Passer au playerPasser au contenu principalPasser au pied de page
  • hier
Le 16 juillet 1995, lors de la commémoration de la rafle du Vel d'Hiv, Jacques Chirac prononçait l'un des discours les plus marquants de la Ve République. En rupture avec ses prédécesseurs, il reconnaissait la responsabilité de la France dans la déportation et l'extermination des Juifs sous le régime de Vichy. Un discours aussi important qu'historique, qui interroge, au-delà du seul événement, sur l'impact et les débats suscités par ces prises de parole mémorielles choisies par les Présidents de la République.

Pour en débattre, Jean-Pierre Gratien reçoit : les historiens, Sébastien Ledoux, spécialiste des questions mémorielles, Annette Wieviorka, spécialiste de l'histoire des Juifs au XXe siècle et Vincent Duclert, spécialiste des sociétés démocratiques et de l'histoire des génocides.

Catégorie

🗞
News
Transcription
00:00:00Générique
00:00:01...
00:00:16Bienvenue à tous dans Débat Doc.
00:00:17Souvenez-vous, voilà 30 ans et pour commémorer la rafle du Veldiv de juillet 1942,
00:00:23Jacques Chirac prononçait l'un des discours les plus marquants de la Vème République
00:00:28en rupture avec ses prédécesseurs.
00:00:30Il reconnaissait la responsabilité de la France dans la déportation et l'extermination des Juifs
00:00:36sous le régime de Vichy.
00:00:38Le documentaire exclusif qui va suivre, l'irréparable 1995,
00:00:42le discours du Veldiv réalisé par Caroline Dussain et Thomas Riby,
00:00:47retrace la genèse de ce fameux discours,
00:00:50mais aussi, vous allez le voir, le contexte historique et politique qui l'ont justifié.
00:00:55Je vous laisse le découvrir et je vous retrouverai juste après sur ce plateau
00:00:58en compagnie des historiens Vincent Duclerc, Annette Vivurka et Sébastien Ledoux.
00:01:04Avec eux, nous nous interrogerons sur l'impact et les débats suscités par les discours mémoriels
00:01:10que décident un jour de porter les chefs d'État.
00:01:14Bon doc.
00:01:14M. le Président, M. le Ministre, Mesdames, Messieurs.
00:01:33Il est dans la vie d'une nation des moments qui blessent la mémoire
00:01:38et l'idée que l'on se fait de son pays.
00:01:46Il faisait une chaleur épouvantable déjà à l'Ouop ce jour-là, le 16 juillet à 42.
00:01:55De grands coups frappaient dans la porte, police ouvrée.
00:01:58Ma grand-mère ouvre.
00:02:01J'avais 8 ans.
00:02:03On était encore endormis.
00:02:06Et allez les enfants, dépêchez-vous, vous avez 5 minutes
00:02:09parce qu'on a encore beaucoup de gens à prendre.
00:02:13Apprendre.
00:02:17Ma grand-mère a essayé de s'interposer, mais ce sont des enfants.
00:02:21On l'a poussé très violemment.
00:02:32On a mis en hâte des quelques vêtements.
00:02:36Et puis nous sommes descendus.
00:02:39Et à ce moment-là, j'ai vu de toutes les portes cochères
00:02:43sortir des femmes avec des enfants.
00:02:47Certains petits dans les bras.
00:02:49Et on nous a emmenés comme un troupeau.
00:02:52Je dis bien comme un troupeau.
00:02:58Les Allemands ne se mêlaient pas de ces arrestations.
00:03:02C'était la police française qui venait prendre les femmes, les enfants.
00:03:09Alors ça n'a été que la police française.
00:03:14L'horreur pourtant ne faisait que commencer.
00:03:17Suivrons d'autres rafles, d'autres arrestations.
00:03:22Après la guerre, la France n'était pas fière de ce qui s'était passé.
00:03:27Nous étions une ombre grise au tableau.
00:03:30Personne ne voulait nous entendre.
00:03:31Reconnaître les fautes commises par l'État.
00:03:35Il nous a fallu attendre 50 ans pour que Jacques Chirac, président de la République,
00:03:42reconnaisse la responsabilité de Vichy, la France des Vichy, la France d'alors.
00:03:48Oui, la folie criminelle de l'occupant a été, chacun le sait, secondée par des Français,
00:03:59secondée par l'État français.
00:04:02Jacques Chirac porte un discours révolutionnaire auquel on ne s'attendait pas, personne.
00:04:06Pour la première fois, le chef de l'État a pris la parole pour reconnaître la responsabilité de l'État français.
00:04:15C'était un très grand combat que je menais depuis 25 ans.
00:04:19On entrait dans une nouvelle ère qui était l'ère de la reconnaissance du rôle véritable de Vichy.
00:04:26Il ne faut pas si évident que ça, quand vous êtes un héritier du Parti Gaulliste,
00:04:32que de prendre une position très contraire à celle qui était la doxa depuis plusieurs décennies.
00:04:38C'est le début de l'histoire, le discours.
00:04:40Il n'est pas la fin de l'histoire.
00:04:41Il est le début d'un processus de réparation des victimes au sens large.
00:04:45Il faut que la France soit à l'aise avec sa propre histoire.
00:04:50Et pour être à l'aise avec son histoire, il faut la regarder en face.
00:04:53La France, ce jour-là, accomplissait l'irréparable.
00:05:23Pourquoi, pendant si longtemps, la France a-t-elle fermé les yeux ?
00:05:30Pourquoi n'a-t-elle pas voulu voir la collaboration,
00:05:38la complicité de son administration,
00:05:41dans la déportation des Juifs pendant la Seconde Guerre mondiale ?
00:05:44Pourquoi ne voulait-elle pas se souvenir de ces images de mai 1941,
00:05:55des policiers en képi qui participent aux arrestations décidées par les nazis, en pleine rue ?
00:06:03Pourquoi ne voulait-elle pas reconnaître la spécificité de la rafle du Veldiv ?
00:06:12Et à travers elle, la responsabilité de l'État.
00:06:19En juin 1942, les Allemands décident d'étendre brutalement la solution finale en Europe de l'Ouest.
00:06:25Ils veulent obtenir de l'État français 40 000 Juifs et Juifs en âge de travailler.
00:06:30Et on a à la tête du gouvernement un homme, Pierre Laval,
00:06:33qui lui veut faire triompher la politique de collaboration.
00:06:36Donc quand on lui demande 40 000 Juifs, il faut leur donner.
00:06:38Et donc il va charger son responsable de la police, qui s'appelle René Bousquet, d'organiser ça.
00:06:44Donc il va négocier avec les Allemands.
00:06:46Il dit aux Allemands, on est prêt à le faire, à condition que vous nous laissiez faire.
00:06:51Là, c'est là où on est vraiment dans cette singularité de la rafle du Veldiv,
00:06:55parce que c'est vraiment la seule grande opération qui va avoir lieu contre les Juifs,
00:06:59où il n'y a pas du tout un seul Allemand.
00:07:00Là, on n'est pas simplement soumis, on n'est pas simplement exécutant,
00:07:09on est co-décisionnaire, co-organisateur.
00:07:12Outre le fait que c'est la plus grosse opération qui a eu lieu contre les Juifs dans toute l'Europe de l'Ouest,
00:07:30ce sont des agents ordinaires de l'État qui ont organisé cette opération et qui l'ont mise en œuvre.
00:07:34Le Gardin de la Paix, c'est le personnage débonnaire.
00:07:36Dans les rues de Paris, c'est celui qui aide à traverser la rue, qui fait la circulation.
00:07:40Donc ça a vraiment été un choc de voir que ces policiers ordinaires arrêtaient des Juifs,
00:07:45des Juives, leurs enfants, avec l'idée qu'on va les déporter.
00:07:49Et ça, ça a été un vrai traumatisme.
00:08:10Il y a eu quatre lieux d'arrestation dans le 20e arrondissement.
00:08:28Pour nous, c'était la Bellevilloise.
00:08:29On n'oublie pas des moments comme ça.
00:08:33Les gens étaient debout, serrés les uns contre les autres.
00:08:40Des clameurs, des cris, des pleurs.
00:08:44Les policiers sifflaient.
00:08:47Et ma mère essayait de se frayer un petit passage avec son épaule.
00:08:54Elle allait d'une femme à l'autre.
00:08:55Elle disait, non, on ne nous emmène pas pour travailler en Allemagne.
00:09:00On ne peut pas travailler avec des tout-petits dans les bras.
00:09:03Elle avait compris ce anti-cela.
00:09:06Et donc, ma mère se tourne vers nous et nous dit,
00:09:11vous allez près de l'issue de secours.
00:09:13Il n'y avait que deux policiers devant l'issue de secours.
00:09:15Et elle nous a dit, les derniers mots de ma mère, c'est,
00:09:21si on revient vous chercher, essayez toujours de fuir dans la rue.
00:09:28Dans la rue, il y a du monde, ça vous protégera.
00:09:31Voilà.
00:09:33Alors, j'ai eu en l'air, j'ai fait une comédie, je ne vais pas te quitter.
00:09:39Alors, ma mère m'a giflé.
00:09:41La seule gifle de ma vie.
00:09:44Elle m'a giflé violemment.
00:09:48Et à ce moment-là, j'ai compris
00:09:49qu'elle voulait que je vive, que je m'en sorte.
00:09:55Et ma sœur m'a prise par la main
00:09:57et nous sommes partis vers l'issue de secours.
00:10:04Nous sortons de là.
00:10:06C'était une question de minutes.
00:10:08J'ai vu les autobus arriver
00:10:09pour emmener tout ce monde-là
00:10:11vers le vélodrome d'hiver.
00:10:22Il n'existe qu'une seule photographie de la rafle.
00:10:27Elle est prise devant le vélodrome d'hiver,
00:10:30le lieu de regroupement choisi,
00:10:32un centre sportif du 15e arrondissement de Paris.
00:10:35On y aperçoit les autobus réquisitionnés,
00:10:43un groupe de juifs
00:10:44qui viennent d'être emmenés
00:10:45et deux hommes en uniforme,
00:10:50des Français,
00:10:52un de chaque côté de la rue.
00:10:53En tout, près de 13 000 juifs sont arrêtés
00:11:06en deux jours.
00:11:09Les Allemands ne réclamaient que des adultes,
00:11:12mais les autorités françaises font du zèle
00:11:14et prennent plus de 4 000 enfants.
00:11:16Ils sont enfermés, eux aussi.
00:11:18Comme les Allemands veulent remplir les convois
00:11:23et qu'ils ne veulent pas d'enfants,
00:11:24ils l'ont dit,
00:11:25on ne veut pas d'enfants tout de suite.
00:11:26Les crématoires sont dans le cours de construction
00:11:29et donc, voilà,
00:11:30ils ne veulent pas s'embarrasser d'enfants tout de suite.
00:11:32Donc les enfants vont finir par être séparés.
00:11:34Donc, vous voyez,
00:11:35on n'arrive pas à sortir de cet engrenage criminel.
00:11:38On les sépare de leurs parents
00:11:39et on finit par les déporter
00:11:41plusieurs semaines plus tard.
00:11:43Et ce crime dans le crime,
00:11:44il est véritablement unique.
00:11:46Nulle part ailleurs,
00:11:47en Europe de l'Ouest,
00:11:48pendant la Deuxième Guerre mondiale,
00:11:49on a déporté des enfants seuls.
00:11:53Et le crime est tellement énorme
00:11:55que c'est cette trafle
00:11:57qui va peser sur notre mémoire nationale.
00:11:59Donc c'est vraiment une singularité historique.
00:12:01Ma mère est partie pour le camp d'extermination d'Auschwitz,
00:12:23où elle a été gazée immédiatement.
00:12:25Voilà.
00:12:25C'est-à-dire qu'elle a été gazée immédiatement.
00:12:26Voilà.
00:12:26L'immense majorité des 74 000 juifs déportés de France
00:12:54est assassinée.
00:12:58On ne compte qu'environ 4 000 survivants.
00:13:00Après la guerre, moi, j'avais besoin de parler.
00:13:06Et j'ai entendu.
00:13:08Allez, allez, on ne parle plus de ça,
00:13:10on parle de l'avenir.
00:13:11Petit à petit, je me suis rendu compte
00:13:13que ça n'intéressait pas grand monde.
00:13:17Alors nous, nous sommes-tu.
00:13:19Je dis nous, parce que tout le monde a fait comme ça.
00:13:22Les victimes se taisent,
00:13:30tandis qu'un discours dominant se met en place.
00:13:33Le général de Gaulle, au nom de la réconciliation nationale,
00:13:38impose le récit historique d'une France tout entière résistante
00:13:41et célèbre sa police qui s'est battue
00:13:44lors de la libération de Paris.
00:13:45Nul drapeau n'a été de mieux mérité.
00:13:51Les gardiens de la paix ont trouvé qu'ils savaient se battre
00:13:54et que Paris s'associe à leur fierté
00:13:55quand ils rentrent dans la préfecture,
00:13:58derrière ces murs qui portent encore la trace
00:14:00de leur résistance et de leur courage.
00:14:05Qui, parmi ces hommes,
00:14:07a participé à la rafle du Veldiv ?
00:14:08À la fin de la guerre,
00:14:13il y a eu la libération de Paris
00:14:15et qui ont été les héros
00:14:18de la libération de Paris ?
00:14:19C'est la préfecture de Paris.
00:14:23Hommage du gouvernement
00:14:24à des hommes qui ne sont pas seulement
00:14:26les gardiens de l'ordre,
00:14:27mais qui ont été aussi les défenseurs de la liberté.
00:14:30On ne va pas dire que ces hommes-là
00:14:31sont aussi responsables
00:14:34de l'arrestation de milliers,
00:14:36de dizaines de milliers de juifs.
00:14:38Il y a une occultation
00:14:49qui va se retrouver dans les livres d'histoire,
00:14:52dans les manuels scolaires
00:14:53à partir de la fin des années 50.
00:14:58Ce qu'on met en avant,
00:15:00c'est la dimension militaire
00:15:01et la glorification de la résistance
00:15:03et de la guerre.
00:15:08Il y a un discours gueuliste,
00:15:10il y a un discours sur la prééminence
00:15:11de ce qu'on appelait la résistance extérieure,
00:15:14de la France libre,
00:15:15de la France combattante.
00:15:18Et donc, on va faire de Vichy
00:15:19une sorte de parenthèse,
00:15:22une parenthèse honteuse.
00:15:24Ils aient l'histoire de France
00:15:25en bande dessinée pour les enfants.
00:15:28Il y a une gignette
00:15:29sur la rafle du Veldiv.
00:15:30On a l'impression
00:15:31qu'on est à Varsovie.
00:15:32Il y a des Allemands
00:15:34qui sont en train
00:15:34d'arrêter des Juifs.
00:15:37Vous voyez,
00:15:37le grand public
00:15:38est quand même
00:15:39induit en erreur
00:15:40assez largement.
00:15:53Il n'y a guère
00:15:54que les rescapés
00:15:55et les familles de victimes
00:15:56pour marquer le souvenir
00:15:58de la déportation.
00:15:59Devant le Veldiv,
00:16:04ils organisent chaque année
00:16:05autour du 16 juillet
00:16:06des commémorations
00:16:08dans l'indifférence.
00:16:12Vous savez,
00:16:14je suis allé
00:16:15pour la première fois
00:16:17au Veldiv
00:16:18en 1953.
00:16:23J'avais 17 ans.
00:16:25C'était une des premières
00:16:27commémorations.
00:16:28les orateurs
00:16:30étaient
00:16:31d'un côté
00:16:32de l'avenue,
00:16:35le public
00:16:36de l'autre côté
00:16:37et les voitures
00:16:38circulaient là.
00:16:39On allait dans la rue
00:16:46devant.
00:16:47Ce n'était pas grand-chose
00:16:48à l'époque,
00:16:49mais on allait commémorer.
00:16:51Mais ça s'est fait
00:16:54vraiment à bas bruit.
00:16:57C'était organisé
00:16:58par les anciens déportés
00:17:01et les orateurs
00:17:02acceptaient
00:17:04que pas un mot
00:17:06ne soit dit
00:17:07sur Vichy,
00:17:09pas un mot
00:17:09sur la police française.
00:17:14Ces mots,
00:17:15il faut attendre
00:17:16la fin des années 60
00:17:17pour commencer
00:17:19à les entendre.
00:17:20En 1967,
00:17:22vous avez un livre
00:17:23qui sort
00:17:23d'un Claude Lévy,
00:17:25Paul Tillard,
00:17:26qui s'appelle
00:17:26La grande rafle
00:17:27du Veldiv.
00:17:29Claude Lévy,
00:17:30c'est un ancien résistant
00:17:31dont les parents
00:17:32ont été déportés
00:17:32et lui,
00:17:33il a vraiment la volonté
00:17:34de dire la vérité
00:17:35sur ce qui s'est passé.
00:17:36Il parle
00:17:37de falsification
00:17:38de l'histoire.
00:17:39Il dit
00:17:39dans les manuels scolaires,
00:17:41il y a des mensonges.
00:17:42Le livre
00:17:46est un best-seller.
00:17:53La revue
00:17:54Le Nouveau Candide
00:17:55en publie
00:17:56de larges extraits
00:17:57et demande
00:18:01à un jeune dessinateur,
00:18:03Cabu,
00:18:04d'illustrer
00:18:04les scènes d'arrestation.
00:18:08Tout est là
00:18:09dans ses dessins.
00:18:12Un bus bombé.
00:18:17Des familles entières.
00:18:23Des vieux.
00:18:26Des bébés.
00:18:27Des étoiles jaunes.
00:18:31La peur.
00:18:35À la manœuvre,
00:18:37des policiers français.
00:18:42C'est le début
00:18:45d'une prise de conscience.
00:18:47Un autre livre,
00:18:48La France de Vichy,
00:18:50signé de l'historien américain
00:18:51Robert Paxton,
00:18:52dévoile les mécanismes
00:18:54de la collaboration d'État.
00:18:56Scandale.
00:18:59Et Marcel Ophuls,
00:19:00dans son film
00:19:01Le chagrin et la pitié,
00:19:03raconte la collaboration
00:19:04des Français.
00:19:05Nouveau scandale.
00:19:09La télévision refuse
00:19:10de le diffuser,
00:19:11mais il connaît
00:19:12un succès retentissant
00:19:13au cinéma.
00:19:17Il y a un silence d'État.
00:19:18Et ce silence,
00:19:19peu à peu,
00:19:19il va commencer
00:19:20à être rompu.
00:19:21Il y a une autre génération
00:19:22qui arrive à l'âge adulte,
00:19:24en âge de l'engagement politique,
00:19:26en âge d'une réflexion
00:19:27sur l'histoire,
00:19:28et qui commence
00:19:29à comprendre
00:19:30que cette période
00:19:30ne se résume pas,
00:19:31évidemment,
00:19:32simplement au fait de gloire
00:19:33de la résistance.
00:19:38Le scandale
00:19:39finit par atteindre
00:19:40le plus haut sommet
00:19:41de l'État.
00:19:45Écoutez,
00:19:46je vous demande pardon.
00:19:47Encore deux questions
00:19:48et c'est terminé
00:19:49pour l'intérieur.
00:19:50Monsieur le Président,
00:19:51les résistants
00:19:51de la région Rhône-Alpes
00:19:53ont été péniblement surpris
00:19:55d'apprendre
00:19:56que Paul Touvier,
00:19:57qui s'était tristement...
00:19:58On apprend que le président Pompidou
00:20:00a gracié Paul Touvier.
00:20:02ancien chef
00:20:05de la milice de Lyon,
00:20:07responsable
00:20:08de l'assassinat
00:20:09de juifs
00:20:09et de résistants.
00:20:11...et qui a été condamné
00:20:12deux fois à mort.
00:20:13Est-il indiscret,
00:20:13Monsieur le Président,
00:20:14de vous demander
00:20:15les raisons
00:20:16qui ont motivé
00:20:17votre geste ?
00:20:18Je vous remercie
00:20:19de votre question.
00:20:19Si vous ne l'aviez pas posée,
00:20:20je l'aurais soule.
00:20:21La grâce de Touvier,
00:20:25c'est typiquement
00:20:25le problème public.
00:20:26Ça veut dire,
00:20:27le Président,
00:20:27au plus haut niveau de l'État,
00:20:28on prend une décision
00:20:29qui choque,
00:20:29qui scandalise.
00:20:30Allons-nous éternellement
00:20:31entretenir saignantes
00:20:34les plaies
00:20:35de nos désaccords nationaux ?
00:20:38Le moment n'est-il pas venu
00:20:39de jeter le voile,
00:20:41d'oublier ces temps
00:20:42où les Français
00:20:43ne s'aimaient pas,
00:20:45s'entre-déchirer
00:20:46et même s'entre-tuer.
00:20:48Et je ne dis pas ça.
00:20:50Même s'il y a ici
00:20:51des esprits forts
00:20:53par calcul politique,
00:20:55je le dis
00:20:56par respect
00:20:56de la France.
00:21:01Dernière question,
00:21:02messieurs,
00:21:02et nous passons
00:21:03à la politique étrangère.
00:21:04Il dit,
00:21:04ce temps où les Français
00:21:05ne s'aimaient pas,
00:21:06ce qu'ils ne voient pas,
00:21:07c'est qu'en pensant
00:21:10contribuer
00:21:11à tourner la page
00:21:13de l'occupation,
00:21:14il a rajouté
00:21:15un bidon d'essence
00:21:16sur une sensibilité
00:21:19qui est en train
00:21:20d'émerger.
00:21:26Cette nouvelle génération
00:21:27qui s'enflamme,
00:21:28c'est celle
00:21:29des enfants de déportés.
00:21:32Un couple l'incarne,
00:21:33Serge et Béate Klarsfeld.
00:21:37Ils vont jouer
00:21:38un rôle clé
00:21:39dans la demande
00:21:40de reconnaissance
00:21:41des crimes de Vichy.
00:21:44Lui,
00:21:45avocat,
00:21:46juif,
00:21:47fils de déporté.
00:21:49Elle,
00:21:49militante allemande,
00:21:51spécialiste
00:21:51des coups d'éclat.
00:21:53Une gifle
00:21:54au chancelier
00:21:55d'Allemagne de l'Ouest,
00:21:56Kissinger,
00:21:57pour dénoncer
00:21:58son passé nazi.
00:22:00La poursuite
00:22:01de criminels
00:22:02devant la justice
00:22:03et devant chez eux.
00:22:04Nous avons pris
00:22:09le nom
00:22:10sur sa boîte à lettres
00:22:11pour montrer
00:22:11qu'il ne se cache pas.
00:22:13Il voit
00:22:13qu'il est filmé,
00:22:14il prend la fuite,
00:22:15il se cache.
00:22:16Lichka,
00:22:17qui était
00:22:17le nazi numéro 1
00:22:19en France.
00:22:20Ce sont ceux
00:22:21qui ont sévi en France,
00:22:22qui ont commis
00:22:22des crimes en France
00:22:23et qui peuvent être
00:22:24jugés en Allemagne.
00:22:25C'est d'abord elle,
00:22:26Béate Klarsfeld,
00:22:27qui est en première ligne,
00:22:29qui fait partie
00:22:30de cette génération
00:22:31d'Allemands
00:22:32qui sont outrés
00:22:34par la non prise en compte
00:22:36de ce qu'a été
00:22:36le nazisme,
00:22:37la réapparition
00:22:38d'anciens nazis
00:22:39dans les gouvernements
00:22:40de la République fédérale.
00:22:42Et puis,
00:22:43Serge Klarsfeld,
00:22:44il faisait peur,
00:22:45il était craint,
00:22:46parce qu'il avait
00:22:47des dossiers
00:22:47en plus solides.
00:22:51Il faut se battre.
00:22:54Nous,
00:22:54on s'est battus.
00:22:55Ceux qui avaient perdu
00:22:57un père,
00:22:59une mère
00:23:00ou les deux parents
00:23:01sont sortis
00:23:02de leur vie normale
00:23:03pour surtout un noyau
00:23:06qui s'est groupé
00:23:08autour de nous
00:23:09et qui a été efficace
00:23:12pendant une trentaine
00:23:13d'années.
00:23:13L'État,
00:23:14bordel !
00:23:15L'État,
00:23:16bordel !
00:23:18J'étais jeune militant,
00:23:20je m'implique,
00:23:21je suis très très proche
00:23:22de Serge et Béate Klarsfeld.
00:23:24On entre en action.
00:23:27J'ai assisté
00:23:27au procès de Cologne
00:23:29qui était celui
00:23:30des nazis
00:23:31qui, en France,
00:23:32avaient collaboré
00:23:33pour la déportation
00:23:34des Juifs.
00:23:39Le monde entier
00:23:40va regarder
00:23:40vers ce verdict
00:23:41et vers ce procès
00:23:43pour savoir
00:23:43s'il est exemplaire,
00:23:44si la sentence
00:23:45est exemplaire.
00:23:46On manifeste
00:23:46à Chambéry
00:23:47avec un groupe
00:23:48d'une cinquantaine
00:23:49de jeunes
00:23:50pour l'arrestation
00:23:51de Touvier.
00:23:53Une manifestation
00:23:54s'est déroulée hier
00:23:55à Chambéry
00:23:55devant la propriété
00:23:56de Paul Touvier.
00:23:57Mme Béate Klarsfeld,
00:23:59accompagnée
00:23:59d'une vingtaine
00:24:00de personnes,
00:24:01ont manifesté
00:24:01rappelant le passé
00:24:02de Paul Touvier.
00:24:04Et donc,
00:24:05j'ai suivi
00:24:05tous ces combats.
00:24:07Il y a un rôle central
00:24:08de Serge Klarsfeld
00:24:09pendant ces années-là.
00:24:15Les Klarsfeld
00:24:16pourchassent
00:24:17d'anciens nazis allemands
00:24:18ayant sévi en France.
00:24:20Grâce au nouveau président,
00:24:22François Mitterrand,
00:24:24ils obtiennent
00:24:24l'extradition
00:24:25de Bolivie
00:24:26de l'un d'entre eux,
00:24:28Klaus Barbie,
00:24:29qui sera jugé
00:24:30à Lyon.
00:24:32Mais lorsqu'il s'attaque
00:24:34à d'anciens fonctionnaires
00:24:35français,
00:24:36le combat juridique
00:24:37devient politique.
00:24:39Dans les années 80,
00:24:53on a Serge Klarsfeld
00:24:54qui veut obtenir
00:24:55le procès de Vichy.
00:25:00On a un président
00:25:01de la République
00:25:02qui s'appelle
00:25:02François Mitterrand
00:25:03qui va incarner
00:25:04une forme de déni.
00:25:06Parce que Mitterrand,
00:25:07il est un ancien
00:25:10de Vichy.
00:25:11Il va être dans
00:25:11des services à Vichy.
00:25:13Donc,
00:25:13il se sent un peu lié
00:25:15à l'histoire de Vichy.
00:25:19Et en plus,
00:25:20il est un ami
00:25:21de René Bousquet.
00:25:22Le fameux René Bousquet
00:25:23qui a organisé
00:25:23la rafle du Veldiv.
00:25:32Donc, Mitterrand
00:25:32va tout faire
00:25:33pour bloquer.
00:25:34Pour bloquer
00:25:35les affaires judiciaires
00:25:36qui se sont mis en cause.
00:25:37Le bras de fer
00:25:42dure des années.
00:25:45De plus en plus
00:25:46de militants
00:25:47réclament que la France,
00:25:49à travers la voix
00:25:50du chef de l'État,
00:25:52ouvre les yeux
00:25:52sur son passé.
00:25:59Quelques jours
00:26:00avant le cinquantenaire
00:26:01de la rafle du Veldiv,
00:26:02François Mitterrand
00:26:03est interrogé.
00:26:05On savait que certains
00:26:06attendent de l'État français
00:26:08qu'il reconnaisse
00:26:08sa responsabilité
00:26:09dans cette foule.
00:26:10Mais qu'est-ce que ça veut dire ?
00:26:12Mais il reste inflexible.
00:26:13Il me demande
00:26:16que l'État français,
00:26:18mais l'État français,
00:26:19si je veux dire,
00:26:20ça n'existe pas.
00:26:21Enfin, il y a la République.
00:26:22Non, M. Amar,
00:26:23il y a la République.
00:26:25L'État français,
00:26:26c'était le régime de Vichy.
00:26:28Ce n'était pas la République.
00:26:29Personne ne lui a dit,
00:26:32ne lui a demandé
00:26:33de dire que c'était la République.
00:26:35On sait bien
00:26:35que ce n'est pas la République.
00:26:36Il a dit qu'il ne ferait pas
00:26:37de déclaration
00:26:39de reconnaissance
00:26:40de la responsabilité
00:26:41de l'État français
00:26:42dans la déportation des Juifs.
00:26:44Il a vraiment,
00:26:45de manière assez méprisante,
00:26:47rejeté cette demande
00:26:50qui était vraiment attendue.
00:26:55Et puis,
00:26:55on a découvert
00:26:56à peu près au même moment
00:26:57que François Mitterrand
00:26:58faisait fleurir
00:27:00tous les ans
00:27:01la tombe du maréchal Pétain
00:27:02pour se souvenir
00:27:03du Pétain de Verdun,
00:27:05Pétain de la Première Guerre mondiale.
00:27:11Ça veut dire clairement,
00:27:13on avait non seulement
00:27:14l'État,
00:27:16le représentant
00:27:16le plus haut niveau
00:27:17qui dit
00:27:17je ne veux rien entendre,
00:27:19la République n'est pas comptable,
00:27:20n'est pas responsable
00:27:21des crimes de Vichy,
00:27:22je ne ferai rien,
00:27:23mais en plus,
00:27:24qui donne le sentiment
00:27:26de montrer
00:27:27une forme d'indulgence
00:27:28à l'égard du principal responsable
00:27:30qui était Pétain.
00:27:32Ça a été
00:27:33une forme de stupéfaction.
00:27:37Nous,
00:27:38on a dit
00:27:38qu'on sera
00:27:39intransigeants
00:27:40totalement.
00:27:45Donc,
00:27:46on est rentrés
00:27:47dans le président
00:27:49de la République.
00:27:49Bonsoir,
00:27:53il y a 50 ans,
00:27:54à l'aube du 16 juillet 1942,
00:27:57la police française
00:27:57arrêtait 13 000 juifs
00:27:59à Paris.
00:27:59François Mitterrand
00:28:00a fait un geste tout à l'heure
00:28:01en assistant
00:28:02à la cérémonie du souvenir.
00:28:03C'est la première fois
00:28:04qu'un président de la République
00:28:06s'associe
00:28:06à cette manifestation.
00:28:07François Mitterrand
00:28:10va se rendre
00:28:11à l'anniversaire
00:28:13de la rave du Vélie,
00:28:14du 50e anniversaire.
00:28:16Oui,
00:28:16nous savions
00:28:17qu'il allait venir,
00:28:19nous savions
00:28:19qu'il n'allait pas
00:28:20prendre la parole.
00:28:22Le public
00:28:22n'a pas accepté
00:28:23que Mitterrand
00:28:24reste silencieux.
00:28:27Donc,
00:28:27mes militants,
00:28:29qui étaient nombreux,
00:28:30eh bien,
00:28:31ils ont sifflé.
00:28:32François Mitterrand
00:28:34a été sifflé
00:28:35dès son arrivée.
00:28:36La déclaration
00:28:36du président
00:28:37le 14 juillet,
00:28:38selon laquelle
00:28:39la République
00:28:39n'est pas comptable
00:28:40des actes de Vichy,
00:28:41n'est pas passée
00:28:42auprès d'une partie
00:28:43de la communauté juive.
00:28:44Mitterrand
00:28:45à Vichy !
00:28:46Mitterrand
00:28:46à Vichy !
00:28:47Mitterrand
00:28:48à Vichy !
00:28:49Mitterrand
00:28:52à Vichy !
00:28:53Mitterrand
00:28:54à Vichy !
00:28:54Robert Badinter,
00:28:56fidèle de Mitterrand,
00:28:57vole à son secours.
00:28:59Je me serais
00:28:59attendu
00:29:00à tout éprouver.
00:29:03Sauf le sentiment
00:29:04que j'ai ressenti
00:29:05il y a un instant
00:29:07et que je vous livre
00:29:08avec toute ma force d'homme.
00:29:11Vous m'avez fait honte !
00:29:13Vous m'avez fait honte
00:29:14en pensant
00:29:15à ce qui s'est passé là !
00:29:17Vous m'avez fait honte !
00:29:20Badinter,
00:29:22son père,
00:29:23comme le mien,
00:29:25a été arrêté
00:29:26par les Allemands.
00:29:27J'ai compris
00:29:27le dilemme
00:29:30qui était le sien
00:29:31parce que son idole
00:29:34a été attaqué
00:29:35devant lui
00:29:36et que c'était lui
00:29:38qui avait la parole.
00:29:40Il fallait qu'il
00:29:41réagisse.
00:29:43Mais je crois
00:29:44qu'il a perdu son sang-froid
00:29:45à ce moment-là.
00:29:46« Taisez-vous !
00:29:49Vous quittez à l'instant
00:29:50ce lieu de recueillement !
00:29:52Vous déshonorez
00:29:54la cause que vous croyez servir ! »
00:29:57Mais nous, on était heureux
00:30:00d'entendre siffler Mitterrand
00:30:02parce que c'était
00:30:03une pression sur lui.
00:30:06Mitterrand
00:30:07cède un peu de terrain.
00:30:09Il fait du 16 juillet
00:30:10une journée nationale
00:30:12de lutte contre le racisme
00:30:13et l'antisémitisme.
00:30:15Et cesse,
00:30:16l'année suivante,
00:30:17de fleurir la tombe
00:30:18de Pétain.
00:30:21Mais pour les responsabilités
00:30:22françaises,
00:30:23rien.
00:30:23Il faudra attendre
00:30:25trois ans de plus.
00:30:41Monsieur le Président,
00:30:44Monsieur le Ministre,
00:30:48Monsieur le Maire de Paris,
00:30:50Monsieur l'Ambassadeur,
00:30:52Monsieur le Grand Rabbin,
00:30:53Mesdames, Messieurs.
00:30:56D'abord,
00:30:56quand on a eu le privilège
00:30:58de le connaître,
00:30:59on comprend que ce discours
00:31:01ne vient absolument pas
00:31:03par hasard.
00:31:04Il y a des anecdotes
00:31:05qui sont racontées.
00:31:06C'est le petit garçon
00:31:07qui quitte Paris
00:31:09sur les routes
00:31:10de l'Exode.
00:31:12Il voit l'armée française
00:31:13en débandade,
00:31:14l'humiliation que ça représente.
00:31:16Et donc, il y a chez lui
00:31:17quelque chose
00:31:18qui est resté ancré.
00:31:20Un mépris
00:31:21pour le régime de Vichy,
00:31:22pour Pétain,
00:31:24un même mépris
00:31:25pour les collaborateurs.
00:31:26Donc, il y a quelque chose
00:31:27de très, très profond
00:31:28qui est viscéral
00:31:29chez lui.
00:31:34Jacques Chirac
00:31:35est élu
00:31:35à la présidence
00:31:36de la République
00:31:37en mai 1995
00:31:38et veut rompre
00:31:40avec son prédécesseur.
00:31:42Sa rencontre,
00:31:43début juillet,
00:31:44avec Henri H. Denberg,
00:31:46nouveau patron du CRIF,
00:31:47le conseil représentatif
00:31:48des institutions juives
00:31:49de France,
00:31:50va servir de déclencheur.
00:31:52On est après une élection
00:31:57qui a été marquante
00:31:58parce que Jean-Marie Le Pen
00:32:00a fait près de 15%
00:32:02des voix.
00:32:03Jean-Marie Le Pen
00:32:04a plusieurs prises de position
00:32:06à caractère antisémite.
00:32:08Il est entouré
00:32:09d'anciens nostalgiques
00:32:11de Vichy.
00:32:12Nous sommes assis
00:32:13devant le bureau
00:32:15de Jacques Chirac
00:32:16et je lui dis
00:32:17nombre de jeunes
00:32:18ont voté
00:32:19pour Jean-Marie Le Pen.
00:32:20Ils ne savent même pas
00:32:21par qui il est entouré.
00:32:23Qu'est-ce que
00:32:24l'époque de Vichy ?
00:32:26Et lui va avec moi
00:32:28dans le même sens
00:32:28en disant
00:32:29oui, c'est déplorable.
00:32:31On ne sait pas suffisamment
00:32:32ce qui s'est passé.
00:32:34Alors j'enchaîne
00:32:35et je lui dis
00:32:36écoutez,
00:32:37peut-être vous avez l'occasion
00:32:39d'expliquer
00:32:40ce qui s'est passé.
00:32:41Il y a la commémoration
00:32:42de la rafle du Veldiv
00:32:44dans quelques jours,
00:32:46le 16 juillet.
00:32:48Moi, je vous invite
00:32:49à prendre la parole.
00:32:50Mais très franchement,
00:32:51je n'y crois pas.
00:32:52Je me dis
00:32:53bon, je le risque,
00:32:55mais...
00:32:57Alors il se tourne
00:32:57vers Christine Albanel
00:32:58et il dit
00:32:59Christine,
00:33:00qu'est-ce qu'on a
00:33:01sur l'agenda
00:33:01le 16 juillet ?
00:33:02Alors Christine Albanel
00:33:03va au bureau
00:33:04regarder l'agenda.
00:33:06Elle dit
00:33:06on n'a rien.
00:33:07Et Chirac dit
00:33:08on y va.
00:33:13Et Jacques Chirac
00:33:14me dit
00:33:15bon,
00:33:16il va falloir
00:33:16que tu me fasses
00:33:16un beau discours.
00:33:18Fais-moi une proposition.
00:33:18Je travaille
00:33:20un peu
00:33:21sur le sujet.
00:33:23L'idée,
00:33:23c'est d'essayer
00:33:24de dire
00:33:25ce que dirait
00:33:26l'homme politique,
00:33:27de parler
00:33:28un peu
00:33:28comme il parle.
00:33:29Donc je lui donne
00:33:30et là,
00:33:32il commence à lire
00:33:32à haute voix.
00:33:33Il me dit
00:33:34oui,
00:33:34ça me paraît bien.
00:33:36Oui.
00:33:36Et c'est là
00:33:37où il me dit
00:33:37est-ce que tu crois
00:33:38qu'on va assez loin ?
00:33:39C'est vrai,
00:33:39il m'a dit cette phrase.
00:33:40Ça va très bien.
00:33:42Il est dans
00:33:43la vie d'une nation...
00:33:45Je lui dis oui.
00:33:46Je crois qu'il y a déjà
00:33:47beaucoup,
00:33:47beaucoup de choses
00:33:48qui sont dites.
00:33:49Je lui dis vraiment.
00:33:50Des moments
00:33:51qui blessent la mémoire
00:33:52et l'idée
00:33:54que l'on se fait
00:33:55de son pays.
00:34:01Il y a incontestablement
00:34:02quelque chose
00:34:04de littéraire
00:34:04tout en restant
00:34:05dans des mots
00:34:06qui sont simples
00:34:07de compréhension.
00:34:08De ces journées
00:34:09de larmes
00:34:10et de honte.
00:34:11Mais il y a
00:34:12une organisation
00:34:12du texte,
00:34:13il y a un rythme,
00:34:15il y a une force
00:34:17dans les mots choisis.
00:34:19Oui,
00:34:20la folie criminelle
00:34:21de l'occupant
00:34:22a été,
00:34:25chacun le sait,
00:34:27secondée
00:34:28par des Français,
00:34:30secondée
00:34:30par l'État français.
00:34:33Oui,
00:34:34la folie criminelle.
00:34:35Le fait d'utiliser
00:34:36le oui,
00:34:37c'est une façon
00:34:37de dire
00:34:38je tranche le débat.
00:34:40C'est-à-dire
00:34:40je reconnais.
00:34:41Voilà.
00:34:42On va clore
00:34:42cette période
00:34:43parce que
00:34:44Jacques Chirac
00:34:45a aussi conscience
00:34:47que c'est un sujet
00:34:48qui divise
00:34:49les Français.
00:34:50La France,
00:34:52ce jour-là,
00:34:54accomplissait
00:34:55l'irréparable.
00:34:58J'étais
00:34:58tout proche
00:35:01de Chirac,
00:35:02quelques mètres
00:35:03de Chirac
00:35:04pendant
00:35:04son discours.
00:35:06Et comme on dit,
00:35:14j'ai eu
00:35:16un immense
00:35:16soulagement
00:35:17quand j'ai entendu
00:35:18cette phrase
00:35:20qui était
00:35:21« Ce jour-là,
00:35:24la France
00:35:24commettait
00:35:25l'irréparable ».
00:35:26Il avait dit
00:35:29« la France »
00:35:30alors que
00:35:31jusque-là,
00:35:32personne n'avait
00:35:33dit « la France ».
00:35:34Je l'entends
00:35:36et je suis presque
00:35:37abasourdi.
00:35:38Personne n'était
00:35:39allé aussi loin
00:35:40dans cette dénonciation
00:35:42de la responsabilité
00:35:44française
00:35:45et de la culpabilité
00:35:46française
00:35:46dans l'arrestation
00:35:48et la déportation
00:35:48des Juifs.
00:35:50Donc Jacques Chirac
00:35:51porte un discours
00:35:52révolutionnaire
00:35:53auquel on ne s'attendait
00:35:54pas,
00:35:54personne.
00:35:5576 000 déportés
00:35:57juifs
00:35:58de France
00:35:59n'en reviendront
00:36:00pas.
00:36:03Nous conservons
00:36:04à leur égard
00:36:05une dette,
00:36:07c'est vrai,
00:36:08monsieur le président,
00:36:10imprescriptible.
00:36:13J'ai pleuré,
00:36:14pleuré,
00:36:15pleuré.
00:36:17J'ai vraiment
00:36:18beaucoup pleuré.
00:36:20Je n'étais pas
00:36:20la seule.
00:36:22Enfin,
00:36:23enfin,
00:36:24on reconnaissait
00:36:25ce qui s'était passé.
00:36:27Enfin,
00:36:27on nous laissait
00:36:28parler.
00:36:30Enfin,
00:36:30on était prêts
00:36:31à nous écouter.
00:36:48Dans l'esprit de Chirac,
00:36:50c'est un discours
00:36:50de reconnaissance.
00:36:52C'est ça qui est beau
00:36:52dans le discours.
00:36:53C'est pour ça que ce discours
00:36:54a autant d'impact.
00:36:55Parce qu'il a ému,
00:36:56à commencer par
00:36:57ceux qui étaient
00:36:58les principaux concernés,
00:37:00c'est-à-dire
00:37:00les orphelins
00:37:01de la Shoah.
00:37:02Marcel O'Ful,
00:37:02c'est du chagrin
00:37:03et la pitié,
00:37:04écrit une lettre
00:37:04extraordinaire
00:37:05à Chirac.
00:37:09En tant que fils
00:37:10de juif allemand,
00:37:11réfugié en France
00:37:11depuis 1933,
00:37:13il faut absolument
00:37:14que je vous exprime
00:37:15ma très grande joie
00:37:16et mon immense reconnaissance.
00:37:20Aujourd'hui,
00:37:21c'est un peu comme si
00:37:22la France,
00:37:23par la voix de son président,
00:37:24nous accueillait
00:37:25une seconde fois.
00:37:26Mais cette fois-ci,
00:37:27sans faux-semblants,
00:37:28sans équivoques,
00:37:29sans xénophobie
00:37:30et de façon définitive.
00:37:31L'accueil n'est pas
00:37:39une amime.
00:37:40L'extrême-droite
00:37:41conspue le président
00:37:42à coups d'attaques
00:37:43antisémiques.
00:37:45Alors parmi les premières
00:37:46réactions,
00:37:46celles par exemple
00:37:47de Jean-Marie Le Pen
00:37:48pour qui Jacques Chirac
00:37:49ne fait que payer
00:37:50sa dette électorale
00:37:51à l'égard
00:37:52de la communauté juive.
00:37:54En 1995,
00:37:55les plus acharnés
00:37:56pour critiquer
00:37:57le discours de Chirac,
00:37:58c'était Jean-Marie Le Pen.
00:38:00C'était déjà
00:38:00Éric Zemmour.
00:38:01En tant que journalistes,
00:38:02c'était eux
00:38:02qui critiquaient
00:38:03le discours de Chirac
00:38:04en disant
00:38:05que c'était
00:38:05un discours
00:38:06émasculé,
00:38:08un discours indigne,
00:38:09un discours
00:38:10qui reconnaissait
00:38:10des crimes imaginaires.
00:38:12Donc c'était vraiment
00:38:13l'extrême-droite
00:38:13identifiée
00:38:14et infréquentable.
00:38:18Quelques fidèles
00:38:18de François Mitterrand
00:38:19collent encore
00:38:21à la doctrine
00:38:22d'après-guerre.
00:38:23Et on ne peut pas
00:38:24faire porter
00:38:25la responsabilité
00:38:26sur la République française
00:38:27ni sur le peuple français
00:38:29collectivement
00:38:30qui,
00:38:31dans son immense majorité,
00:38:33a combattu
00:38:34le nazisme.
00:38:36Les gaullistes
00:38:38historiques
00:38:38se réveillent
00:38:39deux ans plus tard
00:38:40lorsque démarre
00:38:41le procès
00:38:41de Maurice Papon,
00:38:42ancien préfet de Gironde.
00:38:44Non,
00:38:44ce que je crains,
00:38:45c'est une mise en cause
00:38:47de notre pays
00:38:48qui n'a pas
00:38:51un passé immaculé
00:38:53mais qui n'a pas
00:38:54à rougir
00:38:55de son passé.
00:38:58et je trouve
00:38:59ce climat
00:39:01morbide,
00:39:02délétère
00:39:03dans lequel
00:39:04nous nous trouvons,
00:39:05ces évocations
00:39:06d'un faux passé français,
00:39:09cette volonté
00:39:10implicite
00:39:11d'opposer
00:39:12les Français
00:39:13les uns aux autres
00:39:14sur leur passé,
00:39:16tout à fait
00:39:16regrettable
00:39:17et détestable.
00:39:19Dans le débat politique,
00:39:20il y a toujours
00:39:21ceux qui pensent
00:39:22que l'histoire
00:39:23ne doit pas être
00:39:24un objet politique
00:39:26qui sont contre
00:39:28tout ce qui est
00:39:28mémoriel.
00:39:29J'étais jeune
00:39:30à l'époque.
00:39:32Non,
00:39:32au contraire,
00:39:33je considérais
00:39:35qu'il était important
00:39:36que dans ma génération
00:39:37on puisse adhérer
00:39:38à ce qu'était
00:39:39le discours
00:39:40de vérité.
00:39:41Cet incessant combat
00:39:43
00:39:44Jacques Chirac,
00:39:45pourtant,
00:39:46a pris soin
00:39:46d'équilibrer son discours
00:39:48en n'accablant pas
00:39:49la France
00:39:49toute entière.
00:39:51De l'arme.
00:39:53La France,
00:39:55nous le savons tous.
00:39:56n'est pas un pays
00:39:57antisémite.
00:40:00Ce n'est pas du tout
00:40:01un discours
00:40:01de repentance.
00:40:04Chirac insiste
00:40:04dans son discours
00:40:05sur le fait
00:40:06que la France
00:40:07n'est pas un pays
00:40:08antisémite.
00:40:09Il le dit
00:40:10et que si tant de Juifs
00:40:11ont pu survivre
00:40:12en France,
00:40:13c'est parce qu'ils ont été
00:40:13aidés par les Français.
00:40:15C'est juste
00:40:16parmi les nations
00:40:17qui,
00:40:19au plus noir
00:40:20de la tourmente,
00:40:21en sauvant
00:40:22au péril
00:40:22de leur vie
00:40:23comme l'écrit
00:40:24Serge Klarsfeld,
00:40:25les trois quarts
00:40:27de la communauté juive
00:40:28résidant en France
00:40:29ont donné vie
00:40:31à ce qu'elle a
00:40:32de meilleur,
00:40:33cette France.
00:40:34Quand je témoigne
00:40:36devant des grands
00:40:37de terminal
00:40:38ou de première,
00:40:40je leur dis
00:40:40les Français
00:40:42ont bien réagi.
00:40:44Pas la France,
00:40:45les Français.
00:40:46parce qu'après
00:40:47la rafle du Veldiv,
00:40:49beaucoup de gens
00:40:50du peuple,
00:40:52des femmes de ménage,
00:40:53des concierges,
00:40:54ont dit
00:40:54« Donne-moi ton enfant,
00:40:56je vais le cacher
00:40:56chez ma cousine. »
00:41:00Alors ça,
00:41:00il ne faut pas le nier.
00:41:01Mais moi,
00:41:02j'appelle ça
00:41:02l'aide des Français
00:41:03et pas de la France.
00:41:05On dit clairement
00:41:07qu'il y a eu des crimes
00:41:07qui ont été accomplis
00:41:08par Vichy,
00:41:08mais on reconnaît
00:41:09que si tant de Juifs
00:41:10ont survécu,
00:41:11c'est grâce
00:41:11aux Français.
00:41:16Le président
00:41:16veut préserver
00:41:17l'idée d'un pays
00:41:18qui est resté courageux.
00:41:25Ce jour-là,
00:41:26un nouveau mot
00:41:27apparaît
00:41:27dans la parole présidentielle.
00:41:32Jacques Chirac,
00:41:33il ne peut pas opposer
00:41:34les Français non-juifs
00:41:35et les victimes juives.
00:41:37Il faut aussi
00:41:38qu'ils créent des ponts
00:41:39parce qu'on doit reconstruire
00:41:40un vivre-ensemble.
00:41:41Et pour ça,
00:41:42c'est important
00:41:42de mettre en avant
00:41:43des exemples positifs.
00:41:55Personnellement,
00:41:56je suis assez dubitative
00:41:58de cette approche.
00:41:59Historiquement,
00:42:00c'est un fait
00:42:01que trois quarts
00:42:01des Juifs
00:42:02recensés en 1940
00:42:05ont survécu à la guerre.
00:42:07Mais il y a eu
00:42:07de multiples raisons
00:42:08et ça ne s'explique pas
00:42:10que par la solidarité
00:42:12des non-juifs
00:42:13vis-à-vis des Juifs.
00:42:13Par exemple,
00:42:14on se rend compte
00:42:14à quel point
00:42:15les familles juives
00:42:16elles-mêmes
00:42:17ont fait vraiment
00:42:17des efforts
00:42:18absolument incroyables
00:42:20pour survivre.
00:42:21Tout ce que ça a demandé
00:42:22d'ingéniosité,
00:42:24de courage,
00:42:26sans parler
00:42:27des réseaux juifs
00:42:28qui ont été créés
00:42:29spécialement
00:42:30pour sauver
00:42:31les Juifs eux-mêmes.
00:42:33Mais ce discours
00:42:33ouvre la perspective
00:42:34d'une forme
00:42:35de réconciliation
00:42:36entre les Juifs
00:42:38et l'État français
00:42:39qui reconnaît sa faute
00:42:40mais qui en même temps
00:42:41met en avant
00:42:41des gens
00:42:42qui ont aidé les Juifs
00:42:43et que les Juifs eux-mêmes
00:42:44ont reconnu comme tels.
00:42:48Au nom de cette nouvelle
00:42:49réconciliation nationale,
00:42:51la figure des Justes
00:42:52va devenir centrale
00:42:53dans le discours politique
00:42:55jusqu'à leur panthéonisation
00:42:56collective,
00:42:57douze ans plus tard,
00:42:58toujours par Jacques Chirac.
00:43:00Ce nouveau récit historique
00:43:24de deux Frances
00:43:25qui s'opposent
00:43:26et s'équilibrent
00:43:27fait consensus.
00:43:30Mais le discours
00:43:33de Jacques Chirac
00:43:34va bien plus loin
00:43:35qu'une reconnaissance
00:43:36symbolique.
00:43:37Il va changer
00:43:38la vie des victimes
00:43:39et de leurs descendants.
00:43:42Le gouvernement
00:43:43décide de faire
00:43:44toute la lumière
00:43:45sur la spoliation
00:43:46des biens juifs
00:43:47pendant l'occupation.
00:43:57Nous conservons...
00:43:58À la fin de son discours,
00:44:00Jacques Chirac
00:44:00parle de la dette.
00:44:04La dette,
00:44:05c'est une reconnaissance.
00:44:07Ce qui va suivre,
00:44:08c'est la mise en place
00:44:10d'une commission
00:44:12qui va investiguer
00:44:15sur les spoliation
00:44:16dont ont été victimes
00:44:16les Juifs.
00:44:18Lionel Jospin
00:44:19a reçu aujourd'hui
00:44:19le premier rapport d'étape
00:44:20de la mission Matteoli,
00:44:22chargée d'établir
00:44:23l'ampleur de la spoliation
00:44:24dont les Juifs de France
00:44:25ont été victimes
00:44:26durant la Seconde Guerre mondiale.
00:44:27Un travail énorme,
00:44:28la plus grande partie
00:44:29des biens confisqués
00:44:30aux Juifs sous Vichy
00:44:31s'est envolée
00:44:31dans la nature
00:44:32ou dans les caisses
00:44:33de l'État français.
00:44:39Les restitutions
00:44:40effectuées après-guerre
00:44:41ont été importantes
00:44:42mais incomplètes.
00:44:47Grâce à la commission
00:44:48Matteoli,
00:44:49les victimes
00:44:49vont enfin
00:44:50être indemnisées.
00:44:55Les sommes
00:44:56dérobées aux familles
00:44:57qui ont totalement disparu
00:44:59sans ayant droit
00:45:00vont permettre
00:45:01la création
00:45:01de la fondation
00:45:02pour la mémoire
00:45:03de la Shoah
00:45:04et la mise en place
00:45:07d'une mesure
00:45:08à laquelle tenait
00:45:09particulièrement
00:45:10Serge Klarsfeld.
00:45:10J'avais constaté
00:45:20qu'un certain nombre
00:45:22d'orphelins
00:45:23n'avaient pas pu
00:45:25surmonter
00:45:26le traumatisme
00:45:27de la perte
00:45:29de leurs parents
00:45:29et que socialement
00:45:31ils étaient démunis.
00:45:33Moi, ma vie
00:45:34a été détruite
00:45:35à ce moment-là
00:45:35complètement
00:45:36et c'était
00:45:37l'époque
00:45:38où la France
00:45:39devait se reconstruire
00:45:40donc
00:45:42il fallait aller
00:45:43de l'avant.
00:45:44Il fallait travailler.
00:45:45Il fallait
00:45:46vivre au jour le jour.
00:45:49Donc
00:45:49il y avait
00:45:51des préoccupations
00:45:53de survie
00:45:53aussi.
00:45:56J'ai pu me battre
00:45:57pour que
00:45:58les orphelins
00:45:59de la déportation
00:46:00des Juifs
00:46:00de France
00:46:01puissent
00:46:02avoir
00:46:03une pension
00:46:05de façon
00:46:06à éviter
00:46:07de tomber
00:46:08dans la misère.
00:46:09C'est un aspect matériel
00:46:11mais en réalité
00:46:12c'est aussi
00:46:12l'aspect moral.
00:46:14Sans ce discours
00:46:15ça n'existe pas.
00:46:21Un simple discours
00:46:23permet de réparer
00:46:24en partie
00:46:25une grande douleur
00:46:26du pays.
00:46:27C'est la première fois
00:46:28qu'un président
00:46:29reconnaît
00:46:29une faute historique
00:46:30de la France.
00:46:32Cela ouvre une porte
00:46:33là encore.
00:46:35nous sommes là
00:46:38pour dire
00:46:38que la traite
00:46:39et l'esclavage
00:46:40furent
00:46:41et sont un crime
00:46:41contre l'humanité.
00:46:43La France apparaît
00:46:44comme la troisième
00:46:45puissance négrière
00:46:46européenne.
00:46:47Je reconnais
00:46:48les responsabilités
00:46:49des gouvernements
00:46:51français
00:46:52dans l'abandon
00:46:53des harkis
00:46:54des massacres
00:46:55de se rester
00:46:56en Algérie
00:46:57et des conditions
00:46:58d'accueil
00:46:59inhumaines
00:46:59des familles
00:47:00transférées
00:47:01dans les camps
00:47:02en France.
00:47:03La France
00:47:04a un rôle.
00:47:05une histoire
00:47:06et une responsabilité
00:47:09politique
00:47:10au Rwanda.
00:47:12Je viens reconnaître
00:47:13nos responsabilités.
00:47:15Il y a
00:47:16maintenant
00:47:17une nécessité
00:47:18de reconnaître
00:47:19un certain nombre
00:47:21de faits,
00:47:22un certain nombre
00:47:22de drames
00:47:23et même
00:47:24un certain nombre
00:47:25de responsabilités.
00:47:26Un discours
00:47:27de chef d'État
00:47:28ce n'est pas
00:47:28un discours
00:47:29d'historien.
00:47:30C'est un discours
00:47:30qui vient
00:47:31après qu'il y ait eu
00:47:33ou des preuves
00:47:35ou des récits
00:47:37qui montrent
00:47:38ce qui s'est produit.
00:47:39C'est un discours
00:47:40qui conclut
00:47:41et qui ouvre.
00:47:43Emmanuel Macron
00:47:44est tout le temps
00:47:44confi, pardon,
00:47:46en repentance,
00:47:47en disant permanence
00:47:48que la colonisation
00:47:49a été un crime
00:47:50contre l'humanité,
00:47:51etc.
00:47:51Il y a un trait
00:47:51commun,
00:47:52c'est que l'extrême droite
00:47:53est toujours
00:47:54contre les discours
00:47:55de reconnaissance
00:47:56des responsabilités
00:47:58de la France
00:47:59dans un certain nombre
00:47:59de faits historiques.
00:48:01Toujours.
00:48:05Et c'est un autre mot
00:48:07qui apparaît
00:48:08dans le discours politique
00:48:09pour contrer
00:48:10ceux de Jacques Chirac.
00:48:15J'en ai marre
00:48:16de cette autoflagellation,
00:48:17j'en ai marre
00:48:17de cette repentance
00:48:18permanente
00:48:19et j'en ai marre
00:48:19C'est pas de la repentance
00:48:20dit le président.
00:48:21C'est un fait.
00:48:23D'accord,
00:48:23mais pourquoi maintenant
00:48:24et pourquoi ça ?
00:48:25L'école a enseigné
00:48:26à toute une génération
00:48:27la repentance permanente,
00:48:28à savoir que la France
00:48:28avait toujours tout mal fait
00:48:29dans son histoire.
00:48:31Vous avez des gens
00:48:31qui vont parfois
00:48:32se mettre à paniquer,
00:48:33à tout mélanger
00:48:34et à considérer
00:48:36que reconnaître
00:48:36des faits historiques
00:48:37c'est se culpabiliser
00:48:39ou vouloir culpabiliser
00:48:39les Français,
00:48:40ce qui est un fantasme.
00:48:41Et vous avez des gens
00:48:42qui sont dans ce type
00:48:44de fantasme-là,
00:48:46notamment sur la guerre
00:48:47d'Algérie,
00:48:47sur la colonisation
00:48:49qui a entraîné
00:48:50des crimes
00:48:50contre l'humanité.
00:48:51C'est une évidence
00:48:52pour les spécialistes,
00:48:54pour les universitaires,
00:48:54pour les historiens,
00:48:55mais ça a parfois
00:48:56du mal à passer
00:48:57effectivement
00:48:57pour certains
00:48:59responsables politiques.
00:49:01Cet incessant combat,
00:49:03c'est le mien
00:49:03autant que c'est le vôtre.
00:49:06C'est justement
00:49:07avec une tirade
00:49:08contre l'extrême droite
00:49:09que Jacques Chirac
00:49:10termine son discours
00:49:11ce 16 juillet 1995.
00:49:14Certains partis politiques
00:49:16se révèlent porteurs
00:49:18de manière
00:49:19plus ou moins ouverte
00:49:20d'une idéologie
00:49:21d'une idéologie
00:49:22xénophobe,
00:49:23raciste,
00:49:24antisémite.
00:49:26Tout est déjà
00:49:27annoncé dans ce discours.
00:49:29Il y a à la fois
00:49:29l'extrémisme à l'intérieur,
00:49:31l'extrême droite.
00:49:32Les crimes racistes,
00:49:35la défense
00:49:36de thèses révisionnistes,
00:49:38les provocations
00:49:39en tout genre
00:49:40de petites phrases
00:49:42en soi-disant
00:49:42bons mots
00:49:43puissent en réalité
00:49:45aux mêmes sources.
00:49:46Avec un message
00:49:48politique final
00:49:49qui est très important
00:49:51dans ce discours,
00:49:52si on en est arrivé là,
00:49:53c'est parce qu'on a
00:49:55laissé dire,
00:49:55on a laissé faire
00:49:57dans les années 30
00:49:58et on a en réalité
00:50:00ouvert le champ
00:50:01à l'extrémisme.
00:50:02Or, il n'y a qu'une seule
00:50:03façon de faire face
00:50:04à l'extrémisme,
00:50:05c'est le combattre
00:50:06absolument.
00:50:13Après le discours
00:50:15du Valdiv
00:50:15et après cette séquence
00:50:16mémorielle,
00:50:18le pays va mieux
00:50:19qu'avant.
00:50:23Dans un discours
00:50:24présidentiel
00:50:26ou d'un premier ministre,
00:50:28sur le fond du discours,
00:50:29nul n'est revenu
00:50:30sur ce qu'avait dit
00:50:31Jacques Chirac.
00:50:34Maintenant,
00:50:34il est dans
00:50:34les manuels scolaires,
00:50:35il est enseigné
00:50:37à l'école,
00:50:37ce discours.
00:50:38Ce qui doit rester
00:50:39de ce discours
00:50:40de Jacques Chirac,
00:50:42c'est l'idée
00:50:42d'abord qu'il ne doit pas
00:50:44y avoir de discrimination,
00:50:46qu'il ne doit pas
00:50:46y avoir de séquence,
00:50:46qu'en fonction de la race
00:50:49ou de la religion
00:50:50des uns et des autres,
00:50:51on doit mettre
00:50:52certaines personnes
00:50:53au banc d'un pays
00:50:54et puis les écarter,
00:50:58les arrêter,
00:50:59les expulser.
00:51:00Non.
00:51:01Je trouve que la France
00:51:03se grandit
00:51:03en revenant sur ce passé,
00:51:07en assumant.
00:51:15La vérité doit toujours éclater.
00:51:17ne rien occulter des heures sombres
00:51:28de notre histoire,
00:51:28c'est tout simplement défendre
00:51:31une idée de l'homme,
00:51:33de sa liberté.
00:51:34Voilà 30 ans et pour commémorer
00:51:36la rafle du Veldiv de juillet 1942,
00:51:39Jacques Chirac prononçait donc
00:51:40l'un des discours
00:51:41les plus marquants
00:51:42de la Vème République.
00:51:44Ce documentaire exclusif,
00:51:45écrit par l'historienne
00:51:46Dominique Missica,
00:51:47réalisé par Caroline Dussain
00:51:49et Thomas Riby,
00:51:51vient,
00:51:51vous venez de le voir,
00:51:52d'en retracer la genèse,
00:51:54mais aussi le contexte
00:51:55historique et politique
00:51:56qui l'ont porté.
00:51:58De quoi s'interroger
00:51:59plus au-delà maintenant
00:52:00sur ce plateau
00:52:00de Debattoc
00:52:01en compagnie de nos invités
00:52:03sur l'impact
00:52:04et les débats
00:52:05suscités par les discours
00:52:06mémoriels
00:52:07que choisissent un jour
00:52:08de porter
00:52:09les chefs d'État.
00:52:10Sébastien Ledoux
00:52:11est tout d'abord avec nous.
00:52:12Bienvenue à vous,
00:52:14Sébastien Ledoux.
00:52:15Vous êtes historien
00:52:16et spécialiste
00:52:17des questions mémorielles,
00:52:18en particulier
00:52:19concernant la Shoah,
00:52:20la guerre d'Algérie
00:52:21et l'esclavage.
00:52:23Votre dernier ouvrage
00:52:24s'intitule
00:52:24« Vichy était-il la France ? »
00:52:27Le Veldiv
00:52:28et sa mémoire
00:52:28publiée
00:52:29chez Jean-Claude Lattès.
00:52:31Annette Vivierka
00:52:31est également avec nous.
00:52:33Bienvenue à vous,
00:52:33merci de votre fidélité,
00:52:34j'en profite.
00:52:36Vous êtes historienne,
00:52:37directrice de recherche
00:52:38honoraire au CNRS
00:52:39et vice-présidente
00:52:40du Conseil supérieur
00:52:41des archives.
00:52:42Vous êtes une spécialiste
00:52:44de l'histoire des Juifs
00:52:45au XXe siècle
00:52:45et votre dernier livre
00:52:47a lui pour titre
00:52:48« Déportation et génocide
00:52:50entre la mémoire
00:52:50et l'oubli. »
00:52:51Ouvrage publié
00:52:52aux éditions Plon.
00:52:53C'est une réédition
00:52:54d'une thèse
00:52:55que vous aviez publiée
00:52:57en 1992
00:52:59qui a été d'abord
00:53:00republiée en poche.
00:53:01Mais là,
00:53:02nous retrouvons
00:53:02une édition grand format
00:53:04avec cet ouvrage.
00:53:06Et puis enfin,
00:53:06Vincent Duclair
00:53:07est avec nous.
00:53:08Bienvenue à vous aussi,
00:53:10Vincent Duclair.
00:53:11Vous êtes également
00:53:11historien,
00:53:12spécialiste
00:53:13des sociétés démocratiques
00:53:14et de l'histoire
00:53:15des génocides.
00:53:17de 2016 à 2018.
00:53:19Vous avez présidé
00:53:19la mission
00:53:20d'études en France
00:53:21sur la recherche
00:53:22et l'enseignement
00:53:23des génocides.
00:53:24Puis de 2019
00:53:25à 2020,
00:53:26vous avez présidé
00:53:26la commission
00:53:27de recherche
00:53:28sur les archives françaises
00:53:30relatives au Rwanda
00:53:31et au génocide
00:53:32des Tutsis.
00:53:34Vous avez publié
00:53:35ce livre
00:53:35« La France face
00:53:36au génocide
00:53:37des Tutsis »
00:53:38chez Talendier.
00:53:39Et votre dernier ouvrage
00:53:41s'intitule
00:53:41« Arménie,
00:53:43un génocide
00:53:44et la justice ».
00:53:45Et cet ouvrage
00:53:46est lui disponible
00:53:47aux éditions
00:53:48Belles Lettres.
00:53:50Après ce film
00:53:51que nous avons regardé
00:53:52ensemble
00:53:53pour se remémorer
00:53:54ce qu'a été
00:53:55ce discours
00:53:56réellement historique
00:53:57un 30 ans après,
00:53:58nous sommes 30 ans après,
00:54:00on va revenir
00:54:01tout d'abord
00:54:01sur la doxa
00:54:02évoquée par Christine
00:54:04Albanel
00:54:04qui était la plume
00:54:05de Jacques Chirac
00:54:06à l'époque.
00:54:08Et cette doxa
00:54:09pourrait se résumer
00:54:10ainsi dans la formule
00:54:11qu'a eue
00:54:12le général de Gaulle
00:54:13à propos du régime
00:54:15de Vichy
00:54:15considérait que ce régime
00:54:16était, je cite,
00:54:18« nul et non avenu ».
00:54:19Autrement dit,
00:54:20le régime de Vichy,
00:54:21pour lui,
00:54:21à ses yeux,
00:54:22n'était pas la France.
00:54:24Et cette doxa a duré,
00:54:26on l'a vu,
00:54:26jusqu'à ce fameux discours
00:54:27de Jacques Chirac.
00:54:28C'était là
00:54:28qu'était le problème ?
00:54:29Alors, oui,
00:54:30on est effectivement
00:54:32au sorti de la guerre
00:54:3339-45
00:54:33avec une sorte
00:54:34de fiction
00:54:35historico-politique,
00:54:37donc avec ce Vichy
00:54:39nul et non avenu,
00:54:40puisque Vichy
00:54:41était aussi
00:54:42un régime
00:54:42finalement légal,
00:54:43donc on n'est pas
00:54:45face à un coup d'État,
00:54:46par exemple.
00:54:46Qui s'appelait
00:54:47l'État français,
00:54:47d'ailleurs,
00:54:48ce régime.
00:54:48Oui, tout à fait,
00:54:49qui s'appelait
00:54:49l'État français.
00:54:50Ce n'est plus
00:54:51la République française,
00:54:52il ne faut jamais
00:54:52l'oublier, ça.
00:54:53Oui, tout à fait.
00:54:54Et là,
00:54:55en 44-45,
00:54:57en fait,
00:54:57on a un récit,
00:54:59ce qu'on appelle
00:54:59un récit national,
00:55:00donc une façon
00:55:01d'écrire l'histoire
00:55:02de cette guerre
00:55:03qui repose
00:55:05sur la France victorieuse
00:55:06combattante,
00:55:07la France résistante.
00:55:08Et donc,
00:55:08à partir de là,
00:55:09et donc,
00:55:10jusqu'en 95,
00:55:12on a un récit officiel
00:55:14qui est vraiment
00:55:15centré autour
00:55:15de cette dimension
00:55:17d'une France victorieuse,
00:55:18d'une France résistante,
00:55:20ce que, par exemple,
00:55:21Henri Rousseau a appelé
00:55:21le mythe résistant
00:55:22confidentialiste,
00:55:23donc avec un discours
00:55:24qui porte la France
00:55:25comme un pays victorieux
00:55:27parce que résistant.
00:55:28Donc, ça,
00:55:28c'était fondamental.
00:55:30Et donc,
00:55:30effectivement,
00:55:31un discours qui a mis
00:55:32entre parenthèses
00:55:33Vichy et le régime de Vichy.
00:55:35Donc, ni De Gaulle,
00:55:37ni Pompidou,
00:55:38ni Valéry Giscard d'Estaing,
00:55:40ni Mitterrand.
00:55:40François Mitterrand,
00:55:41on a vu,
00:55:42en 92,
00:55:43a été tout de même
00:55:44le premier chef d'État
00:55:45à se rendre
00:55:46à cette fameuse commémoration
00:55:47du 7 juillet.
00:55:49Oui,
00:55:50et il fait,
00:55:50quelques mois plus tard,
00:55:52d'ailleurs,
00:55:52sous la pression,
00:55:54je dirais,
00:55:54de certains militants
00:55:55comme Serge Clarsfeld,
00:55:56dont on a parlé
00:55:56dans le documentaire,
00:55:57mais aussi de parlementaires,
00:55:59Jean Le Garec,
00:56:00initie,
00:56:01par voie parlementaire,
00:56:02en fait...
00:56:02député socialiste du Nord,
00:56:04Jean Le Garec.
00:56:04Exactement.
00:56:05Et donc,
00:56:05il était tout à fait choqué,
00:56:06en fait,
00:56:06de ce qui s'était passé
00:56:07et du silence de Mitterrand,
00:56:09initie une proposition de loi
00:56:11pour, justement,
00:56:13mettre en place
00:56:13une journée de commémoration.
00:56:14Mitterrand décide sous cette pression-là
00:56:17de faire un décret,
00:56:18quelques mois plus tard,
00:56:18on est le 3 février 1993,
00:56:21pour instaurer une journée nationale.
00:56:23Et ça,
00:56:23c'est déjà assez important,
00:56:24d'ailleurs,
00:56:25dans le récit de la France,
00:56:26pour instaurer une journée nationale
00:56:27autour, justement,
00:56:29du Veldiv et au nom du crime,
00:56:32en tout cas,
00:56:33la lutte contre le racisme.
00:56:35Et on apprend aussi
00:56:35dans ce documentaire
00:56:36que l'année suivante,
00:56:37il arrêtera de déposer
00:56:38une gerbe de fleurs
00:56:39sur la tombe
00:56:40de Philippe Pétain.
00:56:43Lorsqu'on parle
00:56:43d'un discours historique,
00:56:44parfois,
00:56:45le mot historique,
00:56:46aujourd'hui,
00:56:46utilisé un peu à tort,
00:56:47à travers,
00:56:48c'est vraiment le cas
00:56:48concernant ce discours ?
00:56:50Il en a prononcé d'autres,
00:56:51d'ailleurs,
00:56:51des discours.
00:56:51Non, non,
00:56:52le discours est historique,
00:56:55c'est un discours magnifique
00:56:57et c'est un discours aussi
00:56:58qui est d'une grande justesse,
00:57:00puisqu'il ne rend pas Vichy
00:57:03aussi responsable du génocide,
00:57:05mais il dit que l'État français
00:57:08a secondé la folie criminelle nazie.
00:57:12Parce que moi,
00:57:12j'ai le sentiment
00:57:12qu'il s'installe
00:57:13un autre discours
00:57:14qui serait que Auschwitz,
00:57:18ce serait de la responsabilité
00:57:19de Vichy,
00:57:19pour aller très vite.
00:57:21Alors, je crois quand même
00:57:23que si on veut comprendre
00:57:24le discours de Jacques Chirac,
00:57:27il faut quand même comprendre
00:57:28ce qui se passe avant.
00:57:30C'est-à-dire que
00:57:31ce n'est pas brusquement
00:57:32un président de la République
00:57:34qui va tenir un discours historique.
00:57:38Il y a eu 20 ans
00:57:39de débats,
00:57:41de polémiques.
00:57:42À partir de la fin des années 70,
00:57:45ces questions-là sont
00:57:46en permanence
00:57:48dans la vie politique.
00:57:51L'objet de polémiques
00:57:53entre le détail de Le Pen,
00:57:58entre la polémique
00:57:59sur le fait que la télévision,
00:58:01le RTF a refusé de passer
00:58:03le chagrin et la pitié.
00:58:05Donc, on ne peut pas dire
00:58:06que ce soit absent.
00:58:08Moi, je me souviens
00:58:08de la marche du siècle de 1992
00:58:10avec Cavada,
00:58:13qui était aussi sur le Veldiv.
00:58:15Donc, en fait,
00:58:16on a les historiens,
00:58:18on a l'opinion publique,
00:58:20on a les descendants
00:58:21des victimes.
00:58:22On a les témoignages.
00:58:23Parce que c'est une autre génération.
00:58:24On a les témoignages
00:58:25abondants.
00:58:26On a déjà une histoire
00:58:28qui est écrite.
00:58:30C'est-à-dire,
00:58:30l'histoire de la Rave du Veldiv,
00:58:31elle est écrite.
00:58:33Déjà en 1995,
00:58:34même si après,
00:58:34on peut toujours faire
00:58:35des petites retouches.
00:58:36Donc, finalement,
00:58:38c'est un discours
00:58:38qui prend acte aussi
00:58:40d'une opinion publique
00:58:42et qui est un discours
00:58:44qui veut aussi
00:58:45calmer
00:58:47l'opinion publique
00:58:49en reconnaissant
00:58:50ce que les autres
00:58:51n'ont pas reconnu.
00:58:52Maintenant,
00:58:53je voudrais juste dire
00:58:53quelque chose,
00:58:54c'est qu'on change
00:58:54de génération.
00:58:56C'est-à-dire que
00:58:57Jacques Chirac
00:58:58est le premier
00:58:58président de la République
00:59:00qui n'est pas été adulte
00:59:03pendant la période
00:59:04de Vichy.
00:59:05Il était encore
00:59:05en coulotte courte.
00:59:07Donc,
00:59:08son histoire
00:59:08n'est pas mêlée
00:59:09à celle
00:59:10de l'occupation.
00:59:12Alors,
00:59:13ce qui est vrai aussi,
00:59:14c'est que,
00:59:14ce n'est pas tout à fait
00:59:16dit dans ce documentaire,
00:59:17c'est que
00:59:18François Hollande,
00:59:20Emmanuel Macron
00:59:21vont s'inscrire
00:59:21dans la droite ligne
00:59:22de ce discours
00:59:23de Jacques Chirac.
00:59:25Plus personne
00:59:25ne sortira
00:59:26de ce discours
00:59:27de Chirac
00:59:28par la suite
00:59:28du côté des chefs
00:59:29d'État français.
00:59:30Alors,
00:59:31vous voulez vous dire
00:59:31à la fois
00:59:32en termes de modèle
00:59:33ou...
00:59:34Non,
00:59:34sur cette fameuse
00:59:34reconnaissance
00:59:35de la responsabilité
00:59:36de la France
00:59:38dans la déportation
00:59:39et l'extermination
00:59:40des juifs.
00:59:40Moi,
00:59:41je rejoins
00:59:41Névi Borka,
00:59:42c'est un discours
00:59:42magnifique
00:59:42parce que
00:59:43c'est un discours
00:59:44aussi qui,
00:59:45à la fois,
00:59:45effectivement,
00:59:46tient compte
00:59:46absolument
00:59:47de l'évolution
00:59:49des progrès historiques
00:59:50de la société civile
00:59:53et puis dit la vérité.
00:59:54Et en fait,
00:59:55ce qui est intéressant,
00:59:56c'est un discours
00:59:56qui grandit.
00:59:57C'est-à-dire,
00:59:58effectivement,
00:59:58il y a
00:59:58un accablement
01:00:01sur la responsabilité
01:00:02de Vichy
01:00:02qui est quand même,
01:00:03il faut bien le rappeler,
01:00:04la responsabilité
01:00:05de tous les cas,
01:00:05de tous les fonctionnaires
01:00:06de la Troisième République.
01:00:07C'est-à-dire que
01:00:08si Vichy,
01:00:09c'est la France,
01:00:09c'est parce que,
01:00:10au fond,
01:00:11mis à part
01:00:11les Français
01:00:12considérés comme juifs
01:00:13qui ont été exclus
01:00:14de la fonction publique,
01:00:15sinon,
01:00:16c'est la fonction publique
01:00:17de la Troisième République
01:00:17qui se retrouvent à Vichy.
01:00:19C'est René Bousquet
01:00:20qui est un préfet
01:00:21comme Jean Moulin
01:00:22était un préfet.
01:00:23Simplement,
01:00:23Jean Moulin fait un choix
01:00:24différent de celui
01:00:25de René Bousquet.
01:00:26Celui de Jean Moulin
01:00:27est plus exceptionnel
01:00:28que celui de Bousquet.
01:00:29Oui, bien sûr.
01:00:30Donc, c'est ça,
01:00:30effectivement,
01:00:31l'important.
01:00:31C'est que,
01:00:32jusque-là,
01:00:32on disait,
01:00:33effectivement,
01:00:33Vichy,
01:00:34c'est quelque chose
01:00:35qui est séparé
01:00:36de l'État.
01:00:38Mais c'est l'État
01:00:39qui, effectivement,
01:00:39a secondé
01:00:40la folie criminelle
01:00:41de l'occupant.
01:00:41Et c'est pour ça
01:00:42que c'est très important.
01:00:43Et, en fait,
01:00:43ce qui est assez extraordinaire,
01:00:46on peut le dire,
01:00:46parce que, aussi,
01:00:47c'est très travaillé,
01:00:48parce qu'il y a,
01:00:48effectivement,
01:00:48une préparation
01:00:49que ce discours
01:00:50est aussi très littéraire,
01:00:51philosophique
01:00:52sur la dimension humaine,
01:00:54c'est qu'effectivement,
01:00:56eh bien,
01:00:56il amène,
01:00:57je veux dire,
01:00:58il grandit, en fait.
01:01:00Vous voyez,
01:01:00ce n'est pas du tout
01:01:01dans la repentance.
01:01:02On y reviendra,
01:01:02certainement.
01:01:03D'ailleurs,
01:01:03on va voir
01:01:04un tout petit extrait
01:01:04sur le décryptage
01:01:06de ce discours.
01:01:07Il y a une organisation
01:01:08du texte,
01:01:09il y a un rythme,
01:01:11il y a une force
01:01:13dans les mots choisis.
01:01:14Oui, la folie criminelle
01:01:17de l'occupant
01:01:18a été,
01:01:20chacun le sait,
01:01:23secondée par des Français,
01:01:26secondée par l'État français.
01:01:29Oui, la folie criminelle.
01:01:31Le fait d'utiliser le oui,
01:01:33c'est une façon de dire
01:01:34je tranche le débat.
01:01:36C'est-à-dire,
01:01:36je reconnais.
01:01:37Voilà.
01:01:38On va clore cette période
01:01:39parce que Jacques Chirac
01:01:41a aussi conscience
01:01:42que c'est un sujet
01:01:44qui divise les Français.
01:01:47La France,
01:01:48ce jour-là,
01:01:50accomplissait l'irréparable.
01:01:52On va clore une période,
01:01:54mais on va en ouvrir une autre.
01:01:57Oui.
01:01:57Une période mémorielle.
01:01:59Tout à fait.
01:01:59Alors, juste pour revenir quand même,
01:02:00je pense que c'est important
01:02:01de signaler que Jacques Chirac,
01:02:03en 1986,
01:02:05commémore le Veldiv
01:02:06avec un discours.
01:02:07On n'en parle pas souvent,
01:02:09mais en fait,
01:02:10il est maire de Paris,
01:02:11il est premier ministre
01:02:12à ce moment-là,
01:02:12et déjà,
01:02:14il s'engage
01:02:15dans un discours
01:02:16qui est alors
01:02:16un petit peu différent,
01:02:17si vous voulez,
01:02:18mais quand même,
01:02:19qui parle des années sombres,
01:02:21des années noires
01:02:21et qu'il faut reconnaître.
01:02:22Il y a une introduction
01:02:23dans ce discours
01:02:24qui est d'ailleurs
01:02:24écrit déjà par Christine Albanel
01:02:26et il y a une très belle introduction
01:02:29en fait,
01:02:29et là,
01:02:30on s'aperçoit
01:02:31qu'on change un petit peu
01:02:32de registre
01:02:33et de schéma narratif
01:02:34et là,
01:02:34je réponds à votre question
01:02:36effectivement,
01:02:37c'est-à-dire que
01:02:37ce discours-là...
01:02:39Parce qu'il est très équilibré
01:02:40ce discours,
01:02:40c'est ce qu'il est dit
01:02:41dans ce film.
01:02:41Oui,
01:02:42c'est la thèse des deux France.
01:02:43Oui,
01:02:43il reconnaît la responsabilité
01:02:45de la France,
01:02:46mais parallèlement,
01:02:46il nous dit aussi
01:02:47dans ce discours
01:02:48que beaucoup de Français
01:02:50ont couru
01:02:50à sauver des justes en France.
01:02:51C'est la thèse des deux France,
01:02:52déjà en 1986,
01:02:53elle est là
01:02:54et déjà en 1986,
01:02:55dans ce premier discours
01:02:56du Veldiv,
01:02:57il cite Klarsfeld,
01:02:58donc il y a une citation
01:02:59du livre
01:03:00de Vichy Auschwitz
01:03:00de Klarsfeld
01:03:01qui vient de paraître
01:03:02à ce moment-là
01:03:03en 1985,
01:03:04justement dans cette idée
01:03:05que finalement,
01:03:07il y a une France collaboratrice,
01:03:08il y a une France
01:03:09effectivement
01:03:09qui a commis
01:03:10un crime irréparable,
01:03:11mais il y a une autre France
01:03:12et donc c'est celle
01:03:13qu'il va appeler en 1995
01:03:15celle des justes.
01:03:16Bon,
01:03:17ce qui...
01:03:18Alors moi,
01:03:18pour ma part,
01:03:19ce qui à la fois...
01:03:21C'est un très beau discours,
01:03:22mais ce qui va effectivement
01:03:23entraîner un autre récit,
01:03:25peut-être aussi
01:03:27un peu problématique
01:03:28malgré tout,
01:03:29c'est-à-dire
01:03:29un récit
01:03:30qui polarise
01:03:32autour du sauvetage
01:03:33des juifs
01:03:33par les justes
01:03:35et qui oublie
01:03:36que pendant la zone
01:03:37de guerre mondiale,
01:03:37les juifs aussi,
01:03:39par leur stratégie propre,
01:03:41ont réussi
01:03:41à échapper
01:03:42à l'élimination
01:03:43justement
01:03:44et l'extermination.
01:03:45Il y a aussi
01:03:45cette dimension-là
01:03:46qui n'est pas présente
01:03:47dans le discours.
01:03:48À propos de
01:03:49Annette Viorca,
01:03:51du rapport
01:03:51de la société française
01:03:52au régime de Vichy
01:03:53et à sa politique
01:03:54antisémite
01:03:55et de ce discours,
01:03:57en 2016,
01:03:59dans une interview
01:03:59au Monde,
01:03:59vous dites qu'aujourd'hui
01:04:00les comptes
01:04:01sont apurés.
01:04:03Voilà,
01:04:03c'est la formule
01:04:03que vous utilisez
01:04:04et ils sont apurés
01:04:05sur un plan politique,
01:04:06c'est donc ce fameux discours,
01:04:08sur un plan judiciaire,
01:04:09parce qu'il arrivera
01:04:10tout de suite après
01:04:10le procès
01:04:11de Maurice Papon
01:04:12et sur un plan matériel
01:04:14avec la mise en place
01:04:15de la fameuse
01:04:16commission
01:04:17Matteoli,
01:04:18pour l'indemnisation
01:04:19des victimes
01:04:19de spoliation
01:04:20à laquelle vous avez
01:04:21d'ailleurs amplement
01:04:22participé.
01:04:23C'est ça le processus ?
01:04:25Oui,
01:04:25alors ce qui est quand même
01:04:26très intéressant,
01:04:27c'est que ce n'est pas
01:04:28la France
01:04:29qui invente
01:04:30ce processus,
01:04:32il est inventé
01:04:34par l'Allemagne
01:04:34d'Adenauer.
01:04:36C'est-à-dire que
01:04:36dès la fin
01:04:37de la Seconde Guerre mondiale,
01:04:39au tout début
01:04:40des années 50,
01:04:42en Allemagne,
01:04:43se pose la question
01:04:44des réparations,
01:04:46Wiedergutmarungen,
01:04:47comme on dit
01:04:48faire le bien
01:04:48à nouveau.
01:04:50Et le processus
01:04:51est déjà en place,
01:04:52c'est un discours
01:04:53d'Adenauer
01:04:55devant le Parlement allemand
01:04:58et c'est ensuite
01:05:00un traité
01:05:01qui va organiser
01:05:03la réparation matérielle,
01:05:06un traité très étrange,
01:05:07le traité de Luxembourg,
01:05:09puisque c'est un traité
01:05:10entre trois pays
01:05:11qui n'existaient pas,
01:05:12la République fédérale
01:05:13d'Allemagne,
01:05:14l'État d'Israël
01:05:15et une grande organisation
01:05:18qui s'appelle
01:05:19la Claims Conference
01:05:19qui regroupe
01:05:21toutes les grandes
01:05:21organisations juives
01:05:22de par le monde
01:05:23et qui va donner
01:05:24des indemnités.
01:05:26Et la Claims
01:05:27existe toujours
01:05:28et elle continue
01:05:29à donner
01:05:30des indemnités
01:05:31aux survivants
01:05:32et à donner
01:05:33de l'argent
01:05:33pour des oeuvres
01:05:35mémorielles,
01:05:37des bourses.
01:05:38Donc,
01:05:39on a déjà
01:05:39ce modèle
01:05:40et on peut dire
01:05:41que pour la France,
01:05:42il y a un petit décalage
01:05:43et que les procès
01:05:47Barbie,
01:05:48Touvier,
01:05:49Papon,
01:05:50ça a pu
01:05:51relé compte
01:05:51du point de vue judiciaire.
01:05:53Il y avait eu
01:05:53des procès avant.
01:05:55D'un point de vue matériel,
01:05:57c'est effectivement
01:05:58la mission
01:05:58Mathéoli.
01:05:59Dans le documentaire,
01:06:01Serge Larsfeld
01:06:02évoque seulement
01:06:03la pension
01:06:04qui est donnée
01:06:05aux orphelins
01:06:06de la déportation.
01:06:08Mais le débouché
01:06:09de Mathéoli,
01:06:10c'est beaucoup plus
01:06:10que ça.
01:06:11C'est la création
01:06:12d'une grande fondation,
01:06:13François Bras,
01:06:14de la Shoah,
01:06:15qui a d'ailleurs
01:06:15financé le documentaire
01:06:17en partie.
01:06:18C'est la réouverture
01:06:19des indemnisations
01:06:20et c'est effectivement
01:06:21la pension.
01:06:22Et puis,
01:06:24voilà,
01:06:24donc on a les trois ordres.
01:06:25Effectivement,
01:06:25le symbolique,
01:06:27c'est le discours
01:06:28de Chirac.
01:06:29Le judiciaire,
01:06:30ce sont ces trois
01:06:31derniers procès,
01:06:33très différents
01:06:34les uns des autres.
01:06:35Et puis,
01:06:36ce qui est ouvert
01:06:37et qui court toujours
01:06:39puisqu'on continue
01:06:40à rechercher
01:06:41les œuvres d'art
01:06:42et puis qu'il y a
01:06:43quand même
01:06:44cette fondation
01:06:44extrêmement importante.
01:06:47On va voir
01:06:47un deuxième extrait
01:06:48du film,
01:06:49si vous en êtes d'accord.
01:06:51Et là,
01:06:51nous approchons
01:06:51la fin du documentaire
01:06:53que nous avons présenté.
01:06:55On va écouter
01:06:57à la fois
01:06:57Christine Taubira,
01:06:59François Hollande
01:07:00et Emmanuel Macron.
01:07:02Nous sommes là
01:07:03pour dire
01:07:03que la traite
01:07:04et l'esclavage
01:07:04furent
01:07:05et sont un crime
01:07:06contre l'humanité.
01:07:07La France apparaît
01:07:08comme la troisième
01:07:09puissance négrière
01:07:10européenne.
01:07:11Je reconnais
01:07:12les responsabilités
01:07:14des gouvernements
01:07:15français
01:07:16dans l'abandon
01:07:18des harkis,
01:07:19des massacres,
01:07:20de se rester
01:07:21en Algérie
01:07:21et des conditions
01:07:23d'accueil inhumaines
01:07:24des familles transférées
01:07:25dans les camps
01:07:26en France.
01:07:28La France
01:07:28a un rôle,
01:07:30une histoire
01:07:31et une responsabilité
01:07:33politique
01:07:35au Rwanda.
01:07:36Il s'agissait bien sûr
01:07:37de Christiane,
01:07:37Taubira,
01:07:38et nous Christine,
01:07:39comme je l'ai dit
01:07:40il y a un instant.
01:07:41Alors,
01:07:42on a entendu
01:07:43d'autres évolutions
01:07:45mémorielles,
01:07:46d'autres discours,
01:07:47notamment celui
01:07:47d'Emmanuel Macron
01:07:48à propos du Rwanda.
01:07:49Vous avez beaucoup
01:07:49travaillé sur cette question.
01:07:51Beaucoup ont dit
01:07:52d'ailleurs
01:07:52que vous aviez préparé
01:07:53le terrain
01:07:53d'Emmanuel Macron
01:07:54à travers les travaux
01:07:55que j'ai évoqués
01:07:55dans la présentation
01:07:57que j'ai faite
01:07:57de vous aujourd'hui
01:07:58sur un plan historique
01:07:59justement.
01:08:00Pour ce qu'allait
01:08:02être les déclarations
01:08:02d'Emmanuel Macron
01:08:03à deux reprises.
01:08:04Première reprise
01:08:05en 2021,
01:08:06je crois,
01:08:07au Rwanda
01:08:08et puis trois ans
01:08:10plus tard,
01:08:10en 2024.
01:08:12Quelles étaient
01:08:13les conclusions
01:08:13de vos travaux
01:08:14essentiellement
01:08:14et que sont-elles
01:08:16devenues
01:08:16dans le discours
01:08:17du chef de l'État
01:08:19qu'étaient
01:08:20Emmanuel Macron ?
01:08:21Je pense que
01:08:22c'est très intéressant
01:08:23je crois
01:08:23de comparer
01:08:24les deux discours
01:08:25celui de Jacques Chirac
01:08:25du 16 juillet 1995
01:08:26et celui d'Emmanuel Macron
01:08:28qu'on voit effectivement ici
01:08:29au mémorale
01:08:29de Guy Sosi
01:08:30et à Kigeli
01:08:31au Rwanda
01:08:31du 27 mai 2021.
01:08:34Parce que déjà
01:08:35on l'a bien entendu
01:08:36il y a effectivement
01:08:38la prise en compte
01:08:39des travaux historiques
01:08:41pour Jacques Chirac
01:08:42comme pour Emmanuel Macron.
01:08:44Il y a eu
01:08:44un certain nombre
01:08:44de recherches
01:08:45qui ont été faites
01:08:46sur l'engagement
01:08:47de la France
01:08:48au Rwanda
01:08:48auprès d'un régime
01:08:50qui prépare le génocide
01:08:51pour être très clair
01:08:53et puis
01:08:54il y a eu effectivement
01:08:56la volonté
01:08:57de Emmanuel Macron
01:08:57d'avoir
01:08:59un rapport
01:09:00et des éléments
01:09:01de vérité historique.
01:09:02Votre rapport
01:09:03concluait
01:09:04je fais très vite
01:09:06mais concluait
01:09:08ainsi
01:09:08les responsabilités
01:09:09lourdes
01:09:09et accablantes
01:09:10de la France
01:09:11concernant
01:09:12ce génocide
01:09:13des Tutsis
01:09:13c'était la formule
01:09:14que tout le monde
01:09:15a retenue
01:09:15à la suite
01:09:16de vos travaux
01:09:16et dans la bouche
01:09:17d'Emmanuel Macron
01:09:18en 2021
01:09:19à Kigali
01:09:19cela devient
01:09:20lui reconnaît
01:09:21solennellement
01:09:22la responsabilité
01:09:23accablante
01:09:24de la France
01:09:25dans un engrenage
01:09:26qui a conduit au pire
01:09:27et trois ans plus tard
01:09:28cela devient
01:09:30dans sa bouche
01:09:32la France
01:09:33aurait pu arrêter
01:09:34les massacres
01:09:34au Rwanda
01:09:35en 1994
01:09:36mais n'en a pas eu
01:09:37la volonté.
01:09:39Je crois qu'on peut faire
01:09:40deux remarques importantes
01:09:41la première
01:09:42c'est que
01:09:42on est effectivement
01:09:43dans une réflexion critique
01:09:45dans un examen
01:09:47de la responsabilité politique
01:09:49ça c'est vraiment
01:09:50très important
01:09:50que ce soit
01:09:51Jacques Chirac
01:09:52par rapport à Vichy
01:09:53et par rapport
01:09:53à ce que Vichy
01:09:54dit de la France
01:09:56et Emmanuel Macron
01:09:57sur des responsabilités politiques
01:09:59il le dit
01:09:59dans l'extrait
01:10:00et donc
01:10:00ces responsabilités
01:10:01sont accablantes
01:10:02donc effectivement
01:10:03d'abord nous
01:10:03effectivement
01:10:04les membres
01:10:05de la commission
01:10:06Anne-Édoui Vorka
01:10:06a commencé à travailler
01:10:07avec nous
01:10:08je suis allé à le préciser
01:10:09et bien c'est
01:10:10donc de constater
01:10:11qu'on est plutôt
01:10:12quand même satisfaits
01:10:12qu'après la République
01:10:13font les acquis
01:10:15de la recherche
01:10:15acquis d'alli
01:10:17dans un discours
01:10:18Alors il ne les porte pas
01:10:18tout à fait dans les mêmes termes
01:10:19Justement je vais y revenir
01:10:20C'est là que la question
01:10:22des députés politiques
01:10:23est intéressante
01:10:23Justement je vais y revenir
01:10:24dans un instant
01:10:25mais quand même
01:10:25effectivement reconnaître
01:10:27qu'il y a une volonté
01:10:28de Jacques Chirac
01:10:29comme d'Emmanuel Macron
01:10:30en fait voilà
01:10:31d'attester la vérité
01:10:33c'est pour ça
01:10:33qu'il n'y a pas de pardon
01:10:34c'est pour ça
01:10:34qu'il n'y a pas de repentance
01:10:35au moins de vue
01:10:35c'est effectivement la vérité
01:10:37et c'est vrai qu'on sait bien
01:10:38que la vérité
01:10:38malgré tout
01:10:39elle grandit
01:10:40même si elle est très difficile
01:10:41La deuxième chose
01:10:42qui est très intéressante
01:10:43et moi j'ai comparé
01:10:43les deux discours
01:10:44de manière très précise
01:10:45c'est que
01:10:45effectivement
01:10:46il y a deux
01:10:47si vous voulez
01:10:47deux actes extrêmement forts
01:10:49Jacques Chirac
01:10:50l'irréparable
01:10:51la France a commis l'irréparable
01:10:53et puis Emmanuel Macron
01:10:54les responsabilités accablantes
01:10:55et à chaque fois
01:10:56effectivement
01:10:57il y a une volonté
01:10:58de nuancer
01:10:59mais en fait
01:10:59ce qui est important
01:11:00c'est ce qui est dit
01:11:01et comment est-ce qu'il nuance
01:11:02Jacques Chirac dit
01:11:03et vous le souvenez
01:11:04la France n'est nullement antisémite
01:11:06je veux dire
01:11:07on sait qu'effectivement
01:11:08là c'est une concession
01:11:09effectivement
01:11:09qui ne tient pas
01:11:10effectivement
01:11:11qui ne résiste pas
01:11:12à la vérité historique
01:11:13à la fois à l'époque
01:11:14et peut-être aujourd'hui
01:11:15et Emmanuel Macron dit
01:11:16oui la France
01:11:17a une responsabilité accablante
01:11:19dans un engrenage
01:11:20qui a mené au pire
01:11:21et il ajoute
01:11:22et on sait bien
01:11:22que ça c'est une manière
01:11:23de faire passer
01:11:24effectivement
01:11:25ce qu'il vient de dire
01:11:26dans un engrenage
01:11:27que la France a tout fait
01:11:29pour éviter
01:11:29ce qui est effectivement faux
01:11:31mais on voit bien
01:11:32effectivement
01:11:33comment est-ce qu'on construit
01:11:34si vous voulez
01:11:34ces discours
01:11:35de manière à ce que
01:11:36l'élément important
01:11:38la responsabilité accablante
01:11:40s'impose
01:11:40et qu'il puisse effectivement
01:11:41ensuite dire
01:11:42non mais
01:11:42on a effectivement
01:11:43nuancé
01:11:44comme Jacques Chirac
01:11:45ou comme Emmanuel Macron
01:11:46vous voyez
01:11:46donc là
01:11:46il y a une organisation
01:11:48très subtile
01:11:49effectivement
01:11:50de ces discours historiques
01:11:51mais avec un impact réel
01:11:52alors on reconnaît
01:11:55les responsabilités
01:11:56mais pas de pardon
01:11:57et ce fameux mot
01:11:59repentance
01:12:00qui revient
01:12:01à la toute fin
01:12:01de ce documentaire
01:12:02qui est apparu
01:12:02il n'y a pas si longtemps
01:12:03en réalité
01:12:04dans notre vocabulaire
01:12:05dans le vocabulaire
01:12:05des responsables politiques
01:12:06pour contester
01:12:08ce genre de discours
01:12:09mais il ne faudrait pas oublier
01:12:10qu'un responsable politique
01:12:10n'est pas un historien
01:12:12et que le discours politique
01:12:15veut avoir des effets
01:12:17et en ce qui concerne
01:12:18au Rwanda
01:12:19il y a aussi
01:12:20des objectifs politiques
01:12:21qui étaient de réconcilier
01:12:22en somme la France
01:12:24avec le Rwanda
01:12:26donc on ne peut pas attendre
01:12:27d'un homme politique
01:12:29qu'il colle
01:12:30à la vérité historique
01:12:33qu'il travaille
01:12:34des historiens
01:12:35parce qu'il a
01:12:37d'autres objectifs
01:12:39que celui
01:12:40d'établir
01:12:40la vérité
01:12:42je crois que
01:12:44tous ces discours
01:12:45ont des objectifs
01:12:46et on le voit
01:12:47par rapport
01:12:49à la guerre d'Algérie
01:12:49par rapport
01:12:50à l'Algérie
01:12:50par exemple
01:12:51qui est un sujet
01:12:52particulièrement
01:12:53chaud
01:12:54Sébastien Ledoux
01:12:55sur ce qui vient d'être dit
01:12:56oui
01:12:56en fait
01:12:57oui tout à fait d'accord
01:12:59en fait
01:12:59vous avez
01:13:00depuis les années 90
01:13:01des politiques
01:13:03qui s'inspirent
01:13:04de travaux historiques
01:13:05donc
01:13:06c'est finalement
01:13:07relativement récent
01:13:08et
01:13:09c'est vraiment
01:13:10un signe de démocratie
01:13:11aussi quelque part
01:13:12parce qu'on voit
01:13:12dans les régimes autoritaires
01:13:13que ce n'est pas du tout le cas
01:13:14au contraire
01:13:14donc là
01:13:15on est vraiment
01:13:15sur
01:13:16une amélioration
01:13:19je dirais
01:13:19un progrès
01:13:20mais en même temps
01:13:21la parole politique
01:13:22a différentes logiques
01:13:25qui ne correspondent pas
01:13:26à un travail scientifique
01:13:26alors pour revenir
01:13:28sur la question
01:13:29de la repentance
01:13:29que vous posiez tout à l'heure
01:13:30c'est très intéressant
01:13:31parce que justement
01:13:32c'est un terme
01:13:33qui a changé
01:13:35en fait
01:13:35de coloration
01:13:36et de sens
01:13:38la repentance
01:13:39on a
01:13:40les évêques
01:13:40de France
01:13:41en 97
01:13:42qui font
01:13:43un discours
01:13:44qui les appelle
01:13:45repentance
01:13:46justement par rapport
01:13:47à la Shoah
01:13:47ils le font à Drancy
01:13:48c'est exactement ça
01:13:50ils le font à Drancy
01:13:51et donc c'est une reconnaissance
01:13:53là aussi
01:13:54d'une responsabilité
01:13:55de l'église
01:13:56dans les crimes antisémites
01:13:57et à ce moment là
01:13:59ce mot de repentance
01:14:00est plutôt très positif
01:14:01il est connoté positivement
01:14:02dans les années 2000
01:14:03il change de nature
01:14:04et il apparaît
01:14:05alors en fait
01:14:07vraiment de façon
01:14:07très significative
01:14:08en 2007
01:14:09pendant l'élection présidentielle
01:14:10portée par Nicolas Sarkozy
01:14:13et là dans un sens
01:14:14tout à fait péjoratif
01:14:15et là pour parler
01:14:15du colonial
01:14:16pour parler de l'histoire coloniale
01:14:19on est deux ans après
01:14:20je ne sais pas si vous vous rappelez
01:14:21la fameuse loi
01:14:23du 23 février 2005
01:14:24qui dans un amendement
01:14:25justement prescrivait
01:14:26qu'on apprenne aux enfants
01:14:28le rôle positif
01:14:29de la colonisation
01:14:30de la présence coloniale
01:14:31je fais rapide
01:14:32mais c'est à peu près ça
01:14:33d'ailleurs c'est un texte
01:14:35qui a été retiré
01:14:36par Jacques Chirac
01:14:37un an après
01:14:38suite à une mobilisation
01:14:39et donc
01:14:40on est sur un échiquier politique
01:14:42qui est en train de changer
01:14:43on est beaucoup plus
01:14:45sur la question
01:14:46des mémoires coloniales
01:14:47et on y est encore
01:14:48en 2025 d'ailleurs
01:14:49et là en fait
01:14:51on a vraiment
01:14:52une structuration
01:14:53du champ politique
01:14:54qui se fait
01:14:55qui se polarise
01:14:55et qui se clive
01:14:57c'est beaucoup plus clivant
01:14:58et ce terme
01:14:59de repentance
01:15:00il est amené
01:15:01effectivement
01:15:02par la droite
01:15:03et l'extrême droite
01:15:03pour cliver
01:15:04en fait l'électorat
01:15:06et pour contester
01:15:07pour le coup
01:15:08tout acte de reconnaissance
01:15:10de crimes
01:15:11liés à l'histoire coloniale
01:15:13Vincent Duclair
01:15:14vous souhaiteriez rajouter
01:15:14quelque chose
01:15:15sur le fait que
01:15:16si on rapproche
01:15:17effectivement
01:15:17les deux discours
01:15:18mentionnés
01:15:19donc Emmanuel Macron
01:15:20Jacques Chirac
01:15:21on a quand même
01:15:21la volonté
01:15:23de marquer
01:15:24un moment
01:15:25qui est le moment
01:15:25de la vérité historique
01:15:26bien sûr
01:15:27effectivement
01:15:27qu'un président de la république
01:15:28n'est pas un historien
01:15:29mais la force
01:15:30des deux discours
01:15:31c'est effectivement
01:15:32de s'établir
01:15:33sur cette vérité là
01:15:34et en fait
01:15:35la force ensuite
01:15:36effectivement
01:15:36de pouvoir
01:15:37établir
01:15:39ces faits historiques
01:15:39même si
01:15:40ils ne sont pas mentionnés
01:15:41nous on n'est pas mentionnés
01:15:42en tant que rapporteur
01:15:44dans le discours
01:15:44d'Emmanuel Macron
01:15:45mais effectivement
01:15:45il y a quand même
01:15:46des phrases
01:15:47extrêmement claires
01:15:48c'est justement
01:15:49de sortir du pièce
01:15:50de la repentance
01:15:50de dire que
01:15:51le pardon
01:15:53l'abaissement
01:15:55de la France
01:15:55qui effectivement
01:15:56serait à même
01:15:57de reconnaître
01:15:58donc ces pages sombres
01:16:00et en fond
01:16:01surmonter
01:16:02par effectivement
01:16:03la force
01:16:04et la dignité
01:16:04de dire
01:16:05à un moment donné
01:16:06cette vérité
01:16:06et cette vérité
01:16:07qui n'est pas
01:16:07une vérité politique
01:16:08c'est une vérité historique
01:16:09donc là je crois
01:16:10que en fait
01:16:11ce qui distingue
01:16:11finalement
01:16:12ces grands discours
01:16:13historiques
01:16:13de tous les discours
01:16:14que les présents
01:16:15de la République
01:16:15font sur le passé
01:16:17la mémoire
01:16:17l'histoire
01:16:18c'est effectivement
01:16:19
01:16:19quand même
01:16:20il y a un certain courage
01:16:20de dire
01:16:21on a effectivement
01:16:23ces travaux d'historien
01:16:24et effectivement
01:16:25on établit
01:16:26ce qui s'est passé
01:16:27et de manière très nette
01:16:28j'ai vu que vous disiez
01:16:29souvent que
01:16:30finalement
01:16:30les propos tenus
01:16:31par le chef de l'état
01:16:32vos travaux d'une part
01:16:33et par la suite
01:16:35les propos tenus
01:16:35par Emmanuel Macron
01:16:36à propos de ce génocide
01:16:37rwandais
01:16:38mettaient un terme
01:16:39à un déni
01:16:40un déni
01:16:41qui aurait été orchestré
01:16:42par
01:16:43François Mitterrand
01:16:44et ceux
01:16:46qui dirigeaient la France
01:16:47à l'époque
01:16:47de ce génocide
01:16:49et d'ailleurs
01:16:49vos travaux
01:16:50vous ont valu
01:16:51un volet de bois vert
01:16:53du côté des Mitterrandiens
01:16:54là c'était pas la droite
01:16:56et l'extrême droite
01:16:56qui vous reprochait
01:16:57d'avoir mis un terme
01:16:58à une forme de déni
01:16:59pour reprendre ce terme
01:17:00que vous avez utilisé
01:17:01et c'est là
01:17:02on voit aussi
01:17:02je trouve que
01:17:03ce qui est intéressant
01:17:04avec votre documentaire
01:17:05et le débat
01:17:05c'est qu'on peut réfléchir
01:17:06à ce qui fait
01:17:07un grand discours historique
01:17:09d'un chef d'état
01:17:09c'est aussi
01:17:11le courage
01:17:12et la prise de risque
01:17:13face à sa famille politique
01:17:14c'est à dire que
01:17:15Jacques Chirac
01:17:16on le voit dans le documentaire
01:17:17Philippe Seguin
01:17:18est très mécontent
01:17:19effectivement du discours
01:17:20de Jacques Chirac
01:17:21d'ailleurs contrairement
01:17:21à ce qu'il a dit
01:17:22dans le documentaire
01:17:23il y a Marie-France Garraud
01:17:25et Philippe Seguin
01:17:26qui ne sont pas d'accord
01:17:27et Philippe Seguin
01:17:28est une personne
01:17:30tout à fait respectable
01:17:31avec
01:17:32il n'a pas connu son père
01:17:33qui est mort
01:17:34pendant la résistance
01:17:34enfin
01:17:35c'est pas
01:17:35c'est pas l'extrême droite
01:17:37Emmanuel Macron
01:17:38il vient de la gauche
01:17:40au moment où il lance
01:17:41effectivement quand même
01:17:42cette volonté
01:17:43aussi comme l'a bien rappelé
01:17:44Anna Duvorka
01:17:45voilà de faire en sorte
01:17:46qu'on sorte
01:17:47effectivement
01:17:48de l'extrême tension
01:17:49entre la France et le Rwanda
01:17:50et donc là ils ront
01:17:51avec une grande partie
01:17:53de la gauche
01:17:54ceux qui ne voulaient pas
01:17:55effectivement
01:17:55qui étaient dans le déni
01:17:56dont notamment
01:17:57le numéro de l'Elysée
01:17:58qui à l'époque
01:17:59de François Mitterrand
01:17:59qui s'appelait Berbédrine
01:18:00Alors il y a un passé
01:18:01qui ne passe pas
01:18:02aujourd'hui en France
01:18:03et notamment
01:18:04vis-à-vis des jeunes générations
01:18:05c'est la colonisation
01:18:08vous l'avez évoqué
01:18:09et la décolonisation
01:18:10alors on pense immédiatement
01:18:11à la guerre d'Algérie
01:18:12mais il n'y a pas
01:18:12non pas que
01:18:14cette séquence
01:18:14de la guerre d'Algérie
01:18:15séquence de décolonisation
01:18:17pourquoi ce passé
01:18:18ne passe toujours pas en France
01:18:20malgré les travaux
01:18:21d'un de vos confrères
01:18:22par exemple
01:18:22Benjamin Stora
01:18:23à qui Emmanuel Macron
01:18:24le chef de l'État
01:18:25a confié un rapport aussi
01:18:26pour mettre en place
01:18:28un travail mémoriel
01:18:29entre les deux pays
01:18:30pourquoi ce passé
01:18:32ne passe pas
01:18:32parce qu'on n'a pas eu le droit
01:18:33encore à un discours
01:18:35marqueur
01:18:36comme ça a été le cas
01:18:37de celui de Jacques Chirac
01:18:40à propos de cette rape du Vendée
01:18:40Moi ce qui me frappe
01:18:41je ne suis pas du tout spécialiste
01:18:42de la guerre d'Algérie
01:18:43ni de l'histoire de l'Algérie
01:18:45mais ce qui me frappe aussi
01:18:47c'est que tous les efforts
01:18:49de vérité historique
01:18:51doivent être faits
01:18:52par la France
01:18:53l'ouverture des archives
01:18:55ce qui est très largement
01:18:56le cas
01:18:56et que du côté algérien
01:18:59on ne demande rien
01:19:00c'est-à-dire qu'on ne demande pas
01:19:02aux Algériens
01:19:03d'ouvrir leurs archives
01:19:04et de permettre
01:19:05d'écrire
01:19:06des deux côtés
01:19:07la mission de Benjamin
01:19:08il y a une mission
01:19:09où normalement
01:19:10ce sont les deux côtés
01:19:11qui travaillent
01:19:12et la gêne
01:19:14elle fait que
01:19:15par exemple
01:19:16aujourd'hui
01:19:17un homme
01:19:20un écrivain
01:19:21qui s'appelle
01:19:21Boalem Sansal
01:19:22est prisonnier
01:19:24en Algérie
01:19:26simplement pour
01:19:28des écrits
01:19:29littéraires
01:19:30c'est pas un militant
01:19:31c'est pas
01:19:32et qu'on fait
01:19:33la fine bouche
01:19:34en disant
01:19:35peut-être
01:19:35alors qu'on a
01:19:38tout simplement
01:19:39un homme âgé
01:19:41prisonnier
01:19:42d'un régime
01:19:43qui est un régime
01:19:44dictatorial
01:19:45et autoritaire
01:19:46donc le problème
01:19:47c'est qu'on demande
01:19:48que l'effort soit fait
01:19:50par les démocraties
01:19:51et c'est très bien
01:19:52et c'est très bien
01:19:53et les travaux
01:19:54de Benjamin Stora
01:19:55sont fondamentaux
01:19:56mais que
01:19:57pour faire la lumière
01:19:58il faudrait peut-être
01:19:58cueillir les deux
01:19:59alors là il y a une mission
01:20:00dont on parle pas
01:20:01qui est très intéressante
01:20:03qui est une mission
01:20:04sur la question
01:20:05de la dette
01:20:06à Haïti
01:20:07ça c'est très intéressant
01:20:08parce que
01:20:10là on a
01:20:12le même
01:20:12mécanisme
01:20:14qui est
01:20:14de faire l'histoire
01:20:16de qu'est-ce qui s'est passé
01:20:17avec cette dette
01:20:19et de réfléchir
01:20:20à comment on pourrait
01:20:21réparer l'histoire
01:20:22à propos de la colonisation
01:20:24de la décolonisation
01:20:25concernant l'Algérie
01:20:26le 15 février
01:20:282017
01:20:30Emmanuel Macron
01:20:30n'était pas encore
01:20:31président de la République
01:20:32il était simplement candidat
01:20:33à la présidence de la République
01:20:34il va à Alger
01:20:35il tient ses propos
01:20:36sur une télévision algérienne
01:20:38la colonisation fait partie
01:20:39de l'histoire française
01:20:40c'est un crime
01:20:42c'est un crime
01:20:42contre l'humanité
01:20:43c'est une vraie barbarie
01:20:45et ça fait partie
01:20:46de ce passé
01:20:47que nous devons regarder
01:20:49en face
01:20:49en présentant
01:20:50nos excuses
01:20:51à l'égard de celles et ceux
01:20:52envers lesquels
01:20:53nous avons commis
01:20:54ces gestes
01:20:54ces propos
01:20:55jamais
01:20:56il ne va les réitérer
01:20:57une fois élus
01:20:59c'est aussi sensible
01:21:01que ça
01:21:01cette question
01:21:02de la colonisation
01:21:02aujourd'hui
01:21:03en 2025
01:21:03en France
01:21:04ce passé
01:21:05qui ne passe pas
01:21:05notamment avec l'Algérie
01:21:07c'est un sujet sensible
01:21:10effectivement
01:21:11alors il ne faut pas oublier
01:21:11qu'il y a quand même
01:21:12trois journées de commémorations
01:21:13ce n'est pas comme s'il n'y avait rien eu
01:21:14les politiques mémoriales
01:21:16sont là depuis maintenant
01:21:1625 ans
01:21:17d'ailleurs c'est Jacques Chirac
01:21:19qui a commencé par des décrets
01:21:20à instaurer
01:21:20des deux journées de commémorations
01:21:22une liée au Harki
01:21:23et puis il y en a une troisième
01:21:25c'est le 19 mars
01:21:26depuis 2012
01:21:27c'était là le Parlement
01:21:28qui a voté une loi
01:21:29pour instaurer
01:21:30cette journée de commémorations
01:21:31après
01:21:31ce qui est intéressant
01:21:33dans justement
01:21:34dans votre exemple
01:21:35vous citez
01:21:36un Emmanuel Macron
01:21:38candidat
01:21:39qui est en campagne
01:21:39c'est de voir aussi
01:21:40que pour le politique
01:21:41la mémoire
01:21:42c'est un répertoire
01:21:44qui est utilisé
01:21:45alors qu'ils sont
01:21:46au gouvernement
01:21:47ou en tout cas
01:21:47en exercice du pouvoir
01:21:48mais aussi
01:21:49quand ils veulent
01:21:50obtenir le pouvoir
01:21:52c'est aussi ça
01:21:53qui montre
01:21:54que la mémoire
01:21:54est omniprésente
01:21:55dans notre société
01:21:56c'est-à-dire
01:21:56on va mobiliser
01:21:58différentes mémoires
01:21:59par exemple
01:22:00Emmanuel Macron
01:22:01dès 2016
01:22:02dès 2016
01:22:03fin 2016
01:22:03dit
01:22:03bon voilà
01:22:04moi je vais faire
01:22:05un travail
01:22:05sur la guerre d'Algérie
01:22:06et en gros
01:22:06je vais régler le problème
01:22:07ce qui est très intéressant
01:22:09c'est que
01:22:09là on a cité
01:22:10évidemment le discours
01:22:11de Chirac
01:22:11qui est plutôt
01:22:12un discours très réussi
01:22:13on pourrait citer
01:22:14un contre-exemple
01:22:15avec Emmanuel Macron
01:22:16c'est la reconnaissance
01:22:17de Maurice Audin
01:22:19en fait
01:22:19Emmanuel Macron
01:22:20a préparé ça
01:22:21avec des historiens
01:22:22justement
01:22:22cette reconnaissance-là
01:22:23et vraiment
01:22:24avec son conseiller politique
01:22:27du moment
01:22:29et avec
01:22:30des historiens
01:22:31et des historiens
01:22:31qui ont vraiment
01:22:32travaillé sur ce sujet
01:22:33et il fait une reconnaissance
01:22:35à la veuve
01:22:35Josette Audin
01:22:36et lui
01:22:37il espère vraiment
01:22:37que ça marque
01:22:38et d'ailleurs
01:22:38il le dit lui-même
01:22:39il dit
01:22:39en gros
01:22:40j'espère faire
01:22:41aussi bien
01:22:42que Jacques Chirac
01:22:43en 95
01:22:44et d'ailleurs
01:22:45il est à voir
01:22:45personnellement sa veuve
01:22:46voilà exactement
01:22:47il y a des images
01:22:48ça ne marche pas
01:22:49ça ne marche pas
01:22:50donc c'est ça
01:22:51qui est intéressant
01:22:51c'est-à-dire qu'on peut
01:22:52avoir une intention politique
01:22:53alors c'est pas un discours
01:22:55évidemment
01:22:55comme l'était
01:22:56celui de Jacques Chirac
01:22:57mais enfin
01:22:58il y avait une intention politique
01:22:59quelque part
01:23:00de fermer
01:23:01et de clore
01:23:02cette question algérienne
01:23:03cette question
01:23:04de la mémoire algérienne
01:23:05et là
01:23:06il se rend compte
01:23:07effectivement
01:23:07que ça ne marche pas
01:23:09comme il aurait voulu
01:23:09et il repart
01:23:11avec le rapport
01:23:12Stora
01:23:12et on en est là
01:23:14parce que c'est très compliqué
01:23:15parce qu'effectivement
01:23:16ça mêle aussi l'Algérie
01:23:17et donc
01:23:18il n'est pas non plus
01:23:19tout seul
01:23:20il n'y a pas
01:23:20que l'état français
01:23:21qui est concerné
01:23:22Audin
01:23:23ça a quand même été
01:23:23une grande histoire
01:23:25François Hollande
01:23:27avait déjà ouvert
01:23:27les archives
01:23:28dans lesquelles
01:23:29on ne trouve rien
01:23:30parce qu'il y a aussi
01:23:31parfois
01:23:32une vérité historique
01:23:34pointue
01:23:35qu'on ne peut pas
01:23:36établir
01:23:37la question
01:23:38de Maurice Audin
01:23:39grosso modo
01:23:40on connaît la vérité
01:23:41on n'a pas retrouvé
01:23:42le corps
01:23:43on n'a jamais pu
01:23:44établir
01:23:45je crois
01:23:46les circonstances
01:23:47tout à fait
01:23:47tout à fait précises
01:23:49donc il y a aussi
01:23:50quelques fois
01:23:51des échecs
01:23:52des historiens
01:23:53mais Hollande
01:23:53François Hollande
01:23:54avait déjà
01:23:55fait un geste
01:23:56à l'égard
01:23:57de la famille
01:23:59Audin
01:23:59il n'avait pas été
01:23:59jusqu'au bout
01:24:00et ça avait été
01:24:01reproché par des historiens
01:24:02à l'Algérie
01:24:03maintenant il faut bien
01:24:04voir aussi
01:24:04que toutes ces choses-là
01:24:06s'est
01:24:07entrevillées
01:24:08dans les luttes politiques
01:24:09Vincent Ducler
01:24:11vraiment en 15 secondes
01:24:12si vous voulez rajouter
01:24:13quelque chose
01:24:13je pense que c'est bien
01:24:15que la France
01:24:16donne l'exemple aussi
01:24:17même si effectivement
01:24:17l'Algérie
01:24:18ne joue absolument pas
01:24:19le jeu
01:24:19que la France
01:24:21donne l'exemple
01:24:21sur ce travail
01:24:22à la fois mémoriel
01:24:23et historique
01:24:24parce que
01:24:25en fait sur l'Algérie
01:24:25il y a un problème
01:24:26je crois qu'il faut rappeler
01:24:28c'est que
01:24:28et même si effectivement
01:24:30j'ai beaucoup
01:24:30d'admiration
01:24:31pour le travail
01:24:31de Benjamin Astora
01:24:32le rapport qui a été
01:24:33remis au président de la République
01:24:34c'est un rapport mémoriel
01:24:35or moi je ne vois pas
01:24:36comment est-ce qu'on peut
01:24:37résoudre une crise mémorielle
01:24:38avec plus de mémoriels
01:24:40et effectivement
01:24:40l'intérêt que
01:24:41de mettre les historiens
01:24:43travailler sur des faits historiques
01:24:45et ensuite
01:24:45effectivement
01:24:46avoir une base
01:24:47pour peut-être avancer
01:24:48de manière plus concrète
01:24:49ce sera le mot de la fin
01:24:51on aurait voulu passer
01:24:52bien plus de temps
01:24:53avec vous trois
01:24:54pour parler
01:24:55de cette question
01:24:56aujourd'hui
01:24:56après ce documentaire
01:24:58ce fameux discours
01:25:00du Veldiv
01:25:00de Jacques Chirac
01:25:02c'était le 16 juillet
01:25:031995
01:25:04il y a 30 ans
01:25:05vos réactions
01:25:06ça sera sur
01:25:07hashtag
01:25:07débattoc
01:25:08bien entendu
01:25:08merci à Félicité Gavalda
01:25:09Yasmine Benahissa
01:25:11qui comme à l'accoutumée
01:25:12m'ont aidé
01:25:12à présenter cette émission
01:25:13et je vous donne rendez-vous
01:25:15pour un prochain débattoc
01:25:16ça sera bien sûr
01:25:17avec son documentaire
01:25:18et son débat
01:25:19à très bientôt
01:25:20Sous-titrage Société Radio-Canada

Recommandations