Avec la conquête de l'Algérie, qui débute en 1830, commence pour la France un siècle d'expansion sans précédent, qui va permettre au pays de se constituer un empire colonial couvrant une partie de l'Afrique et de l'Asie. Une expansion menée au nom du "progrès" et sous couvert de "missions civilisatrice". Mais en réalité, ces conquêtes territoriales ont été le résultat de campagnes militaires particulièrement violentes. Car, là où la France a tenté de planter son drapeau, elle a dû faire face à une résistance acharnée, de l'Algérie à l'Afrique noire, puis de l'Indochine au Maroc.
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00:00:00L'histoire de la colonisation, c'est l'histoire d'un grand bouleversement qui a façonné le monde tel que nous le connaissons.
00:00:12Pendant plusieurs siècles, la France a en effet édifié au-delà des océans un empire colonial de 11 millions de kilomètres carrés.
00:00:22Un empire qui a été conquis par la force et dans le son.
00:00:25Un empire où vivaient des dizaines de millions d'habitants, maintenus dans une situation de soumission et qui pourtant n'ont jamais cessé de se battre pour se libérer du colonisateur.
00:00:41Des peuples que la France s'est finalement avérée incapable d'accompagner vers l'indépendance, quand il en était encore temps.
00:00:50Cette histoire, c'est la nôtre.
00:00:52Elle nous raconte aussi la France d'aujourd'hui, alors que de cette confrontation violente entre des peuples est née une irréversible communauté de destin.
00:01:01C'est la nôtre.
00:01:02C'est la nôtre.
00:01:06!
00:02:09Sur le vieux port de Marseille, l'opérateur Alexandre Promio s'embarque avec sa nouvelle caméra, à destination de ses colonies françaises.
00:02:17Le cinéaste imagine rapporter de son voyage des bobines pleines de rêves exotiques et de grandeur nationale.
00:02:28Mais ce que les images de ce précurseur du cinématographe ne montreront pas, c'est que cette extension territoriale a été, partout, le fruit de conquêtes militaires particulièrement violentes.
00:02:43Car là où la France a tenté de planter son drapeau, elle a dû faire face à une résistance acharnée.
00:02:51Parvenu de l'autre côté de la Méditerranée, Alexandre Promio découvre le port d'Alger, façonné par des années de présence française.
00:03:10Promio capte pour nous l'étonnante place du gouvernement, mélange colonial si typique qu'en se côtoie la tradition religieuse locale et la passion de la République pour les statuts de ses gloires militaires.
00:03:27L'opérateur est fasciné par l'exotisme méditerranéen qui s'offre à lui.
00:03:40Dans l'objectif de Promio, la capitale de l'Algérie semble bien sûr apaisée, car cela fait 60 ans que les français se sont installés ici.
00:03:49Pourtant, cette conquête de l'Algérie a été une véritable guerre, longue et meurtrière.
00:04:04Une conquête qui commence en juin 1830, lorsque la flotte française bombarde Alger à la demande du roi Charles X, sous prétexte de libérer des esclaves chrétiens.
00:04:15En réalité, le roi veut redonner de l'éclat à son règne, et surtout favoriser les armateurs du port de Marseille.
00:04:29Grâce aux peintures d'Horace Vernet, qui a immortalisé cette conquête, nous mesurons la violence d'une campagne dirigée par le maréchal Bugeot.
00:04:39Bugeot, monarchiste exalté, a fait le choix d'une guerre sans merci.
00:04:45Ces troupes ont l'ordre de tout détruire sur leur passage.
00:04:49Pillage, viol, destruction.
00:04:52Le pays est bientôt à feu et à sang.
00:04:58Une politique de la terre brûlée, pour tenter de venir à bout de la résistance féroce, organisée par l'émir Abdelkader,
00:05:06qui a rassemblé plusieurs tribus algériennes.
00:05:08Face à l'acharnement du théologien musulman, Bugeot manque bientôt de troupes,
00:05:14et doit recruter sur place des supplétifs de l'armée française.
00:05:21On choisit alors dans les tribus hostiles à Abdelkader,
00:05:24des cavaliers qui forment le premier régiment de ce pays algérien.
00:05:27Un renfort crucial pour les troupes de Bugeot, qui finissent par prendre le dessus.
00:05:46Premier héros d'une nation algérienne qui n'existe pas encore, mais dont il a fait souffler l'esprit.
00:05:51Ici, Abdelkader est condamné à l'exil en 1847,
00:05:55comme le seront la plupart des chefs de guerre qui vont se dresser contre la France.
00:06:05Il faudra plusieurs dizaines d'années aux soldats français
00:06:08pour finalement conquérir l'ensemble du territoire,
00:06:11d'Auron jusqu'à Constantine.
00:06:13Une conquête sanglante,
00:06:18qui aura fait plusieurs centaines de milliers de victimes du côté algérien.
00:06:29Et voilà la France, qui fait de l'Algérie une colonie de peuplement,
00:06:34se déployant dans les principales villes du pays,
00:06:37comme ici, à Clemsen.
00:06:38Les premiers à s'installer seront les ouvriers parisiens
00:06:44des manufactures nationales mises au chômage
00:06:47et incités à tenter leur chance en Algérie.
00:06:58Puis ce seront les paysans des campagnes françaises,
00:07:00d'Espagne ou d'Italie,
00:07:02qui, pour tenter d'offrir un avenir décent à leurs enfants,
00:07:05répondront à l'appel du gouvernement français.
00:07:08Comme le feront des milliers d'Alsaciens,
00:07:12fuyant l'occupation allemande après 1870.
00:07:18Ces familles ordinaires et travailleuses
00:07:20découvrent ce western saharien
00:07:22avec ses diligences et ses escortes militaires
00:07:25pour s'enfoncer vers l'intérieur des terres.
00:07:31Souvent, à leur arrivée,
00:07:34ces émigrés européens ne possèdent que ce que le gouvernement veut bien leur offrir.
00:07:38C'est ce que raconte ce paysan de Franche-Comté.
00:07:44En arrivant, on nous a donné une maison,
00:07:47mais il n'y avait ni pain, ni eau.
00:07:50Nous avions seulement une couverture,
00:07:53une paillasse vide et un drap pour coucher 12 personnes.
00:07:55Puis, on nous a délivré nos concessions
00:07:59qui ne sont pas aussi régalantes que nous le pensions d'abord.
00:08:06Des terres que les colons vont s'acharner à féconder
00:08:08et qui souvent ont été réquisitionnées par l'administration
00:08:12au détriment des Algériens.
00:08:13Bientôt, des villages entiers sont construits
00:08:20selon les plans fournis par le génie militaire.
00:08:24Un rectangle de 500 mètres de long,
00:08:26percé de sept rues alignées
00:08:27et se coupant à angle droit,
00:08:30dont plusieurs emplacements sont réservés
00:08:32pour l'école, la mairie
00:08:33et l'église catholique.
00:08:35Alors que cette colonisation
00:08:52fait l'unanimité à Paris,
00:08:54quelques voix tentent de s'élever
00:08:55contre cette prétention de vouloir reproduire ici
00:08:58la France en miniature.
00:09:02C'est le cas du journaliste
00:09:04et écrivain Guy de Maupassant
00:09:05qui s'étonne de cette transformation
00:09:08de la ville d'Alger
00:09:09lorsqu'il est envoyé en reportage
00:09:11par le journal Le Gaulois.
00:09:17Dès les premiers pas,
00:09:19on est gênés.
00:09:21C'est nous qui avons l'air de barbares
00:09:22au milieu de ces barbares,
00:09:24mais qui sont chez eux
00:09:25et à qui les siècles ont appris des coutumes
00:09:28dont nous semblons n'avoir pas encore compris le sens.
00:09:34Nos maisons parisiennes,
00:09:37nos mœurs que l'on veut imposer,
00:09:39nos usages,
00:09:40tout cela choque sur ce sol,
00:09:42comme de grossières fautes d'art,
00:09:44de sagesse
00:09:45et de compréhension.
00:09:47Tout ce que nous faisons ici
00:09:49semble un défi à la terre elle-même.
00:09:51Cette étonnante Algérie coloniale
00:10:00que Guy de Maupassant critique en 1880
00:10:02est devenue la fierté de la République.
00:10:09Trois départements,
00:10:11d'Alger, d'Oran et de Constantine,
00:10:14qui sont venus renforcer
00:10:15l'ancien domaine colonial français
00:10:17né au XVIIe siècle.
00:10:21Voilà en effet près de 300 ans
00:10:29que la France est présente dans les Caraïbes,
00:10:31sur les îles de la Guadeloupe
00:10:33et de la Martinique.
00:10:37Des siècles pendant lesquels
00:10:38les Européens ont organisé
00:10:40la traite d'esclaves venus d'Afrique.
00:10:43Des dizaines de milliers d'hommes et de femmes
00:10:46arrachés à leur village
00:10:47parce que vendus par quelques rois africains complices,
00:10:51puis installés de force dans ces îles
00:10:53pour y travailler dans les plantations
00:10:55de canne à sucre ou de cacao.
00:10:59Des esclaves qui vont se rebeller
00:11:01à plusieurs reprises
00:11:02et qui en 1848
00:11:04obtiennent par leur combat
00:11:05non seulement l'abolition de l'esclavage
00:11:07en France,
00:11:09mais aussi la pleine citoyenneté française,
00:11:12donnant naissance dans les Antilles
00:11:13à une société métissée
00:11:15qui revendique de prendre
00:11:17toute sa place dans la République.
00:11:24Les anciennes colonies,
00:11:26c'est aussi la Guyane française,
00:11:28accrochée à l'Amérique du Sud,
00:11:29qui était à l'origine
00:11:30une colonie pénitentiaire
00:11:32avec le bagne de Cayenne.
00:11:36C'est enfin l'île de l'océan Indien,
00:11:39au large des côtes africaines,
00:11:40que l'on appelait Bourbon
00:11:41et qui est devenue l'île de la Réunion.
00:11:54De cet ancien domaine colonial,
00:11:57la France s'apprête à faire un empire.
00:12:02Car une course au territoire
00:12:04vient de s'enclencher
00:12:05avec la Grande-Bretagne.
00:12:11Les deux pays vivent alors
00:12:19une révolution industrielle,
00:12:21du charbon et de l'acier
00:12:22qui leur donnent une puissance financière
00:12:24et militaire sans précédent.
00:12:28Une expansion territoriale
00:12:30leur permettrait de trouver
00:12:32les matières premières,
00:12:34comme les débouchés commerciaux
00:12:35nécessaires à leur industrie
00:12:36en plein développement.
00:12:42L'époque sera donc
00:12:44celle des empires
00:12:44et de l'impérialisme.
00:12:48C'est-à-dire
00:12:48la domination d'un peuple
00:12:50par un autre peuple
00:12:51afin de contrôler
00:12:52les richesses de territoires
00:12:53toujours plus vastes.
00:12:55Et cette domination
00:12:56qui nourrit les imaginaires,
00:12:59ils vont être nombreux
00:13:00parmi les élites françaises
00:13:00à la défendre ardemment.
00:13:07Lorsqu'il devient
00:13:08chef du gouvernement,
00:13:09le républicain de gauche
00:13:10Jules Ferry
00:13:11revendique pleinement
00:13:13cette ambition coloniale.
00:13:15Question de développement économique
00:13:17mais aussi question de puissance
00:13:19qu'il faut retrouver
00:13:20après la défaite
00:13:21contre la Prusse en 1870.
00:13:27Ferry se lance alors
00:13:28dans une politique coloniale
00:13:30d'ampleur.
00:13:30son premier objectif
00:13:34est de contrer
00:13:35les velléités britanniques
00:13:36et italiennes
00:13:37en Afrique du Nord.
00:13:43Sa première cible
00:13:44sera donc la Tunisie.
00:13:47Prétextant la dette
00:13:48contractée par le baie
00:13:49de Tunis
00:13:49auprès de banques françaises
00:13:51et la tension
00:13:52qui règne
00:13:52à la frontière de l'Algérie,
00:13:54le gouvernement décide
00:13:55d'intervenir militairement.
00:14:00plusieurs cuirassés français
00:14:05se dirigent vers le port
00:14:06de Bizerte.
00:14:096000 soldats débarquent
00:14:10et marchent sur Tunis.
00:14:11Le baie de Tunisie
00:14:19dans son palais
00:14:20du Bardot
00:14:21ne peut résister
00:14:22militairement
00:14:23à la France.
00:14:25Il est obligé
00:14:25d'accepter
00:14:26en 1881
00:14:27que son pays
00:14:28devienne
00:14:28un protectorat français.
00:14:32La Tunisie
00:14:33est désormais
00:14:34sous le contrôle étroit
00:14:35d'un résident général
00:14:36nommé par Paris.
00:14:45Pour Jules Ferry,
00:14:47cette expansion française,
00:14:49patriotique
00:14:50et économique
00:14:50se double
00:14:51d'un objectif moral.
00:14:54La colonisation
00:14:56est pour lui
00:14:56une question
00:14:57de civilisation.
00:15:00Comme beaucoup
00:15:01à l'époque,
00:15:02Ferry a la conviction
00:15:03que les Européens
00:15:04ont le devoir
00:15:04de civiliser
00:15:05ces races d'Afrique
00:15:06et d'Orient
00:15:07que l'on considère
00:15:08alors comme inférieures.
00:15:12C'est ce qu'il explique
00:15:13aux députés.
00:15:16Est-ce que quelqu'un
00:15:17peut nier
00:15:17qu'il y a plus de justice,
00:15:19plus d'équité,
00:15:20plus de vertu sociale
00:15:22dans l'Afrique du Nord
00:15:23depuis que la France
00:15:24a fait sa conquête ?
00:15:26À la Chambre des députés,
00:15:32il n'y aura guère
00:15:33que le républicain
00:15:34Georges Clemenceau
00:15:35pour oser contester
00:15:36cette thèse
00:15:37d'une hiérarchie
00:15:38entre les races
00:15:38et répondre à Ferry.
00:15:42Depuis que j'ai vu
00:15:43en 1870
00:15:45des savants allemands
00:15:46démontrer scientifiquement
00:15:47que la France
00:15:48devait être vaincue
00:15:49parce que le français
00:15:50est d'une race
00:15:51inférieure à l'allemand,
00:15:53j'y regarde à deux fois
00:15:54avant de me retourner
00:15:55vers un homme
00:15:55et de le qualifier
00:15:57d'inférieur.
00:15:57Mais la France
00:16:05qui rêve
00:16:06d'avancées technologiques
00:16:07et de modernité
00:16:08en cette fin du 19e siècle
00:16:09n'entendra pas
00:16:10Clemenceau.
00:16:12Et la gauche
00:16:13préfère se rallier
00:16:14à l'idée
00:16:14d'une colonisation
00:16:15civilisatrice
00:16:16fidèle à la philosophie
00:16:18des Lumières.
00:16:18Une colonisation
00:16:24qui au nom du progrès
00:16:25humain
00:16:25ne doit pas connaître
00:16:26de limites.
00:16:28A l'image
00:16:29de ce que défend
00:16:30au même moment
00:16:30Victor Hugo,
00:16:32le grand écrivain
00:16:33qui dans un discours
00:16:33si typique de l'époque
00:16:35apporte avec vigueur
00:16:36son soutien
00:16:37au projet colonial
00:16:38de la France.
00:16:44Dieu offre
00:16:44l'Afrique à l'Europe
00:16:45prenez-la
00:16:47prenez-la
00:16:49non pour le canon
00:16:50mais pour la charrue
00:16:51non pour le sabre
00:16:53mais pour le commerce
00:16:54non pour la bataille
00:16:57mais pour l'industrie
00:16:58non pour la conquête
00:17:00mais pour la fraternité.
00:17:03Allez,
00:17:04faites,
00:17:05faites des routes
00:17:05faites des ports
00:17:07faites des villes
00:17:08croissez,
00:17:09cultivez,
00:17:10colonisez,
00:17:11multipliez.
00:17:17Jules Ferry
00:17:19va dépasser
00:17:20les espérances
00:17:20de Victor Hugo
00:17:21d'autant qu'il ne compte
00:17:23pas perdre un instant
00:17:24car la Grande-Bretagne
00:17:26a déjà pris
00:17:26une longueur d'avance
00:17:27se déployant de l'Inde
00:17:29à l'Afrique du Sud.
00:17:32Si la France
00:17:33ne veut pas être distancée,
00:17:35elle doit lancer
00:17:35des expéditions
00:17:36sur tous les continents
00:17:37et d'abord
00:17:39porter son regard
00:17:40au-delà du Sahara
00:17:41vers l'immense Afrique noire.
00:17:48Ferry envoie
00:17:49un jeune officier
00:17:50Pierre Savornion de Braza
00:17:52à la découverte
00:17:53de la mystérieuse
00:17:54Afrique équatoriale
00:17:55là où aucun Européen
00:17:57ne s'est encore aventuré.
00:18:07L'officier de marine
00:18:19à l'âme d'explorateur
00:18:21veut être un des premiers
00:18:22à atteindre le fleuve Congo
00:18:24au sud de l'Équateur.
00:18:30Depuis le petit comptoir français
00:18:31de Libreville au Gabon,
00:18:33Pierre Savornion de Braza
00:18:34remonte le fleuve au Goué
00:18:36et fonde une nouvelle station
00:18:38qu'il appelle
00:18:39Franceville.
00:18:42Puis,
00:18:43il part à la recherche
00:18:44du mythique fleuve Congo
00:18:45dont on ignore
00:18:46l'emplacement exact.
00:18:50Les derniers kilomètres
00:18:51seront les plus difficiles
00:18:52comme il le racontera.
00:18:56Nous avons laissé
00:18:57notre radeau
00:18:57pour marcher
00:18:58sur un plateau
00:18:59inhabité.
00:19:02Brûlée par le soleil,
00:19:03plusieurs fois égarée,
00:19:05je me croyais perdue.
00:19:06À 11 heures du soir,
00:19:10après une dernière marche forcée,
00:19:13notre vue s'étendit
00:19:13tout à coup
00:19:14sur une immense nappe d'eau
00:19:16dont l'éclat argenté
00:19:18allait se fondre
00:19:18à l'ombre de hautes montagnes.
00:19:22Le Congo,
00:19:24le mystérieux fleuve,
00:19:26coulait majestueusement
00:19:27à nos pieds.
00:19:30C'était là
00:19:30un de ces spectacles
00:19:32qui impose aux voyageurs
00:19:33pour un silence religieux.
00:19:37Dans ce silence,
00:19:38mon cœur de français
00:19:39battait plus fort
00:19:40car je savais
00:19:41qu'ici
00:19:42allait se décider
00:19:43le sort de ma mission.
00:19:44Braza est un idéaliste
00:19:52et pacifiste
00:19:53qui refuse
00:19:54de faire usage
00:19:55de la force.
00:19:56Il séduit le roi
00:19:57des Batekés,
00:19:58Makoko Ier,
00:19:59et lui propose
00:20:00un accord.
00:20:02Le roi,
00:20:02sans forcément mesurer
00:20:03les conséquences
00:20:04de sa signature,
00:20:06accepte le traité
00:20:06qui fait de son territoire
00:20:07le long du fleuve Congo
00:20:09un protectorat français
00:20:10dont la capitale
00:20:12sera Brazzaville.
00:20:20Le succès
00:20:21de la France
00:20:21au Congo
00:20:22crée de fortes tensions
00:20:23entre puissances européennes.
00:20:26Il devient impératif
00:20:28de s'entendre
00:20:28si chacun
00:20:29veut avoir
00:20:30sa part
00:20:30du continent noir.
00:20:31alors à Berlin
00:20:35en 1885,
00:20:37Anglais,
00:20:37Français,
00:20:38Belges et Allemands
00:20:39s'accordent
00:20:40sur les conditions
00:20:41de ce futur
00:20:41dépeçage de l'Afrique.
00:20:47Chacun pourra
00:20:48se lancer
00:20:48à l'assaut
00:20:48de nouveaux territoires
00:20:49à la condition
00:20:50de se mettre
00:20:51d'accord
00:20:51entre Européens
00:20:52sur les frontières
00:20:53départageant
00:20:54les possessions
00:20:54des uns
00:20:54et des autres.
00:21:01Cet accord
00:21:04de Berlin
00:21:04est comme
00:21:05le signal
00:21:05qu'attendait
00:21:06l'armée française
00:21:07pour s'élancer
00:21:07en Afrique
00:21:08sur plusieurs fronts
00:21:09au départ
00:21:10des comptoirs
00:21:11français de Saint-Louis
00:21:12et de Dakar
00:21:13au Sénégal.
00:21:17Des campagnes
00:21:18militaires
00:21:18d'ampleur
00:21:19qui exigent
00:21:19un grand nombre
00:21:20de soldats
00:21:21et donc
00:21:22un recrutement
00:21:22local
00:21:22de forces supplémentaires.
00:21:24Comme elle le fera
00:21:29dans tout l'Empire
00:21:30la France
00:21:31s'appuie ici
00:21:32sur les oppositions
00:21:33tribales
00:21:33ou religieuses
00:21:34pour attirer
00:21:35des volontaires.
00:21:39Grâce à une solde
00:21:40conséquente
00:21:40et à un statut
00:21:41protecteur
00:21:42les tirailleurs
00:21:43sénégalais
00:21:44sont désormais
00:21:45plusieurs milliers.
00:21:49Ces soldats
00:21:50vont devenir
00:21:50l'armée coloniale
00:21:51la plus entraînée
00:21:52et la plus utilisée
00:21:53par la République.
00:21:54pour mener
00:21:54sa conquête
00:21:55du continent.
00:21:58Et cette conquête
00:21:59va être sanglante.
00:22:07Car l'Afrique
00:22:08loin d'être
00:22:09un terrain vierge
00:22:10de civilisation
00:22:11comme on veut
00:22:11se le faire croire
00:22:12à Paris
00:22:12est structurée
00:22:14depuis des siècles
00:22:15par de nombreux royaumes
00:22:16et de grands empires nomades.
00:22:21Le premier adversaire
00:22:22à se lever
00:22:23sur le chemin
00:22:23sur le chemin
00:22:23des Français
00:22:24est le roi
00:22:25Béanzin
00:22:26du Dahomey
00:22:26futur état du Bénin.
00:22:30Béanzin
00:22:30présenté
00:22:31dans la presse
00:22:32parisienne
00:22:32comme un roi-clay
00:22:33sanguinaire
00:22:34et esclavagiste
00:22:35a surtout
00:22:36osé refuser
00:22:37le protectorat
00:22:38qu'on lui proposait.
00:22:38A plusieurs reprises
00:22:42le roi du Dahomey
00:22:43interpelle
00:22:44le président
00:22:44de la République.
00:22:48Dieu
00:22:48a créé
00:22:49le Noir
00:22:49et le Blanc
00:22:50chacun
00:22:51pour habiter
00:22:51la terre
00:22:52qui lui a été
00:22:52désignée.
00:22:54Le Blanc
00:22:54s'occupe
00:22:55de commerce
00:22:55et le Noir
00:22:57accepte
00:22:58de faire le commerce
00:22:58avec le Blanc.
00:23:00Mais les rois
00:23:01du Dahomey
00:23:01n'ont jamais
00:23:02donné leur territoire.
00:23:03ils ne le peuvent pas
00:23:04c'est impossible
00:23:05et jamais
00:23:07nous ne cèderons.
00:23:14De violents combats
00:23:15opposent les français
00:23:16aux Amazones
00:23:17de Béanzin.
00:23:185000 combattantes
00:23:19particulièrement entraînées
00:23:21mais qui seront
00:23:22écrasées
00:23:22par les troupes
00:23:23coloniales.
00:23:28Béanzin
00:23:29comme l'Algérien
00:23:30Abdelkader
00:23:31avant lui
00:23:31sera exilé
00:23:33loin de son Afrique
00:23:33natale
00:23:34sur l'île
00:23:35de la Martinique.
00:23:44L'armée française
00:23:46progresse maintenant
00:23:46au nord du Dahomey
00:23:47mais la résistance
00:23:51va être
00:23:51d'une toute autre
00:23:52ampleur
00:23:52lorsque les officiers
00:23:53coloniaux
00:23:54vont affronter
00:23:54Samori Touré
00:23:55chef guerrier
00:23:56mandingue
00:23:57régnant sur
00:23:58plus de 400 000
00:23:59kilomètres carrés.
00:24:03un vaste empire
00:24:05nomade
00:24:06unifié
00:24:06par l'islam
00:24:07qui s'étendait
00:24:08de la Guinée
00:24:09actuelle
00:24:09à la Côte d'Ivoire
00:24:10et jusqu'au Burkina Faso.
00:24:18Pendant 15 ans
00:24:19Samori Touré
00:24:20va se battre
00:24:21contre les français.
00:24:21Mais malgré
00:24:28ces 30 000 hommes
00:24:28Samori résistera
00:24:30difficilement
00:24:31à la puissance
00:24:31de feu française.
00:24:35Obligé
00:24:36de se replier
00:24:37il est capturé
00:24:38en 1898.
00:24:41On le voit
00:24:42sur cette photographie
00:24:43écouter la sentence
00:24:44qui le condamne
00:24:45à l'exil
00:24:45sur une île du Gabon
00:24:46où les conditions
00:24:48de détention
00:24:49seront telles
00:24:50qu'il mourra
00:24:51rapidement
00:24:51d'une pneumonie.
00:25:03Avec la chute
00:25:04de Béanzin
00:25:05puis de Samori Touré
00:25:06et bientôt
00:25:07celle d'Amadou
00:25:08le Tout-Couleur
00:25:08au Mali
00:25:09s'en est terminé
00:25:11au tournant
00:25:11du XXe siècle
00:25:12des empires africains
00:25:13qui ont résisté
00:25:14tant qu'ils le pouvaient
00:25:15avant finalement
00:25:17d'être tous balayés.
00:25:26En quelques décennies
00:25:28les puissances européennes
00:25:29ont réussi
00:25:30leur mainmise
00:25:30sur le continent africain.
00:25:35L'Allemagne
00:25:36défend ses possessions
00:25:36de Namibie au sud
00:25:37du Rwanda
00:25:39et de la Tanzanie
00:25:40à l'est
00:25:41du Cameroun
00:25:43et du Togo
00:25:44à l'ouest.
00:25:45Le Portugal
00:25:47tente de préserver
00:25:48ses colonies
00:25:49d'Angola
00:25:49et du Mozambique.
00:25:54Les Anglais, eux,
00:25:55rêvent de faire
00:25:56la jonction
00:25:56entre le Caire au nord
00:25:57et le Cap
00:25:58tout au sud
00:25:59grâce à leurs colonies
00:26:00du Kenya
00:26:01et d'Ouganda.
00:26:05Quant aux Français,
00:26:06ils sont enfin
00:26:07parvenus à réunifier
00:26:08autour du lac Tchad
00:26:09toutes leurs possessions
00:26:10africaines
00:26:11depuis l'Algérie
00:26:12au nord,
00:26:13les comptoirs
00:26:14du Sénégal
00:26:14à l'ouest
00:26:15jusqu'à Brasaville
00:26:16en Afrique équatoriale.
00:26:24Le domaine africain
00:26:25de la France
00:26:26est donc devenu
00:26:27particulièrement vaste.
00:26:30Les militaires français
00:26:32ne sont que
00:26:32quelques milliers
00:26:33pour plus de
00:26:3410 millions d'habitants.
00:26:35ils tentent
00:26:38de se déployer
00:26:39sur ce territoire
00:26:39grand comme l'Europe
00:26:40construisant
00:26:42ici et là
00:26:43de petits forts
00:26:43censés marquer
00:26:45la puissance française
00:26:46de Dakar
00:26:47à Cotonou
00:26:48en passant
00:26:49par Bamako
00:26:50à Bidjan
00:26:50au Conakry.
00:27:00Mais souvent
00:27:00livrés à eux-mêmes
00:27:01loin des villes
00:27:02dans de vastes
00:27:03territoires désertiques
00:27:04les officiers
00:27:06de l'infanterie
00:27:07coloniale
00:27:08doivent administrer
00:27:09comme ils le peuvent
00:27:10des tribus entières.
00:27:22C'est le cas
00:27:22du capitaine
00:27:23Émile Coquibus
00:27:24perdu au cœur
00:27:25de la Guinée
00:27:26et qui nous a laissé
00:27:28un fond exceptionnel
00:27:29de photographies
00:27:30prises lors de ses séjours
00:27:31en Afrique noire.
00:27:34Les officiers
00:27:38isolés
00:27:39régulièrement frappés
00:27:40par des fièvres
00:27:41sont souvent troublés
00:27:42par les conditions
00:27:43de leur séjour.
00:27:47Ils ressentent
00:27:48cette angoisse
00:27:48typique de la coloniale
00:27:49et si ces femmes
00:27:51et ces hommes
00:27:52tellement nombreux
00:27:53refusaient leur autorité.
00:27:59Coquibus
00:28:00dans son journal
00:28:01l'exprime
00:28:01à plusieurs reprises
00:28:02ce matin
00:28:06le capitaine
00:28:07m'a fait part
00:28:07de son rêve
00:28:08de la nuit
00:28:08il était si terrible
00:28:11qu'il s'est réveillé
00:28:12en poussant un cri
00:28:13il y avait des tués
00:28:15et des cadavres
00:28:16palpitants.
00:28:19Les Noirs
00:28:20n'osent se défendre
00:28:21ni se plaindre
00:28:22mais à quand
00:28:25leur révolution
00:28:25de 1789
00:28:26pourvu qu'ils ne tournent
00:28:31pas un jour
00:28:31leur colère
00:28:32contre nous.
00:28:32à Paris
00:28:58la belle époque
00:29:00illumine les années 1900
00:29:01et les français s'intéressent
00:29:02bien peu
00:29:03aux conquêtes coloniales
00:29:04de la république
00:29:04on veut croire
00:29:07en la fait
00:29:07électricité
00:29:08à la révolution
00:29:09de l'automobile
00:29:10et du cinématographe
00:29:11de ce vaste empire
00:29:19que la France
00:29:19est en train
00:29:20de façonner
00:29:20les français
00:29:21ne savent rien
00:29:22ou presque
00:29:23le peu
00:29:27qu'ils en connaissent
00:29:28vient de cartes
00:29:29postales exotiques
00:29:30envoyées par ceux
00:29:31qui ont fait le choix
00:29:32de partir aux colonies
00:29:33comme on disait
00:29:34un exotisme
00:29:39qui joue
00:29:40sur la grandeur française
00:29:41et surtout
00:29:42sur l'érotisme
00:29:43supposé
00:29:44des femmes
00:29:44de l'Empire
00:29:45des femmes
00:29:49à la beauté
00:29:49enivrantes
00:29:50forcément soumises
00:29:51un imaginaire
00:29:59de la femme objet
00:30:00à disposition
00:30:01du colonisateur
00:30:02qui sera
00:30:03un puissant levier
00:30:04pour attirer
00:30:04de nouveaux candidats
00:30:05au départ
00:30:06à destination
00:30:08de ce monde
00:30:09pour l'heure
00:30:09essentiellement
00:30:10militaire
00:30:10et masculin
00:30:11un monde colonial
00:30:19qui va en 1905
00:30:20choquer l'opinion publique
00:30:21lorsque des récits
00:30:22sanglants
00:30:23vont parvenir
00:30:23jusqu'à Paris
00:30:24plusieurs polémiques
00:30:32éclatent
00:30:32après l'apparition
00:30:33d'articles
00:30:34dans la presse satirique
00:30:35relatant
00:30:36tel ou tel massacre
00:30:37et à Paris
00:30:40on commence
00:30:41à s'inquiéter
00:30:42de cette prétendue
00:30:42mission civilisatrice
00:30:44qui peut conduire
00:30:45aux pires excès
00:30:45de la part
00:30:46des militaires
00:30:46et des fonctionnaires
00:30:47français
00:30:47le scandale
00:30:52le plus retentissant
00:30:53vient d'Afrique équatoriale
00:30:54quand on découvre
00:30:56que des administrateurs
00:30:57coloniaux
00:30:58en Centrafrique
00:30:59de peur d'une révolte
00:31:00des tribus
00:31:01ont fait exploser
00:31:02un homme
00:31:03à l'aide de dynamite
00:31:04pour simplement
00:31:05faire un exemple
00:31:06cette affaire
00:31:15est celle de trop
00:31:15le gouvernement
00:31:17est sommé
00:31:17de réagir
00:31:18il est impératif
00:31:20d'envoyer
00:31:21une mission
00:31:21d'inspection
00:31:22sur place
00:31:22encore faut-il
00:31:25trouver un homme
00:31:26dont les français
00:31:26ne pourront
00:31:27contester l'intégrité
00:31:28ce sera
00:31:32Pierre Savornian
00:31:33de Braza
00:31:34le héros
00:31:35de l'Afrique équatoriale
00:31:36qui fait depuis
00:31:37plusieurs années
00:31:38le bonheur
00:31:38des publicitaires
00:31:39et qui est tiré
00:31:41de sa retraite
00:31:41par devoir
00:31:42malgré sa notoriété
00:31:52en métropole
00:31:53lorsque Braza
00:31:54arrive à Libreville
00:31:55en 1905
00:31:56pour commencer
00:31:57son inspection
00:31:58l'accueil
00:31:59l'accueil est glacial
00:32:00car le gouvernement
00:32:05qui manque de fonctionnaires
00:32:06pour ses colonies
00:32:07a préféré déléguer sa mission
00:32:09à 40 sociétés privées
00:32:10chargées d'administrer
00:32:12l'Ubangui
00:32:12le Gabon
00:32:13et le Congo
00:32:14en échange du monopole commercial
00:32:16sur les richesses locales
00:32:18bois
00:32:18ivoire
00:32:19caoutchouc
00:32:20ce capitalisme colonial
00:32:25particulièrement vorace
00:32:26préfère s'enrichir
00:32:28au plus vite
00:32:28plutôt que de créer
00:32:29des écoles
00:32:30ou des dispensaires
00:32:31comme ils s'y étaient engagés
00:32:33les sociétés concessionnaires
00:32:38ne souhaitent donc pas du tout
00:32:39que l'on vienne regarder de près
00:32:40leurs agissements
00:32:41Pierre Savornion de Brasa
00:32:50compte pourtant bien
00:32:51mener sa mission
00:32:52à son terme
00:32:52et ce qu'il va découvrir
00:32:55est particulièrement effarant
00:32:57la France a en effet
00:33:01instauré dans l'Empire
00:33:02une règle de plusieurs
00:33:03journées par an
00:33:04de travail obligatoire
00:33:05pour tous ces sujets
00:33:06afin d'avoir de la main d'oeuvre
00:33:09pour construire des routes
00:33:10et des voies de chemin de fer
00:33:12mais les compagnies concessionnaires
00:33:16détournent à leur profit
00:33:17le système
00:33:18obligeant les hommes
00:33:19à travailler dans leurs plantations
00:33:20pire
00:33:24pour que les hommes
00:33:25se soumettent à ce travail forcé
00:33:27elles ont pris la sordide
00:33:28habitude de séquestrer
00:33:29femmes et enfants
00:33:30dans un camp
00:33:31en attendant que leur mari
00:33:33termine leur corvée
00:33:34et leurs conditions
00:33:41de détention sont telles
00:33:42que régulièrement
00:33:44les prisonnières
00:33:44comme les enfants
00:33:45ne survivent pas
00:33:46Brasa comprend vite
00:33:52que les agissements
00:33:53des sociétés
00:33:53sont couverts
00:33:54par l'administration
00:33:55coloniale
00:33:57désespéré
00:33:59il écrit à un ami
00:34:00j'ai trouvé dans l'Ubanguichari
00:34:04une situation impossible
00:34:06c'est la continuation pure et simple
00:34:09de la destruction des populations
00:34:11tourmenté par ce qu'il a découvert
00:34:22Pierre Savornion de Brasa
00:34:24reprend le chemin de la métropole
00:34:25rassemblant ses notes
00:34:27afin de rédiger un rapport
00:34:29qui s'annonce explosif
00:34:30mais les conditions
00:34:34de sa mission
00:34:34qui a duré six mois
00:34:35l'ont affaibli
00:34:36et sur le chemin du retour
00:34:40il ressent de violentes fièvres tropicales
00:34:43le bateau doit s'arrêter d'urgence
00:34:48à Dakar au Sénégal
00:34:49on transporte sa civière
00:34:54jusqu'à l'hôpital de la ville
00:34:55ou à bout de force
00:34:57Pierre Savornion de Brasa
00:34:59s'éteint
00:34:59le 14 septembre 1905
00:35:02il y aura bien finalement
00:35:14un rapport Brasa
00:35:15rédigé par une commission parlementaire
00:35:17à partir des notes
00:35:18de l'explorateur
00:35:19mais le document
00:35:23ne sera pas rendu public
00:35:25et sera envoyé aux archives
00:35:27par le chef du gouvernement
00:35:28Georges Clemenceau
00:35:30qui une fois au pouvoir
00:35:31ne critique plus du tout
00:35:33la grande oeuvre civilisatrice française
00:35:35malgré ses dérives
00:35:37avec la mort de Brasa
00:35:53c'est un idéal humaniste
00:35:55qui semble disparaître
00:35:56tant la société française
00:35:58est en train de se radicaliser
00:36:00vis-à-vis des peuples colonisés
00:36:01et notamment des africains
00:36:03si Jules Ferry défendait sincèrement
00:36:09l'idée que tous les peuples
00:36:10pourraient progresser
00:36:11grâce à la colonisation
00:36:12cette inégalité de civilisation
00:36:15s'est peu à peu transformée
00:36:16en une inégalité raciale
00:36:19théorisée par certains scientifiques
00:36:21qui voudraient démontrer
00:36:22que les blancs
00:36:23sont intrinsèquement supérieurs
00:36:25au noir
00:36:34ainsi va la France
00:36:35en ce début de XXe siècle
00:36:37qui fait un triomphe
00:36:38à Foutit et Chocolat
00:36:39sur la scène du nouveau cirque
00:36:40à Paris
00:36:41comme une allégorie
00:36:43de la société de l'époque
00:36:44Chocolat
00:36:48de son vrai nom
00:36:49Raphaël Padilla
00:36:50et Georges Foutit
00:36:52jouent les rôles
00:36:53devenus classiques au cirque
00:36:54de l'Auguste
00:36:55et du clown blanc
00:36:56la maladresse de l'Auguste
00:37:01face à la rigueur
00:37:02du clown blanc
00:37:03mais cette fois
00:37:07Chocolat et Foutit
00:37:08incarnent une inégalité visible
00:37:10et mise en scène
00:37:11pour le plus grand bonheur
00:37:12du public parisien
00:37:13car les français
00:37:23sont en train de découvrir
00:37:24l'altérité
00:37:25lors d'expositions coloniales
00:37:27qui pour la première fois
00:37:28font venir jusqu'à eux
00:37:29ces peuples inconnus
00:37:30à la couleur de peau
00:37:31différente
00:37:32à Lyon
00:37:35Nantes
00:37:36Toulouse
00:37:36ou Marseille
00:37:37ces expositions
00:37:38connaissent un grand succès
00:37:40Des centaines de figurants
00:37:47sont notamment recrutés au Sénégal
00:37:48pour reconstituer des villages africains
00:37:50traditionnels
00:37:51comme sur ces images
00:37:53tournées au jardin d'acclimatation
00:37:54de Paris
00:37:55des numéros
00:37:58au caractère folklorique
00:37:59dont les figurants
00:38:00sont rémunérés
00:38:01Mais cette mise à distance
00:38:06des africains
00:38:06considérés comme des objets
00:38:08de curiosité
00:38:09insuffle dans la société
00:38:11l'idée d'une hiérarchie
00:38:12entre les hommes
00:38:12Et ces indigènes
00:38:17comme on les appelait alors
00:38:18que l'on exhibe
00:38:19avec leurs coutumes ancestrales
00:38:21deviennent automatiquement
00:38:23aux yeux du public
00:38:23inférieurs aux français
00:38:25et à leur civilisation
00:38:56C'est une véritable mythologie coloniale
00:39:11que le gouvernement va forger
00:39:13peu à peu
00:39:13et diffuser dans la société
00:39:15notamment sur les bancs de l'école
00:39:17Des protèges-cahiers
00:39:24distribués aux enfants
00:39:25racontent les héros
00:39:27et les grandes heures
00:39:28de cette expansion française
00:39:29afin qu'ils s'imprègnent
00:39:31d'une histoire
00:39:31qui doit devenir la leur
00:39:32Des enfants à qui l'on décrit
00:39:40sans leur épargner
00:39:41aucun détail morbide
00:39:42la dernière conquête française
00:39:44celle de l'île de Madagascar
00:39:46qui a fait plus de 20 000 morts
00:39:48parmi les malgaches
00:39:49Une campagne meurtrière
00:39:55dirigée par le général Gallieni
00:39:57que l'on présente aux enfants
00:39:59comme un héros
00:40:00un héros confronté
00:40:02à la reine de Madagascar
00:40:03Rana Valona
00:40:05qui, pour avoir osé
00:40:06soulever son peuple
00:40:07contre la France
00:40:08sera obligé d'abdiquer
00:40:10et de partir en exil
00:40:11laissant en 1897
00:40:15la place libre aux Français
00:40:17sur l'immense île
00:40:19de l'océan Indien
00:40:19Cet empire
00:40:28qui ne cesse de s'agrandir
00:40:29et de déployer
00:40:30sa mission civilisatrice
00:40:31devient ainsi à l'école
00:40:33le meilleur support
00:40:34pour les leçons de géographie
00:40:36En plus de Madagascar
00:40:43devenue une colonie française
00:40:44dirigée depuis Tannanarive
00:40:46l'Empire français
00:40:48compte désormais
00:40:49les îles du Pacifique
00:40:50et de l'Océanie
00:40:51avec Tahiti
00:40:52les îles marquises
00:40:54et l'île pénitentiaire
00:40:56de la Nouvelle Calédonie
00:40:57toutes conquises
00:40:58au XIXe siècle
00:40:59En Afrique
00:41:05le ministère des colonies
00:41:07a créé deux grandes zones
00:41:08administratives
00:41:09l'AOF
00:41:11Afrique occidentale française
00:41:13dirigée depuis Dakar
00:41:15et l'AEF
00:41:17Afrique équatoriale française
00:41:19dont la capitale
00:41:20est Libreville
00:41:20Surtout
00:41:26la France a créé en Asie
00:41:28une fédération d'Indochine
00:41:30qui regroupe ses possessions
00:41:32du Cambodge
00:41:32du Laos
00:41:33du Tonkin
00:41:34d'Annam
00:41:35et de Cochinchine
00:41:36une fédération
00:41:39que l'on surnomme bientôt
00:41:40la perle des colonies françaises
00:41:42Lorsqu'Edgar Imbert
00:41:57s'embarque à Marseille
00:41:59en 1905
00:41:59avec son épouse
00:42:01Marthe
00:42:01ce sont 30 jours
00:42:03de traversée
00:42:04qui attendent
00:42:04le jeune couple
00:42:05pour rejoindre
00:42:06la péninsule
00:42:06indo-chinoise
00:42:07Edgar Imbert
00:42:13passionné de photographie
00:42:14est lieutenant
00:42:15dans l'infanterie coloniale
00:42:17il doit rejoindre
00:42:19son régiment
00:42:20à Hanoi
00:42:21au Tonkin
00:42:22la traversée
00:42:29la traversée
00:42:29est une succession
00:42:30d'étapes exotiques
00:42:31qui éblouissent
00:42:32ceux qui ont la chance
00:42:33de partir
00:42:33et d'abord
00:42:35Port Saïd
00:42:36dans la colonie
00:42:37britannique d'Egypte
00:42:39puis c'est le passage
00:42:42du canal de Suez
00:42:43que le français
00:42:45Ferdinand de Lesseps
00:42:46a fait creuser
00:42:47pour relier la Méditerranée
00:42:48à la mer Rouge
00:42:49afin de pouvoir rejoindre
00:42:51plus rapidement l'Asie
00:42:52puis ce sera
00:42:58Aden en Ethiopie
00:42:59Colombo au Sri Lanka
00:43:02et l'incroyable
00:43:03île de Singapour
00:43:04le Gibraltar
00:43:07de l'extrême-orient
00:43:07comme les britanniques
00:43:09appellent alors
00:43:09leur colonie de Malaisie
00:43:11après plusieurs escales
00:43:15et des semaines
00:43:16de traversée
00:43:17le paquebot arrive enfin
00:43:18en vue de Saïgon
00:43:19capitale de la Cochinchine
00:43:21au sud de l'Indochine
00:43:23française
00:43:23dans la ville
00:43:32édifiée presque entièrement
00:43:33par les français
00:43:34pour concurrencer Singapour
00:43:35Edgar Imbert est fier
00:43:37d'assister au défilé
00:43:38de ses camarades
00:43:39de l'infanterie coloniale
00:43:40une démonstration de force
00:43:49qui rappelle que la conquête
00:43:51de la péninsule
00:43:51a été ici aussi
00:43:53particulièrement violente
00:43:54une conquête en plusieurs vagues
00:44:01en 1859 d'abord
00:44:03au prétexte de défendre
00:44:05des missionnaires catholiques
00:44:06en Cochinchine
00:44:07puis en 1881
00:44:09à l'initiative de Jules Ferry
00:44:11pour lutter contre
00:44:12l'impérialisme chinois
00:44:13au Tonkin
00:44:14cette expédition du Tonkin
00:44:19avait été d'une telle barbarie
00:44:21que les articles
00:44:22dans le Figaro
00:44:23écrits par un jeune officier
00:44:24de marine
00:44:25Pierre Lottie
00:44:26avait alors fait scandale
00:44:27à Paris
00:44:28Pierre Lottie
00:44:31dont les récits d'aventure
00:44:32feront plus tard la gloire
00:44:34avait retranscrit honnêtement
00:44:36ce que ses camarades
00:44:37Matelot
00:44:37avaient ressenti
00:44:38pendant la bataille
00:44:39et le résultat
00:44:42pour le lecteur du Figaro
00:44:43avait été glaçant
00:44:46les derniers anamites
00:44:50dégringolent des murs
00:44:51absolument affolés
00:44:53les français tirent sur eux
00:44:56presque à bout portant
00:44:57et les abattent en masse
00:44:58ceux qui avaient la poitrine crevée
00:45:02criaient d'une manière profonde
00:45:04et horrible
00:45:04en vomissant leur sang
00:45:06dans le sable
00:45:06on tuait presque gaiement
00:45:10déjà grisé par les cris
00:45:12la fumée
00:45:12par la couleur du sang
00:45:14et on se réjouissait
00:45:16de voir tous ces incendies
00:45:18de voir comme tout allait vite
00:45:20et bien
00:45:20comme tout ce pays flambait
00:45:22Marthe et Edgar Imbert
00:45:3425 années plus tard
00:45:35sont éblouis
00:45:36par l'oeuvre coloniale française
00:45:37lorsqu'ils arrivent enfin
00:45:39à Hanoi
00:45:40capitale de l'Indochine
00:45:41le jeune couple
00:45:46se promène dans ces nouveaux quartiers
00:45:48que les français ont imaginés
00:45:49à côté de la vieille ville
00:45:51et où trône désormais
00:45:53une cathédrale flambant neuve
00:45:54non loin de la rue Paul Baer
00:45:56et de l'opéra français
00:45:57construit en miniature
00:45:59sur le modèle de l'opéra Garnier
00:46:01Edgar et Marthe
00:46:07sont heureux
00:46:07dans cette capitale
00:46:08aux airs provinciaux
00:46:09qui voient le jeune couple
00:46:10emménagé dans une belle demeure
00:46:12à la décoration coloniale
00:46:14si typique
00:46:15Marthe est le premier modèle
00:46:19de son mari
00:46:19photographié dans leur intérieur
00:46:21cossu
00:46:22et dans son intimité
00:46:23une vie qui pourrait
00:46:33sembler douce
00:46:33et propice à la rêverie
00:46:34si Edgar
00:46:36l'officier de l'infanterie coloniale
00:46:38n'avait pas rejoint son régiment
00:46:39composé de tirailleurs indochinois
00:46:41recrutés sur place
00:46:42des supplétifs
00:46:46de l'armée française
00:46:47chargés comme partout
00:46:48dans l'empire
00:46:49de maintenir l'ordre
00:46:50et l'ordre
00:46:56c'est la lutte
00:46:57contre ceux que l'on appelle
00:46:57alors
00:46:58les pirates
00:46:59les pirates
00:47:01ce sont tous les adversaires
00:47:03de la présence française
00:47:04que l'on dénomme ainsi
00:47:05afin de discréditer
00:47:06leurs opérations
00:47:07contre la puissance
00:47:09coloniale
00:47:11cette occupation française
00:47:15est notamment contestée
00:47:17par un groupe
00:47:17autour de l'intellectuel
00:47:18Fan Boi Cho
00:47:19qui tente de faire naître
00:47:21un sentiment national
00:47:22vietnamien
00:47:23aidé de la Chine
00:47:27et du Japon
00:47:27il fomente
00:47:29plusieurs complots
00:47:29contre la France
00:47:30dont le plus célèbre
00:47:32se déroule en 1908
00:47:33le projet
00:47:37de ces rebelles
00:47:38était d'empoisonner
00:47:39toute la garnison française
00:47:40de Hanoi
00:47:41avec la complicité
00:47:42de certains
00:47:43tirailleurs indochinois
00:47:44la répression
00:47:47de la France
00:47:48sera d'une sévérité
00:47:49extrême
00:47:49à l'encontre
00:47:50des tirailleurs
00:47:51que l'on voit ici
00:47:52dans la prison de Hanoi
00:47:53porter l'humiliante
00:47:55Kang en bois
00:47:55traditionnel
00:47:56plusieurs d'entre eux
00:48:00seront condamnés
00:48:01à mort
00:48:01et décapités
00:48:02une exécution
00:48:06sordide
00:48:06en public
00:48:07que l'on photographie
00:48:09pour en faire ensuite
00:48:09des cartes hostales
00:48:10qui seront envoyées
00:48:11en métropole
00:48:12bon souvenir
00:48:16d'Indochine
00:48:16et de la rigueur
00:48:18française
00:48:18face à ses ennemis
00:48:21Présente désormais
00:48:35sur tous les continents
00:48:36du globe
00:48:36la France
00:48:38n'en a pourtant
00:48:38pas encore terminé
00:48:39avec son ambition
00:48:40coloniale
00:48:40démesurée
00:48:41à la chambre
00:48:46des députés
00:48:46un parti colonial
00:48:48s'est constitué
00:48:49recrutant au sein
00:48:50de tous les groupes
00:48:50politiques
00:48:51une centaine
00:48:52d'élus favorables
00:48:53par idéologie
00:48:54ou par intérêt
00:48:54aux colonies françaises
00:48:56ce parti colonial
00:49:00dirigé par le député
00:49:01Doran
00:49:02Eugène Etienne
00:49:03est devenu
00:49:04en quelques années
00:49:04incontournable
00:49:05c'est sous son influence
00:49:10qui a été mené
00:49:10l'opération
00:49:11de Madagascar
00:49:12et c'est ce puissant lobby
00:49:14qui s'apprête
00:49:14une nouvelle fois
00:49:15à plonger le pays
00:49:16dans une longue
00:49:17et sanglante guerre impériale
00:49:18car il reste encore
00:49:25un territoire africain
00:49:26à conquérir
00:49:27qui pourrait permettre
00:49:28à la France
00:49:29de contrôler
00:49:29toute l'Afrique du Nord
00:49:31le sultanat du Maroc
00:49:34va donc devenir
00:49:35sa nouvelle cible
00:49:36le jeune sultan
00:49:46moulé Abdelaziz
00:49:47à l'abri
00:49:48des hauts murs
00:49:48de son palais de Fès
00:49:49était pourtant parvenu
00:49:51à préserver l'indépendance
00:49:52de son petit pays
00:49:53poursuivant la politique
00:49:55de ses prédécesseurs
00:49:56qui commerçaient
00:49:58depuis longtemps
00:49:58avec les Européens
00:49:59Allemands, Français, Espagnols
00:50:07et Britanniques
00:50:07étaient les bienvenus
00:50:09dans le port de Tangier
00:50:10et le long de la côte
00:50:11mais dans une tragédie
00:50:16en trois actes
00:50:17dont les acteurs
00:50:18seront les puissances européennes
00:50:20le Maroc va voir
00:50:21son destin lui échapper
00:50:22le premier acte
00:50:29débute en 1904
00:50:30lorsque la France
00:50:31et la Grande-Bretagne
00:50:32décident de solder
00:50:33leurs contentieux coloniaux
00:50:35et de s'allier
00:50:36ce que l'on a appelé
00:50:39l'entente cordiale
00:50:40comporte plusieurs protocoles
00:50:42dont un qui consiste
00:50:43à échanger le droit
00:50:44des Anglais
00:50:45à contrôler l'Egypte
00:50:46contre celui des Français
00:50:47à contrôler le Maroc
00:50:49un accord qui exaspère
00:50:54l'Allemand Guillaume II
00:50:55le Kaiser fait alors
00:50:58une entrée fracassante
00:50:59dans les rues de Tangier
00:51:00en 1905
00:51:01pour soutenir
00:51:02le sultan marocain
00:51:03face aux appétits français
00:51:05la tension est telle
00:51:08que l'on convoque
00:51:09une conférence internationale
00:51:11à Algeziras
00:51:11en 1906
00:51:13mais les Français
00:51:16et leurs alliés
00:51:17parviennent à imposer
00:51:17leur vue aux Allemands
00:51:18les Marocains
00:51:21impuissants
00:51:22sont alors obligés
00:51:23de céder à la France
00:51:24et à l'Espagne
00:51:25le contrôle des villes côtières
00:51:26de Tangier
00:51:27et Casablanca
00:51:28si les deux puissances
00:51:33n'ont pas le droit
00:51:34d'intervenir
00:51:34à l'intérieur du pays
00:51:35elles peuvent désormais
00:51:37déployer leurs troupes
00:51:38le long de la côte
00:51:39comme elles l'exigeaient
00:51:40mais sur le terrain
00:51:47les Marocains
00:51:48ne vont pas se laisser faire
00:51:49lorsqu'en 1907
00:51:57le croiseur français
00:51:58de Galilée
00:51:58débarque 60 hommes
00:51:59dans la ville de Casablanca
00:52:01la réaction
00:52:02des tribus berbères
00:52:03est immédiate
00:52:04plusieurs soldats français
00:52:06sont tués
00:52:07en représailles
00:52:10le commandant du Galilée
00:52:12décide de bombarder
00:52:13Casablanca
00:52:13des milliers de Marocains
00:52:17perdent la vie
00:52:18le pouvoir du sultan
00:52:22Moulet Abdelaziz
00:52:23ne résistera pas
00:52:25à l'onde de choc
00:52:26il doit abdiquer
00:52:28sous la pression
00:52:28de son frère
00:52:29qui lui reproche
00:52:30d'avoir bradé
00:52:31la souveraineté marocaine
00:52:32à la conférence d'Algeziras
00:52:34le nouveau sultan
00:52:37Moulet Abdelafid
00:52:38pense lui
00:52:39pouvoir tenir tête
00:52:40aux français
00:52:41et aux espagnols
00:52:42il n'en sera rien
00:52:46sous la pression
00:52:53du parti colonial
00:52:53qui pousse
00:52:55à l'annexion du Maroc
00:52:56et sous le prétexte
00:52:57toujours le même
00:52:58de troubles
00:52:58à la frontière algérienne
00:52:59la France multiplie
00:53:01les opérations militaires
00:53:03à partir de 1908
00:53:04s'engageant
00:53:05dans une guerre
00:53:06coloniale
00:53:06de plus de 25 années
00:53:08sans doute
00:53:09la moins connue
00:53:09de son histoire
00:53:10ces opérations
00:53:15sont soutenues
00:53:15par une large majorité
00:53:17de députés
00:53:17à l'exception notable
00:53:19des socialistes
00:53:20leur leader
00:53:22Jean Jaurès
00:53:23dénonce
00:53:23à plusieurs reprises
00:53:24à la tribune
00:53:25ces interventions
00:53:26particulièrement violentes
00:53:28Messieurs
00:53:34à mesure que notre intervention
00:53:37au Maroc
00:53:38est plus étendue
00:53:39plus dure
00:53:40et plus brutale
00:53:40je me demande
00:53:43avec une angoisse
00:53:43croissante
00:53:44et sincère
00:53:45de quel droit
00:53:46nous portons la guerre
00:53:47et le feu
00:53:47au cœur même
00:53:48de ce pays
00:53:48au Maroc
00:53:52il y a un peuple
00:53:54effervescent
00:53:54et indépendant
00:53:55qui a plus
00:53:56que nous ne l'imaginons
00:53:57la fierté
00:53:58de sa vieille histoire
00:53:59qui se rappelle
00:54:00qu'il a successivement
00:54:01refoulé de son sol
00:54:02les portugais
00:54:03les espagnols
00:54:04les anglais
00:54:05ce n'est pas un peuple
00:54:08accoutumé
00:54:09à subir en silence
00:54:10une domination tyrannique
00:54:11mais les dénonciations
00:54:16de Jaurès
00:54:17resteront vaines
00:54:17et les soldats français
00:54:20continuent de partir
00:54:21en nombre
00:54:21vers le Maroc
00:54:22alors dans un deuxième acte
00:54:28c'est l'Allemagne
00:54:29qui pousse ses pions
00:54:30le Kaiser Guillaume II
00:54:33comprend que la France
00:54:35ne compte pas respecter
00:54:36l'accord d'Algéziras
00:54:37et qu'un partage du Maroc
00:54:38est devenu inéluctable
00:54:40il envoie au large
00:54:42d'Agadir
00:54:43ses croiseurs
00:54:44le Panthère
00:54:45et le Berlin
00:54:46menaçant d'intervenir
00:54:48militairement
00:54:48un coup d'Agadir
00:54:53qui permet à l'Allemagne
00:54:55d'exiger des compensations
00:54:56en contrepartie
00:54:57de son éventuel accord
00:54:58sur le découpage du pays
00:54:59et lors du troisième acte
00:55:05de ce drame marocain
00:55:06en 1912
00:55:07c'est une nouvelle fois
00:55:09un partage
00:55:10territorial entre Européens
00:55:11qui est finalement décidé
00:55:12la France obtient
00:55:15un protectorat
00:55:16sur le Maroc
00:55:17comme elle le souhaitait
00:55:18en échange
00:55:20elle doit céder
00:55:21à l'Allemagne
00:55:21des terres françaises
00:55:22en Afrique équatoriale
00:55:23afin d'agrandir
00:55:24la colonie allemande
00:55:25du Cameroun
00:55:26l'Italie
00:55:29elle
00:55:30est autorisée
00:55:31à s'installer en Libye
00:55:32quant à l'Espagne
00:55:34elle gardera
00:55:35le contrôle du nord
00:55:36du Maroc
00:55:36autour de Séouta
00:55:37ainsi qu'au sud
00:55:39dans la province
00:55:39du Sahara occidental
00:55:41appelée Rio de Oro
00:55:43comme elle le fait
00:55:49pour toutes ses conquêtes
00:55:49coloniales
00:55:50c'est un militaire
00:55:51que la France choisit
00:55:52pour diriger son nouveau
00:55:54protectorat du Maroc
00:55:55Lorsqu'il parade à cheval
00:56:01dans les rues de Casablanca
00:56:02le général Hubert Lyotet
00:56:04a derrière lui
00:56:05une longue carrière
00:56:06d'officier colonial
00:56:06passée par Madagascar
00:56:09puis par l'Indochine
00:56:10après les campagnes violentes
00:56:14d'un Bugeau
00:56:15ou d'un Gallieni
00:56:16voici venu le temps
00:56:17d'un visionnaire
00:56:18de l'Empire
00:56:18obsédé par la mission
00:56:20civilisatrice
00:56:21de la France
00:56:22mais Lyotet
00:56:26devra remettre
00:56:27à plus tard
00:56:27l'ambitieux plan
00:56:28qu'il a en tête
00:56:29pour le royaume
00:56:30car il doit faire face
00:56:33à un soulèvement
00:56:34généralisé
00:56:34des tribus marocaines
00:56:35qui n'acceptent pas
00:56:36le protectorat français
00:56:38alors
00:56:41pour tenter
00:56:42de circonscrire
00:56:42la rébellion
00:56:43le général fait venir
00:56:44de métropoles
00:56:45et d'Afrique noire
00:56:46des milliers
00:56:47de soldats supplémentaires
00:56:48et l'armée française
00:56:52de s'enfoncer
00:56:53en direction du sud
00:56:54et de s'installer
00:56:55dans des campements
00:56:56à perte de vue
00:56:57ils sont 50 000 soldats
00:57:00dès 1912
00:57:01et ils seront 70 000
00:57:03en 1913
00:57:04Lyotet veut obtenir
00:57:10la reddition
00:57:11des chefs de tribus
00:57:12par tous les moyens
00:57:13mais la France
00:57:16n'aura pas le temps
00:57:17de terminer
00:57:18sa campagne marocaine
00:57:19le général Lyotet
00:57:22doit brutalement
00:57:23interrompre
00:57:23ses opérations
00:57:24à l'été 1914
00:57:25lorsque l'opposition
00:57:27entre l'allemand
00:57:28Guillaume II
00:57:28et le russe
00:57:29Nicolas II
00:57:29entraîne
00:57:30tout le continent européen
00:57:32dans la guerre
00:57:33pour surmonter
00:57:48les preuves
00:57:49qui l'opposent
00:57:49à l'Allemagne
00:57:50la France
00:57:51va devoir mobiliser
00:57:52plus de 6 millions d'hommes
00:57:53mais elle peut désormais
00:57:55compter sur ses colonies
00:57:56conquises depuis 1830
00:57:58plus de 600 000 soldats
00:58:04et 200 000 ouvriers
00:58:05vont ainsi venir
00:58:07d'au-delà les océans
00:58:08sur les plages de la Somme
00:58:15comme sur les routes
00:58:16de Champagne
00:58:17vont déferler
00:58:18l'impressionnante cavalerie
00:58:19des spahis algériens
00:58:20les tirailleurs sénégalais
00:58:24les tirailleurs venus d'Algérie
00:58:28et du Maroc
00:58:29ceux arrivés
00:58:32de l'île de Madagascar
00:58:33ceux venus
00:58:36de la lointaine Indochine
00:58:37comme les soldats
00:58:41Kanak et Papou
00:58:41débarqués
00:58:42des îles
00:58:43de l'océan Pacifique
00:58:44pour la première fois
00:58:48les français
00:58:49mesurent réellement
00:58:49l'importance
00:58:50de leur empire colonial
00:58:51qui va permettre
00:58:52au pays
00:58:53de tenir
00:58:53tout au long
00:58:54des 4 années
00:58:54de cette première
00:58:55guerre mondiale
00:58:56dévastatrice
00:58:56une guerre
00:59:00finalement
00:59:00remportée
00:59:01par la France
00:59:02et ses alliés
00:59:02pendant laquelle
00:59:041 400 000 français
00:59:05perdront la vie
00:59:06dont plusieurs dizaines
00:59:08de milliers
00:59:08de tirailleurs
00:59:09et quand les soldats
00:59:18des colonies
00:59:19défilent sur les Champs-Elysées
00:59:20pour fêter la victoire
00:59:21la France
00:59:23renaissant de ses cendres
00:59:25compte plus que jamais
00:59:26renforcer son empire
00:59:27mais cet empire
00:59:34tout puissant
00:59:34qui s'apprête
00:59:36à vivre son apogée
00:59:37est un colosse
00:59:38aux pieds d'argile
00:59:39et la France
00:59:42si elle souhaite
00:59:43le conserver
00:59:44devra y mener
00:59:45de profondes réformes
00:59:47ce qu'elle va s'avérer
00:59:49incapable de réussir
00:59:51à la France
00:59:54de la France