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Brut.Cannes : Augustin Trapenard a rencontré Julia Ducournau
Brut
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25/03/2025
"Si le cinéma apportait des réponses à quoi que ce soit, ce serait un art mort. L'art en général n'apporte aucune réponse à rien."
La jeune réalisatrice française de "Grave", Julia Ducournau, crée la sensation au Festival de Cannes avec son film "Titane".
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Qu'on aime ou qu'on n'aime pas le film, c'est même pas une question pour moi.
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En fait, ce qui est très important, c'est que le film déclenche quelque chose,
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en fait qu'il soit le début de quelque chose.
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Et ça peut être le début d'une détestation à vie, je veux dire.
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On a tous des films comme ça dont on sait qu'on les haïra à vie.
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Même quand on haït quelque chose, quand on aime, c'est plus évident,
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donc je parle pas de ça, mais quand on a une réaction vraiment épidermique à un film,
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je pense que si, c'est intéressant de se dire, mais pourquoi moi,
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précisément moi, en tant que qui je suis, pas juste en tant que spectateur,
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mais qui je suis, où j'en suis dans ma vie, pourquoi est-ce que ça m'a fait
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me mettre tellement en colère, en fait ?
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Bonjour Julia.
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Bonjour Augustin.
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Je pense que si le cinéma apportait des réponses à quoi que ce soit,
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ce serait un art mort et je pense que l'art en général n'apporte aucune réponse à rien.
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Je pense que peut-être Google peut apporter certaines réponses.
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Mais bon, je suis pas sûre que c'est ça qu'on recherche ici,
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je pense que c'est pas sûr que c'est ça qu'on recherche quand on va au cinéma.
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Je crois que ce qui est important, c'est que ça laisse place à un débat, toujours un débat.
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Et quelle expérience est-ce que c'est, ce débat ?
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Qu'est-ce que ça exige pour le spectateur ?
01:00
Je sais que c'est quelque chose auquel vous réfléchissez tout le temps.
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Je pense que ça exige déjà de se laisser aller à ses sensations premières.
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Les sensations, c'est quelque chose qu'on ne peut pas nier,
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c'est des choses qui s'imposent à nous.
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Et c'est ça que j'aime beaucoup dans la sensation, avec la violence, avec tout ça,
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et puis surtout avec l'absence totale de recul.
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Donc, c'est vraiment réfléchir sur des sensations,
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c'est des choses qui viennent après, qui viennent si le film reste en vous.
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Là, on peut essayer de s'expliquer à soi-même pourquoi on a ressenti ça à ce moment-là précis.
01:30
Et d'ailleurs, cette sensation n'interviendrait peut-être même pas
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si c'était deux heures après, une semaine après, un mois après.
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Donc aussi, l'espèce d'éphémère de la sensation est très intéressant
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et je pense permet justement un questionnement qui soit continuel et toujours fourni,
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puisque de toute façon, les sensations elles-mêmes mutent en permanence.
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Alors, ce qui est intéressant, c'est que vous parlez en tant que cinéaste,
01:50
mais aussi en tant que spectatrice.
01:51
Quelle scène, quelle séquence, quelle image vous a appris pour la première fois
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que le cinéma pouvait faire ça, provoquer ça ?
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OK, je sais.
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C'est cool parce que d'habitude, je ne sais pas répondre du tout à ces questions
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parce que j'ai vraiment une mémoire de poisson rouge
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et dès qu'on me demande un truc, je panique, je me souviens de rien, je me souviens de rien.
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Mais là, je sais exactement.
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C'est dans le film Cria Cuervos de Carlos Saura que j'ai vu à peu près au même âge
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que l'actrice qui joue le rôle principal, qui joue Anna.
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Et en fait, évidemment, il y a ce moment hyper connu
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où elle écoute Jeannette alors que ses sœurs dansent autour d'elle
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et elle écoute avec un casque audio.
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Et en fait, je me rappelle très bien de l'impression de gouffre, de solitude
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que j'ai ressenti devant cette image qui me parlait infiniment.
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Et cette incapacité qu'a le personnage à ce moment-là
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à communiquer avec les êtres qu'elle a le plus proche d'elle, donc ses sœurs.
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Qu'est-ce que ça fait en vous ?
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Ça m'a rendu infiniment triste à l'époque, bien sûr.
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Et puis du coup, mes parents m'ont acheté 45 tours de Jeannette
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que moi-même, j'ai écouté beaucoup avec mon petit casque audio pour à la fois.
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Je pense qu'il y avait une espèce de plongée à l'intérieur
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tout en se coupant de l'extérieur.
03:00
Et je pense que c'est un des moments où j'ai ressenti
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ce que pouvait être peut-être la richesse de l'intériorité
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et d'être seule avec ses sensations.
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Au fond, qu'est-ce qui fait la force d'une image de cinéma ?
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Vous avez fini par le savoir ?
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Non, je pense que j'arrêterais de faire des films si je savais.
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C'est ce que vous recherchez pour autant ?
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Oui, bien sûr.
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Bien sûr, un tournage, c'est vraiment la fabrication en général
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d'un film, c'est un moment de questionnement de soi,
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de remise en question de soi qui est...
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Enfin, je veux dire qu'on n'aurait pas, qu'on n'aurait jamais
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presque dans la vie, la vraie vie, à part peut-être sur le divan
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d'un psychanalyste ou d'une psychanalyste.
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Et quelquefois, il y a un miracle.
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Et parfois, il y a un miracle.
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Et ce miracle, il est beau quand il peut être partagé, surtout,
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parce que moi, j'appelle ça des épiphanies, en fait.
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C'est un truc dont je parle souvent,
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plutôt quand je parle d'écriture en réalité,
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parce que c'est un moment très solitaire, évidemment, qui dure très longtemps.
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Et en fait, avoir une épiphanie quand on est seul à trois heures du mat'
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devant son hardi, c'est à la fois une transe dingue,
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donc qui peut vraiment amener très, très loin dans la réflexion.
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Et en même temps, on peut le partager avec personne
04:00
parce qu'à trois heures du mat',
04:01
on ne va pas appeler les futurs gens de l'équipe.
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Eh, devine quoi, la suite sur Sénard, c'est un truc de fou, je viens d'avouer, etc.
04:06
Tu ne peux pas faire ça.
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Donc, c'est vraiment un truc que tu gardes avec toi.
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Alors que quand tu es sur le plateau,
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là, tu sais, tu sens, tu sens dans la séquence comment il se développe.
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Et tu vois la continuité entre les plans que tu fais les uns après les autres.
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Et tu sens que là, il y a un truc qui touche juste, en fait, qui touche juste.
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Et tu peux aller le dire secrètement, pas à tout le monde.
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Tu ne fais pas mégaphone.
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Eh, les gars, et tout.
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Mais tu sais, moi, je me rappelle, j'étais allée voir Ruben pendant Titan à un moment
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et je lui dis, là, quand même, j'ai l'impression qu'on fait quelque chose
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qui nous dépasse.
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Ruben qui est votre chef, hop.
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Ouais, j'avais vraiment l'impression que la scène était plus grande que nous.
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Et ça, c'était bon. C'était tellement bon.
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Ça implique de la beauté, ça.
04:44
C'est ça, la beauté, l'épiphanie dont vous parlez.
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Je pense que c'est la grâce plutôt, parce que la beauté.
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Moi, je vois la beauté dans la laideur.
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C'est peut être pas le cas de tout le monde.
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Enfin, c'est tellement subjectif.
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Par contre, la grâce, c'est comme la mutation.
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C'est un truc qui tombe dessus. C'est imparable.
04:57
Alors, je pense justement à la façon dont vous filmez les corps
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et surtout dont vous nous les faites regarder.
05:02
Le corps exposé, exhibé, hyper sexualisé, mais aussi le corps contraint,
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bridé, neutralisé, le corps qui se reconstruit, le corps qui sécrète,
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le corps qui produit, le corps qui ressuscite.
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Qu'est ce que c'est, un corps pour vous, Julia ?
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J'ai envie de dire, c'est nous.
05:18
On dit que le corps est l'enveloppe de l'âme.
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Moi, j'ai jamais, jamais, jamais cru à ça.
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Je crois vraiment que pour moi, le corps préexiste à l'âme.
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En réalité, c'est pas l'inverse.
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Et je prends toujours ces exemples d'hermato
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où quand t'as un eczéma, en fait, ton eczéma, il te dit il y a un truc qui va pas.
05:38
Tu sais pas, toi, que t'es stressé, tu te rends pas compte.
05:40
T'as ton truc, tes machins, tout ça, machin.
05:42
Tout à coup, paf, t'as une plaque rouge.
05:43
Il dit bah non, il y a un truc.
05:44
Et c'est comme un warning, tu vois.
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C'est qu'il parle, il raconte quelque chose.
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Exactement, il parle, il nous dit quelque chose, mais quelque chose qui est
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à ce moment là, évidemment, puisque c'est une réaction épidermique
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qui nous rappelle en fait à ce qu'on est vraiment, à savoir
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des êtres mortels, des êtres faillibles, alors que nous, on est dans notre atreiz.
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Tu vois tous les jours être comme ça, contre le temps, contre le temps,
06:07
contre le temps.
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Et là, tout à coup, t'as ton corps qui te dit bah non, en fait, le temps,
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il est là, quoi. Voilà, le corps, c'est le temps.
06:13
C'est ça que je veux dire.
06:13
Et comment ça se filme ?
06:17
Comment ça se filme ?
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Je pense que ça se filme avec beaucoup d'amour.
06:21
Il faut beaucoup d'amour pour fumer les corps dans leur crudité.
06:26
Je pense qu'il faut, il faut avoir.
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Moi, je me dis toujours que c'est un endroit où je peux vraiment convoquer
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une expérience commune
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au-delà de tout, au-delà de tout ce qui nous sépare.
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Je sais qu'à l'endroit du corps, on est tous égaux.
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On se voit tous à poil le soir dans la glace.
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On est tous plus ou moins satisfaits de l'image qu'on en a.
06:45
On sait que quand on nous pique avec une aiguille, ça fait mal.
06:47
On sait tout ça.
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Bon, bref, ça met tout le monde à niveau, en fait.
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Et je pense qu'il faut beaucoup d'amour et je pense aussi beaucoup d'optimisme.
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C'est ce que vous allez chercher chez un acteur, un corps ?
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Oui. D'abord ? D'abord, oui.
07:00
Bien sûr. Pour moi, d'abord, un acteur, une actrice,
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c'est quelqu'un qui sait faire bouger son personnage.
07:06
C'est-à-dire que vous l'imaginez aussi, le corps de l'acteur ?
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Je pense tout de suite.
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Et vous me voyez venir à Vincent Ladon, on ne l'a jamais vu comme ça.
07:11
Oui. Ah bah oui, bien sûr, parce que de toute façon, c'était un
07:15
un parti inhérent de son personnage qui prend des stéroïdes.
07:18
Donc, il fallait évidemment qu'on ait un corps qui rende ça crédible.
07:22
Et puis, Vincent, c'est aussi un acteur qui est corporel,
07:27
qui est plus que corporel, qui est même, je pense, obsédé par ça.
07:30
Et c'est pour ça qu'on se rencontre très bien sur un plateau,
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parce que moi, je ne dirige pas du tout.
07:35
En parlant de la psychologie des personnages, je ne dirige que les corps.
07:38
Et lui, il n'attend que ça, en fait, il est vraiment,
07:39
il ne veut pas du tout entendre parler de ce qu'il se passe
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dans la tête du personnage au moment où il le joue.
07:44
Donc, on se rencontre très, très bien là-dessus. C'est assez magique.
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Ça veut dire que vous attendez un investissement,
07:50
un engagement physique de la part de vos acteurs systématiquement ?
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Oui, bien sûr. Oui, oui, bien sûr.
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Après, c'est vrai que j'invente rien du tout.
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C'est un peu en France, en fait, c'est pas trop notre école,
08:00
mais aux Etats-Unis, ils font que ça.
08:01
L'acteur studio, on sait bien ce que c'est.
08:03
On sait bien que Daniel Day-Lewis, il est allé passer six mois
08:05
dans les montagnes avant de faire le dernier Démoliquant,
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à ne pas se laver, à vivre dans un tipi, tu vois.
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Et moi, c'est un truc sans aller forcément dans ces extrêmes-là,
08:13
quoique je trouve ça extrêmement, extrêmement intéressant comme travail.
08:16
Mais en tout cas, je pense qu'il faut quand même
08:19
au moins éprouver corporellement ce qu'éprouve le personnage dans le film.
08:22
Et vous leur dites quoi à vos acteurs, à vos corps que vous filmez, justement,
08:25
pour les faire exister ?
08:27
Sur le plateau ?
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Ah non, mais sur le plateau, c'est extrêmement...
08:31
C'est vraiment de la chorégraphie et de la musique aussi,
08:34
puisqu'évidemment, pour diriger les lignes,
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il y a peu de lignes qu'il y a, c'est de la musique.
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Et en même temps, il y a aussi la musique des corps
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au sein des plans, qui est vachement importante.
08:43
Le rythme, le rythme de la scène,
08:45
parce que j'ai tellement, tellement de scènes où il n'y a pas de dialogue,
08:47
que pour insuffler du rythme,
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il faut vraiment que les corps soient au rendez-vous, tu vois.
08:50
Mais c'est vraiment ça, c'est de la danse, c'est de la musique.
08:52
Y compris le vôtre ?
08:54
Oh ouais, oui, je bouge énormément derrière mon convo.
08:58
Je passe mon temps à bouger et à vivre ce que les personnages vivent.
09:02
Je dois essayer d'ailleurs souvent de me baïonner
09:05
pour ne pas pousser des cris ou des trucs comme ça pendant des prises.
09:08
Et si on parle d'engagement physique, vous en sortez comment d'un film, Julia ?
09:11
Rincée, totalement rincée, très vivante,
09:14
mais vraiment, vraiment, vraiment sur les rôtules.
09:17
Merci, Julia. Voilà, merci.
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