Passer au playerPasser au contenu principalPasser au pied de page
  • aujourd’hui
Ce samedi 19 juillet, Bruno Coquet, docteur en économie, chercheur associé à l'OFCE, et Alexis Goujon, directeur général de l'association Les Relocalisateurs, étaient les invités dans l'émission Hebdo Com, présentée par Sofiane Aklouf. Hebdo Com est à voir ou écouter le samedi sur BFM Business. Cette émission a été réalisée en partenariat avec CB News.

Catégorie

📺
TV
Transcription
00:00Bonjour à tous et bienvenue dans ce nouveau numéro d'Ebdo.com consacré à ceux qui font bouger les médias et le monde de la communication.
00:18Cette semaine, une question aussi simple que fondamentale.
00:21Et si l'on relocalisait les budgets publicitaires ? Enjeux économiques, de diversité mais aussi démocratiques.
00:28C'est justement la mission des relocalisateurs, une association constituée pour rediriger les budgets publicitaires.
00:35On en parle avec nos deux invités.
00:41Bonjour à tous les deux et merci d'avoir accepté l'invitation de BFM Business.
00:45Bruno Coquet, économiste, auteur d'une étude sur l'impact économique de cette relocalisation publicitaire.
00:51Et Alexis Goujon, vous êtes le directeur général de l'association Les Relocalisateurs qui porte donc au quotidien, on peut le dire, ce combat auprès des annonceurs, des agences mais aussi des pouvoirs publics.
01:02On va en parler.
01:03Justement, est-ce que vous pouvez nous expliquer selon vous ce qui ne va pas actuellement dans le marché publicitaire français ?
01:09Alors le marché publicitaire français, peut-être pour démarrer, dire un petit peu comment il évolue et quel est son niveau aujourd'hui.
01:15Donc le marché publicitaire français, c'est un marché qui évolue doucement.
01:19La dernière étude du Bump, alors c'est une référence chez nous qui est le baromètre unifié des investissements publicitaires,
01:26qui donne une augmentation annuelle de l'ordre de 5% du marché publicitaire.
01:31On était en 2024 sur un investissement global de l'ordre de 19 milliards d'euros, donc avec une évolution de 5% chaque année.
01:39Mais il y a quelque chose de très concret dans la structure de cette évolution-là, c'est que sur ces 5%, en fait, si on détaille,
01:45c'est 14% d'augmentation du digital et seulement 2% d'augmentation pour les médias, on va dire, dits traditionnels.
01:51Donc la particularité, alors en soi, c'est le sens de l'époque.
01:54Oui, on va dire, c'est l'évolution, on est sur le numérique, moins sur les médias traditionnels.
02:00En soi, ça pourrait ne pas être un problème.
02:02Alors en soi, ce n'est pas un problème, mais si on rentre un petit peu dans le détail du chiffre, ça devient un problème,
02:06puisque sur cette augmentation du digital, aujourd'hui, entre 75% voire 80% sur les derniers chiffres qui sont sortis,
02:13de ces investissements sont captés très concrètement par les GAFA, donc Google, Meta, Amazon.
02:18Et donc, ils prennent des parts de marché de plus en plus importantes.
02:21Et quand on regarde dans le détail, leur part de marché sur l'ensemble des investissements publicitaires,
02:25ils augmentent environ de 1,5% à 2% chaque année.
02:28Bruno, on ne vous présente plus, économiste, docteur en économie.
02:32Justement, vous le faites, ce constat très alarmant de 70% des recettes publicitaires captées par les GAFA.
02:38Concrètement, qu'est-ce que ça change ? Quelles sont les conséquences pour les médias français ?
02:42Le modèle économique du média traditionnel, c'est fondamentalement, il a des ressources publicitaires,
02:48il finance son activité avec, qui n'est pas de faire de la publicité, mais qui est de produire de l'information, du divertissement, etc.
03:00Les géants du net, eux, leur but est de produire de la publicité, puisque c'est ça qui constitue l'essentiel de leur revenu.
03:07Et quand ils captent cette ressource publicitaire, qui au bout du compte, c'est des annonceurs,
03:12donc c'est à peu près le même volume pour tout le monde,
03:15donc quand ils en captent une partie, ça l'enlève aux médias traditionnels.
03:19C'est des phases communiquants, finalement.
03:20Ça ne s'additionne pas, à chaque fois, ça passe de l'un à l'autre.
03:23Bien sûr, et donc du coup, le modèle économique des médias traditionnels, il est mis en péril,
03:27puisqu'ils n'ont plus les ressources sur lesquelles ils s'appuyaient pour financer leur activité.
03:30On pourrait se dire, après tout, puisqu'il y a un problème sur les médias traditionnels,
03:34ils n'ont qu'à se mettre sur le numérique, précisément, puisque c'est là qu'est la manne,
03:38c'est ce que vous nous dites, Alexis.
03:40Pourquoi, malgré la digitalisation des médias traditionnels, on n'y arrive pas ?
03:44Alors, il y a une digitalisation des médias traditionnels.
03:47On n'est pas au point zéro de la digitalisation des médias traditionnels.
03:51Ils ont énormément évolué.
03:52Une grosse partie de leurs recettes, aujourd'hui, publicitaires,
03:55viennent bien évidemment de la déclinaison numérique de leurs médias.
03:59La difficulté, aujourd'hui, c'est qu'ils ont du mal à passer un cap.
04:01Il y a une étude qui a été menée par l'ARCOM et la DGIMIC,
04:05du ministère de l'Intérieur, sur l'évolution, à 2030, des investissements publicitaires.
04:11Ils ont évalué, justement, que cette partie digitale des médias traditionnels,
04:14qui est aujourd'hui à peu près à 5%,
04:16allait avoir un plafond de verre à 6% à 2030.
04:18Donc, ce que l'on voit, c'est qu'il y a une difficulté,
04:20parce que, tout simplement, ces grandes plateformes,
04:22à la fois par une politique de prix assez agressive,
04:25prennent l'ensemble des parts des marchés.
04:27Et puis, on va se le dire, c'est plus simple de faire un plan tout Google, tout Facebook,
04:30que de commencer à aller chercher différents médias,
04:33d'en faire un plan un peu complexe.
04:35Donc, il y a cette dimension de facilité,
04:36puis cette dimension encore d'approche prix,
04:38qui est quand même plus difficile, aujourd'hui, à aborder par les médias traditionnels.
04:41Est-ce qu'il y a, évidemment, des conséquences économiques, Bruno Coquet,
04:45mais aussi des conséquences sur l'emploi ?
04:48Ça veut dire des pertes d'emploi potentielles, si la tendance se poursuit ?
04:53Ce n'est pas potentiel.
04:55Les pertes d'emploi, elles seront déjà là, au rythme prévu par l'ARCOM.
05:00On perd à peu près 3 500 emplois par an dans le secteur des médias et de la publicité.
05:07Simplement du fait de la prise de part de marché par les géants du numérique.
05:12Parce qu'il faut bien avoir conscience que toute cette publicité numérique,
05:16en fait, elle est importée.
05:18Alors, ça ne se voit pas, Donald Trump ne s'en est pas aperçu,
05:20ce n'est pas un bien tangible.
05:22Mais quelque part, ce que payent les annonceurs,
05:27part dans un pays où la fiscalité est assez avantageuse.
05:31Donc, il n'y a pas de paiement de taxes sur la valeur ajoutée en France.
05:36Il y a assez peu de salariés localement.
05:38Et donc, du coup, toute cette richesse, c'est comme si on importait un bien
05:43qui vient d'ailleurs, pas produit ici, et sur lequel il y a zéro taxe ici.
05:48Et donc, du coup, il y a une espèce de fuite comme ça de l'économie nationale.
05:52Donc, on a ce qu'on a décrit tout à l'heure,
05:53le modèle économique des médias traditionnels qui est mis en danger.
05:56Mais d'autre part, pas au profit d'un autre acteur de l'économie nationale,
06:00mais au profit d'un acteur qui est localisé à l'extérieur.
06:03Quand on parle de poste, ça peut être un petit peu abstrait.
06:06Est-ce qu'on sait les emplois ?
06:07Est-ce qu'on connaît les emplois les plus concernés ?
06:11C'est probablement dans les médias traditionnels, déjà,
06:14puisque c'est ceux dont le modèle économique est le plus mis en danger.
06:19Et puis après, dans toute la chaîne de valeur, ça va se retrouver.
06:22D'autant que les géants du net essayent d'occuper cette chaîne de valeur.
06:26J'imagine que les agences médias, etc., sont aussi impactées,
06:29puisqu'ils essayent de faire ce travail à partir du produit qu'ils vendent.
06:33Ils essayent de monter dans la chaîne de valeur.
06:36Mais ça, Alexis le connaît mieux.
06:37Il y a une annonce récente de Mark Zuckerberg en disant que dans quelques années,
06:42on se passera des agences médias pour faire des plans,
06:43puisque les annonceurs pourront acheter directement l'ensemble de leurs plans médias chez Meta.
06:47Donc il n'y aura plus d'intermédiaires ?
06:50C'est-à-dire qu'il n'y a plus d'indépendance.
06:52Ce qu'on est, nous, en train de dire au-delà, effectivement,
06:53il y a cet aspect de la création d'emplois,
06:55il y a cet aspect de la création de valeur pour le pays.
06:58Mais il y a un autre sujet qui est extrêmement important,
07:00qui est celui de la souveraineté, celui de l'indépendance.
07:03Il se joue à deux niveaux.
07:04Il se joue au niveau des médias,
07:06parce que ce dont on parle aujourd'hui, ce sont des médias qui,
07:09comme le disait Bruno, se financent par la publicité.
07:11Ce sont des médias d'information.
07:12Ce sont des médias qui font la diversité de l'information
07:15et qui construisent derrière notre modèle démocratique.
07:18Donc le danger, ce n'est pas juste un danger économique,
07:19c'est aussi un danger démocratique.
07:22Voilà, le premier niveau, c'est ça.
07:23On y reviendra peut-être plus tard.
07:24Mais la souveraineté, elle est importante,
07:26parce qu'effectivement, le risque derrière,
07:28c'est qu'il n'y ait plus la capacité à sortir de ce modèle.
07:32On voit bien que ces grandes plateformes veulent le rendre totalement uniforme chez eux.
07:37Avec un combat un peu, on peut dire, David contre Goliath, finalement,
07:40et très déséquilibré.
07:42Oui, très déséquilibré, c'est un point extrêmement important.
07:44C'est-à-dire qu'il y a des distorsions de concurrence extrêmement importantes,
07:47parce qu'il y a de l'optimisation fiscale, sociale, etc.
07:51Et que du coup, tous ces acteurs ne jouent pas non plus sur le même terrain.
07:56Et en fait, ce qui se passe, c'est qu'on taxe la publicité
07:59dans les médias traditionnels, d'une certaine manière,
08:01et qu'on détaxe la publicité sur les médias du numérique.
08:07Enfin, en tout cas, ceux qui sont importés.
08:09Et donc, du coup, on a cette aberration que la subvention va au mauvais endroit
08:12et la taxe va au mauvais endroit.
08:14Et donc, du coup, on coule un peu plus vite que ce qui arriverait normalement.
08:18Là, on peut faire un peu peur à nos téléspectateurs.
08:20C'est le scénario, disons, un peu noir.
08:22Mais il y en a un autre, en tout cas, que vous établissez.
08:24C'est celui d'un réinvestissement d'un milliard d'euros dans les médias français.
08:28Là, quelle retombée concrète cela pourrait générer ?
08:33C'est le cheminement inverse.
08:36Du coup, on relocalise de la valeur ajoutée,
08:40puisqu'on réaugmente la part de marché des médias traditionnels.
08:45Et donc, du coup, principalement locaux.
08:48Donc, du coup, ces médias, ils emploient des journalistes, par exemple,
08:51mais aussi des gens en régie, etc.
08:56Ils emploient des gens pour imprimer les journaux,
08:59pour mettre les affiches en ville, etc.
09:01Et donc, du coup, on a de la valeur ajoutée, donc du PIB.
09:05Et puis, par ailleurs, on a des créations d'emplois
09:08dans le secteur de la publicité, mais autour,
09:10puisque, je ne sais pas, si on prend l'affichage, par exemple,
09:12on voit bien qu'il va falloir imprimer les affiches,
09:15ce qu'il n'y a pas à faire lorsqu'on annonce
09:18sur un réseau social, par exemple.
09:21Et donc, du coup, par capillarité, on recrée beaucoup d'emplois.
09:25Je disais 12 000 emplois et 450 millions de recettes publiques.
09:29Ça, c'est le beau scénario, justement, qu'on a envie d'espérer.
09:32Alexis, mais est-ce que ce n'est pas un peu utopique, finalement ?
09:36Non, ce n'est pas utopique, parce que ce que l'on fait,
09:39au sein des relocalisateurs, c'est justement d'informer
09:41pour, derrière, faire prendre conscience des conséquences.
09:45Tout le monde a à perdre à ce déséquilibre à terme,
09:47y compris les annonceurs qui, aujourd'hui, investissent largement
09:51sur ces plateformes-là, parce que demain, c'est une question d'indépendance.
09:55Donc, il faut en prendre conscience.
09:56Notre sujet, nous, c'est la publicité.
09:59Il faut la prendre à bras-le-corps maintenant,
10:01le sujet de la publicité de demain,
10:03parce que demain, ce sera finalement un petit peu trop tard.
10:06Je rajoute juste un petit point sur l'emploi,
10:08parce que c'est pour illustrer un peu le propos de Bruno.
10:10On sait, par exemple, que dans la communication extérieure,
10:13ce qu'on appelle l'affichage,
10:14un emploi dans la communication extérieure,
10:17c'est 3,6 emplois autour.
10:19C'est-à-dire qu'avec tout le système, notamment des sous-traitants,
10:21il y a un effet multiplicateur sur les emplois.
10:23Donc, l'emploi, ce n'est pas que la pub,
10:24c'est aussi tous ceux qui contribuent indirectement à la publicité.
10:26Mais qu'est-ce que vous entendez par localisation des achats médias ?
10:29Est-ce, finalement, une forme de préférence nationale ?
10:32Alors, ce n'est absolument pas une préférence nationale.
10:34C'est une conscience des impacts de ce transfert de valeur
10:37qui se fait des médias français, nationaux et locaux vers les plateformes.
10:42On pourrait appeler ça de la préférence nationale
10:43si on se dit que derrière, les médias sont français.
10:45Mais ce n'est pas l'idée derrière.
10:46L'idée, c'est de se dire, aujourd'hui,
10:48les grandes plateformes prennent à peu près 50% des investissements publicitaires.
10:52Dans 5 ans, on estime que ce sera les 2 tiers.
10:54Dans 10 ans, on estime que ce sera entre 75 et 85%.
10:57Donc, quand on sera à 85%,
10:59c'est des échanges que l'on a avec Bruno.
11:01Bien évidemment que ce qui est aujourd'hui,
11:02peut-être moins cher parfois, deviendra cher
11:04parce qu'il y aura une situation de monopole
11:05et forcément, ils changeront complètement la politique de prix.
11:08Et puis, quelles libertés auront, notamment les annonceurs,
11:11dans le choix de leur communication,
11:12de l'environnement de leur communication,
11:14quand ils auront le choix concrètement entre Google, Meta ou TikTok ?
11:16On a souvent parlé de quotas français pour la musique.
11:20Ça fait d'ailleurs débat.
11:21Est-ce que, finalement, on pourrait envisager quelque chose d'équivalent ?
11:25Est-ce que c'est viable économiquement d'imaginer des quotas
11:27ou est-ce que ce serait finalement contre-productif
11:30pour toute la chaîne de valeur ?
11:32C'est contre-productif.
11:34Le point, c'est qu'on a d'abord une technologie.
11:37Donc, la technologie, elle est claire.
11:39Les gens l'aiment, ils vont sur les réseaux sociaux.
11:42Donc, il y a un usage.
11:44Il ne s'agit pas d'interdire tout ça.
11:46On ne va pas retourner en Mésopotamie
11:47avec des tablettes d'argile pour faire de la pub sur des tablettes d'argile.
11:50Donc, ce n'est pas ça l'idée.
11:51L'idée, c'est qu'il y a une distorsion de concurrence extrêmement forte.
11:55Pour le moment, on a eu l'histoire des droits voisins.
12:00Maintenant, on a celui de la publicité.
12:03Cette distorsion de concurrence, elle est souvent attaquée juridiquement.
12:06Ça prend des années.
12:07Et donc, du coup, avant d'avoir raison, vous êtes mort.
12:10A la vitesse où ça se passe, la part de marché prise par les géants du net,
12:15elle a été prise en 10-15 ans.
12:17Au point que certains acteurs préfèrent signer des accords
12:20les moins défavorables possibles avec ces GAFAM
12:23plutôt que d'attendre et de se battre
12:26parce qu'ils savent qu'ils ont des millions à perdre d'ici là.
12:29Mais ce n'est pas vrai.
12:30Parce qu'au bout du compte, ils signent un accord avec quelqu'un
12:32où ils sont en situation de faiblesse.
12:35Et donc, du coup, on voit bien que les accords qui ont été signés
12:37il y a quelques années deviennent assez rapidement caduques inopérants.
12:42Et donc, du coup, le point, il faut bien voir
12:43qu'il y a des distorsions de marché économiques.
12:47Donc, cette capacité à être détaxée dans son activité, encore une fois,
12:54alors même qu'on est un acteur extrêmement puissant.
12:59Amazon, Google et Meta
13:02prennent trois quarts de la part de marché mondial du numérique.
13:07Leur revenu publicitaire, c'est le PIB du Danemark chaque année.
13:11Donc, du coup, c'est gigantesque.
13:13Et en plus, ils ont une distorsion de concurrence
13:16qu'ils savent entretenir.
13:17C'est des experts de la distorsion de concurrence.
13:20Donc, du coup, vous devez essayer de la rétablir.
13:22Et pour la rétablir, vous avez des instruments économiques
13:25qui sont imparfaits, mais qui sont d'abord les obligés
13:28à tarifer leurs services.
13:30C'est comme au début des années 2000,
13:31on vous donnait un téléphone gratuit si vous aviez un abonnement.
13:33Mais en fait, on voit bien qu'il y avait un sujet.
13:36Donc là, c'est un peu la même chose.
13:38La première chose, c'est ça.
13:39La deuxième chose, c'est que vous n'avez pas à les détaxer.
13:42Vous devez vous occuper du fait qu'ils soient taxés
13:45sur un pied d'égalité, quand bien même ils ont envie
13:48de produire leurs services dans un autre pays.
13:51Et donc, du coup, on a des choses à gérer en France.
13:52On a des choses à gérer avec les autres pays européens.
13:55Mais en tout cas, aujourd'hui, c'est les distorsions de marché
13:58qui leur permettent d'avancer
13:59et qui vont continuer de leur permettre d'avancer.
14:01Donc, avant de mettre des quotas,
14:03qui sont un truc très français, on adorerait ça.
14:06On réglemente, vous savez.
14:07Non, mais surtout, essayez d'avoir une concurrence équitable.
14:11Déjà, ça, ce serait bien.
14:12Mais justement, comment faire ?
14:13C'est tout le nœud du problème
14:14et c'est tout le cœur de votre travail, justement, Alexis.
14:17Puisqu'il faut convaincre ces acteurs
14:19de rediriger une part de leur investissement
14:21vers les médias nationaux et locaux.
14:24Là, quelle est votre recette pour le faire ?
14:25Alors, notre recette, elle tient en trois points.
14:27Le premier point, on ne va pas se mentir,
14:30c'est une nécessité à les convaincre
14:33que s'ils réinjectent une partie de leurs investissements
14:35dans des médias français nationaux et locaux,
14:38ça va fonctionner pour leurs marques,
14:40pour le développement de leurs ventes.
14:41Et c'est une vérité.
14:42On travaille sur des études sur ces sujets-là
14:44pour leur démontrer que ça fonctionne.
14:45Parce que très souvent, il y a une idée,
14:48j'allais dire, assez peut-être facile à se faire,
14:50que finalement, avec la puissance de ces grandes plateformes-là
14:53et les indicateurs qu'ils peuvent afficher,
14:56ça fonctionnerait très bien.
14:57Les médias français fonctionnent extrêmement bien
14:59et on a un certain nombre de preuves apportées.
15:01Première dimension.
15:02Deuxième dimension, bien évidemment,
15:04Bruno l'a évoqué à plusieurs reprises,
15:05c'est la conséquence économique et sociale.
15:08Tout le monde a, y compris en tant qu'annonceur,
15:09on doit se soucier de la bonne santé économique de son pays.
15:12C'est là où ils font leurs affaires,
15:13donc ils ont intérêt à être dans un pays qui fonctionne bien.
15:16Et puis de la bonne santé, de l'emploi,
15:17c'est également un enjeu pour eux.
15:20Et puis la dernière dimension, on l'a effleurée au début,
15:24c'est cette dimension démocratique.
15:25Là, on va plutôt faire appel aussi à l'engagement citoyen
15:27et à la liberté de l'information.
15:29C'est de se dire, si on continue dans cette tendance-là,
15:33demain, il y aura un écosystème média
15:35qui, parce qu'il est financé par la publicité,
15:37va concrètement mourir, disparaître,
15:39ou alors se faire racheter,
15:40parce qu'il y a aussi tout ce sujet de la concentration.
15:42On va perdre de la diversité, on va perdre de l'indépendance.
15:45Et c'est tout à chacun,
15:46y compris ces annonceurs, qui vont y perdre in fine.
15:48Donc, on agit vraiment sur ces trois dimensions.
15:51Ça fonctionne, c'est bon pour l'économie,
15:52c'est bon pour la démocratie.
15:53Ça fonctionne, mais qui vous soutient dans cet écosystème ?
15:57Alors, j'allais dire, nous soutiennent
15:58tous ceux qui ont conscience que ça fonctionne,
16:00puis tous ceux qui y participent.
16:01Donc aujourd'hui, l'association,
16:03c'est un regroupement de professionnels
16:04des médias et de la publicité,
16:07donc principalement des régies médias,
16:08des agences médias,
16:09également quelques acteurs de la tech et des datas,
16:12et qui, ensemble, amènent des éléments
16:15de démonstration de cette efficacité-là.
16:17Donc ça, c'est, j'allais dire, pour l'écosystème médias.
16:19Et puis, ceux qui nous soutiennent aussi,
16:21c'est une partie des pouvoirs publics,
16:23et on a eu notamment des échanges avec la DGMI,
16:26qui, elle-même, de son côté,
16:28travaille sur des mesures de transparence
16:30sur les investissements publicitaires.
16:32Donc, première étape,
16:33je trouve extrêmement positive,
16:34c'est-à-dire que demain,
16:36il y aura obligation de définir exactement
16:38où les investissements publicitaires se font
16:39et sur quel type de médias,
16:42ce qui est un premier pas,
16:43en tout cas, sur la lisibilité.
16:45À partir du moment où on est exactement capable de lire,
16:47on est capable d'agir.
16:48Bruno, vous travaillez aussi sur des études d'efficacité
16:51des campagnes dans les médias locaux.
16:53Est-ce qu'on peut dire aujourd'hui, finalement,
16:55que tout cela offre un retour sur investissement ?
16:59C'est-à-dire qu'au-delà de la pratique,
17:01est-ce qu'il y a des retombées économiques ?
17:03C'est un peu la question.
17:04C'est-à-dire, faire les choses
17:05au nom de la diversité des médias,
17:08c'est une chose,
17:09et des enjeux démocratiques.
17:12Mais est-ce qu'économiquement,
17:14ces annonceurs peuvent s'y retrouver, finalement ?
17:18Je pense, oui.
17:18Enfin, ça, c'est le rayon d'Alexis.
17:21Moi, je suis plutôt dans des aspects sectoriels
17:24et macroéconomiques.
17:25Mais sur le retour investissement,
17:26ça, c'est la spécialité de Cosmirite et d'Alexis.
17:30Je redonne la spécialité de Bruno,
17:33qui serait sur la conclusion de l'étude,
17:36notamment sur la croissance du PIB.
17:38Donc là, on est sur une économie globale.
17:40Sur une économie, on va dire, privée,
17:41à l'échelle des annonceurs,
17:43bien évidemment qu'investir dans ces médias,
17:46aujourd'hui, ça fonctionne.
17:47On a démontré que ce soit les médias nationaux,
17:49français ou locaux apportent une valeur ajoutée,
17:51que, par exemple, l'argument local apporte
17:53une valeur ajoutée,
17:53qui permet d'augmenter, notamment, les ventes.
17:57On a, aujourd'hui, un certain nombre
17:59d'éléments de preuves.
18:00Ce qui est difficile, en fait, aujourd'hui,
18:01c'est que, dans ce marché,
18:02comment ça se passe, finalement ?
18:03C'est que chaque régie
18:05va venir vendre son produit.
18:08Donc, telle radio va venir vendre son produit,
18:11la radio d'à côté va venir vendre son produit,
18:13etc., etc.
18:13Nous, le pari qu'on fait,
18:15c'est le pari du collectif
18:15pour mettre ensemble tous ces indicateurs
18:17et montrer que, finalement,
18:19dans la globalité des médias français,
18:21il y a de l'efficacité.
18:22Et c'est en capacité de faire progresser
18:25le business des annonceurs in fine.
18:27Sauf que si le bilan macro est positif,
18:30il y a forcément, dans le détail,
18:31des gagnants et des perdants.
18:33Est-ce que les potentiels perdants
18:35vous suivent quand même ?
18:37Et quels intérêts ils peuvent avoir, eux,
18:39à vous rejoindre et à dire
18:41« On joue le jeu,
18:42même si on risque d'y perdre ? »
18:45Alors, aujourd'hui,
18:45tout le monde est gagnant.
18:48Ceux qui sont potentiellement perdants,
18:49si on estime qu'on a un marché...
18:51Une fois de plus, il faut se redire,
18:53on a un marché qui est en croissance,
18:54sauf que cette croissance,
18:55elle profite plus au GAFA
18:56qu'elle ne profite aux eaux.
18:57Donc, pour l'instant,
18:58les perdants, c'est ceux qui en profitent moins.
18:59Si demain, juste,
19:01on rééquilibrait la croissance,
19:03déjà, on permettrait aux médias français
19:05de plus gagner
19:06sans prendre sur la croissance des GAFA.
19:08Et on pourrait, évidemment,
19:10se dire qu'on pourrait inverser
19:11un peu la tendance.
19:12Je reviens sur les propos de Bruno.
19:13Aujourd'hui, il y a quand même
19:14une réglementation fiscale
19:16qui leur est plus que favorable.
19:17On peut considérer
19:18qu'il y a déjà un déséquilibre
19:19qu'il faut corriger à ce niveau-là.
19:21Alors, je complète avec un œil d'économie,
19:23ce que dit Alexis,
19:25c'est qu'en 2000,
19:27il y avait 1% du PIB
19:29qui allait en ressources
19:30aux médias traditionnels,
19:31comme BFM, par exemple.
19:33Aujourd'hui,
19:34il y a 0,6% du PIB
19:37qui va à tous les médias,
19:41y compris les GAFA.
19:43Donc, ce que dit Alexis,
19:45c'est qu'en fait,
19:45le chiffre d'affaires
19:46tel qu'il est vu
19:47par les acteurs du secteur,
19:48il progresse.
19:49Après, leur poids dans l'économie,
19:52il a été divisé par 3.
19:53Voilà, on peut dire
19:54les choses comme ça.
19:55Et donc, du coup,
19:56la ressource que ont
19:58les médias traditionnels,
19:59que ce soit d'information
20:00ou de divertissement,
20:01et donc, du coup,
20:01les acteurs autour,
20:03elle a été divisée par 3
20:04en termes de poids de PIB.
20:05Et donc, du coup,
20:07il faut se sortir aussi,
20:09enfin, il faut s'extraire un peu
20:09de l'illusion nominale,
20:12comme on dit.
20:13C'est-à-dire que tout ça
20:14augmente en valeur,
20:15mais qu'en même temps,
20:16la répartition des choses
20:19et la baisse
20:19des dépenses
20:23des annonceurs
20:24par rapport aux PIB,
20:25puisque c'est au bout du compte,
20:26c'est ça,
20:27elle existe quand même.
20:28Et donc, du coup,
20:28elle se fait
20:29en faveur
20:31des géants du net.
20:33– Mais alors,
20:33quels leviers ?
20:34C'est-à-dire qu'il y a
20:34des leviers juridiques,
20:36économiques,
20:36enfin, budgétaires
20:37et fiscaux.
20:39Qui peut quoi
20:39dans cette histoire ?
20:41Il y a d'abord
20:42des conditions
20:43de concurrence équitable.
20:45Ça, ça se gère
20:46à Bruxelles.
20:47Tous les pays européens
20:48ont le même problème.
20:50Les Américains
20:50ont le même problème.
20:52– C'était la question
20:52que j'allais vous poser.
20:53Est-ce que l'État français
20:54peut quelque chose ?
20:55En tout cas,
20:56vous ne dites pas tout seul,
20:57finalement.
20:57– On peut oublier l'État
20:59dans cette affaire.
21:00Lui, il peut en tirer profit
21:01parce qu'il peut en tirer
21:02des recettes fiscales et sociales,
21:04ce qui, pour le moment,
21:04il recherche ça
21:05puisqu'elles s'évadent.
21:07Mais il faut bien
21:07avoir conscience
21:08que même les États-Unis
21:10ont ce problème
21:11de manière extrêmement aiguë.
21:13Vous avez des prix Nobel d'économie
21:16qui ne sont pas réputés
21:17pour être des post-taliniens
21:18et qui proposent
21:19de créer aux États-Unis
21:21des taxes
21:23sur les recettes publicitaires
21:25des géants du net
21:26qui vont entre 50 et 70 %
21:28de ces recettes.
21:30Pourquoi ?
21:31Parce qu'en fait,
21:33on a un développement
21:34extrêmement rapide
21:36de ces quelques acteurs
21:40qui créent un monopsone
21:41et donc, du coup,
21:42ils prennent une puissance
21:44dans l'économie
21:44qui est désastreuse,
21:46qui a des externalités négatives,
21:48comme on dit,
21:49c'est-à-dire des effets négatifs
21:50pour tous les acteurs autour.
21:51Et donc,
21:52il est important
21:53de les contenir
21:54à court terme
21:54et, par ailleurs,
21:56de jouer
21:57sur la réglementation
21:58des marchés,
21:59donc sur le droit,
22:00pour équilibrer
22:00les conditions de concurrence.
22:01C'est-à-dire s'assurer
22:02qu'à court terme,
22:03tout le monde n'est pas mort
22:04et établir
22:06des conditions
22:07de concurrence équitables
22:08pour que tout le monde,
22:09y compris eux,
22:10les géants du net,
22:11puissent vivre
22:11à moyen terme
22:12et tirer profit
22:14de leur activité.
22:15Il n'y a pas de reste non plus.
22:16Alexis,
22:16est-ce que c'est aussi
22:17un enjeu de visibilité,
22:19une question d'image
22:20pour les marques ?
22:21Finalement,
22:21investir dans un média local,
22:23c'est bon pour le business,
22:25mais aussi pour la réputation ?
22:26Bien évidemment.
22:27Enfin,
22:27on a des contextes
22:28de diffusion,
22:29donc en deux mots,
22:30c'est-à-dire
22:30où sort la publicité,
22:32qu'elle soit en offline
22:33ou en online,
22:34qui, derrière,
22:35entraîne ce qu'on appelle
22:36une attention.
22:38Aujourd'hui,
22:38l'attention publicitaire,
22:39ça devient l'alpha et l'oméga
22:41entre guillemets
22:42de la recherche
22:42d'indicateurs en publicité
22:44puisqu'il ne suffit pas
22:45d'être hyper présent.
22:46Là,
22:46on est plutôt presque
22:47dans l'effet inverse.
22:48On est dans la saturation
22:49informationnelle
22:50et la saturation publicitaire.
22:52Ce qui est important aujourd'hui,
22:53c'est l'attention,
22:54c'est finalement
22:55combien de personnes
22:57vont réellement retenir
22:58la publicité que j'en vois.
22:59Et le contexte de diffusion
23:00de médias
23:01qui sont à la fois
23:02des médias éditoriaux,
23:03ça peut être des médias
23:04in situ,
23:05je pense à l'affichage
23:06par exemple.
23:07Ce sont des contextes
23:08de diffusion
23:09et ça a été prouvé
23:10d'attention
23:10qui sont beaucoup plus forts.
23:11Il faut arrêter
23:12d'être dans la quantité,
23:13il faut être dans la qualité.
23:14Un peu pieux,
23:15on l'espère,
23:16en tout cas,
23:16on le souhaite.
23:16Merci à tous les deux,
23:18Alexis Goujon et Bruno Coquet.
23:19Vous étiez les deux derniers invités
23:20de cette saison
23:21d'Ebdo.com
23:22sur BFM Business.
23:23Merci à vous,
23:24derrière votre écran,
23:25quel qu'il soit.
23:26D'ailleurs,
23:26vous retrouverez cette émission
23:28en replay
23:28et en podcast
23:29et nous,
23:30on se retrouve
23:30dans quelques semaines
23:31après les vacances
23:32que je vous souhaite
23:33belles d'ailleurs
23:34sur BFM Business
23:35pour un nouveau numéro
23:36d'Ebdo.com.
23:37A très vite.

Recommandations