,
12:24et puis du silence, y compris
12:26ceux qui sont au front de la classe.
12:28On sera au tableau, Ophélie Roch est au tableau,
12:30et je vous demanderai la consultation
12:32la plus totale.
12:40Alors, écoutez bien,
12:42c'est vraiment intéressant,
12:44ça va vous ramener, allez, je ne dis pas
12:46de la maternelle, mais du collège au lycée,
12:48avec
12:50Ophélie,
12:52Ophélie Roch,
12:54non pas rock'n'roll, comme certains
12:56pourraient le croire, mais tout.
12:58Alors, écoutez, à la mort de tout, j'ai envie
13:00presque de vous lire
13:02la table des matières.
13:04Je vous dis, elle va, juste comme ça, rapidement,
13:06très rapidement, elle va de la machine à café
13:08au kebab, en passant
13:10par les micro-ondes et la purée,
13:12en passant par les sanctions,
13:14en passant par le bâti scolaire,
13:16la décrépitude, les toilettes,
13:18le silence des toilettes le soir au crépuscule,
13:20et ça va, la petite délinquance
13:22qui peut devenir grande,
13:24ça va, les environnements technologiques
13:26de haut de volée, évidemment, on arrive presque
13:28à l'intelligence artificielle,
13:30les réseaux sociaux, bien sûr,
13:32les films mixtes, tout,
13:34tout, tout, il n'y a pas de problème, jusqu'à Parcoursup,
13:36franchement, rien de ce
13:38qui est scolaire, je l'ai dit, ne lui est
13:40étranger. Et en fait,
13:42c'est le
13:44parti pris, c'est ça, Ophélie Roch
13:46vous dit dire, au fond,
13:48quand vous parlez, par exemple,
13:50des tables, des chaises,
13:52quand vous parlez de la nourriture,
13:54quand vous parlez de la cantine, quand vous parlez de tout
13:56cela, vous voulez dire, attendez, il y a un quotidien,
13:58ce quotidien n'est ni paradisiaque,
14:00ni l'enfer.
14:02Oui, c'est ça, c'est-à-dire qu'on peut
14:04très bien passer des moments
14:06très plaisants avec des tables qui dysfonctionnent,
14:08on en rigole avec les élèves, moi,
14:10je me souviens d'une fois, un élève où
14:12j'étais dépitée parce qu'il y a un rétroprojecteur
14:14qui ne fonctionnait pas, c'est rare que
14:16je les utilise, mais quand j'aime les utiliser,
14:18on aimerait que ça fonctionne, et le
14:20gamin s'est levé, il a tapé deux-trois fois dessus
14:22en disant, voilà, c'est pire qu'un rétrodublette
14:24ce truc, et il fait, vas-y,
14:26je vais vous en rapporter, et j'ai dit,
14:28sérieusement, je suis honorée ?
14:30Enfin, je veux dire, on en rigole.
14:32Moi, je suis
14:34assez marquée, parce que comme j'ai
14:36pas mal vadrouillé, finalement, d'un
14:38établissement à l'autre... Aussi bien du public
14:40que du privé. Voilà, c'est ça, j'ai vu
14:42des établissements flambant neufs
14:44avec des salles
14:46même de petites...
14:48Enfin, des petites salles de box
14:50privatisées pour les élèves qui voudraient enregistrer
14:52un petit peu, comme là, on fait, c'est-à-dire
14:54des petits journaux étudiants,
14:56des titres radios, enfin, des trucs high-tech,
14:58et j'ai vraiment vu des
15:00établissements où, en effet, on n'a pas de chauffage,
15:02et puis, moi, cette année, il y a quand même
15:04un enfant qui a failli se prendre un bout
15:06de placo plâtre qui s'est détaché
15:08du plafond plein dans mon cours.
15:10Dieu merci, l'enfant n'a rien eu, mais ce que
15:12je veux dire, c'est que l'environnement
15:14de travail, en fait, c'est pas vrai
15:16que ça n'influe pas sur le quotidien.
15:18On peut le prendre comme une blague
15:20et souvent, on le prend comme ça, mais
15:22quand vous voyez des enfants qui sont dans des environnements
15:24qui sont, j'ai envie de dire,
15:26quasiment professionnels, avec
15:28des normes, avec
15:30des choses high-tech, qui fonctionnent,
15:32et que vous voyez après
15:34des établissements qui sont
15:36complètement... Mais parfois, on est...
15:38Presque abandonnés, fois pas.
15:40Non, mais dans certains, c'est pas presque.
15:42Concrètement, ça veut dire quoi ?
15:44Je me souviens
15:46une fois où je l'ai pris
15:48en photo, par exemple, à cet atelier
15:50parce que j'en revenais pas. Certaines classes
15:52sont particulières à certaines matières. Je pense notamment
15:54aux classes de physique-chimie. Vous savez, c'est celles avec
15:56les baquets, un petit peu, pour que les enfants
15:58fassent des expériences.
16:00Ces salles-là, en fait, dans un établissement
16:02où j'étais,
16:04je peux pas vous expliquer le degré
16:06de décrépitude, si ce n'est
16:08de vous dire que les murs étaient vers de moisissures,
16:10que le plafond était...
16:12Mais c'est même plus
16:14de la pierre qu'on voyait.
16:16On sait pas ce que c'était. Il y avait des
16:18bouts humides. Ils ont essayé
16:20de rafistoler ça comme ils pouvaient.
16:22Les bacs étaient ébréchés.
16:24Les chaises...
16:26Il y a vraiment des professeurs qui
16:28ramenaient des chaises aux enfants, qui se cotisaient
16:30pour payer.
16:32Tout était en lambeaux, pratiquement.
16:34Tout était en lambeaux parce qu'en fait, c'était un établissement qui aurait dû
16:36se fermer et qui finalement
16:38durait et durait, sans compter
16:40les classes qui sont parfois,
16:42vous savez, les petites baraques de
16:44chantier, ce qu'on appelle
16:46les choses qu'on met temporairement.
16:48Pas des containers,
16:50des mini-containers et compagnie.
16:52Et qu'on a des classes parfois qui sont à 45 degrés
16:54là-dedans, et que ce provisoire...
16:56Voilà, les AGECO. Et que ce provisoire dure
16:58parfois 4, 5, 6 ans.
17:00Bien sûr que l'enfant, il étudie pas de la même manière.
17:02Et bien sûr que le professeur n'enseigne pas de la même
17:04manière. Moi, je pense que les enfants sont
17:06pas bêtes s'ils sentent que
17:08l'État ne leur accorde pas un minimum
17:10financier. Comment vous voulez aussi qu'ils prennent
17:12leurs études au sérieux, ces enfants-là ?
17:14C'est compliqué.
17:16On peut se poser la question. Et donc,
17:18justement, parce que vous renvoyez
17:20presque dans le long-dit de votre livre,
17:22vous dites, voilà, les choses sont plus
17:24compliquées, plus complexes,
17:26c'est pas blanc
17:28et noir, c'est pas manichéen.
17:30Et votre livre n'est pas manichéen.
17:32C'est de cela qu'il est intéressant.
17:34Mais justement, est-ce que,
17:36alors, votre expérience,
17:38grosse différence entre le public et le privé ?
17:40Ah oui. Mais moi, je vais vous dire
17:42une anecdote. Moi, j'ai fait 3 ans
17:44dans le public, et j'aimais ça.
17:46Mais,
17:48comme j'étais contractuelle, le rectorat
17:50gère très très mal, c'est contractuel.
17:52C'est-à-dire qu'à un moment, j'étais sur 4 établissements à la fois.
17:54J'avais plus de 3...
17:56C'était une catastrophe. J'étais forcée
17:58de faire du latin alors que j'en avais jamais fait.
18:00Et donc, en fait, à un moment,
18:02moi, je m'y retrouvais absolument plus du tout.
18:04Là, le plaisir d'enseigner, il est dur
18:06quand vous devez faire
18:08plus de transports que de cours dans la journée.
18:10Et puis, vous êtes rincée, vous êtes exténuée.
18:12Mais,
18:16donc, à un moment, je me suis plus sentie bien
18:18et j'ai dit, là, j'ai envie de passer mon
18:20KPS, mais je vais du coup le passer dans le privé.
18:22Voilà. Parce que ça, je veux plus vivre ça.
18:24Mais, quand j'ai
18:26été dans le privé,
18:28c'est-à-dire qu'au bout de 3 ans de public,
18:30j'ai basculé dans le privé, mais en fait,
18:32je crois que c'est moi qu'on devait
18:34réadapter et rééduquer. Parce que moi,
18:36je suis arrivée avec des codes du public,
18:38c'est-à-dire... C'est-à-dire quoi, en fait ?
18:40C'est-à-dire qu'un enfant qui chuchote, potentiellement,
18:42il peut finir par arracher le rideau. Donc, il faut être un peu
18:44réactif. On ne peut pas être mou.
18:46Et, en fait, je me suis attaquée.
18:48C'est intéressant. Dans le public, s'il chuchote,
18:50il peut aller beaucoup plus loin. Bien sûr, mais moi,
18:52j'ai eu des élèves qui... Comment dire ?
18:54Enfin, moi, sincèrement,
18:56moi, dans le public, et comme on n'est
18:58qu'entre jeunes, et qu'on ne connaît
19:00que, finalement, l'expérience de nos
19:02collègues qui sont, comme nous, dépassés,
19:04on a l'impression que c'est la normalité. Donc, faire que 10 minutes
19:06de cours et 50 minutes de gestion de classe,
19:08moi, je trouvais ça normal, en fait. Enfin, je me suis
19:10dit, c'est ça, être prof, en fait, de nos jours, c'est ça ?
19:12Bon, ben, OK, c'est ça. – Mais attendez, mais c'est quand même
19:14assez... Enfin, je ne dis pas
19:16terrifiant, mais enfin, c'est-à-dire que pour être 10 minutes
19:18de vrai cours et 50 minutes, il faut tenir le truc.
19:20– Pas tout le temps, mais souvent, quand même.
19:22– Souvent, mais c'est énorme. – Souvent, quand même.
19:24Surtout, j'ai envie de vous dire, si vous avez
19:26le malheur d'avoir des cours
19:28en fin d'après-midi, là, c'est sûr
19:30que vous n'avez que 10 minutes de cours et 50 minutes de gestion
19:32de classe. Et puis, c'est des 50 minutes
19:34de gestion de classe parce qu'aussi, on a des enfants
19:36qui ne sont... Comment dire ? Qui ne peuvent pas s'arrêter.
19:38Moi, je pense à tous ces
19:40établissements du public qui regorgent de pépites
19:42qu'on...
19:44Le problème, c'est que c'est 30 enfants sur...
19:46Il y en a 25 qui... Voilà, qui sont des
19:48élèves dits traditionnels.
19:50Et puis, on a des enfants qui, en fait, ne
19:52devraient pas être à l'école, soit parce qu'ils ont une violence
19:54extrême, qu'ils devraient être soignés.
19:56Mais on ne sait... On n'a pas d'argent pour les soigner.
19:58– Et puis, les cèdres nourrissent complètement le tout.
20:00– Voilà, c'est ça. Et du coup, ça vous suffit...
20:02Vous savez, il suffit parfois... Moi, je me souviens
20:04d'avoir poussé parfois des oufs
20:06de soulagement, et mes collègues aussi, quand on apprenait que tel enfant
20:08n'était pas là. Mais on s'est dit
20:10« Oh, c'est trop bien, il n'est pas là, mais c'est génial !
20:12On va faire cours à peu près normalement ! »
20:14Parce qu'en fait, il en suffit d'un.
20:16Et puis, il y en a des ténus aussi, les enfants.
20:18Moi, je n'ai pas... J'ai une vision du métier
20:20qui, j'espère, est la plus...
20:22Comment dire ? La plus sincère possible.
20:24Donc, je pense que beaucoup d'enfants
20:26sont adorables, mais je pense aussi
20:28que certains sont déjà perdus, en fait.
20:30Et je pense que ce n'est pas une grossièreté
20:32que de dire que certains individus sont perdus
20:34parce que... C'est pas parce qu'eux
20:36le sont que ça veut dire que le reste...
20:38– Mais oui ! Sauf que si on les laisse faire,
20:40ceux qui sont perdus, ils vont baisser tout.
20:42– Oui, c'est la grande graine.
20:44– On va en parler, on va continuer à en parler
20:46après cette petite pause.
20:48Ophélie Roch, antisèche d'une prof.
20:500826-300-300,
20:52si vous voulez intervenir.
20:54Vous savez, tout le monde a été
20:56et ou sera goaliste,
20:58tout le monde a été et ou sera enseignant,
21:00en tout cas, ou peut-être sera pas,
21:02mais a été élève
21:04ou professeur.
21:06Donc, on va continuer d'en parler
21:08et c'est passionnant. À tout de suite !
21:10Sudrata midi 14h,
21:12André Bercoff.
21:14– Eh bien,
21:16bienvenue sur les bancs de l'école
21:18du XXIe siècle. Écoutez,
21:20j'ai même rencontré un prof heureux.
21:22Voilà, Ophélie Roch, écoutez,
21:24ça ne m'arrive pas souvent. – J'ai pas honte de le dire.
21:26– Et voilà, en général, on me dit
21:28c'est pas possible, c'est terrifiant,
21:30vous pouvez pas savoir, c'est devenu...
21:32Mais c'est même pas l'Ukraine, c'est devenu
21:34Beyrouth, c'est devenu terrible. Les gens scolaires vous disent
21:36non, non, non, c'est beaucoup plus...
21:38Ça va, il y a des choses qui vont pas,
21:40il y a des choses qui vont. Cela dit,
21:42quand vous me dites effectivement, quand on revient
21:4410 minutes d'enseignement et 50 minutes
21:46ou 40 minutes de gestion, c'est un peu embêtant.
21:48– Je pense que c'est une question de caractère,
21:50c'est-à-dire que je pense que c'est un métier,
21:52si on...
21:54Comment dire ? Si on l'envisage comme une souffrance,
21:56c'est-à-dire que, en effet, chaque cours
21:58qui ne se passe pas bien, c'est quelque chose
22:00qui, pour vous, devient... – Si ils sont marqués,
22:02on est marqué, tout ça. – Ça,
22:04en effet, je pense que c'est un métier où il faut partir
22:06le plus vite possible parce qu'on n'est pas bon
22:08et les élèves, en fait, pour eux,
22:10c'est pas grave non plus. – C'est sûr. – Par contre,
22:12si on arrive à avoir un peu de détachement,
22:14alors peut-être que le détachement, peut-être que là,
22:16pour l'instant, j'arrive encore et que dans 3 ans,
22:18je n'y arriverai plus, je ne dis pas. Mais je pense
22:20qu'il y a un moment, on se dit, bon,
22:22le jour où je n'arrive plus du tout à sourire
22:24de rien, le jour où chaque chose
22:26devient que grave, alors il y a des choses
22:28graves qui ne font jamais sourire, mais il y a des choses
22:30qui, parfois, sont de l'ordre du embêtant,
22:32mais quand même, derrière l'embêtement,
22:34on fait... C'était drôle quand même.
22:36Ok, il a un peu arraché la tringle des rideaux,
22:38mais quand même, sur le moment, il n'y avait pas un truc.
22:40– C'est bien,
22:42j'ai bien aimé votre... Comme ça, c'est
22:44très très bien. Maud, je crois qu'on a
22:46un ou une auditeur.
22:48– Deux paroles, là.
22:50C'est Claude qui appelle de l'un.
22:52– Ah, Julien, Julien. – Tout va bien. On va d'abord
22:54à la Claude. – Alors, Claude.
22:56– Bonjour. – Bonjour, Claude.
22:58– Alors, Claude,
23:00femme. – Claude,
23:02femme. Eh bien, chère Claude,
23:04vous vous appelez de Lyon,
23:06et alors, vous êtes prof,
23:08vous avez été élève, dites-nous tout.
23:10– Alors,
23:12tout, cher ami. J'ai
23:14forcément été élève. J'ai
23:16d'abord travaillé dans le privé, et puis après,
23:18je suis venue enseigner
23:20parce que c'était une évidence pour moi
23:22dès ma sortie,
23:24enfin, dès les études, dès la
23:26terminale. Mais j'avais été...
23:28J'avais pas aimé la réponse d'un de mes profs
23:30quand je lui ai demandé, voilà, j'hésitais
23:32entre aller d'abord travailler,
23:34puis après devenir prof, et...
23:36– Et vous êtes devenue prof.
23:38– Eh bien non, en fait, j'ai travaillé d'abord,
23:40parce que sa réponse, en fait, comme il n'avait jamais
23:42connu le monde du travail, il n'avait pas su
23:44me répondre, et ça m'avait beaucoup énervée.
23:46– Eh bien, écoutez, Ophélie Roch a fait
23:48la même chose, elle était dans le privé, et puis voilà.
23:50– Mais c'est une richesse, en fait,
23:52parce que, moi, je suis dans un enseignement
23:54en plus professionnel, donc ce que
23:56j'enseigne, je l'ai vécu.
23:58Et ça apporte quand même une richesse,
24:00en tout cas dans l'aisance qu'on peut avoir sur l'analyse
24:02d'un référentiel, et sur
24:04la transmission d'un savoir et d'un
24:06savoir-faire, donc c'est
24:08vraiment un plus. Et quand
24:10j'écoutais Madame Roch,
24:12moi, j'ai envie,
24:14je me suis reconnue forcément sur plein plein
24:16de choses, et comme elle a raison
24:18de parler, d'expliquer
24:20que tout le travail qu'on fait en dehors
24:22et en plus, parfois on travaille
24:24en co-enseignement, donc on est
24:26sur des projets, parce qu'on est sur
24:28beaucoup la problématique des projets,
24:30mais travailler en mode projet,
24:32c'est du temps.
24:34C'est du temps de concertation, c'est du temps de mise
24:36en œuvre. Nous, on travaille avec des professionnels.
24:38Les gens ne s'imaginent pas.
24:40Parfois, vous savez, je me dis
24:42à mince, j'étais plus
24:44heureuse quand j'étais commerciale, ou en tout cas
24:46j'avais moins de nœuds au cerveau, voilà.
24:48On peut être très vite en
24:50surcharge mentale. Après, c'est un métier
24:52où la relation humaine, et c'est ce qu'elle a
24:54soulevé, qui est vraiment
24:56quand
24:58ça passe bien avec
25:00les élèves, c'est vraiment une
25:02relation, et on arrive
25:04à faire faire plein de choses.
25:06Mais on est quand même là, faut pas l'oublier,
25:08le système s'appelle éducation nationale.
25:10Moi, je maintiens qu'on est
25:12quand même, on fait beaucoup, beaucoup d'éducation.
25:14Quel que soit.
25:16Moi, je suis en post-bacc.
25:18Mais vous savez, Claude, c'est le grand truc. D'abord,
25:20je voulais vous dire une chose, simplement, il vaut mieux avoir
25:22plus de nœuds que pas de nœuds du tout,
25:24dans le cerveau.
25:26C'est quand même préférable. Et puis, deuxièmement,
25:28vous savez, mais justement, et je voudrais
25:30qu'Ophélie Roch s'exprime là-dessus.
25:32Mais vous savez que beaucoup de gens se disent,
25:34oui, mais justement, l'école
25:36n'est pas là pour éduquer, l'école est là pour
25:38instruire et transmettre. Il faudrait
25:40revenir à un ministère de l'instruction nationale.
25:42Je l'entends beaucoup, ça, dans des débats,
25:44etc. Vous en pensez quoi, Ophélie Roch ?
25:46Est-ce que l'école est là ?
25:48Alors, c'est vraiment...
25:50J'ai envie de vous dire, idéalement,
25:52elle a été construite
25:54pour instruire, mais
25:56de nos jours, il y a bien
25:58parfois, dans certains milieux,
26:00dans certaines zones, périmètres scolaires,
26:02heureusement qu'il y a des profs
26:04qui éduquent.
26:06C'est peut-être pas
26:08forcément ce qu'on souhaite faire
26:10à la base, mais en fait,
26:12c'est aussi une partie du métier qui est intéressante.
26:14C'est-à-dire que, le problème,
26:16encore une fois, c'est que moi, je veux bien qu'on soit
26:18éducateurs scolaires, mais dans ce cas-là,
26:20pas dans des classes de 30, pas dans des classes de 32,
26:22et pas dans des classes de 35.
26:24Et si vraiment, vous voulez qu'on éduque
26:26les jeunes, il faut mettre aussi
26:28des moyens et des formations humaines,
26:30et pas simplement vous envoyer de temps en temps
26:32dire, oui, mais là, vous avez une formation pour apprendre à faire un powerpunt.
26:34On s'en moque de ça, c'est pas ça qu'on a besoin.
26:36En fait, et
26:38en effet, pour l'instant, je pense que l'éducation nationale,
26:40si elle s'appelait instruction nationale,
26:42maintenant qu'elle mentirait, pour le coup, il vaut mieux
26:44la laisser telle qu'elle, j'ai envie de dire.
26:46Claude, vous êtes d'accord avec ça ?
26:48Alors, la nuance que je mettrais,
26:50c'est que quand on a une classe,
26:52en fait, on est un mini groupe social.
26:54Donc, il y a forcément
26:56un apprentissage de règles, ne serait-ce
26:58que ne pas parler tous en même temps.
27:00Quand on rentre, on dit bonjour. Moi, la première,
27:02je rentre dans la classe, je regarde
27:04mes étudiants et je leur dis bonjour.
27:06Je ne peux pas commencer un cours sans ça.
27:08Donc, je veux dire, c'est diffus.
27:10Il ne s'agit pas de faire de l'instruction,
27:12et ça, je suis d'accord,
27:14mais on a quand même un rôle,
27:16et c'est dommage.
27:18Transmission du savoir, quand même.
27:20Oui, et puis du savoir-être.
27:22Il faut gérer ce groupe.
27:24Même entre eux,
27:26il faut qu'ils apprennent à se gérer.
27:28Et eux, par rapport à nous.
27:30Et puis, elle a raison, en fonction
27:32des milieux sociaux,
27:34certains ont un peu plus besoin d'éducation
27:36que d'autres. Et toute la difficulté,
27:38c'est que moi, j'ai beaucoup
27:40d'étudiants qui n'ont pas le même niveau.
27:42Mais la réalité,
27:44bien sûr, en tant qu'enseignante, j'aimerais
27:46avoir que des étudiants qui ont le niveau.
27:48Mais quand même, la réalité, moi je les ai deux ans,
27:50un étudiant que j'accueille
27:52en première année, qui n'a peut-être pas le niveau,
27:54mais il n'est plus pareil au bout de la deuxième
27:56année. Donc, il y a quand même
27:58cette dimension.
28:00Ce sont déjà des petites victoires, en fait.
28:02C'est vrai, ce qu'elle dit, c'est des petites
28:04victoires. Parfois, on se dit, on ne peut
28:06pas amener forcément tout le monde
28:08parfois à l'obtention d'un diplôme,
28:10mais ce n'est pas pour autant que rien n'a été fait.
28:12Que l'enfant n'a rien appris pour
28:14autant, en fait.
28:15C'est intéressant. Alors, justement, vous,
28:17vous avez dressé, en fait, Mademoiselle de Scuaderi
28:19avait écrit la carte du tendre
28:21pour les amoureux de la grande époque.
28:23Et vous, Ophélie Roch, vous écrivez
28:25la carte du tendre scolaire.
28:27Quand je dis tendre, ce n'est pas toujours tendre,
28:29bien sûr. Mais justement, il y a tout.
28:31Il y a vraiment tout. Par exemple,
28:33vous voyez, par exemple, regardez,
28:35je prends votre livre. Tu n'es pas censé
28:37porter des lunettes ? Si.
28:39Tu n'aimais pas ? Non. Et pourquoi ça ?
28:41Moi, je ne suis pas, je n'aime pas, c'est tout,
28:43c'est moche, ça me pique le dos de tête.
28:45Tu arrives à avoir 100 ? Pas vraiment.
28:47Mais tu ne les portes pas quand même ? Ben non.
28:49Mais tes parents sont au courant ?
28:51Wesh, n'allez pas le dire à ma mère.
28:53Bien sûr, j'ai dit à la maman.
28:55C'est... Les enfants, en fait,
28:57on vit avec eux. Enfin, moi, je vois qu'il y a des...
28:59Parfois, il y a des élèves, on les voit avec des
29:01pathologies un peu visibles
29:03ou on voit que
29:05leur santé décline, leur santé reprend.
29:07On voit qu'ils ont des problèmes familiaux,
29:09il y a des choses comme ça. Je pense que
29:11sans aller jusqu'à... Oui, oui, sans aller...
29:13Vous êtes au courant de leur vie à l'extérieur, malgré...
29:15Et ils sont aussi parfois au courant de la
29:17nôtre de manière indirecte, c'est-à-dire que
29:19on ne vit pas, si vous voulez,
29:21on vit avec de l'humain. Et bien sûr,
29:23un enfant qui vient et qui sait,
29:25je ne sais pas, qui a le bras dans un plâtre,
29:27vous n'allez pas commencer le cours
29:29en disant, bon, en le regardant...
29:31Sans poser les questions. Sans dire, ben alors...
29:33Enfin, c'est pas aller...
29:35C'est pas fouiller l'intime d'un élève,
29:37c'est aussi lui dire, mais j'ai vu que
29:39t'avais un truc un peu différent,
29:41et qu'est-ce qui
29:43t'est arrivé ? Comme eux, parfois, le matin,
29:45quand ils vous voient arriver
29:47avec la mèche un peu
29:49de travers et pas de maquillage, en disant,
29:51réveil compliqué ce matin. Oui, ben oui, ça se voit.
29:53Mais je veux dire, c'est pas, encore une fois,
29:55c'est pas parce qu'on interagit un peu
29:57sur des éléments visibles
29:59de notre vie que c'est copiner.
30:01En fait, c'est ça qui aussi fait
30:03la beauté du métier, c'est aussi, ben,
30:05ce sont des êtres humains qui ont, voilà,
30:07qui sont comme nous, qui ont leur bonheur,
30:09leur malheur, et nous, on est là pour
30:11faire cours, et ça ne veut pas dire qu'il faut
30:13axer son cours sur l'humeur d'un élève,
30:15ça veut dire aussi qu'il faut parfois s'adapter
30:17pour regarder, en fait,
30:19à ne pas rajouter une charge
30:21d'inhumanité sur des situations
30:23qui sont parfois déjà très compliquées.
30:25Oui, compliquées, oui, c'est ça. Mais ça, c'est effectivement
30:27pour porter l'humain en soi,
30:29pour faire ça, effectivement.
30:31Et c'est très intéressant
30:33parce que, alors justement,
30:35vous parlez aussi, parce que vous avez
30:37toutes les entrées, moi j'ai cherché à savoir,
30:39j'ai dit, je vais la piéger car il y a quelque chose
30:41où elle n'a pas, les parents d'élèves.
30:43Comment ça se passe, alors, les parents d'élèves ?
30:45On parle beaucoup de ça, on dit oui.
30:47En deux mots, le cliché,
30:49c'est avant, effectivement,
30:51quand la prof parlait,
30:53les parents se retournaient contre l'élève.
30:55Maintenant, au contraire, ils se retournent contre la prof, etc.
30:57Alors, encore une fois, ça dépend vraiment,
30:59vraiment des établissements.
31:01Il y a des établissements où les parents sont,
31:03restent des alliés.
31:05Il y a des établissements où c'est
31:07beaucoup moins vrai.
31:09Globalement, moi, je les trouve
31:11quand même...
31:13Enfin, ça fait sept ans
31:15que je fais ce métier.
31:17J'ai jamais eu,
31:19si vous voulez, un parent
31:21qui aille vraiment trop loin.
31:23Je sais que j'ai des collègues, en revanche, qui ont eu la malchance
31:25de tomber sur des...
31:27Non, parce que je pense que je suis aussi
31:29quelqu'un d'assez rond, c'est-à-dire que
31:31quand on me rentre dedans, en fait,
31:33je m'en moque un peu.
31:35Donc, je pense que ça désarme.
31:37Non, ça me fait sourire, en fait.
31:39Donc, je pense aussi
31:41que... Mais par contre,
31:43il y a aussi des cas,
31:45j'ai eu des collègues
31:47qui ont été vraiment pris à partie
31:49violemment par des parents,
31:51par exemple, des réunions parents-profs,
31:53avec des insultes qui sortaient de nulle part.
31:55On a des parents de mauvaise foi aussi.
31:57Ça, on en a beaucoup, des parents de mauvaise foi.
31:59Ah ben, mon enfant...
32:01Non, non, mais c'est... En fait...
32:03Non, il n'a pas vraiment giflé, cet enfant.
32:05Vous voyez, dans son geste, il avait
32:07plutôt une caresse. Non,
32:09à un moment, il faut dire les choses telles qu'elles sont,
32:11mais bon, voilà, je n'ai pas eu de cas, si vous voulez,
32:13gravissime, là-dessus.
32:15D'accord. Et donc,
32:17vous dites, vous,
32:19qu'au fond, encore une fois,
32:21vraiment, ça transparaît dans votre livre.
32:23Moi, c'est ça aussi qui est intéressant.
32:25Vous ne donnez pas une image
32:27soit d'apocalypse, soit
32:29non plus d'angélisme
32:31vraiment
32:33généralisé. Non, mais, j'ai presque envie de dire
32:35c'est l'apocalypse joyeuse, si vous voulez.
32:37C'est-à-dire que oui, ça ne va pas.
32:39C'est le bon bordel, quoi. Voilà.
32:41C'est... Voilà. Il y a des choses qui,
32:43en effet, font songer à l'apocalypse, mais comme
32:45à titre individuel,
32:47je ne peux pas faire grand-chose pour tout changer,
32:49vaut mieux essayer de me concentrer
32:51sur ce que, moi, je peux apporter
32:53en tant que personne, et le reste,
32:55oui, je ne vais pas réparer
32:57le chauffage défectueux, je ne vais pas
32:59faire en sorte
33:01que l'Emmanuel arrive. Je ne peux pas faire
33:03tout ça, en fait. Donc, je me concentre
33:05sur ce que je peux, et le reste, j'essaie
33:07d'avoir un regard un peu distancié et un peu ironique
33:09parce que je pense que c'est la seule manière, en fond,
33:11de ne pas partir
33:13sur des, j'ai envie de dire,
33:15des lamentations qui n'en finiraient plus, en fait.
33:17Oui, c'est ça qui est intéressant. Vous ne vous mettez pas dans le
33:19champ de l'affrontement...
33:21Non, et puis je ne me veux pas me sentir
33:23victime non plus, vous voyez ce que je veux dire ?
33:25On peut être victime de certaines choses,
33:27il y a des choses qui sont très très graves,
33:29et que, bien sûr, là, ils seraient légitimes,
33:31mais pour des choses qui sont de l'ordre du
33:33structurel, vous dire, bah oui,
33:35dans un établissement, il va y avoir ça, ça et ça comme problème,
33:37oui, on le sait, c'est le métier,
33:39si vraiment ça devient
33:41ingérable,
33:43il faut se poser les questions.
33:45Qu'est-ce qui m'a... Voilà, alors,
33:47une fois, ce n'est pas le même métier que vous
33:49soyez dans tel ou tel environnement,
33:51là, j'ai retrouvé une forme d'énergie,
33:53parce que je n'ai pas non plus,
33:55si vous voulez, une charge
33:57mentale, d'une
33:59fatigue due à une tension extrême,
34:01je rappelle quand même que dans certains
34:03établissements, on ne tourne pas le dos aux élèves,
34:05même pour écrire au tableau,
34:07on envoie un élève écrire au tableau.
34:09On ne tourne jamais le dos aux élèves.
34:11C'est comme si vous avez...
34:13Alors, ça reste des...
34:15C'est comme si vous avez une classe, parfois, qui a 5 fauves
34:17dedans. Alors, ils ont
34:19une petite tête de lionceau, peut-être, mais
34:21ça reste quand même avec des grosses patounettes et
34:23il ne faut pas leur tourner le dos.
34:25Et des coups de griffe, etc.
34:27Moi, je me suis déjà pris des...
34:29Parfois, juste à côté de moi,
34:31on entend une trousse qui claque contre un tableau
34:33parce que vous avez eu le malheur, au départ, vous êtes bêtes,
34:35vous pensez qu'on a le droit de tourner le dos, non, non,
34:37il ne faut pas tourner le dos. Donc, ce n'est pas la même fatigue.
34:39Moi, quand je revenais,
34:41parce que j'enseignais un moment à Argenteuil,
34:43quand je revenais d'Argenteuil, ma mère m'avait dit
34:45ne m'appelle pas les deux heures
34:47qui suivent la sortie de tes cours.
34:49T'es insecte.
34:51T'es énervé, t'es agressif, parce que comme
34:53on se contient toute la journée, parce qu'on ne peut pas
34:55en tant qu'adulte être agressif envers un élève
34:57qui est agressif envers vous,
34:59du coup, quand on sortait de là,
35:01on avait un trou plein d'énergie, on savait...
35:03Voilà.
35:05C'est très intéressant. On va parler, justement, de cette histoire
35:07d'autorité, y compris vis-à-vis du
35:09rectorat, vis-à-vis des supérieurs.
35:11Voilà. 0826-300-300,
35:13si vous voulez intervenir avec
35:15Ophélie Roch, qui a une vision
35:17très intéressante de ce que c'est
35:19que l'enseignement, et beaucoup plus
35:21nuancée. Vous voyez, ce n'est pas sa danse nuance de gris,
35:23c'est 50 nuances
35:25de tableau noir, peut-être, ou autre.
35:27Antisèche d'une prof pour
35:29survivre à l'éducation nationale,
35:31les presses de la cité, à tout de suite
35:33après une petite pause.
35:35Je peux vous dire que les filles, Ophélie Roch
35:37n'est pas dans tous ses états.
35:39Elle essaie de garder une vision
35:41zen, dans un
35:43paysage qui n'est pas simple. Mais, justement,
35:45Ophélie Roch, on a envie de
35:47vous dire,
35:49et l'autorité,
35:51est-ce qu'il ne faudrait pas, parce que vous
35:53vous dites, justement, il faut, et vous avez
35:55raison, il faut à la fois s'adapter,
35:57il faut à la fois de la diplomatie, il faut à la fois la stratégie,
35:59etc., etc. Ça s'appelle aussi
36:01l'intelligence.
36:03Mais, tout cet
36:05esprit, quand vous entendez, effectivement,
36:07quand vous sortez de là,
36:09vous regardez peut-être de temps en temps la télé,
36:11ou les médias, etc., et vous entendez
36:13cette espèce de
36:15d'apocalypse now
36:17du scolaire, quoi. Vraiment,
36:19encore une fois, de l'extérieur,
36:21je dis bien, on a l'impression que...
36:23Et votre livre est rafraîchissant de ce point de vue
36:25parce qu'il dit, attendez, c'est pas
36:27comme ça, c'est plus complexe que ça,
36:29il ne faut pas... Voilà. Et vraiment,
36:31c'est votre message
36:33général.
36:35Le message général, c'est qu'en effet,
36:37ce problème d'autorité, dire qu'il faut que le prof
36:39soit autoritaire, ça ne veut rien dire de dire ça.
36:41Autoritaire comment ? Par rapport à qui ?
36:43Par rapport à quelle classe ? Par rapport à quel contexte ?
36:45Est-ce qu'il faut toujours être autoritaire ?
36:47Moi, je pense surtout qu'on peut être
36:49autoritaire, alors peut-être
36:51qu'on ne l'est pas tout de suite la première année. Je pense que la
36:53première année, c'est rare de voir un prof
36:55véritablement autoritaire. Parce que soit vous mimez
36:57l'autorité, ce qui est pire,
36:59vaut mieux un prof à la cool, entre guillemets,
37:01mais qui dit, non, non, toi, là, t'es collé, là, t'as fait une bêtise.
37:03Ça, ça marche.
37:05Le prof qui, ah, t'as fait ça, non, ça ne marche
37:07pas. Les enfants, ils ne sont pas idiots. Ils voient bien
37:09que vous avez peur. Ils voient bien
37:11derrière cette posture. Ils vont sentir la peur.
37:13Bien sûr. Ils ne sont pas idiots, les enfants.
37:15Vous savez, moi, les rares fois où je suis arrivé
37:17fâché ou contrarié parce qu'il y a eu
37:19des choses graves, je ne parlais pas,
37:21j'avais la mâchoire crispée.
37:23Les enfants, je peux vous dire, je n'ai jamais
37:25eu besoin de murmurer. C'est-à-dire que quand
37:27vraiment vous êtes en colère parce qu'il y a eu
37:29des vraies choses, vous n'avez même pas besoin
37:31d'hausser le ton, vous haussez le ton,
37:33c'est quand vous n'êtes déjà finalement pas très convaincu
37:35vous-même.
37:37Des enfants qui parlent un peu,
37:39c'est très, très rare
37:41quand même que vous ayez besoin
37:43l'autorité pour moi, c'est
37:45faire preuve d'empathie tout en
37:47faisant comprendre que c'est justement parce qu'on est
37:49empathique et que c'est justement parce qu'il y a des
37:51moments d'empathie, des moments où c'est un peu plus
37:53décontracté, qu'il y a des instants
37:55où on dit, non, là, c'est stop. Et là, je l'ai dit
37:57clairement et je ne le redirai pas. C'est stop.
37:59Maintenant, c'est stop.
38:01Au-delà de cette limite, vos tickets les plus valables.
38:03Voilà, en disant, si vous
38:05voulez avoir face à vous quelqu'un d'humain qui,
38:07de temps en temps, fasse une petite blague,
38:09rebondisse avec vous,
38:11essaye d'interagir avec vous,
38:13en fait, comme vous êtes des enfants, c'est normal,
38:15vous vous dissipez beaucoup, vous êtes un peu après
38:17comme en sous-ébullition, donc je vous laisse
38:19cinq secondes pour reprendre votre calme
38:21et puis après, c'est bon, le cours commence.
38:23Et sinon, si on ne peut pas le faire, et dans certaines
38:25classes, hélas, c'est vrai qu'on ne peut pas le faire
38:27parce qu'après, c'est très compliqué
38:29de les maintenir et c'est là où peut-être
38:31on devient un peu plus rigide
38:33et que peut-être que l'autorité prend des
38:35tournures un peu plus
38:37autoritaristes, c'est-à-dire
38:39oui, en effet, on demande le silence
38:41mais c'est triste, un cours qui ne se fait
38:43que sur l'autorité, moi je trouve ça d'une tristesse
38:45sans nom.
38:47Ce qui est intéressant, justement,
38:49c'est que, et vous voyez,
38:51votre livre rapporte ça, et vous-même,
38:53c'est qu'il ne faut pas se dire
38:55que tout l'enseignement est comme ça
38:57ou est comme ça, je reviens là-dessus parce que
38:59ça entraîne, effectivement,
39:01et ça entraîne pas seulement, c'est au niveau des...
39:03Par exemple, au niveau de la pédagogie, du pédagogisme,
39:05au niveau de l'enfant roi,
39:07au niveau, par exemple, où on leur dit, oui, mais on leur enseigne
39:09plus rien, ni l'histoire,
39:11ni de géographie, là-dessus, juste quelques mots,
39:13vous savez, on l'entend là,
39:15puis l'orthographe, puis ceci, sans parler
39:17de l'écriture inclusive, etc.
39:19Je vais vous dire une anecdote qui m'est arrivée récemment et qui peut-être...
39:21Moi, j'étais là,
39:23quand j'avais des lycéens, en disant, ah là là, vous savez pas faire
39:25un plan, vous avez du mal,
39:27et j'étais convaincue, et je le reste toujours convaincue,
39:29que beaucoup ne savent pas faire un plan, qu'on a du mal
39:31à leur apprendre la méthodologie.
39:33Mais, à un moment, je me suis dit, ah, c'est marrant,
39:35je tombe sur un classeur qui m'appartient
39:37de Terminal.
39:39Et je m'attendais, alors oui,
39:41il y avait des choses qui, en effet, c'était bien écrit,
39:43il n'y avait pas de faute, il y avait de la culture
39:45personnelle, ce que parfois fait défaut à certains,
39:47mais je ne savais pas faire de plan non plus,
39:49enfin, je me suis rendue compte qu'en Terminal, en fait,
39:51pourtant j'étais très bonne élève,
39:53mais en fait, le plan impeccable et parfait
39:55que je leur demandais, en fait, je me suis dit,
39:57vous ne le faisiez pas vous-même.
39:59Mais oui, mais ça, celui-là, je l'appliquais plus tard dans mes études.
40:01Et que parfois, je pense aussi que
40:03ce qui serait intéressant pour vraiment, si on veut,
40:05ça serait de regarder soi-même ses propres cahiers
40:07qu'on a eus, les mettre à côté,
40:09alors oui, il y a des choses où la baisse est réelle,
40:11mais il y a des choses où on était meilleur que dans notre esprit.
40:13Mais juste un mot, il n'y avait pas, quand même,
40:15vous venez recul culture générale,
40:17il existait franchement une orthographe, une culture instille,
40:19ça c'est vrai que
40:21la culture générale
40:23était sans doute un peu plus vaste
40:25et en fait, moi, ce qui me déplaît parfois
40:27avec certains lycéens,
40:29pas avec tous encore une fois, on ne peut pas généraliser,
40:31mais on a l'impression que le collégien,
40:33c'est encore une éponge, il est prêt à s'enthousiasmer
40:35pour tout et n'importe quoi,
40:37alors que le lycéen est déjà plus blasé.
40:39Oui, c'est étonnant, oui.
40:41On a dit ça en début d'émission,
40:43être blasé à cet âge,
40:45ça me paraît étonnant.
40:47Moi, les lycéens, j'en veux plus, en fait,
40:49parce que s'ils sont blasés, qu'on a face à soi 30 personnes
40:51très gentilles,
40:53qui vont moins être bruyants que des collégiens,
40:55mais qui sont blasées, et vous n'en avez qu'un
40:57qui est vaguement intéressé, et encore, il n'y a pas toujours
40:59certains d'être intéressés, mais bon.
41:01Ça, vous voyez, pour moi, c'est vraiment
41:03ce manque de curiosité,
41:05c'est peut-être la chose que je comprends le moins
41:07dans cette génération, et j'essaie de m'intéresser
41:09à ce que même aiment, je dis, ah et alors, c'est quoi ?
41:11Mais la réciproque n'est pas vraiment là.
41:13Et pourtant, j'essaie d'enseigner la littérature
41:15comme si c'était vraiment, ah regarde,
41:17mon passant, il a une vie, c'est comme ça,
41:19c'est un mec, il a fait ça. J'essaie de leur dire
41:21regardez, c'est des gens comme vous, c'est des
41:23écrits de gens morts, mais qui étaient
41:25excessivement vivants.
41:27Et regardez, leurs écrits, ils sont vivants.
41:29Et c'est vrai que ça, j'ai le sentiment
41:31qu'en 7 ans,
41:33j'ai le sentiment que ce qui marchait
41:35avec certains élèves, au tout début de ma carrière,
41:37le fonctionne de moins en moins.
41:39Et alors, peut-être que c'est moi qui,
41:41entre-temps, ne me suis pas mis à la page,
41:43je pense pas.
41:45Le phénomène est quand même assez général.
41:47Mais je pense que c'est vraiment pour le coup,
41:49c'est cliché bateau de lien, mais les vidéos
41:51TikTok où il n'y a que 10 secondes de concentration
41:53et on passe à une autre, ça, ça fait du mal quand même.
41:55Et ça, c'est indéniable.
41:57Écoutez, en tout cas, ce qui ne fait pas du mal,
41:59c'est de lire votre livre. Vraiment.
42:01Ophélie Roch, entissage d'une prof pour
42:03suivre à l'éducation nationale.
42:05Lisez-le, il vous ouvrira.
42:07Merci beaucoup, en tout cas, merci de votre gentillesse.