Présidentielle 2024 au Sénégal: Le décryptage de Bledson Mathieu, journaliste-analyste politique

SNPECI Fratmat Chanel

26/03/2024

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00:00 Au Sénégal, ce sont deux roulets hier dimanche, nous sommes aujourd'hui lundi.

00:06 Est-ce qu'on peut dire qu'il y a un gagnant ? Officiellement non, parce que personne n'a

00:13 été proclamé.

00:14 Mais depuis hier, parce que la particularité au Sénégal, les élections d'hier ont été

00:19 à la limite retransmises sur l'ensemble des chaînes en dehors des médias d'État.

00:23 Chaque télévision, chaque radio donnait les résultats, bureau de vote pour bureau

00:28 de vote.

00:29 Donc depuis hier, le candidat de Pastel, Dioma Faye, avait une certaine avance.

00:35 Jusqu'aujourd'hui, au moment même où nous faisons cette vidéo, il est accrédité

00:40 de 56% de voix.

00:42 Et même mieux, le candidat de la mouvance présidentielle, le candidat de Makissal, Amadou

00:48 Ba, l'a appelé pour le féliciter.

00:50 À ce stade, il n'y a pratiquement plus de doute, on peut se fier aux réactions d'autres

00:55 candidats sur les 17-14, l'ont appelé pour le féliciter.

00:59 De toute vraisemblance, sauf cataclysme de dernière heure, le prochain président de

01:04 la République du Sénégal s'appelle Dioma Faye, c'est le candidat de Pastel.

01:09 Maintenant, qui dit Pastel dit Sonko.

01:11 Il est le numéro 2 de Sonko, il est celui qui doit tout aujourd'hui à Sonko.

01:19 C'est vrai, c'est son ami, ils étaient tous deux inspecteurs d'impôts.

01:23 Qu'est-ce qui va se passer à la tête du Sénégal ? Qui va diriger ? Sonko ou Dioma

01:28 Faye ? On suppose qu'ils vont trouver l'intelligence nécessaire de s'entendre, mais c'est vraiment

01:33 une grande première dans la jeune démocratie de l'Afrique et dans la démocratie du Sénégal

01:39 qu'une personne est à la limite élue par procuration.

01:43 Parce que Dioma Faye, c'est vraiment le candidat originel, c'est Sonko.

01:45 Je me souviens très bien que lorsqu'on a arrêté Sonko, le bureau politique du Pastel

01:50 s'est réuni et il a été question d'envisager un plan B.

01:54 A l'unanimité, tout le monde a dit qu'il n'avait pas de question d'envisager ce plan

01:58 B, sinon il serait donné un peu plus de force ou de raison à Macky Sall et ils ont refusé

02:02 le plan B.

02:03 Mais lorsque la condamnation a été définitive, que les élections approchaient, ils se sont

02:07 dit "bon, donnons-nous encore une deuxième carte".

02:09 C'est à ce stade-là que Dioma Faye a déposé sa candidature.

02:13 Lui-même est sorti de prison dans les derniers jours de la campagne.

02:16 Finalement, ils ont pu l'emporter.

02:19 Qu'est-ce qui peut expliquer aussi cette victoire ? Je pense que c'est d'abord le

02:23 fait que les partisans de Sonko ont beaucoup souffert.

02:26 Sonko, il faut dire que c'est le principal opposant à Macky Sall.

02:32 Avant l'arrivée de Macky Sall, le pouvoir ne savait pas au Sénégal qui s'appelait

02:36 Sonko.

02:37 Il était juste l'inspecteur des impôts et il se trouve qu'ils ont fait une enquête

02:42 au niveau des impôts qui incriminait le frère du président de la République Macky Sall.

02:47 Il en a fait un post sur sa page Facebook, le post qu'il a conduit en prison.

02:51 C'est à partir de là qu'il va avoir une célébrité.

02:54 Quand il sort de prison, il fait l'objet de poursuites disciplinaires au sein des impôts

02:58 et finalement il est viré.

02:59 Il dit qu'il était juste syndicaliste, qu'il n'avait plus de travail dans la zone des

03:04 impôts et qu'il ferait maintenant la politique.

03:06 Dès lors, il va s'opposer à toutes les actions de Macky Sall.

03:10 Il va se mettre à les critiquer, à sa gestion des ressources minières.

03:13 Lorsqu'il va avoir l'impression que Macky Sall était en train d'aller vers un troisième

03:19 mandat, il mobilise tout le Sénégal et finalement ça finit par des meurtres, des morts.

03:25 Voilà la personnalité de Sonko qui va s'imposer aux autres leaders qui, entre temps, étaient

03:30 en prison.

03:31 Les principaux leaders là-bas, c'est le maire de Dakar, l'ancien maire.

03:34 C'est aussi Karim Ouad, le fils de l'ancien président, qui vont se retrouver en prison

03:40 puis en exil pour Karim Ouad.

03:42 Ça fait que la seule personnalité qui était crédible et qui s'est opposée à Macky Sall,

03:48 c'était Sonko.

03:49 Sonko a damé le pion à tous les autres leaders.

03:51 Voilà ce qu'il fait, l'aspect Sonko.

03:54 Mais ce combat-là vient du fait que ces électeurs étaient vraiment motivés.

04:00 Ce n'est pas évident que sur l'ensemble des Sénégalais, Sonko soit majoritaire,

04:04 mais au jour des élections, ces électeurs étaient très motivés.

04:09 Là où les autres, le Sénégalais Lambda, était en train de réfléchir sur les propositions

04:15 des 17 candidats, les gars de Sonko ne réfléchissaient pas.

04:19 C'était un combat pour eux, comme s'ils étaient sur un terrain de football, il fallait

04:23 gagner.

04:24 Donc ceux-là ont veillé, ont fait les rangs, ont été les premiers devant les bureaux

04:28 de vote et sont allés chercher leurs amis.

04:30 Voilà ce qui peut expliquer cette victoire.

04:34 La victoire obtenue, qu'est-ce qui va se passer ? D'abord, c'est un parti anti-conformiste,

04:40 un parti qui met tous ceux qui ont goûté au pouvoir, y compris le Parti Socialiste,

04:47 ils le mettent tous dans le système et ils sont anti-système.

04:50 Ça, ça a été le combat.

04:51 Par moments, Sonko lui-même a pris la tête de certaines idéologies proches du panafricanisme,

04:58 notamment à la sortie du CEFA, notamment le nouveau code minier où le Sénégal gagnerait

05:02 plus dans son pétrole et son gaz.

05:04 En fait, comme eux-mêmes, le nom du parti, le CEFA, ce sont des patriotes, donc ce sont

05:11 des nationalistes.

05:12 Et tout ce qui est nationalisme effraie un tout petit peu.

05:16 Est-ce que le Sénégal demain sera un pays à forte consonance patriotique, un pays qui

05:25 remettra tout sur la table ? Il y a cette inquiétude pour ceux qui aiment le Sénégal

05:32 tel qu'il est aujourd'hui, il y a aussi cet espoir pour ceux qui attendent beaucoup

05:37 de changements.

05:38 Je pense que tout le passé, d'ailleurs, compris Sonko, seront moins virulents.

05:44 À mon avis, ils vont être habités de beaucoup plus de sagesse pour pouvoir faire les changements

05:50 qu'ils souhaitent, mais le faire non pas de façon frontale, non pas de façon chirurgicale.

05:55 !

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