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Thiebault Huber, président de la Confédération des Appellations et des Vignerons de Bourgogne
ici Bourgogne
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12/11/2024
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News
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00:00
Ici Matin, Actu locale, musique et bonne humeur sur France Bleu Bourgogne.
00:06
Est-ce qu'il est encore possible de transmettre son domaine viticole à ses enfants ?
00:11
Les droits de succession sont de plus en plus élevés pour nos viticulteurs
00:14
et c'est parfois même impossible à régler.
00:16
Une modification de la loi pourrait bien changer les choses.
00:18
Elle est en train d'ailleurs d'être discutée à l'Assemblée Nationale.
00:21
Alors les vins de Bourgogne peuvent-ils rester une affaire familiale ?
00:24
Olivier Estrand se pose la question ce matin avec notre invité.
00:27
C'est Thiebaud Hubert, viticulteur dans le secteur de Morceau
00:30
et président de la Confédération des Appellations et des Vignerons de Bourgogne.
00:34
Bonjour Thiebaud Hubert.
00:35
Bonjour.
00:36
Les vins de Bourgogne sont bons, les vins de Bourgogne sont chers,
00:38
ce n'est pas nouveau, est-ce que ça devient vraiment un problème ?
00:42
Alors non, qu'ils soient bons, ça ne va sûrement pas,
00:45
ça fait quelques siècles qu'on le fait donc ça va continuer.
00:48
Qu'ils soient chers, ça c'est malheureusement l'adaptation au changement climatique
00:51
et à l'inflation effectivement, et la rareté fait que ce soit cher.
00:56
Après, ce qui nous inquiète le plus, c'est les valeurs de terre qui sont exponentielles,
01:01
des gens spéculent sur nos terres, on a du mal à transmettre ça.
01:04
Est-ce que beaucoup de familles vous disent c'est fini, on ne pourra pas transmettre ?
01:08
On en a de plus en plus malheureusement, et c'est pour ça qu'aujourd'hui on pousse cet article 19
01:12
dans le projet de loi de finances qui est en plein débat aujourd'hui à l'Assemblée nationale et au Sénat.
01:18
C'est un tout petit article qui peut changer la vie de la succession et de la transmission familiale en Bourgogne.
01:24
On va expliquer un petit peu les rouages, sans être trop technique,
01:27
de cet amendement qui pourrait tout changer, mais pour revenir sur le fond du problème,
01:30
ça veut dire qu'aujourd'hui la vigne est considérée comme un bien de luxe ?
01:33
Tout à fait, et elle est considérée comme dans sa valeur patrimoniale
01:37
et non pas comme une valeur d'entreprise.
01:39
Aujourd'hui vous avez une entreprise, vous la transmettez à vos enfants,
01:44
vous allez être imposé sur une baisse de 25%.
01:47
Vous avez une terre agricole, vous n'avez pas ce dispositif, donc vous payez sur 100% de la valeur.
01:51
Et on se retrouve à payer 35% si c'est de ses parents,
01:54
ou 60% ou 65% si c'est une tante ou un oncle qui vous transmet sa vigne
01:59
juste pour que vous puissiez continuer à l'exploiter.
02:02
Et là ça devient des sommes inaccessibles pour nos petits domaines.
02:08
On va peut-être donner une idée du prix moyen.
02:10
Tout à l'heure dans le reportage de Thomas Nogayon,
02:13
on entendait un interlocuteur nous dire que ça pouvait monter jusqu'à 70 millions,
02:16
90 millions d'euros l'hectare.
02:19
C'est exceptionnel ou ça devient une norme ?
02:21
C'est malheureusement de moins en moins exceptionnel.
02:25
Et on a de plus en plus d'appellations prestigieuses.
02:28
Tout est planté, il n'y a pas de possibilité d'expansion de notre vignoble.
02:31
Donc forcément la pression foncière fait que ça monte,
02:34
on devient des produits de luxe, vous l'avez dit.
02:37
Donc ça intéresse des gens qui sont dans le luxe,
02:40
qui ont les moyens et qui investissent
02:43
et qui sont capables de mettre des prix complètement décorrélés d'une exploitation familiale.
02:47
Et donc nous on n'est plus capables les vignons d'acheter nos terres.
02:50
Et ça c'est un gros problème.
02:52
On continue d'en parler dans un instant, bien sûr avec vous Thiebo Hubert
02:55
et avec vous aussi en direct sur France Bleu et France 3.
02:58
France Bleu à vos côtés c'est ici matin.
03:00
Ici matin sur France Bleu Bourgogne.
03:03
Les droits de succession dans l'actualité aujourd'hui,
03:06
on en parle avec Thiebo Hubert, viticulteur dans le secteur de Morceau
03:09
et président de la Confédération des Appellations et des Vignerons de Bourgogne.
03:12
Thiebo Hubert, il y a donc un amendement qui est en train d'être discuté,
03:15
qui va sans doute être voté, qui pourrait changer les choses.
03:18
Expliquez-nous en deux mots quelle donne ça va changer en fait pour vous ?
03:22
C'est tout simplement un outil fiscal qui va permettre d'alléger énormément la taxe
03:28
quand un parent, une tante, un oncle veut transmettre à l'exploitant
03:34
qui aujourd'hui est en charge des vignes.
03:36
On ne l'a pas aujourd'hui.
03:37
Aujourd'hui on est taxé à 100% de la valeur du bien.
03:39
Et comme il y a eu de la spéculation foncière, les biens ont énormément augmenté
03:43
et donc on se retrouve à devoir payer des millions ou des centaines de milliers d'euros
03:46
et les familles sont souvent obligées de vendre ou arrêtent.
03:49
Parce qu'ils ne peuvent pas faire face à ça.
03:50
Cet article permettrait juste de limiter la base de taxation
03:54
et donc du coup de payer nettement moins de taxes
03:56
et du coup de pouvoir conserver ces biens dans la famille.
03:59
La seule contrepartie c'est de continuer à exploiter ces biens pendant 15 ans.
04:03
Ce qu'on fait, nous on est là pour pouvoir durer.
04:05
Ça fait des siècles qu'on a des modèles d'exploitation familial en Bourgogne.
04:08
Il faut absolument qu'on préserve ce jouet.
04:10
Ça fonctionne.
04:11
Regardez, on est réputé dans le monde entier.
04:14
On est un modèle dans notre organisation d'exploitation familiale dans le monde entier.
04:19
Et on ne veut qu'à ces jouets aujourd'hui.
04:21
Pourquoi est-ce qu'à tout prix la Bourgogne devrait rester une affaire familiale ?
04:24
Parce que finalement le vin sait très bien en faire.
04:26
Des grands groupes pourraient en faire du bon vin.
04:28
C'est mieux.
04:30
On embauche 50 000 personnes en Bourgogne.
04:32
On fait 2,5 milliards de chiffre d'affaires à travers le monde entier.
04:35
Une concentration.
04:38
Ça va se retrouver dans les mains de quelques gros groupes internationaux.
04:43
Ce sera des emplois en moins.
04:45
Ce sera peut-être façonner le paysage différemment.
04:49
Ce ne sera peut-être pas mettre en avant autant nos climats.
04:52
Ils feront des vins de qualité.
04:53
De toute façon, ça c'est la base.
04:55
Les climats sont là et le savoir-faire est là.
04:57
Mais ça restera dans les mains de petits groupes.
05:00
On a malheureusement des exemples en France sur des vignobles prestigieux
05:04
qui aujourd'hui sont en train d'arracher de la vigne.
05:06
Parce qu'ils ne s'en sortent pas et ce modèle ne marche pas.
05:09
Alors qu'il y en a un qui marche depuis des siècles.
05:11
C'est des exploitations familiales.
05:13
C'est 7,5 hectares.
05:14
Une exploitation en Bourgogne.
05:15
Donc il faut absolument qu'on conserve ça.
05:17
Et ça fonctionne.
05:18
Et fiscalement, ça rentre assez d'argent, je pense.
05:20
Thiebaud Hubert, président de la CAVB.
05:21
Est-ce qu'aujourd'hui, les grands groupes sont déjà à l'affût ?
05:23
Est-ce que certains de vos collègues, vous-même, vous faites démarcher parfois
05:26
par des gens qui vous disent
05:27
« Allez, pour la transmission, moi, j'ai une solution clé en main. »
05:30
Alors nous, on porte forcément cet amendement.
05:32
Ça fait plusieurs années qu'on essaie de l'introduire dans le projet de loi de finances.
05:36
On a bon espoir cette année puisqu'il a déjà été adopté deux fois.
05:39
Bon, est-ce que le 49.3 sera actionné ? On verra bien.
05:42
Mais pour l'instant, on porte cet amendement.
05:44
Aujourd'hui, la cible, ce n'est pas ces grands groupes.
05:46
Malheureusement, eux, ça fait leur jeu.
05:47
Puisque c'est eux qui ont la capacité financière
05:50
de venir lever et acheter à des prix fous ces terres.
05:55
Donc ce n'est pas forcément eux la cible.
05:57
Mais quand même, aujourd'hui, on aimerait bien
05:59
qu'on soit, nous, petits exploitants,
06:02
qu'on détienne cet amendement
06:04
et qu'on ait la possibilité de garder nos terres.
06:06
Pourquoi est-ce que les députés et les sénateurs ne vous suivraient pas ?
06:08
Pourquoi est-ce qu'ils ne voteraient pas finalement cette modification de la loi ?
06:12
Parce que pendant longtemps, on nous a dit que c'était un problème de riches.
06:16
Ce qui est vrai.
06:17
Et aujourd'hui, vous le considérez comme riche ?
06:20
Aujourd'hui, on a quand même réussi à leur faire entendre
06:22
que ce problème de riches, en fait,
06:24
s'ils ne nous donnaient pas cet amendement,
06:25
ça faisait le jeu des grands groupes.
06:27
Et donc qui, eux, sont fiscalisés différemment que nous
06:30
et qui font de l'optimisation fiscale,
06:32
qui font de l'optimisation sociale, etc.
06:35
Donc là, aujourd'hui, je pense qu'on a réussi à semer cette graine
06:38
en disant, attention, là, on sauve des petites exploitations
06:41
qui embauchent, qui investissent,
06:43
qui façonnent le territoire,
06:45
qui font rayonner la France dans le monde entier.
06:48
Et ça, c'est assez nouveau
06:50
et je pense que c'est pour ça qu'on a un peu d'espoir que ça passe.
06:52
La réponse des parlementaires, ce sera à quelle date ?
06:56
Alors ça, je n'ai pas la boule de cristal.
06:58
Pour l'instant, ça avance.
07:00
Ça a passé jeudi, ça a été adopté en commission,
07:02
ça a été adopté à l'Assemblée nationale samedi soir.
07:05
Est-ce que le 49.3 sera activé ?
07:07
Après, notre jeu, ce sera que, malgré le 49.3,
07:11
cet amendement soit toujours inscrit.
07:13
On va croiser les doigts.
07:14
Thiebaud Hubert, une question pour terminer.
07:16
Cet après-midi, il y a une vente aux enchères un petit peu insolite.
07:18
Des panneaux d'appellation Grand Cru de Bourgogne
07:21
mis aux enchères.
07:22
600 panneaux vendus par le BIVB,
07:24
confrères du bureau interpersonnel des vins de Bourgogne.
07:27
Est-ce qu'il y en a un qui vous fait de l'œil ?
07:28
Ah bien sûr !
07:29
Je ne vais pas vous dire lequel, sinon les enchères vont monter.
07:32
Mais oui, bien sûr, il y en a quelques-uns qui me font de l'œil,
07:35
notamment mon village natal.
07:37
Merci à vous Thiebaud Hubert.
07:39
On a une belle indication par rapport à tout ça.
07:41
Bien sûr, on suivra cette histoire d'amendement
07:44
qui doit être votée par les parlementaires
07:46
et qui pourrait simplifier la transmission
07:48
pour les vignerons ici en Bourgogne.
07:50
On le souhaite. Merci à vous.
07:51
Interview à retrouver sur francebleu.fr.
07:53
Bonne journée.
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