Roussel : Le festin de l'araignée op.17 (Philharmonique de Radio France / Barbara Hannigan)
  • il y a 2 ans
Sous la direction de Barbara Hannigan, l'Orchestre philharmonique de Radio France joue le Festin de l'araignée, composé en 1912 par Albert Roussel. Extrait du concert donné le 8 janvier 2022 à l'auditorium de la Maison de la Radio.

Fragments symphoniques d'après la musique de ballet
Prélude
Entrée des fourmis
Danse du papillon
Éclosion de l'éphémère
Danse de l'éphémère
Funérailles de l'éphémère
La nuit tombe sur le jardin solitaire

Il est dans l’histoire de la musique des années exceptionnelles, semblant concentrer les forces vives de la création pour favoriser l’éclosion de nouveaux langages et de nouveaux genres. Ainsi le doublon 1912-1913 avec Pierrot lunaire de Schoenberg, les Six Bagatelles de Webern, Pénélope de Fauré et le premier cahier de Préludes de Debussy. En France, de jeunes générations s’empressent d’occuper la place laissée vacante par le vieux Massenet enterré.
Au jeu des chaises musicales, le gagnant est peut-être Diaghilev : deux ans suffisent à ses Ballets pour présenter Jeux de Debussy, Daphnis et Chloé de Ravel, et Le Sacre du printemps de Stravinsky. Déjà déconcerté par la nonchalance de jeunes gens partis à la recherche d’une balle de tennis pour s’adonner à d’improbables jeux de séduction (Jeux), le public réserve un bruyant scandale à la chorégraphie de Nijinski et à la musique de Stravinsky.
Un mois plus tôt, un autre ballet a impressionné les Parisiens. Premier ballet du lieutenant de marine Roussel, Le Festin de l’araignée a pour décor une immense toile tendue pour capturer les insectes-danseurs qui, l’un après l’autre, se font prendre au piège. Des insectes sur scène ? Voilà qui est rare en musique. Il y a bien le Vol du bourdon de Rimski-Korsakov, le Grillon de Ravel et la Sauterelle de Poulenc, mais l’orchestre paraît souvent bien grand pour de si petites bêtes.
Dédié à Jacques Rouché et donné au Théâtre des arts, le ballet repose sur un argument du comte Gilbert de Voisins, lui-même inspiré par les Souvenirs entomologiques de Fabre. « Il me semble un peu long, mais plus amusant aussi que le projet primitif », écrit Roussel à Jacques Rouché à propos de l’étonnant récit qui lui est soumis. Des insectes donc, et des arachnides puisqu’il y a six et huit pattes. Le compositeur insiste sur la suppression de quelques scènes et de quelques bestioles, et conçoit une musique parfaitement autonome vis-à-vis du spectacle. Certes, cette musique n’oublie pas de jouer son rôle, mais sa signification dépend moins de l’action et des gestes des danseurs, que des délicates évocations savamment distillées par l’orchestre. Ainsi le prélude : le calme n’est qu’apparent, les syncopes des cordes, sous le solo de flûte, sont bientôt gagnées par des trémolos menaçants. Puis le rideau s’ouvre et le défilé commence : fourmis, papillon, éphémère et mante religieuse.
La mangeuse est mangée : la morale est sauve. Le monde est bien dangereux à toutes les échelles, dans le méandre des herbes comme chez les hommes. À chaque insecte ses rythmes
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