00:00 Ce matin à 7h46, le mois d'octobre commence sous un dôme de chaleur.
00:04 Alice, hier des records ont été battus dans le sud de la France.
00:06 Chez nous, on n'en était pas loin avec plus de 30° à Colmar ou encore Célestat.
00:10 Un été indien synonyme de réchauffement climatique difficile à gérer pour les producteurs de la région.
00:15 On reçoit ce matin pour en parler le directeur de l'Interprofession Fruits et Légumes d'Alsace.
00:19 Bonjour Fabien Tissier.
00:20 Bonjour.
00:21 Quand il fait très chaud à cette période, avec des températures qui sont complètement anormales,
00:25 est-ce que les producteurs sont inquiets ?
00:27 Évidemment on est inquiet puisque les années qui se suivent ne se ressemblent pas.
00:32 Mais ça fait quelques années, particulièrement celle-ci, qui est un peu compliquée et très atypique.
00:37 Concrètement, quand il y a beaucoup de soleil, des températures très élevées même la nuit,
00:42 ça a quel effet sur les fruits et légumes ?
00:44 Il y a deux conséquences.
00:46 Il y a une conséquence sur la production et puis il y a une conséquence sur la consommation des producteurs.
00:53 En ce qui concerne la production, la difficulté c'est qu'on a les chaleurs automnales
01:00 qui arrivent et qui font pousser les légumes beaucoup plus vite qu'il ne faudrait.
01:03 Les légumes d'automne ?
01:04 Notamment les légumes d'automne, les légumes d'hiver.
01:06 On pense notamment par exemple aux poireaux.
01:08 Le poireau d'hiver devrait arriver au mois de janvier, février, mars et est déjà là.
01:13 Il pourrait déjà être récolté.
01:15 Là il y a déjà des poireaux qui poussent alors qu'ils devraient être récoltés en janvier.
01:18 Exactement.
01:19 Pareil pour les navets qui ont une croissance rapide.
01:21 Ça c'est une des premières conséquences.
01:23 Les plantes poussent beaucoup plus vite.
01:25 Et l'autre conséquence, c'est l'effet inverse pour certaines cultures comme la choucroute.
01:28 Le choix choucroute qui va s'arrêter de croître dans cette période chaude.
01:35 D'habitude au mois de septembre ou octobre il va faire des pousses, il va faire sa pomme.
01:40 Et là actuellement il est bloqué.
01:42 Alors que de l'autre côté la demande ne suit pas tellement.
01:45 On a forcément envie de manger des poireaux en ce moment avec ces températures là.
01:49 C'est exactement ça.
01:51 Les gens sont plutôt amenés à acheter des produits dits ratatouilles.
01:55 Les courgettes, les tomates, les concombres, etc.
01:58 On arrive enfin à la production en Alsace.
02:00 Et donc ils vont laisser tomber ce qu'on appelle les légumes plutôt pot-au-feu,
02:05 les céleris, le poireau, les carottes, etc.
02:08 Mais ça veut dire quoi ? Ça veut dire que ces produits là, on les jette ? Il y a des pertes là-dessus ?
02:12 Non, par contre ce qu'on peut inviter ce sont les consommateurs à manger des salades de céleri,
02:18 des salades de carottes, des salades de chou aussi.
02:22 Et même le chou à choucroute, vous savez on peut manger de la choucroute
02:26 sans avoir tout le reste qu'on a l'habitude d'avoir.
02:29 On peut manger de la choucroute aux poissons ou alors une salade de choucroute.
02:32 C'est excellent dans cette saison.
02:34 Donc on peut aussi encourager les consommateurs à acheter des produits locaux plutôt sous forme de salade.
02:38 Quand on est producteur de poireaux, par exemple en ce moment,
02:42 on anticipe une année où il y aura potentiellement des pertes sur le chiffre d'affaires
02:46 par rapport à une année normale si ça existe encore ?
02:48 Alors je dis peut-être puisque la météo est capricieuse et peut souvent très très vite changer.
02:54 Donc il peut faire très chaud mais aussi d'un seul coup il peut faire très frais,
02:57 très frais au moins octobre voire novembre.
02:59 Donc la culture peut se bloquer.
03:01 Donc il ne faut pas aller si vite en besogne avec la météo
03:04 parce qu'il y a des fois des retournements de situation assez atypiques aussi.
03:07 Étonnez-vous qu'il y avait peut-être un jardin à la maison, un petit potager ou que sais-je encore.
03:11 Venez témoigner ce matin sur France Bleu Alsace.
03:13 Comment vous modifiez vos pratiques peut-être ?
03:16 Comment vous cultivez votre potager avec ces températures qui grimpent
03:19 et cette saison automne qui n'est plus vraiment une saison estivale
03:22 et cet été qui perdure 0,3, 88, 25, 15, 15.
03:25 On discute avec vous sur France Bleu Alsace.
03:27 Tout ça, ça arrive en pleine sécheresse.
03:29 Les pluies de cet été, elles n'ont pas suffi à tenir encore jusqu'à maintenant.
03:33 Je vous propose d'écouter ce qu'en dit Frank Sander, le président de la FDSEA.
03:36 Par endroits, c'est trop sec pour arracher des pommes de terre.
03:39 La récolte de betteraves est sur le point de démarrer.
03:41 Là aussi, il y aura beaucoup plus d'usure sur le matériel pour pouvoir justement travailler le sol
03:46 afin d'arracher la betterave entière.
03:48 Ça, c'est un élément qui ne bouge pas.
03:50 On a beau être assis sur la plus grande nappe phréatique de France, ça reste un problème.
03:57 Oui, c'est un problème.
03:58 On voit par exemple sur la pomme de terre, qu'on fait trop sec, on a du mal à la récolter.
04:03 Et puis, il y a un peu plus de casse. Habituellement, l'humidité du sol permet d'amortir ces chocs.
04:09 Donc, quelques fois, les producteurs irriguent, même avant de devoir récolter.
04:14 Mais l'irrigation est indispensable aujourd'hui pour produire des fruits et légumes en Alsace.
04:18 C'est une garantie, c'est une assurance récolte aussi pour les producteurs.
04:21 C'est comme ça que c'est une façon de s'adapter pour les producteurs.
04:24 Est-ce qu'il y a d'autres façons ?
04:25 Vous entendez tout à l'heure dans l'écho d'ici les viticulteurs qui cherchent d'autres espèces, d'autres types de raisins.
04:33 Oui, d'autres cépages.
04:34 Il y a effectivement des recherches qui sont effectuées en Alsace pour la viticulture.
04:38 Mais pour les fruits et légumes aussi, on a des centres de recherche.
04:41 On va essayer de trouver des variétés, des espèces qui s'adaptent à notre climat.
04:46 Puis, on va essayer de réfléchir.
04:47 Il y a d'ailleurs une étude qui est en cours pour la production fruitière et léguminaire alsacienne,
04:51 pour essayer de trouver les variétés de demain, les espèces de demain.
04:54 Pourquoi pas aussi faire plus de pastèques ou des melons en Alsace ?
04:57 Le gouvernement, la semaine dernière, a présenté un pacte pour replanter des haies.
05:02 C'est plus de 100 millions d'euros pour replanter 50 000 kilomètres et supplémentaires.
05:08 C'est pour aller dans le sens de la biodiversité, même si on sait que ça peut être un petit peu cher pour les producteurs d'entretenir ces haies-là.
05:16 Est-ce que ça pourrait être applicable chez nous ?
05:18 Est-ce que ça pourrait être une façon de s'en sortir ?
05:23 Alors, les haies, dans la production de légumes et de fruits, on n'en voit pas tout à fait l'intérêt.
05:29 Puisque, en arboriculture, on a des haies déjà naturelles, avec les arbrutiers qui vont faire de l'ombre aux cultures.
05:36 Et aussi toute une biodiversité qui se met en place aussi auprès des arboriculteurs.
05:41 En légumes, c'est quand même plus compliqué.
05:43 S'adapter, ce n'est pas toujours facile.
05:45 Prendre des moyens d'irrigation, c'est cher.
05:48 C'est quoi l'état d'esprit chez les maraîchers aujourd'hui ?
05:51 Est-ce qu'ils sont plutôt fatalistes face à ce changement climatique qui perturbe tous les ans, d'une façon différente, les récoltes ?
05:58 En fait, la solution c'est s'adapter, évidemment.
06:00 Donc, l'irrigation est un moyen aussi de s'adapter.
06:03 Il y a des investissements, mais derrière, c'est aussi une garantie de récolte.
06:07 Si on prend le cas de la pomme de terre, un producteur qui va irriguer, l'autre qui ne va pas irriguer,
06:12 celui qui n'irrigue pas, il a une récolte de -40 à -50%.
06:17 Donc, c'est une obligation de pouvoir irriguer, parce que c'est une garantie de récolte.
06:21 Et tout le monde en a les moyens ?
06:23 Tout le monde se donne les moyens pour y arriver, tout à fait. Là où il y a de l'eau.
06:26 Est-ce que ces difficultés croissantes dans le secteur du maraîchage, ça freine certaines personnes qui voudraient s'installer ?
06:35 Est-ce qu'il y en a qui laissent tomber, ou alors qui ne se forment pas ?
06:40 Je ne sais pas si on peut parler de conséquences aussi négatives.
06:43 Ce qu'on peut dire, c'est qu'on a quand même la chance en Alsace d'avoir une grande zone de production de fruits et légumes
06:49 qui s'est stabilisée, voire qui a augmenté ses surfaces ces dernières années, depuis 20 ans.
06:54 Alors qu'en France, beaucoup de régions de production ont diminué les surfaces,
06:58 l'Alsace a su mettre en œuvre un plan de développement de la production.
07:03 Donc, on a plutôt un vent qui souffle dans le dos.
07:06 Donc, le tableau n'est pas si noir, finalement ?
07:09 Non, on va vraiment positiver l'image que donnent les fruits et légumes.
07:14 C'est une filière dynamique, une filière qui bouge, une filière qui développe de l'emploi aussi.
07:19 Donc, tous les voyants sont au vert pour essayer d'aller de l'avant, même s'il y a des vents contraires.
07:24 Dynamique, même dans la filière bio, on sait qu'elle est très en difficulté ces derniers mois à cause de l'inflation.
07:29 La consommation d'aliments bio a diminué de 5% l'année dernière.
07:33 Tout à fait, et c'est pour ça aussi qu'on encourage les consommateurs alsaciens à jouer la carte locale.
07:38 Alors, on a deux marques en Alsace, Fruits et Légumes d'Alsace et Fruits et Légumes Bio d'Alsace.
07:42 On encourage les consommateurs à aller acheter dans tous les circuits de commercialisation,
07:47 au marché, au supermarché, les produits locaux, parce que quelque part, ce sont les circuits courts.
07:52 Et c'est aussi la souveraineté alimentaire qui se joue à ce moment-là.
07:56 Et on entend votre message en manger local, manger des produits de saison.
07:59 Alors là, c'est plutôt les poireaux, vous le disiez, les potirons, déjà ?
08:04 - Oui, les potirons aussi, les poireaux et tous les produits d'automne qu'on peut aussi consommer,
08:09 comme je disais tout à l'heure, en salade.
08:11 Et d'ailleurs, on vous invite à découvrir tout cela aussi aux journées d'octobre à Mulhouse,
08:16 puisqu'on est en train de décorer de magnifiques structures à base de fruits et légumes
08:21 dans ce show floral qui s'appelle Folies Flore à Mulhouse.
08:25 Et ça démarre d'ailleurs ce jeudi.
08:27 Et j'invite vraiment tous les citoyens alsaciens à y faire un tour.
08:30 Et vous verrez de magnifiques fruits et légumes d'Alsace.
08:32 - On aura l'occasion largement d'en reparler sur France Bleu Alsace.
08:34 - Bien sûr que oui, puisque nous y serons à Folies Flore.
08:37 Nous nous installerons effectivement dans ce show floral à partir de jeudi.
08:42 Et on vous offrira aussi des places auditeurs de France Bleu Alsace pour aller y faire un tour.
08:45 Merci beaucoup d'avoir été avec nous, M. Dijel.