"May December" : Que vaut le dernier film de Todd Haynes ?

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00:00 Qu'est-ce qui se cache derrière May December, le drôle de titre du nouveau film de Todd Haynes ?

00:04 Pas du tout un calendrier.

00:06 May December, c'est une expression américaine pour dire qu'il y a une grande différence d'âge entre deux personnes dans un couple.

00:29 C'est l'histoire d'une actrice qui est jouée par Nathalie Portman,

00:32 qui va à la rencontre de la femme qui existe réellement et qu'elle doit interpréter dans un film.

00:38 Cette femme, ce n'est pas n'importe qui, elle est inspirée d'une vraie personne.

00:43 Mary-Kate Letourneau, ça a été un des grands faits divers des années 90 aux Etats-Unis,

00:47 puisque c'était une professeure qui avait eu une liaison absolument scandaleuse et illégale, faut-il le rappeler,

00:54 avec un de ses élèves de collège, un gamin de 13 ans.

00:59 Il se trouve qu'elle est allée en prison, qu'elle a accouché en prison,

01:02 et qu'à sa sortie de prison, elle a épousé le jeune homme,

01:05 qu'ils ont fondé une famille, eu des enfants, etc.

01:08 Et puis, elle a fini par s'éteindre d'un cancer.

01:11 Évidemment, on s'est tous demandé ce que Todd Haynes allait faire de cette histoire.

01:15 Et il en fait un film absolument passionnant, une sorte de duel de femmes,

01:20 donc entre Nathalie Portman et Julianne Moore, mais aussi ce que c'est qu'être une actrice,

01:26 et les forces et les faiblesses changeantes des personnages.

01:30 On pense souvent au chef d'œuvre de Barryman, Persona.

01:45 Il y a vraiment des effets de miroir, de double,

01:48 entre les deux, que la mise en scène exploite avec vraiment beaucoup d'élégance.

01:52 Les femmes sont présentées en rivales, en jumelles.

01:54 On ne sait jamais trop si on les voit face caméra ou si elles sont dans un miroir.

01:58 En fait, ça crée comme ça ces effets de double et ces effets de stupéfaction.

02:02 Qu'est-ce qu'on peut voler à quelqu'un pour le jouer, pour l'incarner ?

02:05 Qu'est-ce qu'on peut s'approprier ?

02:07 Ses postures, est-ce qu'on peut...

02:08 Voilà, elle étudie son physique, elle va s'approprier son maquillage.

02:12 Qu'est-ce que l'autre veut bien donner aussi ?

02:14 Est-ce qu'elles peuvent vraiment se comprendre et entrer en connexion,

02:18 ou est-ce que ça va être une histoire de vampirisme ?

02:21 Et qui va dévorer l'autre ?

02:22 Je veux que tu racontes la histoire, n'est-ce pas ?

02:25 Elles sont mignons, n'est-ce pas ?

02:27 On est ensemble depuis presque 24 ans.

02:30 C'est difficile de les croire.

02:31 Tu vas représenter les choses comme elles sont.

02:34 Qu'est-ce qui ferait que une femme de 36 ans

02:38 ait un affaire avec un 7ème année ?

02:41 On saisit cette famille à un moment très particulier,

02:43 qui est le départ du foyer des enfants devenus grands.

02:46 Les enfants vont voler de leurs propres ailes et vont quitter le domicile familial.

02:49 C'est très beau parce que le personnage que joue un acteur assez étonnant,

02:52 qui s'appelle Charles Melton,

02:54 est vraiment passionnant parce qu'il est resté un enfant lui-même.

02:58 Il a toujours été dans une position très bizarre.

03:00 Parce qu'il lui est arrivé, il est devenu adulte beaucoup trop tôt.

03:03 Il est en fait très proche de ses enfants

03:05 parce qu'ils ont une différence d'âge assez réduite.

03:08 Il y a vraiment des scènes magnifiques entre ce père et ses enfants

03:12 qui montrent à la fois l'abîme qui les sépare et leur très grande complicité.

03:17 Il y a quelque chose de magnifique, c'est que c'est un personnage

03:20 qui protège des papillons,

03:22 qui prélève des œufs dans la nature

03:24 pour sauvegarder une espèce de papillon qui s'appelle les monarques

03:27 et dont le but dans la vie, c'est de les remettre en liberté.

03:31 Rien que ça, il y a une profondeur,

03:34 il y a des couches et des couches de profondeur dans ce film,

03:37 tout en évitant complètement une espèce de psychologie de bazar.

03:40 Les gens insecures sont très dangereux, n'est-ce pas ?

03:45 On a découvert le film à Cannes et à l'époque,

03:48 la sortie de la salle, les gens qui disent

03:49 "Oh là là, mais quel ringard ce Todd Hens,

03:51 il a utilisé la musique de Fête entrée l'accusé".

03:53 C'est vrai !

03:54 Effectivement, la musique que l'on entend

03:57 est aussi la musique du générique de Fête entrée l'accusé.

03:59 Mais avant d'être utilisée par Christophe Homblade

04:01 dans son émission de Faits divers,

04:03 c'était donc la musique du messager de Joseph Lozet,

04:06 Palme d'or en 1971, si je ne m'abuse.

04:15 Il a choisi cette musique parce que déjà elle est sublime,

04:17 mais aussi parce qu'elle dit beaucoup,

04:18 elle amène avec elle ce qu'était le film, le messager,

04:22 qui était déjà un film sur l'enfance, abusé, exploité.

04:26 Je trouve vraiment ce choix de musique absolument formidable.

04:29 Médicember, c'est bravo !

04:31 Médicember, un grand bravo !

04:33 [Musique]

04:38 Sous-titrage Société Radio-Canada

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