Maxime s’est rendu dans l’hôtel le plus isolé de France. Pour neo, il nous raconte cette étrange expérience...

neo

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00:00J'ai passé une nuit dans cette résidence fantomatique.

00:09T'as jamais peur ici ?

00:11Euh, si.

00:15Il y a quelque chose d'infini qui se répète.

00:19En fait, il est ou plein ou vide et nous on occupe les vides.

00:22Mais je pense qu'on vient, on cherche ça, on cherche un peu cet isolement.

00:30C'est un peu de démons en fait.

00:32T'as les matériaux qui se répètent, t'as les portes qui se répètent.

00:34Il y a quelque chose un peu de vertigineux,

00:37enfin où tu te perds très vite.

00:41Bonjour Néo, on t'emmène passer une nuit aux Glovettes.

00:44Les Glovettes, c'est cet immense bâtiment niché à plus de 1200 mètres d'altitude

00:48et qui peut accueillir jusqu'à 5000 personnes lors de la haute saison.

00:51Mais les trois quarts de l'année, le bâtiment est complètement vide.

00:54Aujourd'hui, les Glovettes sont une immense copropriété privée

00:57dont les appartements sont louables sur internet via des sites comme Airbnb.

01:01Normalement, l'entrée est là.

01:10L'ordre des appartements, il n'y a aucune logique, regardez.

01:13Ça, c'est l'appartement 731.

01:16Et celui juste à côté, 714.

01:19Ah bon, on est là, 705.

01:22Et donc les clés sont là-dedans, normalement, avec le code.

01:28Bon, donc voilà ma chambre pour cette nuit, franchement, c'est plutôt correct.

01:31Après, on se croirait un peu dans une chambre des années 80, le temps,

01:34on dirait qu'il est un peu figé ici.

01:35Bon, je crois qu'il est temps que je vous parle un peu de l'histoire de ce lieu.

01:38Et pour ça, retour dans la France des années 60.

01:40Avec l'essor de la classe moyenne, les Français sont chaque année

01:43de plus en plus nombreux à partir en vacances.

01:45Mais problème, le pays, et plus particulièrement les stations de ski,

01:48n'ont pas du tout les capacités pour accueillir autant de personnes.

01:51C'est pour ça qu'il y a eu un changement.

01:53Le pays, et plus particulièrement les stations de ski,

01:55n'ont pas du tout les capacités pour accueillir ce nouveau tourisme de masse.

01:59Alors, les présidents successifs de l'époque se lancent

02:01dans un gigantesque plan d'aménagement du territoire.

02:04Les objectifs du plan neige ont été respectés.

02:07On a effectivement construit 150 000 lits entre 71 et 75.

02:11Aujourd'hui, les gisements de neige français sont parmi les meilleurs d'Europe.

02:15Très vite, les massifs montagneux voient sortir de terre

02:17des gigantesques complexes, comme ici, au Glovette.

02:20L'une des principales critiques avancées contre les stations nouvelles

02:23concerne les agressions du paysage.

02:25Il est incontestable que la transposition en montagne

02:28des architectures urbaines contemporaines heurte la sensibilité actuelle.

02:32Ici, la construction commence au début des années 70,

02:35et le projet est titanesque.

02:37Mais le désintérêt progressif des Français pour le ski,

02:39la fin des trottes glorieuses avec le choc pétrolier de 1973,

02:43et le manque de neige chronique, va sceller la fin du plan neige.

02:46En montant le projet, les Glovettes font faillite.

02:48Même s'il y a encore des randonneurs ou des skieurs pendant la haute saison,

02:51le reste de l'année, le bâtiment est quasiment vide.

02:54Je pose mes affaires et je décide de sortir

02:56pour essayer de croiser d'autres habitants.

02:58J'ai parcouru un nombre incalculable de couloirs

03:01sans jamais croiser personne.

03:04Ok, il y a juste un truc qui m'intrigue, c'est qu'il y a un chien là-bas

03:06depuis tout à l'heure, je ne sais pas qui il est.

03:08Salut toi !

03:10Alors ?

03:12Tu t'es perdu ?

03:14Ce chien m'a guidé vers son maître, qui s'avère être Cédric.

03:17Il est en charge de l'entretien de tout le site depuis presque 10 ans.

03:20Tu es mon chien, mes filles, ouais.

03:23Mes filles, comme mes filles toi.

03:25Je l'ai croisé tout à l'heure.

03:27C'est lui qui m'a accueilli.

03:28Comme il accueille beaucoup de gens aux Glovettes, ouais.

03:30C'est vrai ?

03:31Oui, oui.

03:32C'est le réceptionniste.

03:33Il y a même des gens qu'il connaisse, qu'il appelle par son nom,

03:36je ne les connais pas.

03:37Quand on est tout seul dans les couloirs,

03:39et d'un coup tu tombes sur quelqu'un, tu sais,

03:41des fois c'est nez à nez derrière une porte ou quoi,

03:43et là du coup tu sursottes.

03:45Ça, ça nous arrive encore régulièrement.

03:47Par exemple, il y a des résidents qui ne se connaissent pas entre eux.

03:50Oui, qui ne se sont jamais vus.

03:51Qui ne se sont jamais vus.

03:52Ça fait des mois qu'ils vivent là.

03:55C'est ça, ouais.

03:56Au bord des années, ouais.

03:59Après une courte nuit, je décide d'aller voir Agathe,

04:02une habitante dont Cédric m'a parlé.

04:04Elle fait partie de la quarantaine de personnes

04:06qui résident aux Glovettes toute l'année.

04:08Moi, j'ai dû négocier assez serré avec ma famille,

04:12enfin ma mère notamment,

04:13qui me disait, mais ça va être la sinistrose d'habiter ici.

04:16On voulait vraiment vivre cette vie-là, en fait,

04:20un peu coupée avec l'urbanisme,

04:24coupée avec un circuit de consommation.

04:27Et on a la chance, en fait, d'avoir un accès direct à la prairie,

04:31au plus grand jardin du monde, comme je le dis souvent.

04:34Peut-être que Cédric te l'a dit,

04:36mais il y a 23, 24 hectares de terrain.

04:39J'avais passé mon bac ici, je voulais réviser,

04:41donc j'étais à Grenoble, j'étais montée pour passer mon bac.

04:43En fait, j'ai fait deux nuits, puis je me suis barrée

04:45parce que j'ai eu trop peur, en fait, effectivement.

04:47Tout d'un coup, je réalisais que j'étais seule, en fait.

04:49Mon grand-père avait investi dans les Glovettes.

04:51Il s'était laissé embarquer par les promoteurs

04:54qui lui avaient dit, il faut investir, c'est génial.

04:57Pour certaines personnes, c'était encore clairement un Eldorado

05:02de dire, j'ai quelques billes, je les mets dans l'or blanc, quoi.

05:06Je vais avoir du rendement, etc.

05:08Il y a cru, donc il a mis de l'argent sur la table,

05:10qu'il n'a jamais revu.

05:12J'ai maintenant rendez-vous avec un artiste qui vit en résidence aux Glovettes.

05:15C'est Agathe qui organise leur venue à travers l'association Villa Glovette

05:18qu'elle a créée il y a quelques années.

05:20Son objectif est de faire vivre le territoire par l'art.

05:23On rencontre donc Étienne, sculpteur et potier.

05:25Moi, ce que je voudrais faire, c'est des espèces de structures

05:27avec tissage et qui fassent comme des écrans de glace, en fait.

05:31Donc, ça fait partie des matériaux que j'ai envie de récupérer.

05:35Quand on pose le regard, c'est...

05:39Encore plus quand on est sculpteur ou peintre,

05:41ou n'importe qui ici.

05:43C'est merveilleux, quoi.

05:45On n'est pas tout le temps en action dans ces moments-là.

05:47Et donc, l'ennui arrive.

05:50Et c'est tant mieux parce qu'il crée un espace

05:57pour des choses auxquelles on ne penserait pas forcément au quotidien.

06:00C'est un ennui qu'on accueille, en fait.

06:02On n'est pas, oh, je m'ennuie, qu'est-ce que je vais faire ?

06:05C'est déjà le moment de quitter les Glovettes.

06:07J'en pars avec un sentiment contrasté.

06:09En arrivant, l'architecture nous fait peur,

06:11mais au fur et à mesure, on finit presque par l'apprécier.

06:14Ce qui m'a frappé ici, c'est la sérénité qui y règne,

06:16et le véritable esprit de camaraderie des gens qui y vivent.

06:19La France regorge de lieux comme les Glovettes,

06:21avec des personnes qui s'efforcent de faire vivre ces endroits

06:23et de raconter leur histoire.

06:25Alors, si l'envie vous prend au détour d'un voyage,

06:27n'hésitez pas à aller voir ce qui s'y passe.

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