Haut-Karabagh: tout comprendre sur le conflit qui oppose l'Azerbaïdjan à l'Arménie
L'exode des Arméniens de l'enclave du Haut-Karabagh se poursuit. Dans le même temps, une explosion est survenue ce samedi matin à proximité d'une route. Les policiers sur place parlent d'une destruction dans le cadre d'un chantier pour refaire la route par les Azerbaïdjanais, afin de s'approprier le territoire.
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00:00 Bonjour Taline Papazian, merci d'être avec nous.
00:01 Vous êtes docteure en sciences politiques,
00:03 auteure de "L'Arménie à l'épreuve du feu".
00:05 Ce n'est pas la première fois qu'il y a des conflits avec l'Azerbaïdjan,
00:09 mais comment vous expliquez cette situation
00:10 qui conduit au départ de la quasi-totalité de la population ?
00:13 Eh bien, il faut pour la comprendre, remonter à la dernière guerre,
00:18 celle de 2020, la guerre des 44 jours.
00:20 Donc au terme de laquelle l'Azerbaïdjan avait récupéré le contrôle
00:25 sur une très grande partie, on va dire à peu près les deux tiers
00:29 de l'ancienne région autonome du Haut-Kalabakh.
00:31 Et il restait un petit corridor
00:34 qui faisait la jonction entre le Haut-Kalabakh et l'Arménie.
00:37 Ce corridor s'est retrouvé bloqué à partir de décembre 2022.
00:41 Et si vous voulez, il était clair depuis 2020 que l'Azerbaïdjan
00:45 estimait que ses objectifs de guerre n'étaient pas totalement remplis.
00:49 Donc entre 2020 et 2023, elle a petit à petit progressé
00:55 vers la réalisation de ses objectifs.
00:59 Il y a plusieurs facteurs qui sont favorables.
01:01 Le contexte international, l'affaiblissement de la Russie,
01:03 la guerre en Ukraine, le fait que l'Azerbaïdjan soit un très bon partenaire
01:07 de l'Europe, des États-Unis, enfin bref.
01:09 Et donc tout ceci explique que là,
01:10 la semaine dernière,
01:14 elle a été en position ou en situation, disons,
01:17 de bombarder la région autonome du Haut-Kalabakh et très vite
01:20 de pouvoir balayer l'armée de défense,
01:22 ce qui aboutit donc au nettoyage ethnique
01:25 que votre correspondante a dû décrire.
01:28 L'action ou plutôt l'inaction de la force de maintien de la paix russe
01:32 sur le territoire, comment on l'explique ?
01:34 C'est parce qu'elle n'a plus les moyens, parce qu'elle est engagée ailleurs
01:36 ou il y a aussi des intérêts politiques à ne pas agir ?
01:40 C'est une situation très compliquée.
01:44 L'inaction, en fait, il faut quand même tempérer le propos
01:46 parce que sans les forces de maintien de la paix russe,
01:49 il y a tout à craindre.
01:52 Ce nettoyage ethnique qui aujourd'hui permet aux gens d'avoir la vie sauve
01:56 aurait probablement eu lieu de manière extrêmement violente.
02:00 Donc, les forces de maintien de la paix ont joué un rôle d'ultime bouclier,
02:03 si je puis dire, et il faut le reconnaître.
02:06 Maintenant, elles n'ont pas rempli leur mission et ça,
02:08 vous avez raison de le souligner.
02:10 Leur mission était de maintenir le cessez-le-feu dans la région.
02:12 Leur mission était de permettre aux habitants du Kharaport
02:15 de pouvoir vivre en sécurité.
02:17 Sur ces deux points là, c'est l'échec.
02:18 Et il y a en effet un certain nombre de facteurs politiques qui expliquent
02:22 que la Russie n'ait pas souhaité
02:28 pouvoir remplir cette mission comme elle l'aurait dû.
02:31 J'ai envie de vous dire que pour les Arméniens,
02:33 le fait qu'elle n'ait pas pu ou pas voulu
02:35 fait assez peu de différence dans le résultat final
02:38 concernant les Arméniens du Kharaport.
02:39 Mais en revanche, ça fait une très grosse différence
02:41 du point de vue de la situation entre l'Arménie et la Russie,
02:43 puisque ces deux pays qui sont toujours sur le papier des alliés
02:48 sont en réalité en train de connaître une crise sans précédent.
02:51 depuis 1991.