Passer au playerPasser au contenu principalPasser au pied de page
  • 20/11/2023
Avec Najat Vallaud-Belkacem, Directrice générale One France et Présidente de France terre d'asile.


---
Abonnez-vous pour plus de contenus : http://ow.ly/7FZy50G1rry
---
———————————————————————

▶️ Suivez le direct : https://www.dailymotion.com/video/x75yzts
Retrouvez nos podcasts et articles : https://www.sudradio.fr/

———————————————————————

Nous suivre sur les réseaux sociaux

▪️ Facebook : https://www.facebook.com/SudRadioOfficiel
▪️ Instagram : https://www.instagram.com/sudradioofficiel/
▪️ Twitter : https://twitter.com/SudRadio
▪️ TikTok : https://www.tiktok.com/@sudradio?lang=fr

##L_INVITE_POLITIQUE-2023-11-20##

Catégorie

🗞
News
Transcription
00:00 Notre invitée ce matin, Najat Vallaud-Belkacem, qui est présidente de France Terre d'asile,
00:04 ancienne ministre de l'éducation nationale. Bonjour.
00:07 - Bonjour. - Merci d'être avec nous.
00:09 Question directe, est-ce que la France reste une terre d'asile ?
00:14 - Oui, aujourd'hui elle l'est, clairement.
00:18 Elle n'est pas débordée par les demandes d'asile, contrairement à un certain nombre de propos qui circulent.
00:24 Le projet de loi immigration qui est actuellement discuté au Sénat semble vouloir limiter considérablement sa capacité à être une terre d'asile.
00:32 On y reviendra peut-être dans un instant, mais aujourd'hui on peut dire qu'elle l'est.
00:36 - Elle l'est, elle reste une terre d'asile.
00:38 Vous avez co-signé une tribune appelant au sursaut collectif avant le passage du projet de loi, donc, sur l'immigration à l'Assemblée Nationale.
00:45 Les valeurs de la République sont bafouées. Écrivez-vous conjointement quelles valeurs ?
00:51 - Précisément les valeurs qui nous conduisent à reconnaître en tout homme, j'allais dire, un autre soi-même.
00:59 C'est-à-dire que lorsque cet homme, sous-entendu cette femme, cet enfant, est poussé sur les chemins de l'exil par les conflits, les persécutions,
01:08 tout ce qui fait qu'il ne peut plus vivre dignement dans son propre pays,
01:12 eh bien on l'accueille, on fait en sorte de répondre à ses besoins absolument vitaux, comme nous par le passé, nous autres Européens.
01:22 Je rappelle qu'on a été une terre d'immigration. Nous avons pu trouver des terres d'accueil pendant des siècles.
01:29 Nous sommes partis par millions parce que nous avions besoin d'être accueillis ailleurs.
01:32 Eh bien aujourd'hui, il s'agit d'avoir ce même type de comportement.
01:36 - Vous êtes vous-même une enfant de l'immigration.
01:38 Je regardais ce sondage qui m'a frappé. 71% des Français estiment les arrivées trop importantes.
01:47 66% des Français estiment qu'il y a trop d'immigrés extra-européens.
01:52 69% des Français sont préoccupés par le sujet de l'immigration. Pourquoi ? Pourquoi selon vous ?
01:59 - Alors c'est très intéressant ces histoires de sondage parce que tout dépend toujours de ce que vous prenez comme référence.
02:05 Et moi j'avoue que je me réfère bien plus volontiers aux enquêtes qui portent sur du long terme
02:10 et qui évaluent comment est-ce que l'opinion publique française progresse ou régresse sur un certain nombre de ces sujets.
02:17 Et en fait, vous en avez une qui s'appelle "Les enquêtes sur les valeurs des Français" et qui a lieu tous les 9 ans.
02:24 Et qui permet de constater que bien au contraire, en fait, les Français sont de moins en moins hostiles sur les questions d'immigration ou d'asile.
02:33 C'est-à-dire que, par exemple, quand vous posiez au début des années 90 la question de la préférence nationale en matière d'accès à l'emploi.
02:40 Est-ce que vous pensez qu'il faudrait réserver plutôt les emplois aux Français, etc.
02:44 Les Français étaient bien plus nombreux à vous répondre "oui" qu'ils ne le sont aujourd'hui.
02:49 Et aujourd'hui, ils sont quelques 40% à répondre "oui" parce qu'en fait, ils se sont rendus compte avec le temps
02:56 qu'en réalité, les emplois que prennent les immigrés sont plutôt des emplois dans des secteurs en tension, que les Français ne prennent pas eux-mêmes, etc.
03:05 Quand vous les interrogez sur le fait que l'immigration apporte ou pas quelque chose de positif, une richesse économique, culturelle, etc.
03:15 À la France, ils sont de plus en plus nombreux à vous dire "oui, j'ai conscience qu'en fait, ça apporte".
03:19 Donc si vous voulez, ça dépend vraiment des sondages que vous prenez.
03:22 Ceux que vous venez de me citer, contrairement à ce que je viens de vous donner en exemple,
03:27 qui sont des enquêtes scientifiques menées dans des bonnes conditions sur du long terme qui permettent de comparer,
03:32 ceux que vous venez de me donner sont des sondages, j'allais dire, liés à une actualité polémique, politique, d'exploitation politicienne permanente.
03:42 Il ne faut pas s'étonner des résultats.
03:44 - Alors Gérard Darmanin dit "moi quand je me promène sur un marché par exemple, on ne me parle pas d'immigration".
03:50 Vous pensez que ce n'est pas une préoccupation majeure des Français, l'immigration, aujourd'hui ?
03:54 - Gérald Darmanin est un peu contradictoire entre nous, puisque d'une certaine façon, c'est lui qui porte ce texte.
03:59 Encore une fois, on parle du 29ème texte de loi depuis 1980, donc quand même une espèce de frénésie à légiférer,
04:07 qui, à tout le moins, doit nous interroger sur l'efficacité des politiques.
04:11 Parce que s'il faut reprendre la loi aussi souvent, c'est que vraiment, ils ne sont vraiment pas doués pour la rendre efficace.
04:16 - Donc monsieur Darmanin, tiens, j'allais dire souffle le chaud et le froid, et en cela il était assez macroniste, mais tout ça n'est pas très cohérent.
04:24 - Projet de loi immigration, donc, voté au Sénat, nous allons regarder un petit peu avec vous Najat Vallaud-Belkacem.
04:31 L'AME par exemple, suppression de l'aide médicale d'État remplacée par l'aide médicale d'urgence.
04:39 L'argent public était-il gaspillé ? L'AME encourageait-il le tourisme médical ?
04:45 - Non. Ce qui est très intéressant, et ça revient à votre question sur les sondages d'opinion à chaud des Français,
04:52 ce qui est très intéressant, c'est à quel point un certain nombre de mythes, comme ça, lancés dans le débat public,
04:57 finissent par influer sur l'opinion publique, qui finit par forcément y être sensible, penser qu'il y a une part de vrai, avoir un biais de confirmation, etc.
05:06 Là, il y a plusieurs réalités. D'abord, contrairement à ce qu'on entend souvent,
05:10 la France n'est pas le seul pays à soigner les personnes en situation irrégulière sur son territoire.
05:16 En fait, c'est quelque chose de tout à fait commun. La plupart des pays soignent les personnes en situation irrégulière.
05:21 - Soins d'urgence, très souvent. - Oui, avec un panier de soins, honnêtement, qui n'a rien à envier, j'allais dire, en Allemagne par rapport à la France, par exemple.
05:30 Donc la seule différence, et pourquoi est-ce que l'AME est si présent dans le débat public, c'est que nous,
05:35 dans notre présentation faciale, dans le budget de la Sécurité sociale, on voit apparaître la ligne consacrée à l'AME.
05:43 Et ce n'est pas forcément le cas dans d'autres pays. Mais bon, ça c'est la première chose.
05:48 Deuxième chose, est-ce que ce sont des coûts absolument considérables ?
05:53 Franchement, non seulement ils sont tout à fait limités, mais en plus, ils sont bien moindres que ce qu'ils seraient
05:58 s'il fallait attendre justement les situations d'urgence pour soigner les gens.
06:02 Or, c'est ce que le Sénat a proposé en transformant l'AME en AMU, c'est-à-dire ne traiter que les cas d'urgence, ne plus être dans la prévention,
06:10 ne plus permettre à ces personnes d'accéder à la médecine de ville.
06:14 Ça veut dire quoi ? Ça veut dire qu'elles vont venir engorger les services des urgences au moment où leurs pathologies seront tellement avancées
06:21 que ça coûte beaucoup plus cher que d'y répondre, sans compter, évidemment, les effets pour la population générale.
06:26 - Un mot qui revient sans cesse dans la bouche de nombreux Français, est-il équitable qu'un étranger sans papier bénéficie gratuitement de soins sans limite
06:37 alors qu'un Français ne peut pas accéder financièrement à tous les soins ?
06:41 Remboursement partiel de la sécurité sociale, mutuel obligatoire...
06:45 - Mais non, mais c'est typique des mensonges et des fake news.
06:49 - Mais j'entends ça sans cesse, vous aussi j'en suis sûr.
06:51 Il n'y a absolument que ce soit en matière d'accès à la santé, en matière d'accès au logement, en matière d'allocation de demande d'asile,
07:00 il n'y a aucune prestation qui traiterait plus favorablement les personnes en situation irrégulière, demandeurs d'asile, immigrés, etc. que les Français.
07:11 Ça n'existe pas, ça n'existe pas. Et vraiment tous les chercheurs ont travaillé sur ces sujets parce que ce sont des mythes récurrents.
07:17 - Un étranger sans papier, malade, est soigné gratuitement, totalement gratuitement, on est bien d'accord.
07:25 Il n'a rien à... Il ne peut rien payer. Il n'a rien payé.
07:28 - Mais comme une personne française qui ne dispose d'aucune ressource sera soignée gratuitement.
07:36 Et j'allais dire pour le coup les demandeurs d'asile, ou les personnes en situation irrégulière...
07:41 - Ils n'ont pas de mutuel à payer.
07:42 - Non, attendez, ils ont un délai de carence de trois mois qui fait que pendant trois mois en fait ils n'ont pas accès aux soins de santé, ce qui n'est pas le cas des Français.
07:50 - Ils n'ont par exemple pas de mutuel à payer.
07:52 - Oui, et aujourd'hui vous savez tous les salariés en France ont une mutuelle qui est payée par leur entreprise.
07:58 Et les autres entrent dans un autre cadre qui est la CMU.
08:01 - Certains sont obligés de se l'offrir la mutuelle de la payée.
08:03 - Non mais, et les autres, ceux qui ne sont pas en emploi, entrent dans un autre cadre qui est la CMU.
08:07 - Et c'est cette colère, cette forme de colère de la part de Français qui voit ça, qui regarde ça, en se disant "nous sommes désavantagés".
08:18 - Je vais être plus précise.
08:20 Que les Français qui entendent en permanence sur leurs ondes de la part de politiciens qui cherchent à exploiter ce sujet à défaut de trouver autre chose pour se faire élire,
08:30 ou de la part de polémistes qui ne s'informent jamais, ne lisent aucune analyse,
08:34 que des Français qui entendent ce genre de mythe et de fake news finissent par être impactés, par se dire qu'en effet il y a un problème,
08:42 je le comprends, parce que tout le monde n'a pas le temps d'aller creuser la chose, d'aller lire les travaux des chercheurs, d'aller regarder en quoi consistent les remboursements, etc.
08:52 Donc en fait c'est ça le problème de notre débat public, c'est qu'il n'est fait quasiment à 90% plus que d'instrumentalisation, d'exploitation, de manipulation,
09:02 et on a beaucoup de mal à y voir clair.
09:04 - Je me faisais la réflexion ce week-end, pardon je fais juste une parenthèse, mais il est apparu ce week-end, je le lisais dans plusieurs journaux,
09:12 à quel point les manipulations venant des Russes, vous savez les étoiles de David dessinées sur des façades,
09:20 même les affaires de punaises de lit dont la quantité a été grossie, en fait tout ça c'était des manipulations venant de la Russie.
09:27 Bon, je lisais ça et je me disais en fait j'ai l'impression qu'on est de plus en plus éclairé, heureusement, sur les manipulations exogènes venant d'autres pays.
09:35 Il faudrait qu'on apprenne à être éclairé sur les manipulations endogènes, c'est-à-dire venant de l'intérieur de notre pays, de notre débat public,
09:43 de la nullité du caractère complètement faux, trompeur, manipulateur de ce débat public, parce qu'un certain nombre de ces acteurs,
09:55 politiques notamment, se sentent impuissants sur la plupart des sujets politiques et non plus que celui-là, l'immigration, pour essayer de gagner quelques points.
10:04 - J'en termine, j'en termine avec l'immigration. - Sans aucune efficacité.
10:07 - Je vais en terminer avec l'immigration, mais je regardais TF1 hier soir, ce reportage dans le journal de 20 heures,
10:13 je ne sais pas si vous l'avez vu, des médecins qui rédigent de faux certificats médicaux à des étrangers en situation irrégulière,
10:19 permettant à ces étrangers d'être régularisés. Je ne sais pas si vous avez vu ça, il y a eu de nombreux médecins,
10:26 c'est plusieurs millions d'euros, l'escroquerie, là il faut absolument que la loi soit suffisamment sévère, j'imagine,
10:31 que vous êtes la première à le dire, Najat Balou Belkacem.
10:36 - Vous savez, j'entends souvent un commentaire, ou je lis souvent un commentaire sur les réseaux sociaux,
10:42 à propos des associations comme la nôtre, France Terre d'Asile, qui se battent pour la protection du droit d'asile et la défense des personnes.
10:50 J'entends souvent un commentaire visant à dire "vous êtes des laxistes, des immigrationnistes, ou que sais-je".
10:57 En fait, détrompez-vous, on est les premiers défenseurs de l'ordre, nous, parce que nous, on y tient à l'ordre.
11:02 Et l'ordre c'est quoi ? C'est en effet d'être ferme et de savoir sanctionner les escroqueries, les irrégularités,
11:11 quand quelqu'un n'a pas sa place en France pour des raisons évidentes, de délinquance, de réclamer que ce soit appliqué.
11:18 - Parce que les vrais demandeurs d'asile sont les premières victimes du désordre.
11:21 - Exactement, et en revanche, parce qu'on aura su être ferme sur le non, en quelque sorte, faire du oui dans de bonnes conditions.
11:29 Et le oui, c'est accueillir humainement, dignement, faire en sorte que les individus n'aient pas à dormir sous des tentes à la chapelle ou ailleurs,
11:38 qu'ils soient au contraire hébergés dans de bonnes conditions, comme on l'a fait avec les Ukrainiens.
11:41 On ne parle plus de la façon dont on a accueilli les Ukrainiens, c'était pourtant une illustration de ce que l'Europe, la France,
11:47 est capable d'accueillir dignement, humainement, et que ça se passe bien. Faisons-le pour les autres.
11:52 - Alors, dans ce projet de loi, il y a la facilitation d'expulsion d'étrangers condamnés.
12:00 Je dis bien expulsion des étrangers condamnés. Vous approuvez ? Ou pas ?
12:05 - Qu'on puisse expulser des étrangers condamnés ? - Oui.
12:09 - Oui, enfin, je veux dire... - Je vous dis ça parce que c'est ce qu'on appelle l'article, vous savez, c'est la double peine.
12:15 - La double peine. Mais en fait, moi, encore une fois, je pense qu'il faut de la fermeté sur tout ce qui est délinquance, tout ce qui est irrégularité.
12:25 - Donc là, ça ne vous pose pas de problème ? On est bien d'accord ?
12:27 - Non, ce qui me pose problème en revanche, et qui est sorti du texte du Sénat, c'est par exemple le fait de mettre sous rétention
12:33 des demandeurs d'asile avant même que leur dossier ait été instruit.
12:39 Ça, c'est quelque chose qui a été sorti de la discussion au Sénat.
12:43 C'est le fait de vouloir prononcer une obligation de quitter le territoire français
12:49 sitôt qu'un individu qui ne s'est pas vu reconnaître sa demande de droit d'asile, se les fait notifier.
12:58 Alors qu'on pourrait imaginer qu'un individu qui ne s'est pas fait reconnaître comme réfugié, en quelque sorte,
13:03 puisse avoir d'autres raisons, soit de rester sur le territoire, des raisons par exemple familiales,
13:08 soit tout simplement qu'il vienne d'un pays dans lequel il est impossible de le renvoyer.
13:13 Et il faut bien comprendre que la raison pour laquelle les OQTF ne sont pas suffisamment exécutés,
13:17 c'est qu'on n'obtient pas les laissés-passer pour un certain nombre de pays qui ont des états faillis, des états fragiles,
13:25 des états, par exemple en Afrique subsaharienne, qui tout simplement ne vont pas organiser ce retour.
13:30 Donc que fait-on des individus concrètement ?
13:33 Ça n'est pas en démultipliant le nombre d'OQTF qu'on va résoudre le problème.
13:37 En fait, on crée des situations, j'allais dire, d'errance, des situations où les gens sont en l'air, sans droit, dans la rue.
13:44 Alors qu'à un moment donné, il faut aussi s'interroger sur la façon dont faire respecter l'ordre,
13:50 c'est précisément prendre en charge ces gens, les intégrer, éviter qu'ils deviennent des troubles à l'ordre public.
13:57 - Ouverture du congrès des maires de France, Najat Vallaud-Belkacem, les maires agressés, enfin les agressions envers les élus sont de plus en plus nombreuses,
14:05 je regardais les chiffres, +15% je crois en 2023, alors menaces en tout genre, civilité et autres, et xénophobie aussi.
14:13 Mais que faire ? Mais que faire ?
14:16 - Alors moi je suis assez contente que le sujet vienne dans le débat public,
14:20 parce que c'est quand même un constat évident que c'est devenu de plus en plus difficile d'être élu local.
14:26 Nous on a eu affaire à beaucoup de maires qui, dans le cadre par exemple de l'accueil de centres d'hébergement,
14:32 d'accueil de demandeurs d'asile sur leur territoire, voyaient se démultiplier les manifestations organisées notamment par les émouristes et d'autres,
14:40 contre ce projet d'accueil de demandeurs d'asile, créant une situation de tension, de violence, de menaces,
14:47 qui pouvait aboutir dans le cadre par exemple du maire de Saint-Brévin jusqu'à un domicile de maire incendié,
14:55 une famille mise en danger de façon constante,
14:59 et jusqu'à ce que ce maire finalement décide d'arrêter tout simplement de renoncer au projet d'accueil de demandeurs d'asile,
15:04 mais aussi de se retirer.
15:06 Je pense que ça n'est pas acceptable, et il ne faut absolument pas sous-estimer cette violence-là,
15:12 qui non seulement porte atteinte aux individus évidemment, et donne de moins en moins envie à beaucoup d'entre eux d'aller se présenter à des élections,
15:18 mais aussi porte atteinte à la démocratie et tout simplement à notre capacité à vivre ensemble.
15:24 - Je lisais une interview de Ridley Scott, vous voyez je change, le réalisateur du film Napoléon qui sort mercredi,
15:30 "les français ne s'aiment pas" dit-il.
15:32 "Les français ne s'aiment pas", je trouve que c'est assez intéressant.
15:35 Vous le pensez ? Vous pensez que les français ne s'aiment pas ?
15:39 - Alors moi je dirais pas que les français ne s'aiment pas,
15:41 je dirais que les tensions et crispations permanentes autour des sujets d'immigration, d'asile, etc.,
15:48 en réalité si on met de côté tous les fake news sur les chiffres et tout ça,
15:51 nous renseignent davantage sur les français, c'est-à-dire sur nous-mêmes,
15:57 que sur ceux qu'on accueille ou qu'on n'accueille pas.
15:59 C'est-à-dire la façon dont on est à l'aise ou pas dans notre vie d'aujourd'hui.
16:05 La vérité c'est qu'on se sent fragile dans notre vie d'aujourd'hui en France, pour beaucoup d'entre nous.
16:10 Et c'est ça qui rend si préoccupant, qui crée beaucoup d'interrogations identitaires sur est-ce qu'on est capable d'accueillir de l'immigration et tout ça.
16:19 L'immigration on en a besoin pour des raisons économiques, sociales, de création, culturelles,
16:24 pour toutes ces raisons on en a besoin. L'Allemagne l'a parfaitement compris d'ailleurs.
16:28 - Même si elle revient, l'Allemagne, un peu sur... Elle change la loi, vous l'avez vu, comme nous.
16:34 - Alors pourquoi est-ce qu'on se sent finalement parfois un petit rallié sur ces questions identitaires ?
16:39 Peut-être parce qu'encore une fois on est en vulnérabilité ici.
16:42 Et on est en vulnérabilité à mesure notamment que nos services publics finalement se détricotent,
16:48 qu'on a le sentiment d'être moins bien traité, de ne pas avoir accès aux services de santé,
16:53 comme vous le disiez tout à l'heure, de vivre dans des déserts médicaux,
16:55 d'avoir une école qui ne fonctionne pas comme elle devrait fonctionner et tout ça.
16:58 Donc en fait c'est vrai, nos crispations sur la question de l'immigration nous renseignent sur notre vulnérabilité ici
17:04 et devraient pousser les pouvoirs publics, non pas à instrumentaliser la question de l'immigration,
17:08 mais à répondre à nos craintes ici et à renforcer nos services publics.
17:13 - Une question très intéressante, Najat Vallaud-Belkacem de la Fondation Jean Jaurès.
17:16 Auprès de 8700 personnes, que réclament les Français ?
17:20 De la tranquillité avant tout.
17:23 Que disent les Français ? Non aux diviseurs, non aux exaltés, non aux extrémistes,
17:29 mais toutes sortes, ceux qui manient le bruit et la fureur,
17:33 ceux qui manient le bruit et la fureur qui sont à gauche comme à droite.
17:37 Vous aussi ? Vous dites non à ceux qui manient le bruit et la fureur ?
17:42 - Je me reconnais parfaitement dans ce portrait que dresse la Fondation Jean Jaurès.
17:46 C'est évident qu'on est en souffrance honnêtement depuis des années maintenant
17:52 du fait de la nature de ce débat public et de ces diviseurs et de ces violents.
17:58 - Qui sont ces diviseurs d'ailleurs ? Disons-le ! Soyons clairs !
18:00 - Ils sont évidemment partout, malheureusement ils sont partout.
18:04 Parce que c'est très simple, ce serait trop simple de dire ils sont au debout de l'échelle politique.
18:08 - C'est Éric Zemmour ? C'est Jean-Luc Mélenchon ? Ce sont ceux-là ?
18:11 - C'est cette analyse-là qui à mon avis est trop simple parce qu'ils sont aussi par exemple dans des partis républicains,
18:17 les républicains précisément. Vous en trouvez ?
18:20 La nature des propos qui ont été tenus au Sénat dans le cadre de l'examen du projet de loi immigration la semaine dernière
18:26 mais sont absolument aberrants, infectes et vraiment, je veux dire, on ne l'a pas dit ici,
18:33 on a parlé beaucoup d'immigration irrégulière mais quand on voit que même des étrangers en situation régulière
18:39 se sont vus attaquer leur droit, leur droit par exemple à des aides publics au logement,
18:46 leur droit à des allocations familiales, etc.
18:49 Alors qu'ils sont installés là, qu'ils travaillent, qu'ils cotisent, qu'ils payent des impôts,
18:53 qu'ils participent à la richesse nationale, ça, ça a été décidé au Sénat la semaine dernière
18:58 et vous avez y compris des gens de Renaissance qui ont voté ça, donc le parti gouvernemental,
19:03 vous avez vraiment des gens qui n'ont plus la mesure des choses, qui n'ont plus peur d'être dans l'outrance,
19:11 vraiment dans l'outrance des propos, des fake news, des violences,
19:15 et je pense que chacun doit balayer devant sa porte, oui.
19:19 - Najat Vallaud-Belkacem, comment peut-on être wokiste, néo-féministe et islamo-gauchiste ?
19:27 - Alors, wokiste, néo-féministe et islamo-gauchiste...
19:31 - C'est-à-dire ? - Non, non, non.
19:33 Par exemple, pourquoi est-ce que les néo-féministes ne disent rien sur le combat des femmes iraniennes ?
19:39 - Mais vous trouvez, vous ? - Oui.
19:41 - Moi, je ne sais pas ce qu'on appelle néo-féministe, mais moi je suis une féministe clairement
19:46 et j'appartiens au monde d'aujourd'hui, donc c'est ça qu'on appelle néo-féministe.
19:49 Le combat des femmes iraniennes, le combat des femmes afghanes,
19:53 je ne suis pas la dernière à en parler bien, au contraire.
19:56 - Est-ce qu'on peut les manifester pour les palestiniens
20:04 et parallèlement trouver que le Hamas n'est pas un mouvement de résistance
20:11 et en même temps défendre les LGBT ?
20:15 - Vous savez, moi j'aime bien réfléchir simplement, le plus simplement possible.
20:22 - Allez-y.
20:24 - Sur le sujet que vous venez d'évoquer, depuis le 7 octobre dernier,
20:28 je vous avoue que je suis sous le choc.
20:30 - Perdue ? - Non, je suis sous le choc.
20:32 Un choc vraiment qui se prolonge depuis.
20:34 J'ai été effondrée par ce qui s'est passé le 7 octobre dernier,
20:40 par la barbarie du Hamas à l'égard de ces pauvres gens, femmes, enfants, vieillards.
20:45 J'ai été vraiment effondrée, voilà.
20:47 Et je l'ai dit sur le moment et je continue de le penser.
20:50 Et il n'y a pas un jour où je ne pense pas aux otages qui sont encore retenus
20:54 évidemment.
20:56 Mais quand je dis que je suis sous un choc prolongé,
20:58 c'est que malheureusement, ce que j'ai ressenti ce jour-là,
21:01 c'est que le gouvernement de Netanyahou allait tomber dans le piège
21:04 qui lui était tendu par le Hamas.
21:06 Il y est évidemment tombé, il y a sauté les deux piégeoins.
21:10 Et depuis, ce qui s'est abattu sur la population de Gaza
21:14 est absolument infernal, insupportable.
21:18 Et donc je suis aussi la première à réclamer un cessez-le-feu.
21:22 Donc vous dites "est-ce qu'on peut descendre dans la rue pour tout ça à la fois ?"
21:24 Évidemment, moi je descends dans la rue pour tout ça à la fois.
21:27 Mais ce qui m'insupporte, je vais vous dire dans le débat public,
21:30 c'est tout autant les gens qui qualifient le Hamas de mouvement armé de résistance,
21:37 c'est une horreur pour moi, ça me fait vraiment frémir d'entendre ces mots-là,
21:41 que les gens qui, lorsque vous dites "il faut un cessez-le-feu à Gaza",
21:47 vous répondent immédiatement "donc vous êtes antisémites".
21:50 Vous voyez, c'est ces deux folies-là dont je ne veux plus.
21:53 Donc oui, je rejoins ce que disait la Fondation Jean Jaurès,
21:56 je fais partie des gens qui demandent juste de la nuance et de la raison dans le débat.
22:01 - La France prête à accueillir une cinquantaine d'enfants blessés de Gaza,
22:06 la France doit-elle accueillir des réfugiés de Gaza ?
22:08 Je vous pose la question parce que j'ai vu une tribune dans le Washington Post
22:12 d'extrémistes israéliens, d'extrême droite,
22:17 qui demandent à ce que la France et l'Europe accueillent des enfants,
22:21 et pas que des enfants, des réfugiés de Gaza.
22:23 - Et donc la question c'est, est-ce qu'on fait bien d'accueillir des enfants pour les soigner ?
22:29 - Est-ce qu'on devrait accueillir des réfugiés de Gaza ?
22:31 - Ben oui, enfin je veux dire, tout individu qui doit fuir son territoire, son état,
22:37 qui n'a pas le choix car il est persécuté pour des raisons,
22:40 j'allais dire idéologiques, religieuses, ou liées à sa situation personnelle,
22:46 doit pouvoir être accueilli en effet dans l'état où il se rend.
22:49 - Najat Vallaud-Belkacem, vous disiez tout à l'heure,
22:51 je suis horrifié par ce qui s'est passé le 7 octobre,
22:54 je ne comprends pas qu'on puisse nier le caractère terroriste du Hamas,
23:01 oui mais il y a des ONG qui défendent les droits de l'homme
23:06 et qui n'ont jamais qualifié de terroristes les massacres,
23:09 de terrorisme les massacres commis par le Hamas le 7 octobre.
23:13 - Je ne veux pas rentrer là-dedans,
23:15 parce que moi je me suis rendu compte quand même d'une chose ces derniers temps,
23:18 c'est que les ONG font de plus en plus souvent l'objet d'attaques qui sont d'une violence,
23:25 enfin je veux dire, il faut se souvenir de quoi on parle.
23:27 - Elles sont peut-être de plus en plus souvent politisées ou pas ?
23:29 - Je ne dirais pas qu'elles sont de plus en plus souvent politisées,
23:32 mais je dirais qu'elles sont de plus en plus souvent la cible d'attaques politiques,
23:36 en fait c'est ça qui en fait un objet politique.
23:39 Et je suis très frappée parce que c'est vrai des ONG, des associations nationales installées ici,
23:46 on en a eu quelques exemples encore récemment,
23:48 et c'est vrai des associations et des ONG internationales.
23:51 Je voudrais redire par exemple si on pense à Médecins Sans Frontières ou Amnesty International etc,
23:59 qu'on parle d'individus qui donnent leur vie dans des conditions absolument atroces
24:05 pour aller aider d'autres personnes.
24:07 - Mais Amnesty n'a jamais qualifié le Hamas de mouvement terroriste,
24:13 n'a jamais parlé des massacres du 7 octobre,
24:18 enfin a parlé des massacres du 7 octobre mais sans condamner une seule fois le Hamas.
24:23 - Pardon, mais je n'ai pas lu la même chose que vous,
24:26 moi je les ai quand même vus condamner le Hamas.
24:28 - Oui, peut-être condamner, mais est-ce que le Hamas...
24:31 - Mais de toute façon je ne suis pas membre ni représentante d'Amnesty,
24:34 donc je ne veux pas m'exprimer sur ce qu'ils disent,
24:37 mais en tout cas ce qui est certain,
24:38 c'est que les agissements sur le terrain de ces ONG sont particulièrement difficiles.
24:44 Et je pense que toute personne polémiste, commentateur sur les plateaux télé
24:51 qui confortablement installée s'exprime sur ces ONG et leur travail
24:56 devrait juste retrouver un peu de décence
24:59 et prendre trois minutes pour se renseigner sur ce qui est fait,
25:01 sur la difficulté de ce qui est fait.
25:03 Je voudrais juste terminer sur un sujet,
25:06 c'est que les conflits sont, comme vous le savez,
25:09 en nombre de plus en plus important dans notre monde,
25:11 ils n'ont jamais été aussi importants,
25:12 le nombre de populations exposées à des conflits n'a jamais été aussi important depuis 45.
25:17 Et donc on va quand même avoir un tout petit peu besoin
25:20 de se serrer les coudes, de se souder un petit peu
25:24 et de ne pas passer son temps à jeter de l'huile sur le feu
25:26 en accusant un tel, de telle horreur ou de telle autre horreur,
25:30 quand c'est inutile.
25:32 Il y a suffisamment de gens qui sont là pour exploiter,
25:35 pour tirer les ficelles, pour manipuler, pour lancer les conflits
25:38 et contre lesquels on peut se retourner
25:40 pour ne pas avoir besoin de se retourner
25:41 contre ceux qui sont d'abord là pour aider.
25:43 - Merci N'Ajad Nallou-Belkacem.

Recommandations

38:01