La peur aux trousses - témoignage Sylvia

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27/11/2024

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Sport

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00:00Je suis passée devant et il m'a attrapée quand j'étais dos à lui, en fait.

00:03Donc je n'ai pas eu le temps de...

00:06Et à ce moment-là, j'ai dit que c'était pour ma pomme.

00:09Voilà ce que je me suis dit.

00:10Comme si je le savais, en fait.

00:12Donc le 20 mai 2004, c'est le jour de l'ascension.

00:15C'était l'ascension, donc il faisait très beau, il faisait très chaud.

00:19Il y avait énormément de monde dans ce parc, le parc du Grand Valérien.

00:24Donc on s'y est rendu pour courir avec ma mère et son ami de l'époque.

00:29Et on court tous les trois ensemble, on commence à courir.

00:32Et puis moi, très vite, j'ai eu un point de côté.

00:35À un moment donné, ils m'ont dit, tu ralentis, OK, pas de souci.

00:39Nous, on te rejoint un peu plus haut.

00:41Sauf qu'à ce moment-là, je me suis rendue compte qu'en ralentissant mon pas,

00:46je vois une personne accoudée, un homme accoudé à la rambarde.

00:51Je me disais, c'est bizarre, qu'est-ce qu'il fait là, celui-là ?

00:54Je me suis quand même posé des questions assez rapidement.

00:56Puis je trouvais qu'il me regardait bizarrement, donc je me suis dit, c'est pas normal.

01:00Donc j'ai ralenti tellement mon pas, je me suis presque arrêtée.

01:04Et là, j'ai réfléchi 30 secondes et je me suis dit, mais non,

01:07t'es dans un parc public, il y a du monde, il y a les enfants là, tu les entends.

01:10Qu'est-ce qui va t'arriver ? Il va te faire une réflexion, puis quoi ?

01:13Et à ce moment-là, je me suis rendue compte qu'il n'y avait personne devant moi, personne derrière moi.

01:16Je suis passée devant lui, mais quand même vraiment en me disant,

01:21c'est avec cette espèce d'instinct qui me disait, attention.

01:25Je suis passée devant et il m'a attrapée quand j'étais dos à lui, en fait.

01:28Donc j'ai pas eu le temps de...

01:32Et à ce moment-là, j'ai dit, c'était pour ma paume, voilà ce que je me suis dit.

01:36Comme si je le savais, en fait.

01:37De toute façon, j'ai pas eu le temps de réfléchir puisqu'il m'a attrapée, étranglée.

01:40Puis j'ai crié une première fois, il m'a étranglée plus fort.

01:44La deuxième fois, j'ai pas pu crier.

01:45Et la troisième fois, il m'a dit, si tu cries, je te tue.

01:47Donc j'ai dit, OK, ça sert à rien, c'est pas la peine, il fait 1m90, 130 kg, je vais arrêter là.

01:53Donc j'ai pas lutté et il m'a balancée dans le ravin et il s'est servi de moi en tant que bouclier.

01:57J'ai dû me cogner, je sais pas, enfin j'en sais rien, après je sais plus comment je suis arrivée en bas.

02:01Je sais juste que c'était comme dans un film, qu'à un moment donné, j'ai voulu remonter

02:05et qu'il m'a tirée par les pieds.

02:07Et ça, c'était une image de film.

02:09Et c'est là où je me suis dit, bon, OK, c'est fini pour moi, quoi, voilà.

02:13Il a tout de suite pris mon téléphone, il a tout écrasé.

02:16Ma mère m'appelait.

02:17Et après, je l'avais entendue aussi en haut, elle m'a appelée.

02:20Et je l'ai entendue, mais comme c'est très profond.

02:23Et j'avais envie de dire, mais je suis là, je suis là.

02:27Et elle est passée au-dessus, quoi.

02:29J'entendais Sylvia, Sylvia, j'entendais.

02:32Et je pouvais pas répondre, quoi.

02:35Ça, par contre, c'était horrible.

02:39Ça, c'était horrible parce que j'avais envie de crier, je suis là,

02:41mais j'aurais crié, je suis là, il m'aurait tué, je le savais, de toute façon, je le savais.

02:44J'avais pu mes chaussures, il m'avait enlevé mes chaussures pour pas m'échapper.

02:47Il avait installé tous ses tournevis-couteaux devant moi

02:50pour me dire, si tu cries, si tu pousses seulement un cri, je te tue.

02:54C'était comme ça, je pouvais pas remonter, c'était pas possible.

02:58J'imaginais, en fait, la douleur que j'allais ressentir quand il allait me tuer.

03:01Comme il avait tout prévu, le couteau, le tournevis et tout,

03:05et que je savais que c'était pas un simple viol,

03:08je me suis dit, comment je vais mourir ?

03:11L'agression sexuelle, c'était vraiment secondaire.

03:13Je pensais vraiment plus à ma vie.

03:16J'ai fait abstraction de ça pour me focaliser sur ma survie.

03:21Comme je pouvais pas utiliser la force, j'ai dit, bon, d'accord,

03:24donc on va faire autre chose.

03:27On va essayer de faire autrement.

03:31Pour moi, il fallait que je trouve une idée pour que je puisse garder du temps

03:35pour qu'on puisse me retrouver.

03:37Je me suis dit, si je parle avec lui,

03:39si je fais quelque chose d'autre, qu'il a peut-être pas l'habitude, je sais pas,

03:43peut-être qu'il va se dire, mais pourquoi elle me parle, celle-là ?

03:47Peut-être que pendant ce temps-là, les gens qui étaient avec moi

03:51pourraient me chercher.

03:53Je me souviens de lui avoir parlé des arbres, à un moment donné,

03:56comme quoi il avait des beaux yeux,

03:58comme quoi je lui ai dit, mais vous avez des beaux yeux,

04:01pourquoi vous m'offrez pas un café, tout naturellement ?

04:04Et c'est parti comme ça.

04:06Et je me suis dit, ça marche, ça marche, ça marche, vas-y !

04:09Parce qu'il me répondait et je voyais bien que ça le déconcentrait.

04:13Et donc je suis allée à fond dans cette dynamique-là

04:17et ça m'a sauvée, au final.

04:20Il m'a dit, si tu veux, je peux t'emmener en Normandie.

04:23Et moi, bah oui, quelle bonne idée, puisque j'ai personne, pourquoi pas ?

04:27Mais voilà, c'est un super plan, la Normandie, j'adore, en plus, et tout.

04:31Viens, on remonte, on y va, on va dans ta voiture, on y va.

04:34Laisse-moi juste aller aux toilettes avant et on y va.

04:37Et donc il est remonté vraiment comme ça.

04:40Et c'est là, une fois en haut, je me suis dit, ça y est,

04:43il y a quand même une partie de gagné.

04:45Et là, j'ai croisé beaucoup de gens.

04:47Forcément, ils ont vu d'où l'étage était.

04:51Ils n'ont pas bougé.

04:53Moi, il m'a serré très, très fort avec le couteau, ici,

04:57pour être sûre que je m'échappe pas.

04:59Je me suis dit, bon, il y a bien un moment donné

05:01où je vais arriver à faire très rapide.

05:03Et à m'échapper, il y a bien un moment donné

05:05où je vais trouver le moment. Il faut que je trouve le moment.

05:08Je me suis dit, déjà, quand je vais aller aux toilettes,

05:10ça peut être un moment.

05:12Et effectivement, il m'amène vers les toilettes.

05:14Et c'est là où je croise ma mère, née à nez.

05:18Née à nez avec ma mère et des policiers en civil.

05:23Et c'est à ce moment-là, lui, il a repéré qu'il y avait

05:26deux autres hommes, je pense.

05:28Et là, j'ai senti un espèce de relâchement.

05:33Et c'est à ce moment-là, j'ai couru vers ma mère.

05:35Je l'ai poussée pour qu'il ne s'en prenne pas à elle.

05:39Je l'ai poussée et j'ai couru dans la cabane des gardiens.

05:43Et lui, il est reparti.

05:45Ils l'ont rattrapé juste...

05:49Il mettait la clé dans sa serrure.

05:52Ils l'ont rattrapé vraiment de justesse.

05:54Il mettait la clé.

05:56Entre 2004 et 2009, oui, c'est qu'une reconstruction

06:01physique, mentale, tout, quoi.

06:04C'est-à-dire, je suis née avec un caractère, avec ci, avec ça.

06:08Et hop, après, je suis devenue quelqu'un d'autre.

06:11Une autre personne.

06:13Et il a fallu que je me retrouve.

06:15Et ça a été long.

06:16On avait posé la question s'il était amené à sortir.

06:23Et là, j'ai répondu.

06:25Surtout, ne le lâchez pas d'une semaine, il va recommencer.

06:28Il va tuer.

06:30Cette fois-ci, il va tuer.

06:31Cette fois-ci, il va y arriver.

06:33Il va tuer.

06:34Et je l'ai dit, mais à tout le monde.

06:36Aux avocats, aux juges, enfin, à tout le monde.

06:39J'ai dit, bah là, le début du cauchemar, quoi.

06:42Un jour, je reçois un coup de fil.

06:44On me dit que un tel a recommencé.

06:48Là, donc déjà, mon sang s'est glacé.

06:50Et après, on me dit, il a tué.

06:52Et là, je pleurais.

06:54Toutes les larmes de mon corps.

06:55Pourquoi on m'a pas écoutée, quoi ?

06:58Pourquoi on l'a laissé sortir au bout de quatre ans alors qu'il avait dix ans ?

07:01Il aurait fait ces dix ans, déjà, Natacha aurait été sauvée, quoi.

07:04Voilà.

07:05Non, je ne peux pas.

07:06Non, non, je ne peux plus courir.

07:07C'est fini, ça.

07:08Non, même avec une amie, même avec qui que ce soit,

07:11même entourée de mille personnes.

07:13Non.

07:14Après, les autres, je ne peux pas non plus.

07:18Voilà, je ne peux pas dire, attention, attention, attention.

07:21Pour moi, il ne faut pas courir seule.

07:23Mais bon, voilà, c'est plus prudent.

07:25Il y a beaucoup de femmes qui se font agresser régulièrement, partout.

07:31Après, que ce soit pendant le sport ou ailleurs,

07:34malheureusement, les femmes se font quand même assez mal respectées.

07:40Ça pourrait venir de l'éducation, du fait que la société a changé,

07:46qu'on n'élève pas les enfants de la même façon.

07:48Moi, ce que je voudrais apprendre à mon fils quand il va grandir,

07:52mais déjà, même maintenant, un non, si quelqu'un dit non, c'est non.

07:57Ce n'est pas dire j'y vais quand même.

07:58Ça veut dire non, en fait.

07:59Donc, il faut s'arrêter là.

08:01Déjà, ça peut commencer par là.

08:03Après, on verra.

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