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Décryptage : en Tunisie, avec 90,7% des voix, la victoire écrasante du président Kaïs Saïed
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08/10/2024
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00:00
Il en est persuadé, il a une mission divine à accomplir, ce sont ses mots.
00:03
Kayser a été réélu avec une auction particulière, 90,7% des suffrages officiellement, un score
00:10
écrasant qui cache une participation historiquement basse.
00:13
D'abord, on retrouve Lilia Blaise à Tunis.
00:15
C'est une victoire confirmée pour le président Kayser qui a remporté 90,6% des suffrages
00:26
selon les résultats préliminaires annoncés par l'instance électorale ce lundi.
00:30
Ses concurrents, l'ingénieur et ex-député Ayat Chizamel, qui se trouve actuellement
00:35
en détention, a remporté 7,3% des voix, tandis que l'ex-député pan-arabiste Zouher
00:40
Marzaoui n'a récolté que 1,9% des votes.
00:44
Alors, ces résultats, comme je vous le disais, sont préliminaires.
00:47
Il reste un mois pour faire des recours et les résultats définitifs devraient être
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annoncés le 9 novembre prochain.
00:54
On ne sait pas encore quelle va être la réaction de l'opposition.
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Une grande majorité de partis avait déclaré ne pas reconnaître le processus électoral
01:02
qui avait été entaché, selon leurs mots, de nombreuses irrégularités.
01:06
Il y a autre donnée de ce scrutin, le faible taux de participation.
01:10
L'instance électorale l'a confirmé ce lundi, 28,8% seulement de taux de participation,
01:17
avec une très grande désaffection des jeunes.
01:19
Seulement 6% des électeurs âgés entre 18 et 35 ans se sont rendus aux urnes ce dimanche,
01:25
alors qu'ils représentaient le plus gros contingent électoral.
01:29
Le président Kays Saïed n'a pas commenté ce fort taux d'abstention.
01:33
Il s'est rendu dès dimanche, après la sortie de sondage donnant déjà des résultats,
01:39
vers son QG et l'avenue Abibourgiba, où il a célébré sa victoire.
01:43
Il a déclaré qu'avec ce scrutin, les Tunisiens paraîtraient la révolution
01:48
et qu'il allait, selon ses mots, assainir le pays de tous les corrompus et les comploteurs.
01:54
L'Ile-et-la-Blaise hier soir dans le Journal de l'Afrique.
01:57
Bonjour Taoufiq Mjaed.
01:58
Bonjour.
01:59
Merci d'être avec nous, on vous connaît bien.
02:01
Vous êtes le présentateur star de la chaîne arabophone depuis des années.
02:05
Kays Saïed réélu hier officiellement avec 90,7% des suffrages.
02:09
Rappelons, le taux de participation, moins de 30%, on est à 28%.
02:14
Comment est-ce que le président a réussi à atteindre de tels sommets ?
02:17
Est-ce qu'il a eu une stratégie particulière ?
02:20
Il n'y a pas eu de stratégie parce que la campagne en elle-même était beaucoup plus que froide.
02:25
Il n'y a pas eu de campagne, ce qui prouve que le 6 octobre a été préparé depuis au moins un an.
02:33
C'est-à-dire qu'il a procédé par élimination.
02:36
Tous ceux qui peuvent le gêner politiquement ont été éliminés,
02:40
soit mis en prison, soit écartés complètement.
02:43
Ça a touché également la société civile, les journalistes, les avocats.
02:49
Ça a touché tout le monde.
02:50
Il y a eu une préparation parce qu'on ne peut pas s'engager dans une élection
02:53
aussi importante que l'élection présidentielle sans entrer en campagne.
02:57
Il y a autre chose, on ne fait pas attention à l'autre chose,
02:59
c'est qu'il y a le Parlement, il y a une deuxième chambre qui rassemble les collectivités locales.
03:05
Dans ces collectivités locales, il y a beaucoup de gens qui sont pro-Kays Saïed,
03:10
qui ont fait le travail à la place de ceux qui devaient faire la campagne de Kays Saïed.
03:16
Ça, c'est d'une.
03:16
Deuxièmement, il y a eu une symbiose entre Kays Saïed et une large tranche de la population
03:24
qui disent la démocratie, ça nous a rapporté quoi ?
03:28
La situation économique est mauvaise, la situation sociale, pareil,
03:32
le système éducatif est en ruine, le système de la santé, c'est pareil,
03:37
donc ça ne nous a rien rapporté.
03:38
En fait, c'est le discours qui a toujours défendu et qui a trouvé son propre public,
03:44
puisque les gens pensent que tous ces partis politiques, depuis 2011,
03:49
n'ont pas fait le travail qu'il fallait.
03:51
Il y a eu ce qu'on peut appeler une overdose démocratique,
03:54
c'est-à-dire, il y a eu, à un moment donné, on avait quand même plus de 120 candidats aux élections.
04:01
Là, il y a eu 17, il en a éliminé 14 pour garder deux, puisque le troisième était en prison,
04:07
donc il y a eu un travail de préparation pour un deuxième mandat,
04:10
parce que, comme on le dit, lui, il pense qu'il doit accomplir le travail qui a déjà commencé.
04:15
Mais qui sont ces électeurs, ces partisans de Kays Saïed ?
04:18
Quand on regarde de près, je crois, ce que vous me disiez tout à l'heure,
04:21
ce sont des Tunisiens qui ont plus de 50 ans, qui ont connu l'ère Bourguiba,
04:24
qui ont connu l'ère Ben Ali, ça veut dire qu'il y a un désir d'autoritarisme, en quelque sorte ?
04:28
Exactement, ceux qui ont plus de 50 ans ont voté pour Kays Saïed.
04:32
Il pense qu'il y a eu un grand laissé-aller sur le plan des libertés à tel point qu'on ne pouvait plus rien gérer,
04:40
ni à l'administration, ni au niveau du Parlement, ni au niveau des institutions.
04:44
Donc, je pense qu'il a fait sa propre lecture de la société.
04:48
Il a compris que son discours peut passer auprès d'une certaine population,
04:53
c'est-à-dire, parce que les jeunes n'ont pas voté. Pourquoi les jeunes ?
04:55
Parce que personne ne leur a donné un espoir de faire quelque chose ou d'avoir un avenir.
05:00
Donc, ils ne sont pas allés voter. Et ça aussi, c'est un camouflet pour Kays Saïed.
05:03
S'il n'arrive pas à rassembler un grand nombre de jeunes, c'est qu'il n'a pas réussi.
05:07
Parce qu'au niveau de son bilan, le bilan économique, il n'est pas terrible.
05:13
Le bilan social, il n'est pas terrible. Tout est basé sur des promesses.
05:16
Donc, le discours populiste marche avec une population qui veut avoir de l'espoir
05:22
et penser que la Tunisie peut avoir un avenir meilleur.
05:25
Là, on est dans cette situation et c'est la réalité sociologique de la Tunisie aujourd'hui.
05:30
Kays Saïed, également faux soyeur des islamistes d'Ennahda.
05:33
Est-ce que ça a marché ? Est-ce que ça a porté ses fruits ?
05:37
Et est-ce que ça lui a apporté des soutiens supplémentaires ?
05:40
Surtout chez les laïcs.
05:42
Ça, en parlant avec tous les Tunisiens, ils disent que le principal acquis du mandat de Kays Saïed,
05:49
c'est qu'il nous a débarrassés. Ils utilisent ce mot.
05:53
Il nous a débarrassés d'Ennahda.
05:55
Et puis, au niveau des pays occidentaux, c'est le bilan sécuritaire.
06:00
On ne voit plus d'actes terroristes en Tunisie.
06:02
Et c'est vrai qu'on en parlait il y a plusieurs années encore.
06:04
Et au niveau de l'immigration, oui.
06:07
Kays Saïed, il a promis de jouer le jeu et de dire que je vais empêcher
06:11
ces immigrés qui cherchent à atteindre les cotes européennes.
06:15
Donc, ça plaît plus ou moins.
06:17
L'aspect démocratique, c'est chez la société civile.
06:21
Quelques avocats, des journalistes, etc., qui disent qu'effectivement,
06:25
il y a des restrictions au niveau des libertés,
06:27
des restrictions au niveau de la démocratie.
06:29
Mais ce qu'on entend souvent, c'est que moi, ce que je cherche, c'est plutôt mon quotidien.
06:36
Qu'est-ce que je gagne ? Qu'est-ce que j'ai ? Qu'est-ce que je peux faire ?
06:40
Ça veut dire que les idéaux de la révolution de 2011, aujourd'hui, sont enterrés en Tunisie ?
06:44
Le miracle tunisien, c'est fini.
06:47
L'opposition de gauche, c'est fini.
06:50
Il n'y a plus... L'opposition de gauche a toujours été divisée en Tunisie.
06:53
Ce n'est pas à l'époque de Gaësaïd, même avant.
06:56
Il n'y a jamais eu un discours logique chez la gauche qui peut atteindre la population tunisienne.
07:04
Donc, on ne parle plus du 14 janvier, déjà.
07:08
On ne parle plus de ce qui s'est passé.
07:10
On ne parle plus du miracle tunisien.
07:11
Beaucoup, aussi, se permettent de dire ce miracle tunisien.
07:14
Ce sont les Occidentaux qui l'ont applaudi.
07:17
Mais nous, ça ne nous a rien rapporté.
07:18
Quand on a demandé de l'aide aux Occidentaux, ils n'étaient pas au rendez-vous.
07:22
Donc, qu'est-ce qu'on va faire avec la démocratie ?
07:24
Et c'est pour ça que les gens, je parle de cette tranche d'âge de plus de 50 ans,
07:28
ils avaient besoin d'autorité.
07:29
Lui, il a donné, avec son discours, au niveau agressif, verbalement,
07:34
il a donné cette impression qu'il est là pour sévir.
07:38
Et ça marche.
07:39
Et c'est reparti pour un mandat.
07:40
Merci beaucoup, Taoufik, pour votre décryptage.
07:42
On vous retrouve sur la chaîne Arabophone à partir de 19h.
07:45
19h jusqu'à 21h.
07:46
Merci beaucoup et à très vite.
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