Pour faire des économies, le gouvernement veut réduire les conditions d'accès aux indemnités chômage post rupture conventionnelle. Le nombre a explosé ces dernières année pour atteindre un record de 515 000 ruptures conventionnelles en 2024, en hausse de 17% par rapport à la période pré covid. Regardez L'angle éco de Pierre Herbulot du 25 juillet 2025.
00:01L'Angle Éco, le décryptage du matin, Pierre Arbulot, vous revenez sur l'une des pistes d'économie du gouvernement pour son prochain budget.
00:09Elle tient donc en deux mots, rupture conventionnelle.
00:12Ce dispositif pile entre la démission et le licenciement.
00:15C'est le départ d'un salarié de son entreprise, d'un commun accord avec son employeur qui lui verse des indemnités de départ.
00:21Le dispositif ouvre ensuite droit au chômage. C'est là que le gouvernement veut intervenir.
00:26En rabotant les droits au chômage qui font suite à une rupture conventionnelle.
00:29On est en train de regarder, fait savoir sobrement le ministère du Travail.
00:32La piste qui tient la corde, c'est allonger le délai de carence entre la rupture conventionnelle et la date de la première indemnisation.
00:39Allonger le délai de carence parce que ça existe déjà ?
00:41Oui, et ça répond au doux nom de différé spécifique.
00:45On a le chic pour trouver des noms simples.
00:46Aujourd'hui, ça correspond à 7 jours minimum.
00:48Une semaine donc entre le moment où un salarié quitte son poste et le début de ses droits au chômage.
00:53Un délai qui peut s'allonger en fonction des indemnités de la rupture conventionnelle.
00:57Je ne rentre pas dans les détails du calcul, mais si elles sont très importantes, ça peut aller jusqu'à 5 mois entiers.
01:02Le gouvernement veut donc étendre ses délais de carence, passer le minimum à 2 semaines, 3 semaines, 1 mois,
01:08voire carrément dans le pire des scénarios selon les syndicats.
01:11Considérer la rupture conventionnelle comme une démission, ça veut dire que l'indemnité chômage ne tomberait pas avant 4 mois entiers, quoi qu'il arrive.
01:18Et pourquoi le gouvernement s'attaque aux ruptures conventionnelles ? On en abuse ?
01:21Oui, il y en a eu l'an dernier 515 000, un niveau record déjà atteint l'année précédente, en hausse de 17% par rapport à avant le Covid.
01:30Cette année 2025 est partie sur un rythme similaire avec déjà 128 000 ruptures conventionnelles au premier trimestre.
01:36Et qui en abuse alors ?
01:37Vous voulez la version des patrons ou celle des syndicats ?
01:39J'ai l'impression de voir où vous voulez en venir.
01:41Oui, chaque partie accuse l'autre d'en profiter.
01:44J'ai eu la CGT hier au téléphone qui m'a dit que les patrons utilisaient cette rupture co, comme on dit, pour éviter d'avoir à passer par des plans de licenciement.
01:52C'est le concept de virer quelqu'un, mais à l'amiable.
01:55L'avantage du point de vue du chef d'entreprise, c'est un dispositif plus souple, potentiellement des indemnités un peu plus faibles à verser.
02:02Et enfin, ça éloigne aussi le risque de contestation au prud'homme par le salarié, parce qu'il a donné son accord.
02:08Je précise qu'il y a quand même des garde-fous.
02:10Au-delà de 10 ruptures conventionnelles, un patron est obligé de consulter les représentants du personnel.
02:14Mais alors, comment se défendent les patrons ?
02:16Ils répondent un peu l'inverse.
02:18Qu'aujourd'hui, un salarié qui veut partir d'une entreprise, plutôt que de démissionner, il va toquer à la porte de son supérieur pour demander une rupture conventionnelle.
02:25Et que quand c'est refusé, il menace parfois de se mettre en arrêt maladie.
02:28Bref, pardonnez l'expression, il fait cracher l'employeur, puis l'unédic derrière avec les droits au chômage.
02:35La réalité se situe probablement un peu au milieu, entre le licenciement déguisé et le salarié profiteur.
02:41Aucune étude n'est aujourd'hui capable de dire s'il y a effectivement un report d'un côté ou de l'autre.
02:46En revanche, ce qui est sûr, c'est que les salariés démissionnent encore et beaucoup.
02:50D'après les chiffres du gouvernement, en 2023, sur les 4 millions de salariés qui ont quitté leur entreprise,
02:55il y a eu 2 millions de démissions, 600 000 licenciements et 500 000 ruptures conventionnelles.
03:00Pierre, quelles que soient les raisons, la finalité est la même. Le gouvernement trouve que ça coûte trop cher.
03:05Oui, puisque les 3 quarts des salariés qui quittent leur emploi via une rupture conventionnelle finissent indemnisés par France Travail.
03:10Aujourd'hui, d'après l'UNEDIC, ils représentent 20% des ouvertures de droits au chômage.
03:14Une source au gouvernement explique que ce sont des profils jeunes, entre 25 et 45 ans, principalement des cadres.
03:21Bref, des actifs qui pourraient rapidement retrouver du travail.
03:24L'idée, c'est donc de rendre moins attractif le dispositif pour faire des économies sur l'assurance chômage.
03:28Et ça, ça pourrait rapporter combien ?
03:30Pas d'estimation encore, d'autant que ce coup de rabot serait intégré dans une réforme plus globale de l'assurance chômage.
03:36Allongement de la durée de cotisation, donc du temps de travail nécessaire pour avoir accès à une indemnité.
03:40Durée d'indemnisation plus courte aussi.
03:42Sur le principe du conclave sur les retraites, ce sont les patrons et les syndicats qui devront négocier.
03:47Avec une enveloppe d'économie globale à réaliser.
03:49On devrait avoir le détail au mois d'août avec les lettres de cadrage.
03:53Mais un négociateur syndical estime le volume d'économies demandées à 3 ou 4 milliards d'euros.
03:57C'est quasiment 10% de l'enveloppe prévue dans le projet de budget.