00:00L'invité d'ici matin à 7h48, c'est un sapeur-pompier en poste à Saint-Nazaire qui raconte sa vie, ses angoisses et ses traumatismes dans un livre.
00:08Il s'appelle Mathieu Josse et qui est dans notre studio. Bonjour Mathieu Josse.
00:12Bonjour Nicolas.
00:12Je vous montre tout de suite votre livre pour ceux qui nous regardent sur France 3, le titre évocateur « Sauver sans périr »,
00:20une manière détournée de l'expression évidemment séchère au sapeur-pompier.
00:26Aux éditions « Bateau vert et blanc », « Sauver sans périr » ou « Comment se protéger finalement des horreurs auxquelles chaque sapeur-pompier est confronté quand il part en intervention ? »
00:35Oui, c'est ça tout à fait.
00:39C'est quoi le déclic ? Qu'est-ce qui vous a donné envie d'écrire ?
00:42C'est la suite d'une intervention. Cette intervention m'a bousculé dans l'écriture, m'a bousculé dans la vie mais m'a bousculé dans l'écriture.
00:54On peut en dire deux mots quand même. Vous êtes confronté à un drame avec des adolescents électrocutés.
01:00Oui, c'est ça.
01:01Vous allez quelque part sur une intervention et vous avez face à vous des jeunes.
01:06Vous savez pourquoi cette intervention-là, plus que d'autres, vous a marqué ?
01:10Oui, tout d'abord parce que ça touche des victimes jeunes. C'est d'autant plus traumatisant.
01:18Cette intervention ne s'est pas spécialement bien passée. J'ai été confronté à une grosse sensation d'impuissance,
01:29d'impossibilité de faire quoi que ce soit pour faire face à leur détresse.
01:35C'est quelque chose qu'on nous apprend très peu chez les pompiers.
01:38On est toujours dans l'action, il y a toujours des actions à réaliser en faveur des victimes.
01:45Pour cette intervention, il n'y avait rien à faire.
01:49Là, c'est dur parce que vous avez ce sentiment d'impuissance.
01:52Or, quand on est pompier, c'est pour sauver des vies.
01:55Ce n'est pas pour laisser les personnes dans la détresse.
01:58Ça vous a marqué au point d'écrire ce livre parce que vous, derrière,
02:05vous étiez quasiment victime d'un vrai coup de blues.
02:10Vous n'avez pas pu retourner travailler.
02:13J'ai été victime d'un stress post-traumatique avec des symptômes provoqués par ce stress.
02:21Des pensées envahissantes.
02:24En permanence, la journée, avoir des reviviscences, revivre ce drame.
02:30Vous dites que mon monde s'est écroulé à ce moment-là.
02:34Quand on est pompier, pompier professionnel comme vous,
02:37ou pompier aussi dans les villages, bénévole, volontaire comme on dit,
02:42à chaque fois qu'il y a une intervention, on est obligé de se mettre en mode commando
02:47pour sauver sans réfléchir.
02:49Mais on est quand même des éponges.
02:52Oui, c'est ça.
02:53On ne se rend pas compte en début de carrière de cet effet cumulatif.
02:58On a en quelque sorte un sac à dos de charge émotionnelle
03:03qu'on remplit au fur et à mesure de notre carrière.
03:06Chaque intervention, finalement, c'est un petit bout du sac à dos qui se remplit.
03:09Exactement.
03:10On ne nous apprend pas forcément, en début de carrière, à le vider.
03:13À le vider régulièrement pour pouvoir aller jusqu'au bout.
03:17C'est finalement une sorte de sport d'endurance,
03:19ce qui est le métier de sapeur-pompier.
03:21Pour aller jusqu'au bout, il faut accepter de l'aide.
03:26C'est un cheminement pas toujours facile dans notre métier.
03:31Il faut savoir reconnaître ses faiblesses.
03:35Dans un monde assez masculin, de casernes, de muscles.
03:40Je n'irais pas jusqu'à dire macho, parce qu'il y a une féminisation.
03:44Mais dans un monde viril, montrer ses faiblesses, ce n'est pas facile.