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  • 09/07/2025
Le 10 juillet 1985, sur ordre du ministère de la Défense, des agents français de la DGSE coulent le chalutier Rainbow Warrior, appartenant à Greenpeace, qui menaçait de perturber les essais nucléaires français dans le Pacifique. Fernando Pereira, un photographe portugais travaillant pour l'organisation, est retrouvé mort à bord après deux explosions. Quarante ans plus tard, ce scandale - qui a impliqué le président François Mitterrand et plusieurs membres de son gouvernement - demeure entouré de nombreuses zones d'ombre. Le chef de l'État a-t-il donné son aval ? Ou ignorait-il réellement les détails de l'opération ? Comment a-t-il pu sortir indemne de cette affaire ? Et quelles leçons peut-on tirer de cette affaire d'État ?

Pour en débattre, Jean-Pierre Gratien reçoit : Hervé Gattegno, journaliste d'investigation ; Patrick Careil, ancien haut fonctionnaire et ancien directeur de cabinet de Charles Hernu à l'époque des faits et Floran Vadillo, président des Études françaises de renseignement et de cyber.

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Transcription
00:00:00Générique
00:00:02...
00:00:16Bienvenue à tous, voilà 40 ans, ce fut sans conteste le feuilleton politico-médiatique de l'été 1985.
00:00:23Retour sur l'affaire du Rainbow Warrior aujourd'hui dans ce débat doc.
00:00:27Avec pour commencer le documentaire qui va suivre, tiré de la série Les Mensonges de l'Histoire,
00:00:32et intitulé 1985, le Rainbow Warrior.
00:00:36Tout commence, vous allez le voir, en Nouvelle-Zélande, à Auckland,
00:00:39où le navire amiral de l'organisation écologiste Greenpeace est envoyé par le fond, faisant un mort.
00:00:45Et très vite, des soupçons se portent sur les services secrets français.
00:00:49Je vous laisse découvrir ou redécouvrir la suite avec ce film,
00:00:53et je vous retrouverai juste après, en compagnie du journaliste Hervé Gattegnaud,
00:00:57de l'ancien haut fonctionnaire Patrick Carreille,
00:01:00et du président des études françaises de renseignement et de cyber, Florent Vadillot.
00:01:05Avec eux, nous nous interrogerons sur les leçons à tirer d'une bien encombrante affaire d'État.
00:01:11Bon doc.
00:01:11C'est l'un des plus grands mensonges de la Vème République,
00:01:33une histoire à la David contre Goliath, sur fond de guerre nucléaire dans le Pacifique.
00:01:36D'un côté, il y a une association écologique, Greenpeace.
00:01:41De l'autre, les militaires français qui testent leurs bombes dans un cadre paradisien.
00:01:47À l'époque, il était impossible, impensable de s'opposer au nucléaire.
00:01:50Ces écologistes chevelus apparaissent comme des ennemis publics numéro un,
00:01:55et tous les moyens sont bons pour les abattre.
00:01:57L'opération satanique contre Greenpeace est lancée.
00:02:00L'officier commandant le service action leur dit « chaleur et lumière ».
00:02:04Ils voulaient une vraie explosion.
00:02:06C'était une riposte disproportionnée, comme prendre un grand box pour écraser une mouche.
00:02:12Le Rainbow Warrior est coulé dans le port d'Auckland le 10 juillet 1985.
00:02:17Mais rien ne se déroule comme prévu.
00:02:19Un homme meurt dans l'explosion du bateau.
00:02:22On comprenait qu'on nous fasse sauter des bateaux de Kadhafi qui menaient des attentats, etc.
00:02:28Mais Greenpeace, c'était vraiment étonnant.
00:02:30Il fallait faire un trou, il fallait que ça se voit, il fallait que ce soit une leçon.
00:02:33Ça, c'est les politiques.
00:02:34Rapidement, les enquêteurs comprennent que les Français sont derrière tout ça.
00:02:38Mais ces derniers refusent d'admettre leur forfait et mentent dans les grandes largeurs.
00:02:43Jox va voir Mitterrand et lui dit « on peut négocier avec les Néo-Zélandais, il suffit de reconnaître, et tout font ».
00:02:49Et Mitterrand, non.
00:02:50Et Mitterrand, l'honneur de la France.
00:02:52Mais à Paris, ni Charles Arnoux, ni François Mitterrand ne s'en inquiètent.
00:02:56Ils couvrent l'un des plus gros mensonges d'État de la Vème République.
00:02:59François Mitterrand va faire une lettre d'une grande prétention française disant « mais comment osez-vous mettre en cause la parole de la France ? »
00:03:07On est au sommet de ce qu'on peut faire comme manipulation dans un État démocratique.
00:03:1230 ans après l'explosion du Rainbow Warrior, nous reprenons cette affaire qui est encore considérée comme l'un des plus grands fiascos de nos services secrets.
00:03:20Nous avons rencontré des témoins clés en France et en Nouvelle-Zélande.
00:03:24Et parmi eux, Jean-Luc Kister, le poseur de bombes.
00:03:28Qui a réellement donné l'ordre de couler le bateau de Greenpeace ?
00:03:32Pourquoi une opération aussi violente à l'encontre d'écologistes ?
00:03:35Pourquoi Charles Arnoux a-t-il menti ?
00:03:38Pour protéger qui ?
00:03:40Le Rainbow Warrior est aujourd'hui au fond du Pacifique, dans les eaux néo-zélandaises,
00:03:43et les secrets qui entourent cette affaire sont encore nombreux.
00:03:53Notre enquête débute en juillet 1985.
00:04:01C'est l'été en France et l'hiver, à 20 000 km de là en Nouvelle-Zélande.
00:04:08Un grand bateau aux couleurs arc-en-ciel arrive dans le port d'Auckland.
00:04:11C'est le vaisseau amiral de Greenpeace, l'organisation internationale qui milite depuis plus de 10 ans contre les essais nucléaires.
00:04:17À bord, une douzaine de membres d'équipage est parmi eux, Bunny McDermid.
00:04:24Elle est néo-zélandaise, a une vingtaine d'années, et s'est engagée depuis quelques mois avec Greenpeace.
00:04:31Quand on est arrivés en Nouvelle-Zélande, c'était l'hiver, le 7 juillet.
00:04:36Je nous revois allonger la côte.
00:04:39On commençait à sentir l'odeur de la terre.
00:04:42C'était une très belle arrivée.
00:04:43Des tas de bateaux étaient venus à notre rencontre,
00:04:46et beaucoup de gens nous attendaient sur les quais quand on est entrés dans le port.
00:04:50C'était vraiment agréable.
00:04:54Greenpeace et le Rainbow Warrior sont extrêmement bien accueillis en Nouvelle-Zélande.
00:04:59En Nouvelle-Zélande, il y a toujours une conscience environnementale importante,
00:05:03il y a toujours une bienveillance à l'égard des mouvements environnementaux,
00:05:07et Greenpeace fait partie de ces mouvements environnementaux.
00:05:09En plus, il y avait quelques Néo-Zélandais dans l'équipage.
00:05:11Depuis les années 70, Greenpeace milite contre les essais nucléaires partout dans le monde,
00:05:17et se fait beaucoup d'ennemis.
00:05:22On est en pleine guerre froide.
00:05:24L'Est et l'Ouest développent leur arsenal nucléaire à tout va.
00:05:29En 1981, François Mitterrand est élu.
00:05:32C'est le premier président socialiste de la Vème République.
00:05:34Lui aussi se laisse convaincre de l'importance de la dissuasion nucléaire,
00:05:38malgré ses engagements de campagne.
00:05:39Il faut se souvenir que le programme commun de la gauche en 1972
00:05:44prévoyait d'arrêter le nucléaire,
00:05:47et qu'il y a eu au sein de la famille socialiste,
00:05:49et notamment sous l'impulsion de Charles Hernu,
00:05:51mais aussi de Jean-Pierre Chevènement,
00:05:53toute une campagne pour convaincre finalement les plus hautes autorités,
00:05:57et notamment François Mitterrand,
00:05:59que le nucléaire était une énergie nécessaire.
00:06:02La plupart des centrales ont été construites entre 1977 et 1987.
00:06:06A l'époque, il était impossible, impensable de s'opposer au nucléaire,
00:06:09ou de remettre en cause le nucléaire.
00:06:12En 1985, Greenpeace a décidé d'affronter ce qui pollue le Pacifique.
00:06:17Et d'abord, les grandes compagnies qui se débarrassent dans la mer
00:06:20des déchets nucléaires stockés dans ces fûts.
00:06:22L'association dénonce ces pratiques illégales
00:06:28et fournit aux médias du monde entier ce genre d'images scandaleuses.
00:06:33Greenpeace a aussi décidé de montrer à la Terre entière
00:06:36les essais nucléaires français en Polynésie.
00:06:39C'est la dernière campagne de Greenpeace prévue dans le Pacifique cette année-là.
00:06:44Les militants sont très bien préparés.
00:06:46Ils naviguent à bord d'un gros chalutier, le Rainbow Warrior.
00:06:48C'est une véritable petite guerre qui se joue entre les écologistes et les militaires
00:06:53depuis que la France réalise ses essais nucléaires dans le Pacifique.
00:06:56Et en cette année 1985, les amiraux se sentent investis d'une mission sacrée.
00:07:01Continuer coûte que coûte les essais nucléaires
00:07:03pour sauvegarder la grandeur de la France.
00:07:06Et ce ne sont pas quelques activistes qui vont les en empêcher.
00:07:11Greenpeace a marre pour quelques jours à Auckland, en terrain ami.
00:07:14La Nouvelle-Zélande est un petit pays à l'est de l'Australie de 3 millions d'habitants.
00:07:21Un pays rural et écolo
00:07:23où la population voit d'un très mauvais oeil les essais nucléaires
00:07:26qui ont lieu depuis plus de 30 ans dans le Pacifique.
00:07:30La Nouvelle-Zélande est un pays opposé à l'utilisation de l'arme nucléaire
00:07:42donc on sent qu'il y a une vraie bienveillance, un soutien, une aide
00:07:47qui n'a jamais failli.
00:07:50Je pense que le sentiment général était
00:07:52« si vous voulez faire des essais nucléaires, faites-les chez vous, pas chez nous ».
00:07:55Greenpeace a décidé de mener une nouvelle opération médiatique contre la France.
00:08:02C'est en tout cas l'information qui remonte à l'état-major grâce à une taupe, Christine Cabon.
00:08:07Une espionne de la DGSE infiltrée chez les écologistes.
00:08:12Les militaires refusent de se laisser intimider par l'organisation anti-nucléaire.
00:08:17Une opération secrète est décidée pour stopper les activistes.
00:08:20Ces écologistes chevelus, ex-gauchistes, apparaissent comme des ennemis publics numéro 1
00:08:27et tous les moyens sont bons pour les abattre.
00:08:30Il y avait une tradition d'opération contre Greenpeace de la part des services de renseignement français
00:08:34parce qu'à chaque fois qu'ils s'approchaient de la zone d'essai nucléaire,
00:08:37les services de renseignement dévissaient l'hélice,
00:08:40mettaient du sucre dans le réservoir, injectaient des maladies dans la nourriture.
00:08:44Donc c'était des opérations qui étaient assez bénignes pour les navires de Greenpeace.
00:08:49Quelques jours avant le départ du Rainbow Warrior vers Mururoa,
00:08:52un atoll d'expérimentation nucléaire français situé à 4300 km au nord-est de la Nouvelle-Zélande,
00:08:59le bateau est à quai.
00:09:00L'équipage fait un adversaire.
00:09:04Vers minuit, beaucoup étaient déjà au lit.
00:09:07Mais il y avait encore un groupe qui discutait dans le carré
00:09:10quand une première détonation a eu lieu.
00:09:12C'était une très grosse explosion qui provenait du flanc du bateau au niveau de la salle des machines.
00:09:25À ce moment-là, toutes les lumières se sont éteintes et le bateau s'est mis à jeter.
00:09:31Un des mécaniciens qui était dans le carré s'est précipité vers la salle des machines.
00:09:35Il a ouvert la porte et a vu que l'eau montait très, très vite à l'intérieur.
00:09:41Puis le capitaine, qui s'était réveillé, a rassemblé ses esprits
00:09:46et il a ordonné à tout le monde d'abandonner le navire.
00:09:51Il y a alors eu une grosse agitation partout sur le bateau pour réveiller tout le monde,
00:09:56nous faire sortir de nos cabines, puis du bateau.
00:09:59« On avait froid, il faisait nuit noire. »
00:10:03Une femme avait disparu, Anna.
00:10:05Elle était introuvable.
00:10:07On ne savait même pas si elle était encore à bord dans une des cabines de poupe.
00:10:11Donc Martini et Fernando sont redescendus à l'arrière du Rainbow Warrior pour la chercher.
00:10:16Elle n'y était pas.
00:10:19Martini a fait demi-tour en disant « Sortons de là ».
00:10:22Le bateau était en train de couler.
00:10:24Et Fernando, le photographe, s'est dit
00:10:26« Je fais un saut rapide dans ma cabine pour récupérer mes appareils photos.
00:10:30J'ai des bonnes photos sur la pellicule. »
00:10:32Pendant qu'il faisait ça, la deuxième bombe,
00:10:34qui se trouvait à la poupe sur le système de propulsion, a explosé.
00:10:42En quelques minutes, le bateau coule dans le port d'Auckland.
00:10:49Une fois sur le quai, on a essayé de se compter pour vérifier qu'il ne manquait personne.
00:10:53Et on a fini par se rendre compte que Fernando n'était pas là, qu'il était resté à bord.
00:11:00J'espère qu'il n'a pas été touché par la bombe.
00:11:03Mais quoi qu'il en soit, il s'est noyé.
00:11:08Rapidement après les explosions, la police arrive sur place et ouvre une enquête.
00:11:13Parmi les détectives, le sergent-chef, Maurice Wysham.
00:11:16« On a ouvert une enquête pour homicide.
00:11:20Un homme était mort et tout portait à croire qu'il s'agissait d'un homicide.
00:11:23Était-ce un homicide volontaire ? On ne le savait pas.
00:11:26Était-ce un assassinat ? On ne le savait pas. »
00:11:30« Ma première réaction a été, peut-être que quelque chose a mal tourné à bord.
00:11:37Peut-être qu'ils faisaient des tests, qu'ils développaient quelque chose pour gêner les autorités françaises.
00:11:44Quelque chose qui a pu causer les explosions.
00:11:46La salle des machines était réellement immaculée et sur le pont, on aurait pu manger par terre.
00:11:54Alors ils ont vite compris qu'il n'y avait rien sur le bateau qui pouvait avoir déclenché une telle explosion.
00:12:02À 10h30, le 11 juillet, les plongeurs de la police rentrent au commissariat.
00:12:08Et tout d'un coup, l'enquête fait un bond en avant.
00:12:10« De toute évidence, c'était une bombe, un engin explosif, une mini-ventouse ou autre,
00:12:20qui avait été placée à l'extérieur du navire.
00:12:23À ce stade-là, on enquêtait bien sur un meurtre.
00:12:26Un homme était mort suite à un acte illicite, donc il s'agissait bien d'un meurtre. »
00:12:33C'est la première fois que Greenpeace est victime d'une attaque aussi radicale.
00:12:36La première fois que Greenpeace perd un de ses membres.
00:12:44La première fois que la Nouvelle-Zélande est la cible d'une attaque à la bombe sur son territoire.
00:12:50Greenpeace est habituée à prendre des risques en mer,
00:12:54mais là, personne ne s'attend à ce qu'il se passe ça à terre.
00:12:57« Je pense qu'on a sous-estimé le pouvoir de Greenpeace,
00:13:02et à quel point le sentiment anti-nucléaire, qui était en train de se développer,
00:13:07représentait une menace pour certains. »
00:13:10« Les bateaux de Greenpeace dans des ports en Nouvelle-Zélande,
00:13:14ça ne peut pas exploser, ça n'existe pas, ce n'est pas un accident.
00:13:19Si ce n'est pas un accident, qui peut faire ça ? »
00:13:22« On a envie de penser aux Français, mais c'était comme une bonne blague.
00:13:26Oh, c'est peut-être les Français qui ont fait ça, on en riait. »
00:13:30Blague ou pas, l'enquête se poursuit,
00:13:33et le mensonge des Français enfle.
00:13:35À l'hôtel de police, une équipe d'une soixantaine d'enquêteurs est mobilisée.
00:13:42Ils ont deux suspects en ligne de mire.
00:13:45Un couple de touristes suisses repérés sur le port d'Occlande le soir de l'explosion,
00:13:50alors qu'ils transportent de gros sacs dans un van de location.
00:13:55« Des étrangers qui vaquent à leurs occupations,
00:13:58mais sans véritablement faire de tourisme, ça attire la suspicion, ça attire l'attention. »
00:14:03Les quais étaient surveillés parce qu'il y avait eu des vols.
00:14:06Et quand on voit ces types qui extrairent des sacs d'attos,
00:14:10ils ont cru que c'était des vols.
00:14:12Donc il y a une équipe de surveillance des quais qui a repéré et qui a noté le numéro de la voiture.
00:14:16Aux alentours de 20h30, un van, un petit camping-car est arrivé.
00:14:21Il a fait deux ou trois tours,
00:14:23puis ses occupants ont rencontré un homme qui avait un Zodiac.
00:14:26Ils ont pris des choses sur le Zodiac et les ont chargés dans le van.
00:14:30Puis ils sont repartis.
00:14:31C'est un pays où tout le monde passe son temps à regarder tout le monde,
00:14:35où les moindres faits divergents sont immédiatement vus, notés, repérés et transmis à la police.
00:14:45Les deux étrangers, Sophie et Alain Thuringe, sont arrêtés
00:14:48alors qu'ils s'apprêtent à quitter précipitamment la Nouvelle-Zélande.
00:14:52Pendant leurs interrogatoires, ils ne cessent de mentir aux enquêteurs.
00:14:54On a fait des recherches sur leurs passeports suisses,
00:15:00qui se sont avérés faux.
00:15:03Puis on a découvert qu'ils n'étaient pas mariés.
00:15:06Ils ont alors avoué qu'ils ne l'étaient pas.
00:15:09Et c'est à partir de là que la situation a commencé à leur échapper.
00:15:13Quand on apprend par la Suisse que les passeports sont faux,
00:15:17ça devient quand même très chaud.
00:15:18Les enquêteurs épluchent leur emploi du temps
00:15:21et se rendent compte que Sophie Thuringe a passé un étrange coup de fil en France
00:15:24quelques heures à peine après l'attentat contre le Rainbow Warrior.
00:15:28Les Thuringes ne disent pas la vérité.
00:15:31Ils ne sont pas venus en Nouvelle-Zélande pour leur lune de miel.
00:15:34Les policiers sont même convaincus qu'ils ont quelque chose à voir
00:15:36avec l'explosion du Rainbow Warrior.
00:15:41Ils avaient passé un coup de fil depuis Hamilton.
00:15:43Depuis une cabine téléphonique à Hamilton,
00:15:46ils avaient appelé un numéro à Paris, un certain oncle Emile.
00:15:50On s'est donc adressé à Interpol qui a répondu
00:15:52« C'est le numéro du ministère de la Défense français ».
00:15:55À ce moment-là, on a commencé à y voir plus clair.
00:15:59À ce moment-là, les enquêteurs néo-zélandais
00:16:01savent que les Thuringes sont de faux époux
00:16:03munis de faux passeports suisses.
00:16:05C'est leur enquête exceptionnelle et l'accumulation de preuves
00:16:08qui va leur permettre de découvrir le poteau rose.
00:16:10Si des espions français ont participé à l'attentat,
00:16:15cela veut dire que la DGSE et la France sont impliqués.
00:16:19C'est en tout cas ce qu'en concluent les policiers néo-zélandais
00:16:22après avoir recueilli des tonnes d'indices et de témoignages.
00:16:25Ils ont flairé le mensonge.
00:16:27Charles Hernu, le ministre de la Défense,
00:16:29est forcément au courant de cette opération.
00:16:32Et pourtant, ni à l'Élysée,
00:16:34ni au ministère de la Défense ont réagi.
00:16:36Silence radio ou mensonge par omission.
00:16:39Lorsque les époux d'Urange, Alain Mafard et Dominique Prieur sont arrêtés,
00:16:45on peut imaginer que dans les services de renseignement,
00:16:47il y a une cellule de crise qui se met en place,
00:16:48que l'affaire est gérée de manière très rationnelle.
00:16:50En fait, il n'en est rien.
00:16:51La règle dans ce cas-là, c'est
00:16:53le chef des services français appelle le chef des services néo-zélandais
00:16:58et il lui dit « C'est moi ? Combien ? »
00:17:02Voilà.
00:17:04On deal.
00:17:06Mais Mitterrand et Hernu ne bougent pas.
00:17:09C'est le statu quo.
00:17:10Ils pensent que l'affaire va s'évanouir dans la chaleur de l'été 1985.
00:17:15Pourquoi François Mitterrand ne prend pas de décision ?
00:17:17On est en plein été.
00:17:18Mais les médias se saisissent très peu de cet épisode.
00:17:22Et donc on pense qu'on va arriver à gérer cela,
00:17:24d'autant que l'opposition elle-même est en vacances.
00:17:26Tout ça est passé relativement inaperçu
00:17:28et je pense que pour le grand public à l'époque,
00:17:31vraiment, c'est une nouvelle qui en a chassé une autre.
00:17:33Mais à la mi-août, l'affaire rebondit.
00:17:36Les néo-zélandais ont identifié une autre équipe d'espions français,
00:17:40l'équipage du voilier UVA,
00:17:42qui aurait transporté les explosifs,
00:17:45les combinaisons de plongée
00:17:46et le bateau pneumatique ayant servi à l'opération.
00:17:50Le 7 août, VSD, l'événement du jeudi,
00:17:53publie le fait que des nageurs de combat
00:17:55participaient à l'opération en Nouvelle-Zélande.
00:17:59C'est cet élément-là, finalement,
00:18:00qui crée le rebondissement médiatique.
00:18:03Là, à ce moment-là, tout le monde s'est un peu mobilisé.
00:18:07Pour calmer les journalistes
00:18:08et tenter d'étouffer le mensonge,
00:18:10une enquête officielle est confiée à Bernard Tricot,
00:18:13un haut fonctionnaire issu de l'opposition.
00:18:14On fait appel à l'ancien secrétaire général de l'Élysée
00:18:19à l'époque du général de Gaulle.
00:18:21Il a été au cœur de l'activité de l'État,
00:18:23y compris l'activité secrète.
00:18:25On se dit que cet homme ne pourra pas être berné
00:18:27par les services de renseignement.
00:18:28Et au final, on se rend compte que
00:18:30Bernard Tricot, le rapporteur,
00:18:32est petit à petit conduit à écrire
00:18:35ce que les services voulaient qu'il écrive.
00:18:39Bernard Tricot a clairement été manipulé
00:18:41dans l'affaire du Rainbow Warrior.
00:18:42Les infos qu'il recueille auprès de la DGSE sont fausses.
00:18:46Qui a ordonné à des membres des services secrets de mentir ?
00:18:50Qui en avait le pouvoir ?
00:18:53Les médias vont se tourner vers le ministre de la Défense
00:18:55qui chapeaute les services secrets.
00:18:57Mais celui-ci ne souhaite pas perturber l'enquête
00:18:59confiée à Bernard Tricot.
00:19:01Après des semaines de silence,
00:19:03la campagne d'intoxication des médias
00:19:05et de l'opinion publique démarre.
00:19:08Dans la construction du mensonge,
00:19:10il y a eu une instrumentalisation des journaux,
00:19:13de quelques journalistes qui acceptaient
00:19:15de jouer ce rôle en toute connaissance de cause.
00:19:18C'est vrai que des tas d'informations un peu folles circulaient.
00:19:21Et oui, l'intoxication des médias était bien réelle.
00:19:25Il y a eu la piste de l'extrême droite.
00:19:27On a d'abord dit que c'était un coup de l'extrême droite.
00:19:29Il y a eu la piste des services étrangers,
00:19:31les Britanniques, le KGB, tout y est passé.
00:19:34Il y a eu la piste du sabotage des agents
00:19:36qui étaient des francs tireurs.
00:19:37Tout cela contribuait en fait à des écrans de fumée
00:19:41pour protéger le pouvoir politique,
00:19:44les décideurs, les services de renseignement eux-mêmes.
00:19:47Cette manipulation est orchestrée
00:19:49par les plus hautes instances de l'État
00:19:51et en premier lieu, Charles Hernu.
00:19:54Ami de Mitterrand qu'il a nommé ministre de la Défense
00:19:56dès 1981.
00:19:58L'homme pivot.
00:19:59Cette affaire, c'est quand même Charles Hernu.
00:20:01Personnage très controversé,
00:20:04ami de très longue date
00:20:05est compagnon de lutte de François Mitterrand.
00:20:07C'est l'homme qui a convaincu Mitterrand
00:20:09qu'il ne fallait pas arrêter la force de dissuasion.
00:20:12Hernu est nucléaire compatible depuis toujours.
00:20:15C'est aussi le fils d'un gendarme
00:20:17et il est resté très proche des militaires.
00:20:20Quand les amiraux du Pacifique,
00:20:22ceux en charge des essais nucléaires,
00:20:24évoquent la présence de Greenpeace
00:20:25dans les eaux polynésiennes,
00:20:27Hernu autorise une action.
00:20:29Ceux qui ont convaincu Hernu,
00:20:34c'est les amiraux,
00:20:35ceux qu'on appelle les amiraux du Pacifique,
00:20:37c'est-à-dire les amiraux
00:20:38qui étaient chargés d'assurer la sécurité de l'atoll.
00:20:42Ils sont dans leur forteresse
00:20:44et ils cherchent l'ennemi.
00:20:45Ils ont besoin d'un ennemi.
00:20:47Donc Greenpeace, c'est l'ennemi,
00:20:48puisque qu'est-ce que c'est ?
00:20:50Ces écologistes qui vont essayer de les embêter,
00:20:53de venir dans les eaux territoriales et tout.
00:20:55Donc ils vont diaboliser l'ennemi.
00:20:56La sécurité de l'atoll contre un bateau de Greenpeace,
00:21:01c'est quand même à la portée de la marine française.
00:21:03Ils ont joué à se faire peur.
00:21:05Ils se sont persuadés qu'il pouvait y avoir
00:21:07quelque chose de grave qui allait se passer,
00:21:09ce qui n'était évidemment pas le cas.
00:21:12L'opération satanique est lancée.
00:21:14L'officier commandant le service action
00:21:16leur dit chaleur et lumière.
00:21:19C'est-à-dire qu'ils voulaient une explosion,
00:21:23une vraie explosion.
00:21:24On peut penser que c'est ou le chef du service action
00:21:26qui a dit on va faire, on va montrer nos muscles
00:21:28et montrer qu'on est capable,
00:21:30ou ce qu'on a beaucoup dit, c'est Ernu,
00:21:32qui était ministre de la Défense,
00:21:33qui a dit on le coule, voilà.
00:21:34C'était une riposte disproportionnée,
00:21:40comme prendre un grand box pour écraser une mouche, quoi.
00:21:45Il y avait une volonté à un haut niveau
00:21:46de dire non, non, maintenant il faut que ça cesse définitivement.
00:21:50L'opération est radicale et organisée en quelques mois.
00:21:57Trop court pour ne pas prendre de risques.
00:21:59La pression politique pour agir rapidement
00:22:01a effectivement conduit à bâcler quelque peu la préparation.
00:22:05Ils ont fait ça dans des délais impossibles.
00:22:07Ils vont faire un repérage l'été,
00:22:09ils vont faire l'opération l'hiver.
00:22:10L'été, il y a plein de monde, on peut se cacher.
00:22:12L'hiver, il n'y a pas grand monde.
00:22:14Donc tout le monde est au rideau
00:22:15et tout le monde voit une personne seule, etc.
00:22:17À peine 4 mois de préparation pour une opération
00:22:20qui en demanderait au moins 12.
00:22:22Pour éviter un fiasco,
00:22:23les agents secrets proposent à leurs supérieurs
00:22:25des scénarii moins violents, plus discrets.
00:22:28On peut faire une panne dans le moteur,
00:22:31on peut mettre une sorte de sucre qui avarie l'essence.
00:22:34On pouvait très bien, effectivement,
00:22:36saboter l'hélice.
00:22:37Là, il y a eu la volonté,
00:22:40vraisemblablement politique,
00:22:42enfin du moins à un ordre politique,
00:22:44de dire on met deux bons.
00:22:45On en met une première pour ébranler le bateau,
00:22:49les gens vont partir,
00:22:50et on en met une deuxième pour le couler.
00:22:52Il fallait faire un trou,
00:22:53il fallait que ça se voit,
00:22:54il fallait que ce soit une leçon.
00:22:55Ça, c'est les politiques.
00:22:58Dès le départ, à Aspreto, en Corse,
00:23:00dans la base des nageurs de combat,
00:23:02quand on présente la mission aux agents secrets,
00:23:04ils émettent quelques réserves.
00:23:06Ils ne partagent pas la vision des politiques,
00:23:08mais ce sont des militaires,
00:23:10alors ils obéissent aux ordres.
00:23:11Ils étaient extrêmement inquiets
00:23:14sur le mode opératoire,
00:23:15et plusieurs membres du service action
00:23:17ont estimé que c'était une opération ratée d'avance.
00:23:20Quand Aspreto, à la base,
00:23:23en Corse, des plongeurs,
00:23:24on leur présente l'opération,
00:23:26ils sentent que c'est un truc très, très dangereux.
00:23:29On comprenait qu'on nous fasse sauter
00:23:31des bateaux de Kadhafi
00:23:33qui menaient des attentats, etc.,
00:23:34comme ça a été le cas en 1980,
00:23:37mais Greenpeace, c'était vraiment étonnant.
00:23:41Une douzaine d'espions français
00:23:42est envoyé en Nouvelle-Zélande
00:23:43sous fausse identité.
00:23:45Les faux épouturanges arrivent de Londres
00:23:47pour leur voyage de noces
00:23:48le 22 juin 1985.
00:23:51Les marins de Louvéa
00:23:52viennent plonger en Nouvelle-Zélande.
00:23:54Ce sont eux qui transportent
00:23:56les explosifs depuis Nouméa.
00:23:58Les nageurs de combat sont là pour skier.
00:24:00Ils voyagent sur un avion de ligne
00:24:02entre Papette et Auckland.
00:24:04C'est une opération qui,
00:24:05en termes humains,
00:24:06est extrêmement lourde.
00:24:07Vous avez les épouturanges,
00:24:08vous avez le voilier Louvéa,
00:24:10vous avez potentiellement des équipes
00:24:11pour récupérer l'ensemble des opérationnels,
00:24:14puis vous avez d'autres personnes
00:24:15en Nouvelle-Zélande
00:24:15qui coordonnent l'aspect opérationnel.
00:24:17Il fallait faire venir les bombes
00:24:19qui sont venues par des marins
00:24:20dans un bateau, dans un voilier,
00:24:22qui sont rentrés dans un port invraisemblable,
00:24:24par tempête.
00:24:25Ensuite, il fallait les plongeurs sur place
00:24:28pour aller mettre les bombes sur le bateau.
00:24:30Alain Maffard et Dominique Prieur,
00:24:34les faux épouturanges,
00:24:36ont trois semaines sur zone
00:24:37pour tout organiser.
00:24:39Faire les repérages au port,
00:24:41trouver de discrets lieux de rencontre,
00:24:44récupérer les bombes,
00:24:46le Zodiac,
00:24:47les combinaisons de plongée
00:24:48apportées par l'Ouva,
00:24:50définir des zones de récupération des agents
00:24:52et trouver des cachettes
00:24:54pour faire disparaître discrètement
00:24:56tous les équipements.
00:24:57Le 10 juillet, c'est le jour J.
00:25:10Les faux épouturanges récupèrent le matériel
00:25:12dans une petite marina
00:25:13et le livrent aux pilotes du Zodiac.
00:25:18En fin d'après-midi,
00:25:19Jean-Luc Kister, le plongeur poseur de bombes,
00:25:22joue le touriste au bord de l'eau
00:25:23avec son coéquipier.
00:25:25Kister est le meilleur nageur de combat français
00:25:28à l'époque, le plus entraîné.
00:25:31Ils embarquent discrètement sur un Zodiac.
00:25:37Allongés dans le bateau,
00:25:39ils se changent et s'équipent,
00:25:40les charges fixées sur leur dos.
00:25:44Ils plongent avec leur oxygeur,
00:25:46un système qui leur permet de respirer
00:25:48sans émettre de bulle.
00:25:49Ils sont à un kilomètre du Rainbow Warrior
00:25:52et doivent palmer 30 minutes
00:25:54avant d'atteindre leur objectif.
00:25:59Il y a très peu de très bons professionnels
00:26:01qui étaient en mesure de mettre en œuvre
00:26:03l'opération satanique,
00:26:05ce qui explique que ce soit deux agents
00:26:07très confirmés qui aient été choisis pour cela.
00:26:09Jean-Luc Kister,
00:26:12le poseur de bombes,
00:26:13progresse avec son coéquipier vers l'objectif.
00:26:17On arrive de loin sur le quai
00:26:20en face du Marsdenwolf.
00:26:21On est toujours sanglés par deux,
00:26:23un chef d'équipe et un équipier.
00:26:25Et donc on se dirige la nuit
00:26:26avec un compact
00:26:27où tout est mémorisé dans la tête
00:26:30avec les durées
00:26:31puisqu'on sait que 100 coups de palme,
00:26:33c'est le temps de mettre.
00:26:33On fait une immersion discrète
00:26:37pour être sûr
00:26:39qu'on est bien sur l'objectif
00:26:41et ensuite on y va.
00:26:47Lors des reconnaissances de jour,
00:26:49on s'est aperçu
00:26:50qu'il y avait un voilier
00:26:52qui était à côté du bateau
00:26:54et donc on s'est dit
00:26:56peut-être que des voiliers peuvent venir.
00:26:58Donc on décide de mettre la charge
00:27:00du côté du quai
00:27:01et au maximum de profondeur.
00:27:06À 20 heures,
00:27:07les explosifs sont installés.
00:27:09Les nageurs repartent vers le Zodiac
00:27:10pour la phase d'exfiltration.
00:27:16Les plongeurs doivent disparaître
00:27:18dans la nature.
00:27:19Brieur et Mafar
00:27:20doivent retrouver le pilote du Zodiac
00:27:22et faire disparaître le matériel.
00:27:25Mais une vedette de la police
00:27:27surveille le port,
00:27:29ce qui complique la donne.
00:27:31Ce jour-là,
00:27:33il faisait beau
00:27:33et des plécheurs étaient là,
00:27:36partout.
00:27:36Donc le problème,
00:27:37c'est qu'on ne peut pas arriver
00:27:38au point numéro 1.
00:27:39On voit au point numéro 2.
00:27:41Là aussi, il y a du monde
00:27:41et on va dans une zone de rescue
00:27:43où là, il faut se débrouiller.
00:27:46C'est là que les types
00:27:47qui étaient en surveillance
00:27:49de la marina
00:27:50voient des mouvements suspects
00:27:52et décident d'aller voir
00:27:54ce qui se passe.
00:27:55Dominique Prieur
00:27:56et Alain Mafar
00:27:57se font repérer.
00:27:59Les gardiens du port
00:27:59notent le numéro
00:28:00de leur plaque d'immatriculation.
00:28:04C'est à ce moment
00:28:05que tout va basculer
00:28:06pour les espions français.
00:28:08En Nouvelle-Zélande,
00:28:08à cette époque,
00:28:09une émission de télévision
00:28:10met à l'honneur
00:28:11les bons citoyens,
00:28:12ceux qui aident la police
00:28:13à traquer les criminels
00:28:14et les voleurs.
00:28:15La police néo-zélandaise
00:28:17va ainsi récupérer
00:28:18beaucoup de témoignages
00:28:19et des indices
00:28:20laissés par les thuringes.
00:28:21200 policiers
00:28:22travaillent à présent
00:28:23sur l'enquête.
00:28:24Ils vont réussir
00:28:25à mettre à jour
00:28:25le planning des thuringes,
00:28:27leurs déplacements
00:28:27et leurs rendez-vous.
00:28:29Ils vont se rendre compte
00:28:30qu'il y a d'autres
00:28:31agents français à Auckland.
00:28:32En plus des faux époux thuringes,
00:28:34il y a les marins
00:28:35du voilier Ouvéa
00:28:36qui transportent les bombes.
00:28:42Quelques jours plus tôt,
00:28:43en pleine campagne,
00:28:45des témoins aperçoivent
00:28:46les thuringes
00:28:46alors qu'ils récupèrent
00:28:47des sacs remplis de matériel.
00:28:51Le van avait rendez-vous
00:28:54avec un autre véhicule
00:28:55au nord d'Auckland
00:28:56pour récupérer
00:28:57du matériel de plongée.
00:28:59Sur le parking
00:29:00où l'échange a eu lieu,
00:29:01il y avait un homme
00:29:03qui s'est dit
00:29:03« C'est un peu bizarre,
00:29:06c'est deux véhicules
00:29:07qui arrivent
00:29:07de directions différentes
00:29:08et qui échangent des choses. »
00:29:13Alors quand les bombes
00:29:14ont explosé
00:29:15et que l'histoire
00:29:15a été relayée
00:29:16dans tout le pays,
00:29:17il s'est souvenu.
00:29:18Mais au fait,
00:29:18j'ai vu un van
00:29:19qui ressemble beaucoup
00:29:20à celui qu'il recherche.
00:29:21J'avais relevé
00:29:21son immatriculation
00:29:22sur ma vitre de voiture
00:29:23et le numéro
00:29:24était toujours écrit
00:29:25dans la poussière.
00:29:27Des témoins
00:29:28ayant aperçu
00:29:29les espions,
00:29:30le beau temps
00:29:30ce soir-là
00:29:31et un compte à rebours
00:29:32de mise à feu
00:29:33pour les bombes
00:29:33trop court
00:29:34entraînent
00:29:34le fiasco
00:29:35de l'opération.
00:29:37Une série
00:29:37de petits soucis
00:29:38s'accumulent
00:29:39pour les agents français.
00:29:40C'est ce qu'on appelle
00:29:41tout simplement
00:29:42la loi de Murphy.
00:29:44La loi de Murphy,
00:29:45c'est ce qu'on appelle
00:29:46aussi d'une manière
00:29:46un peu plus simple
00:29:47la loi de l'emmerdement maximum.
00:29:49Quand vous êtes
00:29:49dans une spirale
00:29:51descendante,
00:29:51dans un cercle vicieux
00:29:52et que vous vous enfoncez
00:29:54encore plus
00:29:56tous les jours.
00:29:57Quand ces petites erreurs
00:29:58s'accumulent,
00:29:59c'est là
00:30:00qu'intervient le clash.
00:30:02Les épouturages
00:30:03sont arrêtés
00:30:04le 12 juillet 1985
00:30:06et la police
00:30:07a rapidement
00:30:08la confirmation
00:30:08avec l'aide d'Interpol
00:30:09que ce sont bien
00:30:10des agents
00:30:11de la DGSE.
00:30:14Dix jours plus tard,
00:30:15l'affaire prend
00:30:16une nouvelle tournure
00:30:16très politique
00:30:17en Nouvelle-Zélande
00:30:18après l'annonce
00:30:19fracassante
00:30:19du Premier ministre.
00:30:22Si les services
00:30:22secrets français
00:30:23ont participé
00:30:24à l'attentat,
00:30:25alors les principes
00:30:26de droits internationaux
00:30:27ont été violés.
00:30:29et nous déposerons
00:30:30une plainte
00:30:30contre le gouvernement
00:30:31français.
00:30:34Nous pourrions
00:30:35considérer cela
00:30:36comme un acte
00:30:37de guerre.
00:30:39Un acte de guerre,
00:30:41une déclaration
00:30:42très forte
00:30:43en provenance
00:30:43d'un pays allié.
00:30:45Pourtant à Paris,
00:30:46RAS,
00:30:47personne ne veut
00:30:48s'exprimer.
00:30:49Mitterrand,
00:30:50au sein de son
00:30:50pouvoir politique,
00:30:51certains ont compris.
00:30:53Pierre Jox,
00:30:54le Premier,
00:30:54le ministre de l'Intérieur.
00:30:55Jox va voir Mitterrand
00:30:57et lui dit
00:30:58on peut arranger,
00:31:00on peut négocier
00:31:01avec les Néo-Zélandais,
00:31:02il suffit de reconnaître
00:31:03et tout font.
00:31:04Arrangeons-nous.
00:31:05Mitterrand, non.
00:31:06Mitterrand,
00:31:07l'honneur de la France.
00:31:08C'est vrai que c'était
00:31:09très compliqué
00:31:10en 1985,
00:31:12la gauche
00:31:12de reconnaître
00:31:13qu'on avait fait ça,
00:31:14de reconnaître
00:31:15que la France,
00:31:16qui est comme
00:31:16un pays de gauche,
00:31:17allait envoyer des gens
00:31:18pour faire sauter
00:31:19un bateau écologique
00:31:21et tuer un des...
00:31:21ce n'était pas facile.
00:31:23On est au sommet
00:31:24de ce qu'on peut faire
00:31:25comme manipulation
00:31:26dans un État démocratique.
00:31:29Charles Hernut,
00:31:30quant à lui,
00:31:30prend même les choses
00:31:31à la légère.
00:31:32Vous allez démissionner ?
00:31:34Écoutez,
00:31:37votre question
00:31:40est tellement drôle.
00:31:41Oui, c'est ça.
00:31:44Écoutez,
00:31:45non,
00:31:45je n'ai pas songé,
00:31:47je n'ai pas écrit
00:31:47même des brouillons de l'air.
00:31:50Comment vous voyez
00:31:50l'avenir
00:31:51à courir
00:31:51et à moyenne perte
00:31:52dans cette affaire-là ?
00:31:54Il faut que l'avenir
00:31:56doit être
00:31:58l'expression
00:32:01de la vérité.
00:32:02La vérité,
00:32:03on en est loin
00:32:04avec Charles Hernut
00:32:05qui manipule tout le monde.
00:32:07Mais il faut donner
00:32:07l'illusion de la transparence,
00:32:10faire croire
00:32:10que l'on recherche la vérité.
00:32:12C'est justement
00:32:13la mission
00:32:13qui a été confiée
00:32:14à Bernard Tricot.
00:32:16Le 25 août,
00:32:17l'ancien secrétaire général
00:32:18de l'Élysée
00:32:19remet son rapport
00:32:20à Laurent Fabius.
00:32:21L'honneur de la France
00:32:22est sauf,
00:32:23en tout cas en apparence.
00:32:25À Matignon,
00:32:26on admet seulement
00:32:27l'existence
00:32:27d'une mission de surveillance.
00:32:30Monsieur Tricot estime
00:32:32que ni les personnes
00:32:33inculpées
00:32:34en Nouvelle-Zélande
00:32:35ni l'équipage
00:32:36de l'UVA
00:32:37n'ont procédé
00:32:39à l'attentat
00:32:40contre le Rainbow Warrior
00:32:41pour lequel
00:32:43ils n'ont reçu
00:32:44aucune mission.
00:32:47Personne n'y croit.
00:32:48D'ailleurs,
00:32:49Bernard Tricot lui-même
00:32:50émet des doutes
00:32:50sur son rapport.
00:32:52Dans mon rapport,
00:32:53je n'ai pas exclu
00:32:54que j'ai été berné.
00:32:58On lui ment,
00:32:59mais il lui mente
00:32:59comme ce n'est pas permis
00:33:01pour un rapport officiel
00:33:02commandé par le Premier ministre.
00:33:04C'est totalement ahurissant.
00:33:05C'est honteux
00:33:05d'avoir fait ça.
00:33:06Vraiment,
00:33:07on a ridiculisé cet homme.
00:33:09Ce qui prouve
00:33:09la vraie volonté
00:33:12de ne pas lâcher le truc.
00:33:13Je crois qu'Ernus
00:33:14s'est accroché jusqu'au bout.
00:33:15On sait que la DGSE
00:33:16était impliquée,
00:33:17mais le rapport Tricot
00:33:18conclut à une simple
00:33:19mission de surveillance.
00:33:21Tout cela fait
00:33:22qu'il y a une grande confusion.
00:33:24La réaction du patron
00:33:26de Greenpeace
00:33:26est cinglante.
00:33:29Le rapport Tricot
00:33:31est une insulte
00:33:33à l'intelligence.
00:33:37Je ne m'abaisserai pas
00:33:40à le commenter.
00:33:43La presse, elle,
00:33:45réagit.
00:33:46Les médias
00:33:46commencent à être
00:33:47très critiques.
00:33:49Et dans l'opposition,
00:33:50quelques-uns demandent
00:33:51des comptes,
00:33:52notamment le sénateur
00:33:53Charles Pasquois.
00:33:55Si, comme je le crains,
00:33:56ce gouvernement
00:33:57est incapable
00:33:58d'assumer ses responsabilités,
00:34:00alors le moment est venu
00:34:02de dire à M. Laurent Fabius
00:34:03de s'en aller.
00:34:05Quelle différence
00:34:06cela fera-t-il ?
00:34:08Alors que la polémique
00:34:09enfle au cours de l'été,
00:34:11Mitterrand passe quelques heures
00:34:12en Suisse
00:34:12sur les bords du lac.
00:34:14Mais pourquoi est-il
00:34:15là ?
00:34:15Pour le plaisir
00:34:16de rencontrer des amis
00:34:18qui sont des responsables,
00:34:21responsables d'un pays
00:34:23et qui ont donc
00:34:25bien des choses
00:34:25à me dire
00:34:26comme chez moi-même
00:34:27à leur en confier.
00:34:32Mensonge
00:34:32ou demi-vérité ?
00:34:35En tout cas,
00:34:35plus que pour le plaisir,
00:34:37Mitterrand vient en fait
00:34:38discrètement s'excuser
00:34:39auprès des autorités helvétiques
00:34:40pour les faux passeports suisses
00:34:42ayant servi aux époux
00:34:43Thuringes
00:34:44les deux espions
00:34:45de la DGSE
00:34:45écroués en Nouvelle-Zélande.
00:34:49En revanche,
00:34:50Mitterrand ne montre
00:34:51aucun signe d'apaisement
00:34:52en direction du gouvernement
00:34:53néo-zélandais.
00:34:54Tout au contraire,
00:34:56il est d'une arrogance
00:34:57et d'une suffisance incroyable.
00:34:59François Mitterrand
00:35:00va dans le Pacifique,
00:35:03il va à Muroroa,
00:35:05il va parler avec Morgue
00:35:07à la Nouvelle-Zélande,
00:35:08il va faire une lettre
00:35:09d'une grande prétention française
00:35:11disant
00:35:12« Mais comment osez-vous
00:35:13mettre en cause
00:35:14la parole de la France ? »
00:35:15Mesdames et Messieurs,
00:35:16la France n'a pas d'ennemis
00:35:18dans le Pacifique Sud.
00:35:22Elle entend seulement
00:35:23faire respecter ses droits
00:35:26qui en France
00:35:28et dans le monde
00:35:29pourraient s'en étonner.
00:35:32Par ce discours,
00:35:34Mitterrand menace aussi
00:35:35mais à mot couvert
00:35:35Greenpeace,
00:35:37qui a décidé
00:35:38de poursuivre sa campagne
00:35:39contre les essais nucléaires français
00:35:40en envoyant
00:35:41de nouveaux navires
00:35:42en Polynésie.
00:35:44Le président a signé
00:35:46une directive
00:35:46pour ordonner
00:35:47aux militaires français
00:35:48de stopper Greenpeace,
00:35:50y compris par la force.
00:35:53C'est la Nouvelle-Guerre
00:35:53du Pacifique
00:35:54comme le titre Libération.
00:35:56Le 17 septembre,
00:36:01coup de théâtre.
00:36:03Le monde obtient
00:36:04la confirmation officielle
00:36:05de la présence
00:36:05d'une troisième équipe
00:36:06d'espions français
00:36:07à Auckland.
00:36:08L'équipe
00:36:09déposeurs de bombes.
00:36:11C'est la dernière pièce
00:36:11du puzzle.
00:36:13La DGSE
00:36:14n'était donc pas
00:36:15en mission de surveillance
00:36:16mais en opération commando
00:36:17pour couler
00:36:18le Rainbow Warrior.
00:36:19Et c'est Charles Hernut
00:36:20qui a donné le feu vert.
00:36:22Deux mois après l'attentat,
00:36:24la version officielle française
00:36:25ne tient plus.
00:36:28Lorsque le monde publie
00:36:29cette information-là,
00:36:30elle est immédiatement
00:36:32jugée crédible.
00:36:33Parce que c'est le monde
00:36:33et parce qu'effectivement
00:36:35c'est le complément logique
00:36:36dans cette affaire.
00:36:37on passe notre vie
00:36:38à essayer de comprendre
00:36:40comment les marins
00:36:41de l'UVA
00:36:41ont pu poser la bombe
00:36:43dans le port d'Auckland.
00:36:45Or, à l'époque,
00:36:47ils ne sont plus là,
00:36:47ils sont déjà repartis,
00:36:48donc on ne comprend rien,
00:36:49on n'y arrive pas.
00:36:50Et c'est là
00:36:51qu'on apprend
00:36:52avec la troisième équipe
00:36:53qu'en réalité,
00:36:54il y a d'autres nageurs
00:36:56qui vont aller poser la bombe.
00:36:57Et là,
00:36:57l'affaire est techniquement résolue.
00:37:00Nous obtiendrons,
00:37:01et je le revérifierai
00:37:02par un deuxième rendez-vous,
00:37:03l'identification
00:37:04comme un officier,
00:37:06un sous-officier
00:37:07de l'armée française,
00:37:08nageur de combat,
00:37:09qui pose l'explosif.
00:37:13C'est finalement
00:37:14le triomphe
00:37:15de la méthode journalistique
00:37:17pendant l'été,
00:37:17c'est-à-dire
00:37:18aller de fuite en fuite
00:37:19et de source
00:37:20plus ou moins crédible
00:37:21en source plus ou moins crédible
00:37:23afin de révéler la vérité.
00:37:26La vérité éclate au grand jour
00:37:28grâce à une source
00:37:28d'Edoui Plenel
00:37:29très haut placée.
00:37:31Cette source
00:37:31n'était pas n'importe qui,
00:37:32c'était le directeur général
00:37:34de la police nationale
00:37:35qui savait que dans l'État,
00:37:38il y a des gens
00:37:38qui peuvent faire des bêtises.
00:37:40Il n'aimait pas
00:37:40les glorieux,
00:37:41c'est-à-dire les politiques
00:37:42qui se poussent du col.
00:37:43En l'occurrence,
00:37:44c'était Charles Hernu,
00:37:45le ministre de la Défense.
00:37:46Il n'aimait pas
00:37:46les culottes de peau.
00:37:47En l'occurrence,
00:37:48c'est les amiraux du Pacifique
00:37:50qui voyaient Greenpeace
00:37:51comme une filiale
00:37:53du KGB soviétique.
00:37:55Avec ces infos
00:37:56de première main,
00:37:57Plenel signe
00:37:58un article fracassant.
00:38:00Le scandale
00:38:00éclabousse le gouvernement,
00:38:01mais Charles Hernu
00:38:02conteste haut et fort
00:38:04cette version du monde.
00:38:06Aucune organisation
00:38:08dépendante de mon ministère
00:38:10n'a reçu l'ordre
00:38:12de commettre
00:38:14un attentat
00:38:16contre le Rimbaud-Varrior.
00:38:19Les journalistes
00:38:20sont scandalisés
00:38:21par l'aplomb du ministre.
00:38:23On était tous au journal,
00:38:24on regardait ça halluciné,
00:38:25en disant
00:38:25ou alors on s'est tous trompés,
00:38:26tout est faux,
00:38:27ou alors ce type a un culot,
00:38:28enfin c'est un culot monstre.
00:38:30Il est dans l'idée
00:38:31que plus c'est gros,
00:38:32plus ça passe,
00:38:33et puis en quelque sorte
00:38:34pas vu, pas pris.
00:38:35La DGSE
00:38:36n'avait pas
00:38:38d'alors
00:38:39en Nouvelle-Zélande,
00:38:41outre le commandant Mafar
00:38:43et le capitaine Prieur,
00:38:47d'autres agents
00:38:48que ceux
00:38:49qui composaient
00:38:51l'équipage
00:38:53de l'UVA.
00:38:53C'est un menteur pathologique,
00:38:59c'est-à-dire
00:38:59il ment tout le temps.
00:39:00Il dit au chef
00:39:01du conservatoire
00:39:03de Villeurbanne
00:39:04« Je suis un violoniste
00:39:06excellent. »
00:39:07Donc le gars
00:39:08lui le fait venir
00:39:09pour jouer devant les enfants,
00:39:10il n'a jamais vu
00:39:10un violon de sa vie,
00:39:11il ne sait pas jouer.
00:39:13Il voit des cyclistes,
00:39:14il dit « Vous savez,
00:39:14moi j'étais un super,
00:39:15les mecs
00:39:16qui le mettent
00:39:16sur un vélo,
00:39:16ils tombent. »
00:39:18Le vent est en train
00:39:19de tourner
00:39:19et Charles Hernu le sait.
00:39:21À la fin de sa conférence
00:39:22de presse,
00:39:23il change de stratégie.
00:39:25La meilleure défense,
00:39:26c'est l'attaque.
00:39:28« Si l'on m'a désobéi,
00:39:33si l'on m'a menti,
00:39:37croyez-moi,
00:39:37vous me connaissez,
00:39:39je serai impitoyable
00:39:41dans mes sanctions,
00:39:44ceci dans l'intérêt même
00:39:47de la crédibilité
00:39:49de notre système de défense. »
00:39:52Pendant trois jours,
00:39:55les réunions interministérielles
00:39:57se multiplient.
00:39:58Une bataille a lieu
00:39:59entre Matignon,
00:40:01l'Elysée
00:40:01et la Défense.
00:40:03La situation est intenable.
00:40:06« Il y a une bataille
00:40:07qui se passe
00:40:08au sein du pouvoir
00:40:09entre le Premier ministre,
00:40:11Laurent Fabius,
00:40:11le ministre de l'Intérieur,
00:40:12Pierre Jox,
00:40:13de l'autre côté,
00:40:13le ministre de la Défense
00:40:14et François Mitterrand
00:40:16qui observe pour arriver
00:40:18à passer lui-même
00:40:19entre les gouttes.
00:40:19Et finalement,
00:40:20au bout de 48 heures,
00:40:21il y a la reconnaissance
00:40:23de la vérité. »
00:40:24Mitterrand est au pied du mur.
00:40:26Il doit lâcher Ernus,
00:40:27son ami de toujours,
00:40:28mais demande à Fabius
00:40:29de s'en occuper.
00:40:31« Il ne faut pas sous-estimer
00:40:32non plus
00:40:32le réflexe d'orgueil
00:40:34de Laurent Fabius. »
00:40:35Fabius a pris un coup de colère
00:40:37et il a dit maintenant
00:40:38« Il y en a marre.
00:40:38Ce n'est pas possible.
00:40:39Je ne peux pas apprendre
00:40:40par l'Express,
00:40:41par le monde
00:40:42cette opération. »
00:40:43Alors qu'Hernu me dit
00:40:44que ce n'est pas vrai,
00:40:45c'est absurde.
00:40:46Lorsqu'il est sur le point
00:40:48de trancher cet épisode-là,
00:40:50il y a une part de vengeance
00:40:51et il demande la tête
00:40:53de Charles Ernus.
00:40:54Le 20 septembre 1985,
00:40:56Charles Ernus démissionne
00:40:57et l'amiral Lacoste,
00:40:58le patron de la DGSE,
00:41:00est limogé.
00:41:01« Il fallait faire sauter quelqu'un.
00:41:02Donc c'était ou Ernus,
00:41:04ou Fabius,
00:41:04ou le président.
00:41:05Donc c'était Ernus.
00:41:06Et donc Ernus a démissionné. »
00:41:11Deux jours plus tard,
00:41:12Laurent Fabius intervient
00:41:14contraint et forcé
00:41:15à la télévision.
00:41:17« Le ministre de la Défense
00:41:18vient de m'informer
00:41:21des premières conclusions
00:41:23de l'enquête menée
00:41:24sur l'affaire du Rainbow Vario.
00:41:27Ce sont des agents
00:41:30de la DGSE
00:41:31qui ont coulé ce bateau.
00:41:34Ils ont agi sur ordre. »
00:41:38Un mois après
00:41:39sa première intervention
00:41:40sur l'affaire
00:41:40du Rainbow Warrior,
00:41:42un rétro-pédalage impressionnant
00:41:43du premier ministre
00:41:44à Matignon.
00:41:45Même décor,
00:41:46même cravate,
00:41:47mais discours radicalement différents.
00:41:50Laurent Fabius confirme
00:41:51ce que tout le monde sait
00:41:51depuis plusieurs semaines,
00:41:53sauf lui.
00:41:53« Il y en a un
00:41:55dont on est certain
00:41:56qu'il est au courant
00:41:56de rien,
00:41:58c'est Laurent Fabius.
00:41:59Alors lui,
00:41:59il est en dehors des clous,
00:42:02mais c'est conforme
00:42:03à l'esprit de la Vème République. »
00:42:04« Un premier ministre,
00:42:05traditionnellement,
00:42:07n'est pas informé
00:42:07des affaires de la DGSE,
00:42:09surtout pas à cette époque. »
00:42:11Ce qui se passe
00:42:11est exceptionnel
00:42:12dans l'histoire
00:42:13de la Vème République.
00:42:14Un premier ministre
00:42:15en exercice
00:42:16avoue publiquement
00:42:17qu'il a été mené en bateau
00:42:18pendant plusieurs mois
00:42:19par son ministre de la Défense
00:42:21et les services secrets français.
00:42:22Mais qui a donné l'ordre
00:42:24de couler le bateau ?
00:42:26Qui est responsable
00:42:27du fiasco
00:42:27le plus retentissant
00:42:28du service action ?
00:42:30Est-ce le patron
00:42:30de la DGSE,
00:42:31l'amiral Lacoste,
00:42:32qui a voulu se faire mousser ?
00:42:34Est-ce le ministre
00:42:35de la Défense,
00:42:35Charles Hernu,
00:42:36qui a voulu coûte que coûte
00:42:37protéger les essais nucléaires ?
00:42:39Ou est-ce François Mitterrand
00:42:40qui ne voulait plus
00:42:41s'encombrer
00:42:42d'une bande
00:42:43d'activistes écologistes ?
00:42:45« Le président
00:42:47était parfaitement au courant.
00:42:49Il savait certainement
00:42:50que si des nageurs
00:42:51de combats sont impliqués
00:42:52dans cette affaire,
00:42:54c'est que c'était sérieux.
00:42:56Donc l'ordre,
00:42:58il savait qu'il y aurait
00:42:58un sabotage, etc. »
00:43:01Est-ce que le président
00:43:01de la République
00:43:02connaît dans le détail
00:43:03l'opération satanique ?
00:43:06Évidemment non.
00:43:07Parce que ça n'est pas
00:43:07du niveau du président
00:43:08de la République
00:43:08et parce que François Mitterrand
00:43:10se souciait assez peu
00:43:11des détails
00:43:11et que Charles Hernu
00:43:12n'avait pas à cœur
00:43:13d'informer le président
00:43:14de la République.
00:43:15Hernu au courant,
00:43:16oui, il a donné l'ordre.
00:43:17Mais Hernu,
00:43:18ça reste un mystère
00:43:19parce qu'il a envie
00:43:20d'être accepté
00:43:22par les amiraux.
00:43:23Il croit servir la France
00:43:24en faisant ce type d'action
00:43:25qui est une stupidité
00:43:27sans nom.
00:43:28Et ce sont
00:43:28les faux épouturanges
00:43:30qui payent l'addition.
00:43:31Pendant que Charles Hernu
00:43:32s'enferre dans le mensonge,
00:43:34Dominique Prieur
00:43:35et Alain Mafard
00:43:35croupissent en prison.
00:43:37Leur visage
00:43:37et leur nom
00:43:38sont connus
00:43:38dans le monde entier.
00:43:40Ils sont grillés.
00:43:41Le sort des deux agents
00:43:42est évidemment
00:43:43très ennuyeux.
00:43:45Mais enfin,
00:43:46ce sont des militaires.
00:43:47ils ont commis
00:43:48une action illégale.
00:43:50Ils ont été attrapés.
00:43:51Ils sont entre les mains
00:43:52de la justice néo-lislandaise.
00:43:53Le tout,
00:43:54c'est de les faire sortir.
00:43:55Mais ils ne sont quand même
00:43:56pas dans des jôles
00:43:57inhumaines.
00:43:59Les néo-zélandais
00:44:00réclament un procès.
00:44:01Surtout David Langhi,
00:44:02leur premier ministre,
00:44:03qui joue sa réélection
00:44:04sur cette affaire.
00:44:07Les épouturanges
00:44:07sont donc entendus
00:44:08par un juge
00:44:09le 22 octobre 1985.
00:44:11Robert Badinter,
00:44:14le ministre de la Justice,
00:44:15leur a envoyé
00:44:16un avocat français,
00:44:17Maître Soulaise-la-Rivière.
00:44:20Je voulais le voir
00:44:21à Badinter.
00:44:21Je lui ai dit
00:44:21« Mais qu'est-ce que
00:44:22vous attendez, moi ?
00:44:24Qu'est-ce que
00:44:24le gouvernement attend de moi ? »
00:44:26Et il me répond
00:44:26que vous les sortiez
00:44:27de prison
00:44:28plus tôt possible.
00:44:30Après des semaines
00:44:31de négociations,
00:44:32Maître Soulaise-la-Rivière
00:44:33arrive à modifier
00:44:34le chef d'inculpation.
00:44:36Il y avait un petit tribunal
00:44:38très anglais
00:44:38avec des trucs en bois.
00:44:40Et puis il y avait
00:44:40une immense salle
00:44:41avec un grand écran.
00:44:43Et c'était prévu,
00:44:44on était prévu
00:44:44pendant un procès d'un mois.
00:44:46Ils arrivent tous les deux,
00:44:47elle qui était maquillée
00:44:47comme un camion,
00:44:48elle avait une perruque noire,
00:44:50elle avait des yeux,
00:44:51elle était entièrement maquillée,
00:44:52c'était surréaliste.
00:44:53Lui,
00:44:54et lui,
00:44:54faisait playboy.
00:44:56Et là,
00:44:59à la question
00:45:00coupable ou non coupable,
00:45:01ils disent coupable.
00:45:02Et là,
00:45:03c'est la constatation.
00:45:03Tout le monde
00:45:04est absolument stupéfait
00:45:05parce que
00:45:05ceux qui connaissent
00:45:06savent que c'est fini.
00:45:07Une affaire de ce genre,
00:45:09il y a deux solutions.
00:45:09ou bien
00:45:10vous plaidez
00:45:11contre
00:45:12l'accusation
00:45:14devant un jury,
00:45:15ça dure 5 mois,
00:45:166 mois.
00:45:17Ou bien,
00:45:18si ce n'est pas raisonnable,
00:45:19vous essayez de négocier
00:45:20une diminution des charges
00:45:22en grande partie
00:45:23de ce qu'on appelle
00:45:24un guilty plea.
00:45:25Et c'est à l'évidence
00:45:26ce qui s'imposait.
00:45:26Guilty or not guilty,
00:45:29coupable ou non coupable.
00:45:31À cette question fatidique
00:45:32posée par un juge en perruque,
00:45:34comme vous en avez tous vu
00:45:35déjà dans des films
00:45:35d'Hitchcock ou autres,
00:45:37les faux épouturanges
00:45:38ont répondu coupable.
00:45:39Il a réussi à échanger
00:45:41les charges contre eux,
00:45:42qui étaient de
00:45:43domicile
00:45:44volontaire,
00:45:46ou de complicité
00:45:46de domicile,
00:45:47qui étaient 15 à 20 ans,
00:45:48à domicile
00:45:49d'un volontaire,
00:45:50ce qui fait
00:45:50qu'ils n'ont pris
00:45:51que 10 ans.
00:45:52Il a défini cette stratégie,
00:45:54une stratégie de la vérité,
00:45:55et il leur a permis,
00:45:57grâce à son entregenre,
00:45:58grâce à sa connaissance
00:45:59du système britannique,
00:46:01car la Nouvelle-Zélande
00:46:02a un système judiciaire
00:46:03britannique,
00:46:04qui leur a permis
00:46:04vraiment d'aller
00:46:06vers la libération,
00:46:07une libération
00:46:08qui était vraiment
00:46:09mal partie.
00:46:10Mais leur libération
00:46:11va prendre du temps.
00:46:13Les Néo-Zélandais
00:46:13ne sont pas très favorables
00:46:14à voir les espions français
00:46:16sortir de prison.
00:46:18À ma connaissance,
00:46:19aucun membre
00:46:20de cette équipe
00:46:21de la DGSE
00:46:21n'a réellement répondu
00:46:22de ses actes.
00:46:24Bien sûr,
00:46:25à ce moment-là,
00:46:26beaucoup d'autres facteurs
00:46:27politiques sont entrés en jeu.
00:46:29Et tout ça,
00:46:30c'est soldé
00:46:30par le rapatriement
00:46:31des Thuringes.
00:46:33Les négociations traînent.
00:46:35En mars 1986,
00:46:37Jacques Chirac,
00:46:37qui est sur le point
00:46:38d'arriver à Matignon,
00:46:39décide de prendre
00:46:40les choses en main.
00:46:42Deux officiers français
00:46:43qui font honneur
00:46:44à l'armée française,
00:46:46qui ont obéi aux ordres,
00:46:48qui ne sont pas
00:46:48des terroristes,
00:46:50sont aujourd'hui
00:46:51en prison
00:46:52et le capitaine
00:46:53Dominique Friere,
00:46:55la femme,
00:46:55en quartier
00:46:56de haute sécurité.
00:46:58Et à l'évidence,
00:47:00plus personne
00:47:01ne s'en occupe
00:47:01sérieusement
00:47:02au niveau
00:47:03du gouvernement.
00:47:04Quand la droite
00:47:05est arrivée au pouvoir
00:47:06avec le gouvernement
00:47:07de Jacques Chirac
00:47:07en 1986,
00:47:09immédiatement,
00:47:10les choses
00:47:10se sont transformées
00:47:13parce que le chef
00:47:15du cabinet
00:47:15de Jacques Chirac
00:47:17à Matignon
00:47:17était un ancien
00:47:19de la DGSE.
00:47:21On savait très bien
00:47:22que deux officiers français
00:47:23ne pouvaient pas rester
00:47:25dix ans en prison
00:47:25en Nouvelle-Zélande.
00:47:26Ça n'a ni que ni tête.
00:47:27Surtout quand ils ont
00:47:28agi sur ordre.
00:47:29Donc c'est un problème
00:47:30d'État,
00:47:31de relations entre États,
00:47:32beaucoup plus
00:47:33que de personnes.
00:47:35Alain Mafard
00:47:36et Dominique Prieur
00:47:37restent un an
00:47:37en prison.
00:47:39Pendant ce temps,
00:47:40un bras de fer étonnant
00:47:40se joue entre Paris
00:47:41et Auckland.
00:47:43Comment pousser
00:47:43les Néo-Zélandais
00:47:44à libérer les Thuringes ?
00:47:46Comment négocier ?
00:47:47Que leur offrir
00:47:48en échange ?
00:47:50L'idée du gouvernement
00:47:51français
00:47:52qui a été faite
00:47:54assez habilement,
00:47:55ça a été de pourrir
00:47:56la vie des Néo-Zélandais
00:47:57sur ce qu'ils vendent,
00:47:58c'est-à-dire la vente
00:47:58de produits agricoles.
00:47:59Donc par exemple,
00:47:59s'ils avaient d'énormes
00:48:00marchés de beurre
00:48:01avec l'Algérie,
00:48:02les Français ont pulvérisé
00:48:04les contrats,
00:48:05c'est-à-dire qu'ils ont
00:48:06vendu du beurre
00:48:07à moitié moins cher
00:48:07que les Néo-Zélandais.
00:48:08La Nouvelle-Zélande,
00:48:10comme c'est un pays
00:48:11qui est plein de moutons,
00:48:11ils vendent plein de laine
00:48:12et les douaniers français,
00:48:14quand les camions
00:48:15étaient en France,
00:48:15ils pétaient les câbles
00:48:16pour vérifier
00:48:17s'il n'y avait pas
00:48:18de la drogue dedans
00:48:18et résultat,
00:48:19la laine était perdue,
00:48:20invendable
00:48:21et ça a été comme ça
00:48:22tout le temps.
00:48:23La Nouvelle-Zélande
00:48:23qui a extraordinairement
00:48:24besoin de ses exportations
00:48:26finit par céder
00:48:27et sous l'égide
00:48:29effectivement des Nations Unies,
00:48:31un dénouement est trouvé
00:48:32qui est assez peu glorieux.
00:48:34On échange effectivement
00:48:34des agents
00:48:35contre de la laine
00:48:36et du lait.
00:48:36Le gouvernement était pris
00:48:38dans un dilemme.
00:48:40Il devait décider
00:48:41si détenir
00:48:42les espions français
00:48:43en Nouvelle-Zélande
00:48:44serait utile
00:48:44à long terme
00:48:45ou s'il valait mieux
00:48:46conclure un accord.
00:48:49Un accord est trouvé
00:48:50et dans la nuit
00:48:51du 22 au 23 juillet 1986,
00:48:53soit un an après
00:48:55l'attentat
00:48:55contre le Rainbow Warrior,
00:48:57les faux épouturages
00:48:58sont exfiltrés
00:48:58vers la base militaire
00:49:00de Howe.
00:49:00On a accepté
00:49:01au bout d'un an
00:49:02qu'ils aillent
00:49:02dans un îlot
00:49:04qui se fait là-haut
00:49:05où ils devaient rester
00:49:07au moins trois ans.
00:49:08Ils n'avaient pas le droit
00:49:08d'en sortir.
00:49:09Là-haut,
00:49:10il faut savoir ce que c'est.
00:49:10Là-haut,
00:49:11c'est une piste d'atterrissage.
00:49:12C'est-à-dire que c'est un truc
00:49:13qui est un tout petit îlot,
00:49:14il y a une immense piste
00:49:15d'atterrissage
00:49:16qui sert uniquement
00:49:17pour détourner
00:49:17les avions militaires
00:49:18s'il y a un problème
00:49:19pour se poser.
00:49:20Et ils sont restés là,
00:49:22tous les...
00:49:22alors,
00:49:23ma femme,
00:49:24et puis son vrai mari,
00:49:25qui avait été muté là-bas.
00:49:27Ils avaient créé
00:49:28un truc de plongée.
00:49:32Et après presque
00:49:33deux ans sur l'atoll,
00:49:34surprise.
00:49:36Un jour,
00:49:36ils ont fait le concorde
00:49:37pour se poser.
00:49:40Et Chirac,
00:49:41qui était proéministe,
00:49:42ça devait être entre 86
00:49:43et 80 décembre,
00:49:45et aller serrer les mains
00:49:46et leur dire bonjour.
00:49:48Il leur a dit,
00:49:48écoutez,
00:49:48il y a une solution,
00:49:50madame,
00:49:50il y a une solution,
00:49:51madame.
00:49:51Parce que,
00:49:52imaginez que
00:49:53vous attendiez
00:49:54un heureux événement.
00:49:55on sera obligés
00:49:56de vous répatrier en France.
00:49:57Parce que,
00:49:59parce qu'on ne peut pas
00:50:00vous laisser accoucher
00:50:01à eau.
00:50:02Et puis il a dit à Maffard,
00:50:03vous,
00:50:04vous êtes quand même
00:50:04assez fragiles
00:50:05de constitution,
00:50:06vous avez un problème
00:50:07pulmonaire,
00:50:07un truc comme ça.
00:50:09Et donc,
00:50:09ils ont attendu,
00:50:10et dès qu'elle a eu
00:50:11ces résultats
00:50:13de qu'elle était
00:50:13vraiment enceinte,
00:50:14elle a communiqué ça
00:50:15au médecin des armées,
00:50:16qui était très étonné,
00:50:17qui a communiqué à Paris,
00:50:19et on a dit,
00:50:20on la rappelle.
00:50:21Alain Maffard souffrirait
00:50:22de graves douleurs
00:50:23à l'estomac.
00:50:24Les Néo-Zélandais
00:50:25ont proposé
00:50:26de le soigner
00:50:26à Wellington,
00:50:27mais un médecin
00:50:28militaire français
00:50:29venu l'examiner
00:50:30a jugé que son état
00:50:31nécessitait son retour.
00:50:33Le commandant Maffard
00:50:34est malade,
00:50:36que ceci a été constaté
00:50:37par des autorités médicales
00:50:41nationales incontestables,
00:50:43qu'en conséquence,
00:50:45il est revenu à Paris.
00:50:46Il est rentré aussi
00:50:47la veille des élections,
00:50:49ce qui était peut-être
00:50:49pour Chirac,
00:50:50peut-être qu'il avait
00:50:50une derrière-pensée politique
00:50:51derrière,
00:50:52mais c'est comme ça
00:50:52qu'ils sont rentrés.
00:50:54Le 7 mai 1988,
00:50:57six mois après Alain Maffard,
00:50:58Dominique Prieur
00:50:59atterrit à l'aéroport
00:51:00de Villacoublet.
00:51:01C'est l'ultime épisode
00:51:02de l'affaire
00:51:03du Rainbow Warrior.
00:51:04Quand même,
00:51:04elle a porté
00:51:05une attaque considérable
00:51:06au sein des Français.
00:51:07On a effectivement
00:51:07passé pour des rigolos.
00:51:09Les Anglais
00:51:09ne se sont pas privés,
00:51:10les Américains,
00:51:11pour nous le dire.
00:51:11En contrepartie
00:51:13de la libération
00:51:13des espions,
00:51:14la France paye
00:51:15plus de 15 millions de dollars.
00:51:17Le prix de la négociation,
00:51:19le prix du mensonge,
00:51:20le prix du secret d'État.
00:51:22C'est une tragédie
00:51:23pour la démocratie.
00:51:25Qu'un État démocratique
00:51:26pense que ça ne pose
00:51:27pas de problème
00:51:27d'aller faire exploser
00:51:28un bateau
00:51:29dans un autre État démocratique.
00:51:31La question du mensonge d'État,
00:51:33il sera de tout temps,
00:51:34de toutes les époques.
00:51:35La vraie question,
00:51:36c'est est-ce qu'en face,
00:51:37on a un écosystème démocratique ?
00:51:39Jamais aucun débriefing
00:51:40n'a eu lieu
00:51:41à la DGSE.
00:51:42Jamais aucune commission
00:51:43d'enquête
00:51:44n'a permis d'établir
00:51:45la chaîne de responsabilité.
00:51:47On n'a jamais réuni
00:51:49les gens
00:51:49en leur disant
00:51:50qu'est-ce qui s'est passé ?
00:51:52Si on avait été aux États-Unis,
00:51:54d'autres têtes
00:51:54seraient tombées
00:51:55pour haute trahison.
00:51:57Le contrôle parlementaire
00:51:58du renseignement
00:51:58n'est advenu en France
00:52:00qu'en 2007.
00:52:0230 ans après,
00:52:03on ne sait toujours pas
00:52:04qui a réellement donné l'ordre
00:52:05de couler le Rimbaud Warrior.
00:52:07Justice n'a pas été faite
00:52:09pour le meurtre de Fernando.
00:52:10Les vrais méchants
00:52:11de l'histoire
00:52:11sont Mitterrand
00:52:12et Ernus.
00:52:14Bilan cruel,
00:52:15un membre de Greenpeace
00:52:16est mort à Auckland
00:52:17et les essais nucléaires français
00:52:18ont continué
00:52:19jusqu'en 1996.
00:52:20Telle fut donc la fameuse affaire
00:52:29du Rimbaud Warrior
00:52:30que vient de vous faire revivre
00:52:32ce documentaire réalisé
00:52:33par Mélanie d'Alsace
00:52:34et tiré de la série
00:52:35Les mensonges de l'histoire.
00:52:3740 ans après,
00:52:38cache-t-elle encore
00:52:39des zones d'ombre ?
00:52:40Et quelles leçons
00:52:41ont tiré de cette bien
00:52:42encombrante affaire d'État ?
00:52:44Eh bien, nous allons en débattre
00:52:45maintenant avec nos invités
00:52:46présents aujourd'hui
00:52:47sur ce plateau
00:52:48de débat doc.
00:52:49Hervé Gatignot tout d'abord.
00:52:51Bonjour.
00:52:51Bienvenue à vous Hervé Gatignot.
00:52:52Vous êtes journaliste
00:52:53d'investigation.
00:52:55Vous avez notamment
00:52:56longtemps travaillé
00:52:57au sein du quotidien
00:52:58Le Monde.
00:52:59On peut désormais écouter
00:53:00vos revues de presse
00:53:01sur Radio Classique
00:53:02dont vous êtes
00:53:02le directeur de la rédaction
00:53:04et vous venez de publier
00:53:06chez Flammarion
00:53:07deux bombes
00:53:08sous le Rainbow Warrior,
00:53:09les derniers secrets
00:53:10de l'affaire
00:53:11qui aurait pu faire couler
00:53:12Mitterrand.
00:53:14On va voir avec vous
00:53:15quels sont justement
00:53:16ces derniers secrets
00:53:18qui se cachent encore
00:53:19derrière cette fameuse affaire
00:53:20du Rainbow Warrior.
00:53:21Florent Vadillot
00:53:22est également avec nous.
00:53:24Bienvenue.
00:53:24Vous êtes le président
00:53:26des études françaises
00:53:27de renseignement
00:53:28et de cyber
00:53:29et enseignant à Sciences Po.
00:53:30On vous a vu
00:53:31dans ce film
00:53:32que nous venons de voir
00:53:33et vous êtes aussi
00:53:34l'auteur de ce livre
00:53:34Les coulisses du renseignement
00:53:36publié au cahier français.
00:53:39Et puis enfin avec nous
00:53:39Patrick Carreille.
00:53:41Bienvenue à vous.
00:53:42Vous êtes ancien haut fonctionnaire,
00:53:44ancien directeur
00:53:45du cabinet de Charles Hénu
00:53:46à l'époque des faits,
00:53:48autrement dit à l'époque
00:53:49où il était ministre
00:53:50de la Défense.
00:53:51C'est la première fois
00:53:52que vous acceptez
00:53:53de témoigner
00:53:54dans une télévision française
00:53:56à propos de cette affaire
00:53:58et vous avez tenu
00:53:59en préalable
00:54:00à nous recontactualiser
00:54:02ce qu'a essayé cette affaire
00:54:04après avoir vu
00:54:04ensemble ce film.
00:54:06Je vous remercie
00:54:07de me permettre
00:54:08de le faire.
00:54:09On ne comprend rien
00:54:10à cette affaire
00:54:11si on ne sait pas
00:54:12dans quel état
00:54:13on était
00:54:13il y a 40 ans.
00:54:15D'abord,
00:54:15il y a 40 ans,
00:54:16la France faisait l'objet
00:54:17d'une campagne d'attentat
00:54:18extrêmement violente
00:54:19avec des morts partout
00:54:20depuis celui de Beyrouth
00:54:22en 1983.
00:54:23Mais surtout,
00:54:24nous étions dans un contexte
00:54:26de conflit ouvert
00:54:27avec l'Union soviétique
00:54:28qui, depuis 1983,
00:54:31menaçait les grandes villes
00:54:32européennes
00:54:33avec les missiles
00:54:34SS-20.
00:54:35Et c'est dans ce contexte
00:54:36que le président
00:54:37François Mitterrand
00:54:38a été au Bundestag
00:54:39pour dire
00:54:40les missiles sont à l'Est
00:54:42et les Pacifiques
00:54:42à l'Ouest.
00:54:44Qu'est-ce que vient faire
00:54:44là-dedans l'affaire Greenpeace ?
00:54:46Nous avions des essais nucléaires
00:54:48qui étaient complètement indispensables
00:54:50pour réaliser la force de frappe
00:54:51parce qu'il était impossible
00:54:53de le faire sans ça.
00:54:54Pourquoi Greenpeace vient
00:54:57avec le Rainbow Warrior ?
00:54:59Parce qu'il veut nous empêcher
00:55:00de nous doter
00:55:01d'une force de dissuasion.
00:55:03Il faut savoir,
00:55:04et c'est une anomalie du film,
00:55:06on voit des essais atmosphériques.
00:55:08Il n'en est absolument pas question.
00:55:10Depuis 15 ans,
00:55:11tous les essais atmosphériques
00:55:12ont été arrêtés.
00:55:13Ils ont lieu désormais...
00:55:14Ils ont été arrêtés d'ailleurs
00:55:14en 1974.
00:55:16Absolument.
00:55:17Ils ont lieu donc désormais
00:55:19dans un puits
00:55:20qui est enfoncé
00:55:20sous le lagon
00:55:22à 1000 mètres sous terre
00:55:23et il n'y a aucune retombée.
00:55:25Donc,
00:55:25comme on voit dans le film
00:55:26des gens parler des retombées,
00:55:28c'est dépassé depuis 15 ans.
00:55:30S'il vient
00:55:31et tenter de forcer
00:55:32le fait
00:55:33que c'est une zone militaire interdite,
00:55:35c'est pour empêcher les essais,
00:55:37c'est-à-dire pour empêcher
00:55:38la force de dissuasion.
00:55:39Donc,
00:55:40ce que je veux dire
00:55:40en entrée de jeu,
00:55:42pour préciser pour notre débat,
00:55:43c'est qu'il était parfaitement légitime
00:55:45pour l'État français
00:55:47d'empêcher
00:55:48ces gens
00:55:49de venir
00:55:50nous empêcher
00:55:51de nous doter
00:55:52de quoi nous défendre
00:55:53contre l'URSS.
00:55:54Ce qui peut faire l'objet débat,
00:55:56dont on va sûrement parler maintenant,
00:55:58c'est les conditions
00:55:59et les moyens
00:55:59dans lesquels
00:56:00ceci a été mis en œuvre.
00:56:01Mais ce n'est pas l'objectif
00:56:03qui était parfaitement légitime.
00:56:05Le ministre de la Défense
00:56:06se devait
00:56:07de donner
00:56:08les instructions nécessaires
00:56:09pour qu'on puisse faire
00:56:10ces essais nucléaires
00:56:12qui étaient encore une fois
00:56:13indispensables
00:56:14pour qu'on puisse construire
00:56:15la force de dissuasion.
00:56:17Dès que les gouvernements
00:56:18successifs ont pu
00:56:19les interrompre
00:56:20en 1996
00:56:21parce qu'on avait mis
00:56:23au point
00:56:24un outil de simulation,
00:56:25ils ont été abandonnés.
00:56:26Voilà ce que je voulais dire
00:56:27en préliminaire.
00:56:28Hervé Cattignot,
00:56:29ce livre,
00:56:30Deux bombes
00:56:30sous le Rainbow Warrior,
00:56:32nous promet
00:56:32de nous révéler
00:56:33les derniers secrets
00:56:34concernant cette affaire.
00:56:36Le travail
00:56:37auquel je me suis assigné,
00:56:41ça a consisté
00:56:42à remettre en ordre
00:56:43tous les éléments
00:56:44de ce puzzle
00:56:46et de le compléter
00:56:47là où c'était possible.
00:56:48Donc j'ai eu accès
00:56:49à des archives
00:56:50que je crois
00:56:50personne ou presque
00:56:52n'avait vues avant moi,
00:56:53des archives
00:56:54des services secrets français,
00:56:56du ministère de la Défense,
00:56:57des archives
00:56:57de la Présidence de la République,
00:56:59de Matignon,
00:57:00du Quai d'Orsay,
00:57:01du ministère de la Justice.
00:57:02J'ai rencontré
00:57:03des témoins,
00:57:04des membres
00:57:04de cette mission
00:57:05dont le nom de code
00:57:07était satanique,
00:57:08ça ne s'invente pas,
00:57:10et qui raconte
00:57:11encore aujourd'hui
00:57:12à la fois
00:57:12les difficultés
00:57:13de cette opération,
00:57:15sa légitimité,
00:57:16comme vient de le dire
00:57:17Patrick Carey,
00:57:17pour les membres du service.
00:57:19Bon, d'abord,
00:57:19les membres du service
00:57:20sont des militaires,
00:57:21ils obéissent
00:57:21aux ordres
00:57:22d'un gouvernement légitime,
00:57:23c'était le cas.
00:57:25Et puis la légitimité même
00:57:26de cette opération,
00:57:27en effet,
00:57:28protéger l'arme
00:57:29de dissuasion nucléaire française,
00:57:31mais aussi
00:57:32les difficultés
00:57:34de cette opération
00:57:35dans le peu de temps
00:57:36qu'ils ont eu
00:57:37pour la préparer
00:57:38et le fiasco
00:57:39auquel elle a conduit.
00:57:41Alors,
00:57:41vous avez aussi
00:57:42beaucoup travaillé
00:57:43sur les archives
00:57:45de l'amiral Lacoste.
00:57:46Alors,
00:57:46l'amiral Lacoste,
00:57:47ses archives,
00:57:48bon,
00:57:49sont révélées
00:57:49complètement dans l'intégralité
00:57:51en 2022,
00:57:52et l'amiral Lacoste,
00:57:53lui,
00:57:53décède en janvier 2020.
00:57:55Et notamment,
00:57:57il est dit,
00:57:58à nouveau dans ses archives,
00:57:59puisqu'il l'affirme,
00:58:00qu'il y a eu un rendez-vous
00:58:02entre lui-même
00:58:05et François Mitterrand,
00:58:06c'était le 15 mai 1985,
00:58:08et lors de ce rendez-vous,
00:58:09l'amiral Lacoste
00:58:10affirme qu'il a eu
00:58:10le feu vert
00:58:11de la bouche
00:58:13de François Mitterrand.
00:58:14Ça,
00:58:14ce n'est pas dit
00:58:15dans le documentaire,
00:58:16et c'est un élément
00:58:16qui change beaucoup de choses.
00:58:17C'est le moment crucial
00:58:18de cette affaire.
00:58:20C'est le point clé,
00:58:21c'est le point clé
00:58:22du processus de décision,
00:58:24puisque,
00:58:24effectivement,
00:58:25le service action
00:58:26de la DGSE
00:58:27à qui on avait confié
00:58:29cette opération
00:58:30était réticent
00:58:31à l'exécuter
00:58:32dans les conditions
00:58:33qui lui étaient imposées.
00:58:34Il n'y avait pas assez
00:58:35de temps de préparation,
00:58:36pas assez de personnes
00:58:39sur le terrain,
00:58:40des conditions
00:58:41à l'autre bout du monde,
00:58:42dans une démocratie
00:58:43et un gouvernement allié
00:58:45du gouvernement socialiste
00:58:47français.
00:58:48Il y avait évidemment
00:58:48beaucoup d'obstacles.
00:58:49Le service était réticent
00:58:50et l'amiral Lacoste...
00:58:52Il ne rentre peut-être pas
00:58:52dans ce détail
00:58:53avec François Mitterrand,
00:58:54l'amiral Lacoste...
00:58:55L'amiral Lacoste,
00:58:55néanmoins,
00:58:56et c'est ça qui est très important
00:58:57de comprendre,
00:58:58c'est que l'amiral Lacoste
00:59:00pouvait,
00:59:00pour une opération
00:59:01de ce type,
00:59:02se contenter
00:59:02de l'ordre du ministre
00:59:04de la Défense,
00:59:05Charles Hernud.
00:59:05Cet ordre,
00:59:06il l'avait reçu,
00:59:07il l'avait reçu
00:59:07une première fois,
00:59:08puis il a une confirmation
00:59:10de cet ordre
00:59:11une fois que le projet
00:59:12d'opération
00:59:13est montée.
00:59:15Charles Hernud
00:59:15lui redonne cet ordre
00:59:16le 6 mai 1985
00:59:17et dans l'organisation
00:59:20de nos services secrets,
00:59:21dans une démocratie
00:59:22comme la France,
00:59:23pour ce qu'on appelle
00:59:24une opération ARMA,
00:59:26c'est-à-dire une opération
00:59:26qui ne vise pas
00:59:28à attenter
00:59:29à des vies humaines.
00:59:30À des vies humaines.
00:59:31C'est une opération
00:59:32qui ne concerne
00:59:33que des éléments matériels,
00:59:34si j'ose dire,
00:59:35un bâtiment,
00:59:36un avion,
00:59:36un bateau en l'occurrence.
00:59:38L'ordre du ministre
00:59:39de la Défense
00:59:40peut suffire.
00:59:40L'amiral Lacoste,
00:59:41s'il décide
00:59:42d'aller à l'Elysée,
00:59:43c'est précisément
00:59:44parce qu'il mesure
00:59:45les difficultés
00:59:46de cette opération
00:59:47et il sent
00:59:48que dans son service,
00:59:49il y a une réticence
00:59:50à l'organiser
00:59:51dans de telles conditions.
00:59:52Donc,
00:59:52ce qu'il va chercher
00:59:52à l'Elysée
00:59:53le 15 mai,
00:59:54autrement dit,
00:59:55une semaine après
00:59:56l'ordre du ministre,
00:59:57c'est une confirmation
00:59:58ou plus vraisemblablement,
01:00:00et il s'en ouvrira
01:00:01à plusieurs témoins
01:00:02à l'époque,
01:00:03une information.
01:00:04Au fond,
01:00:05Pierre Lacoste
01:00:05attend du président
01:00:06de la République
01:00:07qu'il mette
01:00:08un feu rouge
01:00:09à cette opération
01:00:10comme ça se produit
01:00:10souvent dans
01:00:11les services secrets
01:00:12et,
01:00:13d'une certaine façon,
01:00:14à sa surprise,
01:00:16le feu rouge
01:00:16ne vient pas.
01:00:17François Mitterrand
01:00:18valide cette opération.
01:00:19C'est pourquoi
01:00:20je ne crois pas du tout
01:00:21à la thèse
01:00:22du dialogue ambigu
01:00:24entre ces deux hommes.
01:00:25Le dialogue
01:00:25ne peut pas avoir été ambigu
01:00:27parce que l'amiral Lacoste
01:00:28est allé chercher
01:00:29chez le président
01:00:30de la République
01:00:31et le président
01:00:31connaissait la nature
01:00:33exacte de ce qu'allait
01:00:34être cette opération.
01:00:34Les détails opérationnels,
01:00:36le président n'a jamais
01:00:37à les connaître.
01:00:38C'est le fonctionnement
01:00:39des services secrets
01:00:40dans une démocratie.
01:00:41Le président ne connaît
01:00:42pas les détails,
01:00:43il connaît l'essentiel,
01:00:44mais ce jour-là,
01:00:45nécessairement,
01:00:46l'amiral Lacoste
01:00:47lui a dit
01:00:48de quoi il était question
01:00:49et lui a forcément
01:00:50parlé de la destruction
01:00:51du navire.
01:00:52Moi, j'apprécie énormément
01:00:54Hervé Gattegnaud,
01:00:55son livre est tout à fait patient.
01:00:57On le conseille.
01:00:57C'est la première fois
01:00:58que j'ai lu
01:00:58le rapport Lacoste,
01:01:00mais ça,
01:01:00c'est une hypothèse
01:01:01qui formule.
01:01:02Vous ne croyez pas
01:01:03à ce qu'affirme
01:01:04l'amiral Lacoste ?
01:01:05Parce qu'on n'a jamais vu
01:01:08un chef des services secrets
01:01:09donner le détail
01:01:10d'une opération
01:01:11à un président de la République.
01:01:12Ça ne se passe jamais
01:01:13comme ça.
01:01:14Il est allé lui indiquer
01:01:15qu'il allait.
01:01:16Je n'ai pas entendu
01:01:17autre chose
01:01:18dans la voix
01:01:18d'Hervé Gattegnaud.
01:01:19Mais l'amiral Lacoste
01:01:20dit dans son rapport,
01:01:22il dit que la conversation
01:01:23était suffisamment explicite.
01:01:25Pour l'amiral,
01:01:26c'est très gentil ça,
01:01:28mais je n'imagine pas,
01:01:30parce que ce n'était pas du tout
01:01:31la méthode de travail
01:01:32et ce n'était pas celle
01:01:33de François Mitterrand,
01:01:34qu'on lui dit
01:01:34on va couler le bateau.
01:01:35Ça, c'est absolument inconcevable.
01:01:37D'ailleurs,
01:01:37si on lui avait dit,
01:01:38il aurait dit
01:01:39vous êtes idiots.
01:01:40Avant, Charles Lernu,
01:01:42lui,
01:01:43qui donne l'ordre,
01:01:44lui sait qu'on va couler le bateau.
01:01:46Ça, c'est un autre problème.
01:01:47Je vais y revenir.
01:01:48Mais ce qu'il va dire
01:01:49au président de la République,
01:01:50c'est le ministre de la Défente,
01:01:52souhaite que j'intervienne
01:01:53pour que le bateau
01:01:54n'arrive pas à mûrer au roi.
01:01:55Ça, il va le dire.
01:01:56Il n'a pas besoin
01:01:58de l'aval du président
01:01:59de la République
01:01:59pour faire ça.
01:02:00L'ordre du ministre
01:02:00lui suffit.
01:02:01Oui, ça, ça reste à débattre
01:02:03parce qu'il estime...
01:02:04Non, mais on ne connaît pas
01:02:06le type...
01:02:07L'amiral Lacoste
01:02:08va avoir pratiquement
01:02:09toutes les semaines
01:02:10le président de la République
01:02:11pour lui raconter
01:02:12ce qu'il fait.
01:02:13Et donc,
01:02:14je ne sais pas
01:02:15dans les détails
01:02:16qu'est-ce qui a été lui dire.
01:02:17Personne ne le sait.
01:02:18Il n'y a aucun trace
01:02:20de ce qui s'est dit
01:02:20entre les deux.
01:02:21Mais c'est hautement improbable
01:02:23qu'on entre devant le président
01:02:24qui n'entrait vraiment
01:02:25jamais dans les détails
01:02:26sur le fait
01:02:27qu'on va couler le bateau.
01:02:28Ça me paraît invraisemblable.
01:02:30En revanche,
01:02:30le fait que Charles Hernu,
01:02:32lui, ait donné son feu vert
01:02:33et ne connaissait pas
01:02:34la nature de cette opération...
01:02:35Ça, c'est un autre problème.
01:02:36Alors là,
01:02:37en tant que témoin
01:02:38du début d'une partie
01:02:41de l'affaire,
01:02:42j'ai assisté
01:02:43au comité interministériel
01:02:45où la question
01:02:46du danger
01:02:46que représentait
01:02:47pour la marine
01:02:48d'arrêter un bateau
01:02:49de cette taille
01:02:50s'est posée.
01:02:50J'ai entendu,
01:02:52je suis témoin,
01:02:53j'ai entendu le dialogue
01:02:54entre Charles Hernu
01:02:55et le chef d'état-major
01:02:56des armées
01:02:57puisque la COS n'était pas présente.
01:02:59Et Charles Hernu
01:03:00s'est tourné
01:03:01vers le chef d'état-major
01:03:02et lui a dit
01:03:03« Mon général,
01:03:04à votre époque,
01:03:04on savait comment arrêter
01:03:05ce genre de choses.
01:03:07Vous mettiez des choses
01:03:07dans l'huile. »
01:03:09Le chef d'état-major
01:03:11qui était quelqu'un
01:03:11qui ne parlait très peu
01:03:13a hoché la tête.
01:03:14et à ce moment-là,
01:03:16le ministre lui a dit
01:03:18« Mon général,
01:03:19expliquez à l'amiral
01:03:20comment vous faites. »
01:03:21Le reste,
01:03:22il n'y a aucun témoin
01:03:23de ce qui a pu se dire
01:03:25entre la COS
01:03:26et Hernu.
01:03:27Il est possible,
01:03:28je ne conteste pas
01:03:29ce que dit Hervé Gaténaud,
01:03:31il est possible
01:03:31que la COS lui ait dit
01:03:34« On n'a pas d'autre moyen
01:03:35que de faire. »
01:03:36Simplement,
01:03:37ce qui est dit
01:03:38un peu partout,
01:03:39c'est qu'on voulait
01:03:39couler le bateau.
01:03:40Ça,
01:03:40ce n'est absolument pas vrai.
01:03:43Je n'ai jamais entendu
01:03:44à aucun moment
01:03:45dire qu'on voulait le couler.
01:03:46On voulait l'empêcher
01:03:47par tout moyen,
01:03:48c'est absolument exact,
01:03:49d'entrer dans l'atoll.
01:03:51Ça, oui.
01:03:52Le couler,
01:03:52je ne sais pas
01:03:53d'où s'est sorti.
01:03:54Les archives
01:03:55et les témoins
01:03:57de l'époque
01:03:57disent des choses
01:03:59beaucoup plus précises
01:04:00que ça.
01:04:01Il était absolument question
01:04:02non pas seulement
01:04:03d'empêcher le bateau
01:04:04d'entrer dans la zone,
01:04:05mais de l'empêcher
01:04:06définitivement.
01:04:07Donc, autrement dit,
01:04:08il était question,
01:04:09dans les objectifs
01:04:09qui sont fixés,
01:04:11il est question
01:04:11de détruire le bateau
01:04:13et ce sont les scénarios,
01:04:15le service Action
01:04:16dans ces cas-là
01:04:16propose plusieurs scénarios
01:04:18d'intervention
01:04:18et tous les scénarios
01:04:19d'intervention
01:04:20qui ont été proposés
01:04:21visaient à détruire
01:04:23le bateau.
01:04:24Donc, il ne s'agissait plus
01:04:25là, pour le coup,
01:04:26de mettre du sucre
01:04:27dans le moteur
01:04:28ou de fausser l'hélice.
01:04:29Il s'agissait vraiment
01:04:30de se débarrasser
01:04:31définitivement de ce bateau.
01:04:33Vous êtes fait,
01:04:33en tout cas,
01:04:34vous connaissez bien
01:04:34cette affaire.
01:04:35On vous avait témoigné
01:04:36vous êtes fait une religion
01:04:37sur la chaîne de commandement
01:04:38qui a donné l'ordre à qui
01:04:39et qui savait,
01:04:41qui ne savait pas,
01:04:42notamment dans la classe politique
01:04:43au sein de ce gouvernement
01:04:44de l'été 85.
01:04:46La première question
01:04:47que vous avez posée
01:04:47à Hervé Gatégno,
01:04:48c'est quels sont
01:04:48les mystères qui subsistent.
01:04:50Et finalement,
01:04:51c'est un vrai mystère
01:04:53qui subsiste.
01:04:53Alors, il y a
01:04:53effectivement des enquêtes
01:04:56et Hervé Gatégno
01:04:56apporte des éléments
01:04:57qui sont extrêmement forts
01:04:58dans le raisonnement
01:04:59mais pour le fait,
01:05:01ni le président de la République,
01:05:02ni le ministre de la Défense,
01:05:03ni l'amiral Lacoste
01:05:04n'ont jamais évoqué
01:05:06dans le détail
01:05:07ce qu'ils ont vraiment
01:05:09échangé comme type
01:05:10d'information.
01:05:11J'ai eu la chance
01:05:11de connaître l'amiral Lacoste
01:05:12à la fin de sa vie
01:05:13très longtemps.
01:05:15Il n'avait pas de relation
01:05:16aisée avec
01:05:16ni François Mitterrand
01:05:18ni Charles Hernu.
01:05:19Exact.
01:05:19C'était une relation
01:05:20qui n'était pas fluide.
01:05:21Patrick Carré confirme.
01:05:23Oui.
01:05:23Il était d'ailleurs
01:05:24plutôt du bord opposé
01:05:26au président de la République,
01:05:27loyal à la République,
01:05:28mais il n'y avait pas
01:05:28de fluidité
01:05:30ni avec le ministre de la Défense
01:05:31ni avec le ministre des Armées,
01:05:32avec le président de la République.
01:05:33Le président de la République
01:05:34n'avait pas une appétence
01:05:36majeure pour les sujets
01:05:37de renseignement.
01:05:38Il y avait une petite anomalie,
01:05:39c'est qu'effectivement,
01:05:40à la différence de ses prédécesseurs,
01:05:41il recevait le chef
01:05:42de la DGSE
01:05:43à l'Elysée,
01:05:44ce que ne faisaient
01:05:44quasiment pas ses prédécesseurs.
01:05:46Donc, il y avait néanmoins
01:05:48une volonté
01:05:49de traiter ces sujets-là.
01:05:50Mais, à l'Elysée,
01:05:52les interlocuteurs
01:05:53de l'amiral Lacoste
01:05:54étaient extrêmement nombreux.
01:05:55Il y avait le secrétaire général
01:05:56de l'Elysée,
01:05:57le chef d'état-major particulier.
01:05:59Donc, je pense que,
01:05:59in fine,
01:06:00il y a eu une dilution
01:06:01de l'information
01:06:02qui a été donnée.
01:06:04Sur les fonds spéciaux,
01:06:05le chef d'état-major particulier
01:06:06du président de la République
01:06:07a eu un impact
01:06:09pour financer l'opération.
01:06:10Des fonds spéciaux
01:06:11qui vont financer
01:06:12effectivement cette opération ?
01:06:13Donc, je pense qu'il y a
01:06:14peut-être eu,
01:06:15en tout cas,
01:06:15moi, je reste sur cette idée
01:06:16qu'il y a eu une forme
01:06:17de dialogue de dupe
01:06:18où chacun a cru dire
01:06:19à l'autre
01:06:20ce que l'autre pensait savoir
01:06:21et qu'in fine,
01:06:24peu de monde savait
01:06:25la réalité de l'opération.
01:06:26En tout cas,
01:06:27je ne vois pas
01:06:28François Mitterrand
01:06:28valider une opération
01:06:29dont il aurait connu le détail.
01:06:31En revanche,
01:06:31là où je rejoins
01:06:32Hervé Gatégnon,
01:06:33c'est qu'il y avait
01:06:33une volonté
01:06:34du ministre de la Défense
01:06:36et du président de la République
01:06:37de ne plus avoir
01:06:38le problème de Greenpeace
01:06:39et donc de ne plus recourir
01:06:40aux anciennes solutions.
01:06:41On dévisse l'hélice,
01:06:42on donne la jaunisse
01:06:43à l'équipage
01:06:44ou on met du sucre
01:06:45dans le réservoir.
01:06:45Donc, il y a eu
01:06:45une volonté
01:06:46de solution définitive.
01:06:48Alors, vous allez plus loin,
01:06:49vous tirez le fil,
01:06:50vous tirez le fil
01:06:51et vous en arrivez
01:06:51à nous dire
01:06:52que ce n'est pas Ernest
01:06:53qui ment à Mitterrand
01:06:54dans cette affaire
01:06:55mais c'est Mitterrand
01:06:56qui lui intime de mentir.
01:06:58Alors là,
01:06:58ça, c'est un moment clé
01:07:00de la partie politique
01:07:02de l'affaire.
01:07:03C'est-à-dire que
01:07:03cette affaire
01:07:04est une sorte de thriller
01:07:05d'espionnage
01:07:06qui devient
01:07:06un scandale politique
01:07:08et donc ce scandale politique,
01:07:10lui aussi,
01:07:10il a pour origine
01:07:11ce fameux rendez-vous
01:07:12du 15 mai
01:07:13parce que François Mitterrand
01:07:14ayant donné
01:07:15peu ou prou
01:07:16son feu vert
01:07:17à cette opération,
01:07:19François Mitterrand,
01:07:20ensuite,
01:07:21lorsque l'affaire
01:07:23est connue
01:07:23et que les soupçons
01:07:25visent le service
01:07:26secret français,
01:07:27il est obligé
01:07:27de couvrir
01:07:28l'ensemble
01:07:29de l'opération
01:07:29et là,
01:07:30se produit
01:07:31une sorte de quiproquo
01:07:32assez ahurissant
01:07:34à ce niveau
01:07:34de l'État,
01:07:35c'est que
01:07:35Charles Hernud,
01:07:36pendant plusieurs semaines,
01:07:37va penser
01:07:38que par l'ordre
01:07:40qu'il a donné
01:07:40au service
01:07:41et par la mauvaise
01:07:42exécution
01:07:43de l'opération,
01:07:44il a lui-même
01:07:45mis en difficulté
01:07:46le pouvoir politique
01:07:47et vis-à-vis
01:07:48de François Mitterrand
01:07:49qui est son maître,
01:07:50son mentor
01:07:50et presque son idole,
01:07:52racontent les témoins
01:07:53de l'époque,
01:07:54il se sent
01:07:54particulièrement embarrassé
01:07:56et donc
01:07:56François Mitterrand
01:07:58ne va jamais lui dire
01:08:00pendant toutes ces semaines
01:08:01jusqu'à la fin
01:08:02du mois de juillet,
01:08:03François Mitterrand
01:08:03ne va jamais lui dire
01:08:04qu'il a vu en tête
01:08:05à tête l'amiral Lacoste
01:08:07pour évoquer cette opération
01:08:08et que donc
01:08:09il en est informé
01:08:10depuis l'origine
01:08:11et Charles Hernud
01:08:12ne va l'apprendre
01:08:13qu'à la fin du mois de juillet
01:08:14par une confidence
01:08:15de l'amiral Lacoste
01:08:16et lorsqu'il le découvre,
01:08:17il est complètement ébahi
01:08:18et il raconte
01:08:20à quelques-uns
01:08:20de ses collaborateurs,
01:08:22on verra si Patrick Carré
01:08:23il y a eu cette confidence
01:08:24et Charles Hernud
01:08:26raconte à ses collaborateurs
01:08:27que François Mitterrand
01:08:28décidément
01:08:29est encore plus fort
01:08:30qu'on ne le pensait,
01:08:32c'est vraiment
01:08:32le maître du secret,
01:08:33depuis le début
01:08:34il est au courant
01:08:35de cette opération
01:08:36et lui,
01:08:36psychologiquement,
01:08:37pour Charles Hernud,
01:08:38c'est un double déclic,
01:08:40d'abord,
01:08:40il se sent
01:08:41complètement conforté
01:08:42et donc
01:08:43il va s'enfoncer
01:08:44lui aussi
01:08:44dans une spirale
01:08:45de mensonges
01:08:46assez folle
01:08:47et d'autre part
01:08:48il se sent rassuré
01:08:49puisque ce n'est pas
01:08:50par sa faute
01:08:51que François Mitterrand
01:08:52et le pouvoir socialiste
01:08:54de l'époque
01:08:54se retrouvent en difficulté
01:08:55en quelque sorte
01:08:56c'est une décision
01:08:57qui ne lui appartenait pas
01:08:59et maintenant
01:08:59il se retrouve
01:09:00en position,
01:09:01lui,
01:09:01de protéger
01:09:01François Mitterrand.
01:09:02Je vais vous donner
01:09:03la parole
01:09:03tout de suite,
01:09:04bien sûr,
01:09:05il y a autre chose
01:09:05que vous dites,
01:09:06vous parlez d'un rendez-vous
01:09:07le 15 juillet
01:09:08et c'est Laurent Fabius
01:09:10qui va avoir le fin mot
01:09:10mais le 15 juillet
01:09:12Fabius,
01:09:14François Mitterrand
01:09:15et Charles Hernud
01:09:16parle de cette affaire
01:09:17à la demande
01:09:17de Laurent Fabius
01:09:18et c'est Laurent Fabius
01:09:19qui vous raconte
01:09:21cette entrevue
01:09:21dans votre livre.
01:09:22Laurent Fabius
01:09:23est un peu
01:09:23le dindon de la farce
01:09:24il est Premier Ministre
01:09:26on sait bien
01:09:26qu'il y a le domaine
01:09:27réservé du Président
01:09:28les questions
01:09:29de renseignement
01:09:30et d'espionnage
01:09:30sont encore plus secrètes
01:09:31que le secret.
01:09:32Mitterrand et Hernud
01:09:33se mettent d'accord
01:09:34sur une base de mention ?
01:09:36Mitterrand donne instruction
01:09:37à Charles Hernud
01:09:38de ne rien dire
01:09:39au Premier Ministre
01:09:40et donc cette scène
01:09:42incroyable
01:09:42une scène de théâtre
01:09:43se produit
01:09:44où en présence
01:09:45du Premier Ministre
01:09:46le Président de la République
01:09:47dit à Charles Hernud
01:09:48Charles dit au Premier Ministre
01:09:50est-ce que oui ou non
01:09:51les services secrets français
01:09:52sont impliqués
01:09:53dans cette opération
01:09:54et là Charles Hernud
01:09:55met la main sur la poitrine
01:09:56et jure
01:09:57sur son honneur
01:09:58d'officier
01:09:58que non
01:09:59le service
01:10:00l'ADGSE
01:10:01n'est pas impliqué
01:10:02dans cet attentat
01:10:03et le plus ahurissant
01:10:05c'est que Laurent Fabius
01:10:06le croit
01:10:06alors même que
01:10:07tout son cabinet
01:10:08lui dit
01:10:08mais non
01:10:08Monsieur le Premier Ministre
01:10:09évidemment que ce sont
01:10:11nos agents
01:10:11qui ont fait le coup
01:10:12ça crève les vues
01:10:13Laurent Fabius
01:10:13dit-vous dans votre livre
01:10:14à aucun moment
01:10:15ne pense que
01:10:16François Mitterrand
01:10:17peut lui mentir
01:10:17en revanche
01:10:18il a un doute
01:10:18sur la version
01:10:20de Charles Hernud
01:10:21alors sur ce qui vient
01:10:22d'être dit
01:10:23je reviens juste
01:10:24d'un mot
01:10:24la raison pour laquelle
01:10:26il y a mystère
01:10:27je le reconnais
01:10:28vous avez raison
01:10:28mais la raison pour laquelle
01:10:30je ne suis pas convaincu
01:10:31qu'il ait été explicitement
01:10:33demandé de le couler
01:10:34ou en tout cas
01:10:35quand j'entends dire
01:10:36que c'était l'intention
01:10:38de couler le bateau
01:10:39pour les empêcher de revenir
01:10:40la raison pour laquelle
01:10:41ça ne tient pas la route
01:10:42c'est qu'il y avait
01:10:42une flottille de bateaux
01:10:44et que quelques semaines
01:10:45plus tard
01:10:46en tant que directeur
01:10:47du cabinet
01:10:47du nouveau ministre
01:10:48Paul Quillesse
01:10:49j'ai eu à suivre
01:10:50avec lui
01:10:50comment empêcher
01:10:51cette flottille
01:10:52d'aller dans le truc
01:10:53donc ce n'est pas
01:10:53parce qu'on aurait coulé
01:10:54un bateau
01:10:55qu'on n'en aurait pas eu
01:10:56dix le suivant
01:10:57donc voilà
01:10:57je reconnais
01:10:58qu'on ne le sait pas
01:10:59simplement
01:11:00je voudrais terminer
01:11:01sur un point
01:11:01non mais ce mensonge
01:11:03pardonnez-moi
01:11:04mais ce mensonge
01:11:04orchestré
01:11:05entre le chef d'état
01:11:08et son ministre
01:11:08de la défense
01:11:09peut-être qu'il est décrit
01:11:10dans ce livre
01:11:11d'Hervé Gatégnaud
01:11:11est-ce qu'elle vous paraît
01:11:13plausible
01:11:13est-ce que vous-même
01:11:14vous avez eu un doute
01:11:15sur tout de même
01:11:16les positions tenues
01:11:17par votre ministre
01:11:18à l'époque
01:11:18je peux d'autant plus
01:11:20le crédibiliser
01:11:21que des mois plus tard
01:11:22ayant l'occasion
01:11:23de parler de cette affaire
01:11:24avec Laurent Fabius
01:11:25qui n'était plus
01:11:26premier ministre
01:11:27il n'était toujours
01:11:28pas convaincu
01:11:29que le président
01:11:30l'avait autorisé
01:11:30il continuait à penser
01:11:32que c'était un coup
01:11:33d'air nu
01:11:34derrière son dos
01:11:34ou des services
01:11:35et j'ai dû
01:11:38lui expliquer
01:11:39que moi
01:11:40je le savais
01:11:41je le savais
01:11:42pas par air nu
01:11:43pas par la coste
01:11:45je le savais
01:11:45par le coup de téléphone
01:11:46du général Sounier
01:11:47qui me demandait
01:11:48si on pouvait donner
01:11:493 millions
01:11:50j'en avais aucune idée
01:11:51je lui ai dit
01:11:52écoutez mon général
01:11:53la seule question
01:11:54que ça pose
01:11:54c'est est-ce que c'est
01:11:54autorisé ou pas
01:11:55et il ne m'a pas répondu
01:11:57il n'avait pas à me répondre
01:11:58et 3 millions
01:11:59ont été débloqués
01:12:00donc je dois dire
01:12:02que des mois plus tard
01:12:03il n'était toujours
01:12:04pas convaincu
01:12:05qu'on lui avait menti
01:12:06voilà
01:12:06le fameux rapport Tricot
01:12:08alors est-ce qu'on a affaire
01:12:09à une vraie fausse opération
01:12:11de communication
01:12:12montée de toute pièce
01:12:13par les services secrets français
01:12:15avec l'accord de Charles Lernu
01:12:16peut-être même
01:12:17pourquoi pas
01:12:18du chef de l'état
01:12:19de l'époque
01:12:20un tissu de mensonge
01:12:22nous dit-on
01:12:23dans ce film
01:12:24une insulte
01:12:25à l'intelligence
01:12:25voilà ce qui est dit
01:12:27dans ce film
01:12:28sur rapport Tricot
01:12:28c'était tout de même étonnant
01:12:30c'était quoi le principe
01:12:33de ce rapport Tricot
01:12:34d'abord le choix
01:12:35de Bernard Tricot
01:12:35c'était
01:12:36l'ancien secrétaire
01:12:37général de l'Elysée
01:12:38l'ancien rapporteur
01:12:40enfin celui qui avait créé
01:12:41la commission nationale
01:12:42de l'informatique
01:12:43et des libertés
01:12:43donc un homme
01:12:44au-dessus de tous soupçons
01:12:45sans accointance politique
01:12:46avec le pouvoir en place
01:12:47dont on pensait
01:12:48qu'il connaissait l'état
01:12:49et il avait une intégrité absolue
01:12:51donc le nommer
01:12:52c'était une sortie
01:12:53de crise magnifique
01:12:54parce que s'il dédouanait
01:12:55les services
01:12:55tout le monde croirait
01:12:56à le rapport Tricot
01:12:57bon la difficulté
01:12:58c'est que Bernard Tricot
01:12:59il avait été secrétaire général
01:13:00de l'Elysée
01:13:01mais il ne connaissait pas
01:13:02nécessairement
01:13:02les sujets de renseignement
01:13:04puisqu'à l'époque
01:13:04l'Elysée n'était pas structurée
01:13:06pour que Bernard Tricot
01:13:06en ait...
01:13:07Pour le moins
01:13:07c'est ce qu'on a envie
01:13:09de se dire
01:13:09avec le recul
01:13:10maintenant on se dit...
01:13:10Absolument
01:13:11et ensuite il a été
01:13:12très bien accompagné
01:13:14parce que il a été...
01:13:15Alors qui l'accompagne là ?
01:13:16La DGSE
01:13:17l'a prise en main
01:13:18l'a fait visiter
01:13:20ses locaux
01:13:21lui a fait rencontrer
01:13:22des personnes
01:13:23qui vraiment
01:13:24l'ont circonvenu
01:13:26et ont abaissé
01:13:27une vigilance
01:13:29qui était la sienne
01:13:29mais il a donc rédigé
01:13:31un rapport
01:13:31quasi sur commande
01:13:33mais une commande
01:13:34tellement bien passée
01:13:34que l'auteur
01:13:35n'en a pas conscience
01:13:36mais lorsqu'il remet
01:13:38ce rapport
01:13:38lorsque le rapport
01:13:40va devenir public
01:13:41il a une forme
01:13:41de sursaut
01:13:42et en fait
01:13:43il tue lui-même
01:13:44son rapport
01:13:44puisque le jour
01:13:45de la remise
01:13:46il reconnaît
01:13:47qu'il n'est pas impossible
01:13:49qu'il ait été dupé
01:13:50donc la sortie de crise
01:13:51s'effondre
01:13:53puisque le rapporteur
01:13:54reconnaît
01:13:55qu'il a pu être
01:13:56en quelque sorte
01:13:57l'objet
01:13:58d'une manipulation
01:13:59donc le rapport Tricot
01:14:01n'a aucune crédibilité
01:14:02le jour même
01:14:03où il est remis
01:14:04comment vous l'avez vécu
01:14:05ces conclusions
01:14:06du rapport Tricot
01:14:07au poste
01:14:08que vous équipiez à l'époque
01:14:09c'est l'annonce
01:14:10qu'on faisait un rapport
01:14:11c'est à dire
01:14:11j'étais en vacances
01:14:13et je regardais quand même
01:14:15comme je devais quand même
01:14:15suivre un peu
01:14:16ce qui se passait
01:14:17le journal télévisé
01:14:18et je vois
01:14:19Laurent Fabius
01:14:20annoncer
01:14:20qu'il a demandé
01:14:21une enquête
01:14:22à Bernard Tricot
01:14:24et à ce moment-là
01:14:25je me suis dit
01:14:26il y a quelque chose
01:14:27qui dysfonctionne
01:14:28on est en train
01:14:29d'enquêter
01:14:29sur nous-mêmes
01:14:30je n'imaginais pas
01:14:32que le Premier ministre
01:14:34n'avait pas été mis
01:14:34au courant
01:14:35par le Président
01:14:35mais c'est normal
01:14:37c'est la situation
01:14:38qui prévalait
01:14:39depuis que Giscard d'Estaing
01:14:41se méfiant
01:14:42de Chirac Premier ministre
01:14:44avait ordonné
01:14:45qu'il n'y ait
01:14:45aucune communication
01:14:46entre les affaires
01:14:48de la DGSE
01:14:48et le Premier ministre
01:14:49et donc effectivement
01:14:50d'abord moi-même au cabinet
01:14:52j'en étais déconnecté
01:14:53et il n'y avait
01:14:54aucune liaison
01:14:55aucune passerelle
01:14:56qui permettait
01:14:57au Premier ministre
01:14:58d'être au courant
01:14:58et c'est comme ça
01:14:59que ça fonctionnait
01:15:00depuis 1976
01:15:02et François Mitterrand
01:15:04n'a pas changé
01:15:04le système
01:15:06On voit ce que c'est
01:15:07un service de renseignement
01:15:08et d'espionnage
01:15:09qui fonctionne bien
01:15:10en réalité
01:15:11il y a beaucoup
01:15:11de dysfonctionnements
01:15:13dans le service
01:15:14dans cette affaire
01:15:15mais il y a aussi
01:15:15des choses qui marchent
01:15:16la façon dont ils prennent
01:15:18en main
01:15:18dont la DGSE
01:15:19prend en main
01:15:19Bernard Tricot
01:15:20qui est un haut fonctionnaire
01:15:21assez imbu de sa personne
01:15:23et qui pense
01:15:24qu'il est là
01:15:24pour défendre
01:15:25les intérêts de l'Etat
01:15:26est absolument spectaculaire
01:15:27j'ai retrouvé
01:15:28dans les archives
01:15:29du service secret
01:15:30des papiers
01:15:32qui ont été rédigés
01:15:33à l'attention
01:15:34de Bernard Tricot
01:15:34où tout est faux
01:15:35donc on fait
01:15:36des faux compte-rendus
01:15:37de mission
01:15:38des faux planning
01:15:40de ce qu'auront à faire
01:15:41les agents sur place
01:15:42et ensuite
01:15:43on emmène
01:15:44Bernard Tricot
01:15:45au siège
01:15:46du service action
01:15:47et en prenant
01:15:48des mines de comploteurs
01:15:49on lui dit
01:15:50regardez
01:15:50on va vous montrer
01:15:51des papiers
01:15:51que normalement
01:15:52personne ne devrait voir
01:15:53on lui montre ça
01:15:54Bernard Tricot est persuadé
01:15:55qu'il est au coeur
01:15:56du coeur du secret
01:15:57on lui montre des papiers
01:15:59qui sont entièrement faux
01:16:00il en sort absolument
01:16:01convaincu
01:16:01que les agents
01:16:02qui étaient en Nouvelle-Zélande
01:16:04n'étaient là-bas
01:16:04que pour faire du renseignement
01:16:06et sûrement pas
01:16:07pour couler un bateau
01:16:08qu'aucun ordre
01:16:09n'a été donné
01:16:10en ce sens
01:16:10et il va même plus loin
01:16:11considérant
01:16:13qu'il est lui-même
01:16:14un acteur de cette affaire
01:16:15pour la défense
01:16:16de l'état
01:16:16et de la république française
01:16:18il dupe
01:16:19l'ambassadeur
01:16:20de Nouvelle-Zélande
01:16:21à Paris
01:16:22à qui il va
01:16:23sous le sceau
01:16:24de la confiance
01:16:25demander
01:16:26s'il a la possibilité
01:16:28de lui donner
01:16:28la liste des charges
01:16:29retenues par les enquêteurs
01:16:31néo-zélandais
01:16:32contre les deux agents français
01:16:33qui ont été arrêtés
01:16:34l'ambassadeur lui fait
01:16:35remettre ce papier
01:16:36contre la promesse
01:16:38que bien entendu
01:16:39ça reste pour lui
01:16:39et pour aider son enquête
01:16:41que fait Bernard Tricot
01:16:42avec ce papier
01:16:43immédiatement
01:16:44il le remet
01:16:44à l'amiral Lacoste
01:16:45pour que le service secret
01:16:47sache enfin
01:16:48ce que la police
01:16:49néo-zélandaise
01:16:50a trouvé sur ses agents
01:16:51parce que
01:16:52la Nouvelle-Zélande
01:16:53c'est à l'autre bout du monde
01:16:54le droit anglo-saxon
01:16:55les procédures
01:16:57sont très bien verrouillées
01:16:58et donc la DGSE
01:16:59était complètement
01:17:00dans le brouillard
01:17:01et ne savait pas
01:17:01quelles preuves
01:17:02les enquêteurs néo-zélandais
01:17:04étaient susceptibles
01:17:04d'avoir retenues
01:17:05contre leurs agents
01:17:06On va écouter
01:17:06Laurent Fabius
01:17:07il était bien entendu
01:17:09dans ce documentaire
01:17:09nous sommes le 22 septembre 1985
01:17:12et il connaît enfin
01:17:14la vérité
01:17:16Le ministre de la Défense
01:17:17vient de m'informer
01:17:20des premières conclusions
01:17:22de l'enquête menée
01:17:23sur l'affaire
01:17:24du Rainbow Warrior
01:17:25ce sont
01:17:27des agents
01:17:29de la DGSE
01:17:30qui ont coulé
01:17:32ce bateau
01:17:32ils ont agi
01:17:35sur ordre
01:17:36Laurent Fabius
01:17:37donc après
01:17:38c'est un rétro-pédalage
01:17:40historique quasiment
01:17:41on peut le dire
01:17:42puisque c'est lui
01:17:43qui présente
01:17:44les conclusions
01:17:44de ce fameux
01:17:45rapport Tricot
01:17:45que nous avons évoqué
01:17:46ensemble
01:17:47puis alors là
01:17:47quelques semaines plus tard
01:17:48c'est déjà plus
01:17:50Charles Ernu
01:17:51qui est ministre
01:17:51de la Défense
01:17:52c'est celui
01:17:52qu'on a vu
01:17:53sur ces images
01:17:53c'est Paul Quillesse
01:17:54qui devient
01:17:55ministre de la Défense
01:17:56il aura payé
01:17:57cher
01:17:59politiquement
01:18:00cette affaire
01:18:01Laurent Fabius
01:18:02on a l'impression
01:18:02qu'il voit
01:18:03jusqu'à la lit
01:18:04oui alors je crois
01:18:05que pour la postérité
01:18:07c'est pas l'affaire
01:18:08qu'on lui reproche
01:18:09il a plus de sujets
01:18:10avec le sang contaminé
01:18:11que le Rambo Warrior
01:18:11tout le monde est assez
01:18:13conscient du fait
01:18:13qu'il a été le Danon
01:18:14de la farce
01:18:15puisque non seulement
01:18:16il n'a pas été informé
01:18:17mais en plus
01:18:18le président de la république
01:18:19lui laisse quand même
01:18:20prendre une forme
01:18:21de responsabilité médiatique
01:18:23en annonçant
01:18:23qu'ils avaient agi
01:18:24sur ordre
01:18:25et donc en signalant
01:18:26qu'il avait lui-même
01:18:26découvert que des ordres
01:18:28avaient été passés
01:18:29sans qu'il en soit
01:18:30destinataire
01:18:31donc toute cette histoire
01:18:32est en fait une forme
01:18:33d'humiliation
01:18:33plus que d'un rétro-pédalage
01:18:35mais il y a
01:18:36chez Laurent Fabius
01:18:37et son entourage
01:18:38de l'époque
01:18:39une forme de fureur
01:18:40qui consiste en fait
01:18:41à vouloir solder
01:18:42ce mensonge
01:18:43qui a été orchestré
01:18:44par le président de la république
01:18:45le ministre de la défense
01:18:47et qui les a
01:18:48en quelque sorte
01:18:49plongé dans une crise
01:18:50dont la résolution
01:18:51aurait été quand même
01:18:52beaucoup plus simple
01:18:53si la spirale du mensonge
01:18:55n'avait pas été
01:18:56enclenchée
01:18:57et je le signale
01:18:58parce que dans son entourage
01:18:59Claude Silbersan
01:19:00était son conseiller
01:19:01aux affaires intérieures
01:19:03et qui suivait
01:19:03l'affaire du Rimboriand
01:19:04il deviendra
01:19:05patron de la DGSE
01:19:064 années plus tard
01:19:07et il n'aura de cesse
01:19:09que de réformer
01:19:10ce service
01:19:11pour que
01:19:11ce qu'il avait vu
01:19:12son patron
01:19:13devoir faire
01:19:14ne se reproduise
01:19:15jamais plus
01:19:15donc c'est vraiment
01:19:16très important
01:19:17dans l'entourage fabusien
01:19:18alors Patrick Carey
01:19:19votre ministre
01:19:20est démissionné
01:19:21quelques jours
01:19:21avant cette déclaration
01:19:22que nous venons de voir
01:19:23il est démissionné
01:19:24le 17 septembre
01:19:25l'amiral Lacoste
01:19:27lui aussi
01:19:28le patron des services
01:19:29secrets français
01:19:30avait démissionné
01:19:30et vous resterez
01:19:31aux côtés de Paul Quillès
01:19:32en tant que directeur
01:19:33de cabinet
01:19:33j'ai eu à gérer
01:19:34la deuxième affaire
01:19:35Greenpeace
01:19:36quelques semaines plus tard
01:19:38on faisait un nouvel essai
01:19:39Laurent Fabius
01:19:40avait décidé
01:19:41d'y assister personnellement
01:19:42pour montrer
01:19:43qu'il y avait pu avoir
01:19:44un désaccord
01:19:45sur la manière
01:19:45dont s'étaient passées
01:19:46les choses
01:19:46mais que
01:19:47l'ordre d'empêcher
01:19:49tout entrave
01:19:49aux essais
01:19:50était un ordre
01:19:51de toute la république
01:19:52donc il est parti là-bas
01:19:53je l'ai accompagné
01:19:54et nous avons eu
01:19:55avec Paul Quillès
01:19:57à gérer
01:19:58comment on faisait
01:19:59cette fois-ci
01:19:59et là
01:20:01le point important
01:20:03c'est que
01:20:03le ministre a demandé
01:20:04à entrer
01:20:05dans les plus petits détails
01:20:06et là
01:20:06j'étais physiquement présent
01:20:07parce que
01:20:08les entretiens
01:20:09d'Ernus
01:20:09avec le chef
01:20:11du service action
01:20:12s'ils ont eu lieu
01:20:13ce qui me trouve
01:20:13extraordinairement étonnant
01:20:15et en tout cas
01:20:16avec l'amiral Lacoste
01:20:17n'avait pas de témoins
01:20:18donc
01:20:19Paul Quillès
01:20:20a demandé
01:20:20à ce que je sois présent
01:20:21et on est entré
01:20:22dans les plus petits détails
01:20:23sur comment on allait
01:20:25empêcher les bateaux
01:20:25d'entrer
01:20:26et notamment
01:20:27de demander aux marins
01:20:28de ne pas utiliser
01:20:29même des balles
01:20:30d'oom-doum
01:20:30comme il disait
01:20:31et donc
01:20:32autrement dit
01:20:32l'état français
01:20:33n'avait pas fini
01:20:33avec Greenpeace
01:20:34on a traîné
01:20:37les antinucléaires
01:20:38depuis toujours
01:20:40il y a toujours eu
01:20:41une volonté
01:20:43d'empêcher la France
01:20:44et d'autres nations
01:20:45mais pas l'URSS
01:20:46dans votre livre
01:20:46vous dites
01:20:47pour Charles Lernu
01:20:48Greenpeace
01:20:48c'était le KGB
01:20:49écoutez
01:20:50on ne savait pas
01:20:51alors très franchement
01:20:52j'ai lu le livre
01:20:53je n'ai vu
01:20:55aucun document
01:20:56permettant
01:20:57de le prouver
01:20:58il y avait
01:20:59cette thèse
01:21:00reposant notamment
01:21:01sur un certain nombre
01:21:02de drôles
01:21:03de coïncidences
01:21:04dans les archives
01:21:05de la dégéation
01:21:07on trouve
01:21:07quelques papiers
01:21:08quelques notes
01:21:08de l'époque
01:21:09qui en effet
01:21:11relèvent des coïncidences
01:21:12la plus troublante
01:21:13étant l'accès
01:21:14facilité
01:21:15à certains navires
01:21:16de Greenpeace
01:21:16à l'époque
01:21:17à des ports
01:21:18soviétiques
01:21:18dans lesquels
01:21:19normalement
01:21:20les navires occidentaux
01:21:21n'entraient pas
01:21:21mais ça n'était pas
01:21:22une preuve pour autant
01:21:23en tout état de cause
01:21:24j'ai regardé vraiment
01:21:26partout
01:21:26j'ai fouillé partout
01:21:27je n'ai trouvé
01:21:28aucun élément
01:21:29qui permette
01:21:29contrairement à ce que disent
01:21:31certains anciens du service
01:21:32d'établir le moindre lien
01:21:34entre Fernando Pereira
01:21:35le photographe
01:21:36qui est mort
01:21:37à bord
01:21:38du Rainbow Warrior
01:21:38et l'espionnage soviétique
01:21:40le KGB
01:21:41ou que sais-je
01:21:42là-dessus
01:21:43il n'y a absolument
01:21:43aucun élément
01:21:44alors il nous reste
01:21:44deux minutes
01:21:45l'affaire Greenpeace
01:21:47elle n'était pas
01:21:47tout à fait finie
01:21:48parce qu'il s'agissait
01:21:49aussi d'exfiltrer
01:21:50les vrais faux
01:21:51époux
01:21:52turanges
01:21:52notamment
01:21:54et c'est Jacques Chirac
01:21:55qui évidemment
01:21:56a pris la suite
01:21:57est-ce que Jacques Chirac
01:21:59a tiré un maximum
01:22:00de profit politique
01:22:00de cette affaire ?
01:22:02non quasiment aucun
01:22:03quasiment aucun
01:22:04il s'est occupé
01:22:06dès son arrivée
01:22:07dès mars 86
01:22:08son arrivée à Matignon
01:22:09où il succède
01:22:10à Laurent Fabius
01:22:10il s'est occupé
01:22:11comme une priorité
01:22:12de sortir
01:22:13ses deux agents
01:22:14c'est la raison
01:22:15pour laquelle
01:22:16le fameux rapport
01:22:16de l'amiral Lacoste
01:22:17que je publie
01:22:18existe
01:22:18c'est parce que Jacques Chirac
01:22:20et son ministre
01:22:20de la défense
01:22:21de l'époque
01:22:22André Giraud
01:22:23voulaient savoir
01:22:24exactement de quoi
01:22:25il retournait
01:22:25donc ils ont demandé
01:22:26ce résumé
01:22:27qui est un document
01:22:29extraordinaire en soi
01:22:30parce que normalement
01:22:30un document comme ça
01:22:31n'existe pas
01:22:32et donc sur cette base
01:22:33ils ont procédé
01:22:34à des négociations
01:22:35de coulisses
01:22:35très secrètes
01:22:36là aussi
01:22:37j'ai retrouvé
01:22:37des tas d'archives
01:22:38qui montrent
01:22:39une seule chose
01:22:40pour le dire en un mot
01:22:40c'est que ça aussi
01:22:41c'était une supercherie
01:22:43il n'y a pas eu
01:22:44d'arbitrage final
01:22:45rendu sous l'égide
01:22:46des Nations Unies
01:22:47tout a été négocié
01:22:49entre la France
01:22:49et la Nouvelle-Zélande
01:22:51et habillé
01:22:51in extremis
01:22:52du tampon
01:22:53je voudrais juste ajouter
01:22:56je voudrais juste ajouter
01:22:58en un mot
01:22:59que la fin de l'histoire
01:23:00est à mes yeux
01:23:01injuste
01:23:02car les deux seuls
01:23:03qui ont été
01:23:04réprimandés
01:23:06en quelque sorte
01:23:06c'est le commandant
01:23:08de Mafard
01:23:08et le capitaine
01:23:10Prieur
01:23:11aucun des deux
01:23:12n'a été vraiment promu
01:23:13alors qu'ils étaient
01:23:14tous les deux
01:23:15des agents exceptionnels
01:23:16à l'inverse
01:23:17tous les autres
01:23:18protagonistes
01:23:19autres que la Meyrale
01:23:20bien sûr
01:23:21ont tous été promus
01:23:22donc je voulais dire
01:23:23en terminant
01:23:24que j'ai une pensée
01:23:24pour les deux
01:23:25qui n'ont commis
01:23:26aucune faute
01:23:27et qui ont payé
01:23:28cette affaire
01:23:29Flan Valliot
01:23:30vous dites quelque part
01:23:31je crois dans le film
01:23:31oui
01:23:32un contrôle parlementaire
01:23:35des affaires
01:23:36concernant le renseignement
01:23:38d'une manière générale
01:23:39a été mis en place
01:23:40par la suite
01:23:40je ne sais pas si d'ailleurs
01:23:41c'est une des conséquences
01:23:42de cette affaire
01:23:42non pas directement
01:23:43mais c'est quand même compliqué
01:23:44de faire du contrôle
01:23:45concernant les affaires
01:23:47du renseignement français
01:23:48il n'y a qu'en France
01:23:49qu'on trouve que c'est
01:23:50vraiment compliqué
01:23:50y compris sur ce type
01:23:51d'opérations
01:23:52aux Etats-Unis
01:23:52il y a une traçabilité absolue
01:23:54et les comités parlementaires
01:23:55reçoivent
01:23:56donc c'est possible
01:23:57c'est non seulement possible
01:23:58mais je pense que c'est
01:23:58même souhaitable
01:23:59parce que 40 ans après
01:24:00quand on est encore
01:24:01à se demander
01:24:02quel était le niveau
01:24:03de responsabilité de l'Etat
01:24:04qui a dit quoi
01:24:05à quel moment
01:24:05c'est qu'il y a un problème
01:24:06et que la démocratie
01:24:07n'est pas mûre
01:24:08cette affaire aura néanmoins
01:24:09eu plusieurs avantages
01:24:11que je me permets de donner
01:24:11un la création d'une délégation
01:24:13parlementaire au renseignement
01:24:14le titre est inventé
01:24:15par les communistes en 85
01:24:16elle est adoptée en 2007
01:24:17la plus grande réforme
01:24:19administrative de la DGSE
01:24:20qui sera conduite
01:24:21à partir de 89
01:24:21par Claude Silbersan
01:24:22c'est le service moderne
01:24:24et puis surtout
01:24:25pour le service de renseignement
01:24:27paradoxalement
01:24:28ça sera aussi
01:24:28un moyen de recrutement
01:24:29beaucoup d'agents
01:24:32de la génération 85-90
01:24:33iront au service
01:24:34pour défendre la France
01:24:35parce qu'ils estimaient
01:24:36que le service
01:24:37avait été injustement traité
01:24:38ce sera le mot de la fin
01:24:39un grand merci vraiment
01:24:41à tous les trois
01:24:41d'avoir participé
01:24:43à ce débat d'oq aujourd'hui
01:24:44après ce documentaire
01:24:46tiré de la série
01:24:48les mensonges de l'histoire
01:24:50je conseille la lecture
01:24:51de ce livre
01:24:51notamment cet été
01:24:53pourquoi pas
01:24:54sur les plages
01:24:54deux bombes
01:24:55sous le rainbow warrior
01:24:56chez Flammarion
01:24:57signé Hervé Gattegno
01:24:58pour en savoir
01:24:59encore un peu plus
01:25:00sur les dessous
01:25:01de cette affaire
01:25:02après notre échange
01:25:03après ce film
01:25:04dans cette émission
01:25:04débat d'oq
01:25:05merci à Félicité Gavalda
01:25:06merci aussi à Yasmine Benaïssa
01:25:09pour qui c'était
01:25:10la dernière émission
01:25:11débat d'oq
01:25:12un grand merci
01:25:12pour ces six mois
01:25:13de travail
01:25:13dans cette émission
01:25:15prochain rendez-vous
01:25:17avec débat d'oq
01:25:19ce sera bien sûr
01:25:19avec son documentaire
01:25:21et son débat
01:25:21ce sera à la même place
01:25:23et à la même heure
01:25:23à très bientôt

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