Le champion olympique de fleuret, Enzo Lefort, nous parle de sa passion pour l’escrime (et nous révèle même ses meilleurs entraîneurs)
Ses débuts dans l’escrime, ses inspirations ou encore ce qu’il fait quand il perd ou gagne : le champion olympique de fleuret, Enzo Lefort, nous parle de sa passion pour l’escrime (et nous révèle même ses meilleurs entraîneurs)
Category
🥇
SportsTranscript
00:00Je m'appelle Enzo Lefort, j'ai 32 ans, je pratique l'escrime.
00:03Ma discipline, c'est le fleuret.
00:05Je suis double champion du monde individuel,
00:07quintuple champion d'Europe par équipe,
00:09champion du monde par équipe et champion olympique par équipe.
00:12Et je vais représenter la France cet été aux Jeux olympiques à Paris.
00:16Alors moi, j'ai commencé l'escrime à l'âge de 5 ans
00:19en voyant Laura Flessel gagner les Jeux olympiques à Atlanta en 1996.
00:23Du coup, de mes 5 à mes 16 ans, j'ai pratiqué l'escrime en Guadeloupe.
00:26Ensuite, à 16 ans, je suis arrivé en France hexagonale pour faire sport et études.
00:30Et depuis 2010, je suis pensionnaire de l'INSEP,
00:32le centre national de la grande majorité des sports olympiques.
00:36Ma première sélection en équipe de France, ça a été en cadet.
00:39J'avais 16 ans.
00:39Depuis ce jour, je n'ai jamais quitté l'équipe de France.
00:42En dehors de l'escrime, mon idole était Michael Jordan
00:45parce que j'habitais en Guadeloupe,
00:46donc on était sur le même fuseau horaire en fait que la NBA.
00:48Donc je me souviens que je regardais les matchs d'NBA avec mon père.
00:50Et aujourd'hui, c'est plus un mec comme Russell Westbrook.
00:53C'est pas forcément le plus technique des joueurs,
00:55mais à chaque fois qu'il est sur le parquet,
00:57il met son cœur à l'ouvrage et ça m'inspire énormément.
01:00Je crois que dans l'escrime, ce qui me plaît le plus,
01:01c'est que c'est un sport de combat
01:03dans lequel on est quand même à proximité immédiate de notre adversaire.
01:06Et moi, ce que j'adore, c'est que peu importe le geste qu'on va réaliser,
01:10l'adversaire aura toujours une réaction différente.
01:12On va devoir s'ajuster à la réaction de l'adversaire.
01:14Et en fait, c'est un jeu qui est sans fin.
01:16Et c'est pour ça que l'escrime, ça a toujours été mon premier amour.
01:18Une semaine type d'un escrimeur,
01:20on s'entraîne à peu près 18 heures pour les petites semaines
01:23et 22-23 heures pour les grosses semaines.
01:24On ne fait pas de l'escrime forcément tous les jours.
01:26Je vais avoir un entraînement individuel qui s'appelle la leçon individuelle.
01:29Donc, je vais être face à mon entraîneur qui va me faire faire répéter des gammes.
01:32Il nous demande de faire des actions, il nous pose des problèmes.
01:35On va devoir trouver des solutions.
01:36Il y a la séance dite d'assaut,
01:38où là, on va affronter les coéquipiers d'entraînement.
01:41Et là, ça va être intéressant parce que c'est le format qui se rapproche
01:43le plus de ce qu'on retrouve en compétition.
01:45Et après, pour pouvoir être capable d'exprimer au maximum la technique,
01:48il faut qu'on ait une base physique qui soit irréprochable.
01:50Donc, ça, c'est plusieurs séances de physique par semaine.
01:53Le physique, c'est de renforcement musculaire, du cardio, de l'endurance,
01:56de l'explosivité, du fractionnir.
01:58Enfin, tout ce qu'on peut retrouver dans diverses disciplines sportives.
02:00Franchement, je ne suis pas fan ni du cardio, ni de renforcement musculaire.
02:03Mais si tu veux, j'ai envie de gagner, donc je le fais.
02:06Moi, j'avoue que je n'ai pas l'alimentation qu'on pourrait imaginer d'un sportif.
02:10Plus jeune, je faisais beaucoup moins attention.
02:11Je pouvais manger fast food, des excès alimentaires, même avec l'alcool.
02:15Et c'est vrai qu'au fur et à mesure que je me suis professionnalisé,
02:19j'ai pris conscience que tout ce que j'ingérais, tout ce qui rentrait dans mon corps,
02:22ça me servait d'énergie pour pouvoir arriver à m'entraîner le plus efficacement possible.
02:26Je fais attention à ce que je mange, mais dans le sens où
02:29j'essaie de manger le plus diversifié possible, c'est tout.
02:31J'essaie quand même de me faire plaisir quand j'en ressens le besoin.
02:35Je crois que mon cheat meal idéal, c'est l'éthiopien.
02:37C'est une nourriture qu'on mange sur des grands plats qu'on partage.
02:40Donc, il y a une galette qui tapisse le fond.
02:42En fait, il y a peut-être trois plats de viande, quatre plats végétariens.
02:45En fait, c'est plusieurs cheat meals, un seul cheat meal.
02:47On peut piocher et c'est un mélange de saveurs que j'adore.
02:50C'est vrai que très longtemps, j'ai été épargné par les blessures.
02:52Il y a cinq ans, j'ai été rattrapé par la patrouille.
02:55Avant chaque échéance de fin de saison, j'ai été blessé.
02:58En 2019, j'ai été arrêté trois semaines un mois
03:01et j'ai repris le scrim une semaine avant le championnat du monde,
03:03que j'ai remporté avant les Jeux Olympiques de Tokyo.
03:06Je me suis arrêté deux semaines.
03:07On gagne par équipe.
03:08Et pareil, en 2022, je suis revenu trois semaines avant le championnat du monde.
03:12Je me suis encore imposé sur ces championnats du monde.
03:14J'ai la chance d'être bien entouré par un staff médical,
03:16un staff d'entraîneur.
03:17Avec les années, on aménage un peu l'entraînement.
03:19Je ne m'entraîne plus comme quand j'avais 20 ans.
03:21En fait, les blessures, je les gère en aménageant mon emploi du temps
03:24pour faire en sorte que mon corps soit moins soumis à des traumatismes.
03:28J'ai eu énormément d'entraîneurs.
03:30Désolé, je vais faire des jaloux, mais il y a eu mon premier maître d'armes,
03:32maître Rémi Modern, qui m'a mis en garde.
03:34C'est un ancien militaire, donc c'était quelqu'un de très carré,
03:37un peu à l'ancienne, mais qui m'a donné une base hyper solide.
03:40Ensuite, il y a Franck Boidin et Amérique Clot
03:42qui m'ont inculqué la science du haut niveau quand j'avais 16 ans.
03:45Je n'étais pas du tout le plus prometteur de ma génération,
03:48donc ils ont senti quelque chose en moi, ils m'ont fait confiance.
03:51Là, ça fait quelques années que je m'entraîne avec Amérique Clot
03:54et Amir Chabak Essas, qui est un duo qui, pour moi, est hyper complémentaire.
03:57J'aime à penser que j'ai picoré
03:59certaines choses de chacun de ces entraîneurs et je m'en suis nourri.
04:02C'est ce qui a fait de moi l'entraîneur que je suis aujourd'hui.
04:04J'écoute énormément de musique en compétition.
04:05Ça m'aide à m'ancrer dans l'instant présent,
04:07à ne pas trop penser à l'enjeu de la compétition que je suis en train de disputer.
04:10On ne va pas se mentir, j'ai une playlist composée à grande majorité de rap et de hip hop.
04:13Ces 110 chansons me permettent de me mettre dans un état d'esprit conquérant
04:17avant d'entrer sur la piste.
04:18Ces derniers mois, j'écoute beaucoup Nino Vinicius.
04:21Après une défaite, je passe à autre chose.
04:24Parfois, s'il y a un coéquipier qui fait une médaille, je fais la fête avec lui.
04:27J'ai toujours un rapport assez particulier à la défaite.
04:29Dix minutes après une défaite, je suis capable de rire.
04:31Bon, après, si je perds aux Jeux olympiques, ça prendra peut-être un peu plus de temps.
04:34L'événement est quand même un peu plus important.
04:36Je pense déjà à comment je peux faire pour m'améliorer,
04:39pour ne pas que cet échec se reproduise.
04:41Ce qui est fait, on ne peut pas le défaire.
04:42La seule chose que je puisse maîtriser, c'est mon attitude
04:44et ce que je vais mettre par la suite pour m'empêcher de reperdre à nouveau.
04:48Donc, c'est plutôt comme ça que je vois la chose.
04:50Après avoir gagné une compétition, je fais la fête.
04:52Et s'il y a l'épreuve par équipe, après, non, je ne fais pas la fête.
04:54Je reste avec mes coéquipiers.
04:55On boit peut-être un coup juste pour marquer le coup.
04:57Et après, on bascule directement dans la compétition par équipe.
04:59Mais sinon, on fait la fête parce que le sport de haut niveau,
05:02c'est énormément de pression.
05:03Donc, ça fait du bien de relâcher la pression parfois.
05:06Si on gagne cette année au jeu, la fête, elle sera folle.
05:08Elle sera folle. On sera à Paris avec nos amis, avec nos proches.
05:11Je n'ose même pas imaginer parce que je préfère me concentrer d'abord
05:15sur le fait d'emporter une médaille.
05:17Ensuite, on verra pour la fête chaque chose en son temps.
05:19Quand j'arrive sur des compétitions importantes,
05:21je me dis tout ce que tu fais depuis des mois, depuis des années,
05:24c'est pour ce moment-là.
05:25Il y a des gens qui tueraient pour être à ta place.
05:28J'ai envie de pouvoir exprimer tout ce que je travaille à l'entraînement
05:30sur ces compétitions.
05:31Donc, c'est vraiment ça que je me dis.
05:33Et après, quand on perd avec les gars de mon équipe,
05:36on a une devise, c'est on ne gagne peut-être pas tout le temps,
05:38mais qu'est-ce qu'on rigole.