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Samuel DYENS, avocat spécialiste de la laïcité

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00:00Dans l'info d'ici, à 7h31, cette nouvelle polémique que va devoir trancher aujourd'hui
00:06le tribunal administratif de Nîmes.
00:09La Ligue des droits de l'homme demande au maire Erren de Bocquer de retirer sa crèche
00:13de Noël de retour pour la 11e année de suite dans la cour de l'hôtel de ville.
00:18L'association estime que cette décoration religieuse n'a rien à faire dans un espace
00:23public au nom de la laïcité et de la loi de 1905.
00:27Pour en parler avec nous, Maître Samuel Diens ce matin.
00:30Bonjour Maître.
00:31Bonjour.
00:32Alors vous êtes avocat et maître de conférences à l'université de Nîmes, vous suivez de
00:35près ces questions de déontologie et de laïcité dans l'espace public.
00:39Justement, qu'est-ce qu'elle dit la loi de 1905 sur la présence d'une crèche à
00:44Noël dans une mairie ?
00:45Alors directement, la loi de 1905 ne traite pas de la question des crèches et plus largement
00:50interdit sur tout emplacement ou espace public et bâtiment public d'apposer un signe religieux.
00:56Sauf des cas très particuliers comme les monuments funéraires ou les lieux de sépulture,
01:00ce qui se comprend.
01:01En revanche, c'est le Conseil d'Etat qui en 2016 a été saisi pour la première fois
01:04de ces questions et qui a donc fixé un petit peu la doctrine que les juges administratifs
01:08sur le territoire mettent en oeuvre.
01:10Le Conseil d'Etat a distingué deux situations très rapidement, la première c'est celle
01:14dans laquelle la crèche serait installée dans un bâtiment public, a fortiori lieu
01:19type hôtel de ville ou hôtel de département ou de région, c'est-à-dire le lieu de l'implantation
01:23du service public et par principe cette installation est interdite sauf si elle revêt un caractère
01:29culturel, festif ou artistique.
01:32En revanche, en dehors de l'espace public, du bâtiment public, le Conseil d'Etat estime
01:37que c'est parfaitement possible dans le cadre d'une logique d'animation à l'occasion des
01:42fêtes de Noël mais en dehors des bâtiments publics et sauf si cela revêterait une dimension
01:48prosélite ou de revendication religieuse.
01:52Alors justement, vous parlez du culturel et la mairie de Bocquers se base là-dessus,
01:57c'est une exposition de centons, c'est ce que dit la mairie, une tradition provençale
02:02mais est-ce que c'est suffisant donc au regard du droit ?
02:04Alors, le juge administratif et notamment le juge Nîmois a déjà eu l'occasion de
02:09se prononcer sur le sujet en indiquant que le simple fait d'être à proximité de la
02:13Provence, en Provence effectivement une vraie tradition centonnière, conduit à ne pas
02:18suffire pour qu'il y ait une justification à l'installation, dans un bâtiment public,
02:23hôtel de ville en l'espèce, d'une crèche puisqu'il n'y aurait pas de lien suffisant
02:27avec une réelle tradition ou que ça ne revêterait pas ce caractère culturel ou festif.
02:31Alors, il y a la question de la tradition qui se pose effectivement, à force de la
02:36remettre tous les ans cette crèche, est-ce que ça ne peut pas devenir justement une
02:40tradition inattaquable ?
02:41Alors c'est vrai que ça pourrait apparaître comme une logique, à force de l'installer
02:46je crée une tradition.
02:47La difficulté c'est qu'à plusieurs reprises le juge administratif a dû annuler l'installation
02:50et donc il me semble juridiquement difficile de fonder une tradition sur des actes que
02:55la juridiction administrative a malheureusement décrété comme étant parfaitement illégal.
02:59Il y a un nouveau recours aujourd'hui devant le tribunal administratif de Nîmes, si la
03:04mairie est condamnée une nouvelle fois, quelles peuvent être les sanctions ?
03:07Les sanctions c'est la suspension, aujourd'hui en étant référé, donc c'est une procédure
03:11d'urgence et la suspension de la décision conduit à retirer la crèche.
03:16Aujourd'hui, je ne suis pas certain que la décision soit prise, mais en toute hypothèse
03:21dans les jours qui vont venir, il reviendra à la juridiction de dire si elle suspend
03:25la décision, donc derrière c'est la mise en œuvre du retrait de l'installation de
03:29la crèche.
03:30La Ligue des droits de l'homme demande également 2000 euros d'amende par jour de retard, c'est
03:34le genre de sanctions qui peuvent s'accompagner de cette suspension ?
03:37Juré du commerce est parfaitement envisageable, en général, en référé, il est extrêmement
03:42rare que la juridiction administrative aille sur cette solution-là.
03:46En revanche, comme on a affaire à une récurrence avec cette collectivité et ce dossier-là,
03:53il n'est pas du tout impossible, il n'est pas du tout inenvisageable que l'on puisse,
03:56pour marquer le coup, finalement arriver à ce type de décision.
03:59Donc ça pourrait aller jusque-là si finalement c'est ce qui est décidé par le tribunal
04:05administratif.
04:06Merci beaucoup, Maître Samuel Dien, sans le rappel, vous êtes avocat et maître de
04:10conférences à l'Université de Nîmes.
04:12Merci d'avoir été notre invité ce matin, cette interview sera à retrouver sur votre
04:17application ici.

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