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Enseignante à l'INSPE de Mont-de-Marsan, élue municipale

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00:01Ici Gascogne, l'invité Céline Piau, enseignante à l'INSPE de Mont-de-Marsan, l'Institut de formation des enseignants.
00:07Elle est avec vous, Renaud Biondimogé, bonjour.
00:09Bonjour Céline Piau, bonjour, merci d'être présente dans ce studio.
00:12Vous êtes membre d'un collectif qui défend l'enseignement de textes de littérature en langue régionale,
00:17dans les écoles, les collèges ou les lycées.
00:18Je précise que vous êtes également élue municipale à Mont-de-Marsan, membre de l'opposition,
00:22mais c'est en temps qu'universitaire, enseignante, chercheuse en histoire à l'Université de Bordeaux
00:26que vous investissez dans ce collectif.
00:30qui comprend des écrivains également, des historiens, des universitaires comme vous,
00:34et qui vient d'écrire à la ministre de l'Éducation nationale, Elisabeth Borne,
00:36pour lui demander d'intégrer la littérature en langue régionale dans les cours de français,
00:41c'est-à-dire qu'on pourrait étudier à l'école des textes en Gascon,
00:44si le gouvernement va dans votre sens.
00:47Pourquoi est-ce si important pour vous ?
00:50Alors, qu'est-ce qui est séparatiste ?
00:53Parce qu'on accuse toujours les défenseurs des langues dites régionales
00:56d'être parfois séparatistes ou fédéralistes,
00:59en tout cas pas républicains.
01:01Qu'est-ce qui est le plus séparatiste ?
01:02Est-ce qu'il n'y a que les petits basques
01:04qui auraient la chance de connaître des littératures en basque,
01:07les Alsaciens qui connaîtraient les littératures en Alsacien,
01:11les Antillais qui connaîtraient des littératures en créole,
01:14alors que notre démarche, au contraire,
01:16c'est que tous les élèves français,
01:18quel que soit l'endroit où ils habitent sur le territoire,
01:21puissent avoir accès à la connaissance,
01:23déjà même à l'existence,
01:24du fait qu'il y ait des littératures dites,
01:27donc en langue dite régionale.
01:28Mais ça veut dire, peut-être que tout le monde ne le sait pas,
01:30il y a donc de la littérature en Gascogne,
01:32suffisamment de textes pour les étudier à l'école ?
01:34Alors pas qu'en Gascogne, dans toutes,
01:35alors nous bien sûr on est ici sur le plateau d'ici Gascogne,
01:38mais il y a des littératures de très grande qualité,
01:41dans toutes les langues dites régionales.
01:44Justement pour l'Occitan,
01:45vous avez mille ans de littérature.
01:47Donc c'est extraordinaire,
01:48c'est une richesse que personne ou pas grand monde ne connaît.
01:51D'ailleurs en 1904, la France a obtenu le prix Nobel de littérature
01:56pour une œuvre en Occitan,
01:58pardon, oui en Occitan, mais en Provençal,
02:00celle de Frédéric Mistral,
02:02et pas grand monde ne le sait.
02:03Et donc nous justement,
02:04on voudrait que les gens aient accès à cette richesse.
02:07Alors vous dites Occitan justement,
02:08Gascogne, Occitan, ici c'est quoi ?
02:10On parle de Gascogne ?
02:11Alors ici dans les Landes, certes c'est le dialecte Gascogne,
02:14qui appartient au grand domaine linguistique Occitan.
02:17Et puis moi je vous disais,
02:18on parlait, je vous disais, mes grands-parents parlaient le patois,
02:22j'entendais le patois.
02:22On m'a dit, il ne faut surtout pas dire le patois, pourquoi ?
02:25Alors en fait, le mot patois a été créé vers le XVIIe siècle,
02:28et c'est une création politique ce mot,
02:31pour dénigrer justement les gens qui parlaient autre chose que le français.
02:36Et le patois veut dire tout simplement la langue des patois.
02:39Donc on est bien là derrière quelque chose pour dire
02:42que c'est la langue des arriérés, des ploucs.
02:43Alors bien sûr, aujourd'hui, il y a un côté un peu affectif,
02:46c'est le parler de mes grands-parents.
02:49Mais on a en fait intégré l'idée que ce n'est pas une langue.
02:53Or justement, nous, nous voulons rendre la dignité aux locuteurs et aux langues.
02:57Et une langue qui a donc ses littératures,
02:59enfin des langues qui ont leur littérature.
03:02Pourquoi défendre la littérature,
03:03plutôt que des cours en langue régionale,
03:05comme des cours en Gascogne ?
03:07Alors c'est clair que le combat est lié,
03:09dans le sens où si on veut des écrivains en langue dite régionale,
03:14il faut que ces gens maîtrisent ces langues.
03:16Et si on veut que les littératures soient lues,
03:18il faut bien que des gens aient appris les langues.
03:21Mais notre combat, c'est de passer vraiment par les littératures
03:25pour le côté richesse, pour le côté partage.
03:28On est un citoyen si on est informé, si on est cultivé.
03:32Et donc cela passe par la connaissance.
03:34Alors certains vont vous dire,
03:36il y a tellement de lacunes parfois en français chez les élèves.
03:38Est-ce que c'est la priorité d'apprendre les langues régionales
03:41plutôt que d'apprendre le français ?
03:43Alors on pourrait dire ça pour tout, à chaque fois.
03:46Mais vous savez, si on reste sur un côté très utilitariste,
03:49on va dire, plus on apprend tôt une langue,
03:52plus on ouvre son oreille musicale,
03:54et plus on développe les compétences justement liées à l'apprentissage des langues.
03:58Je prends juste un exemple avec le Gascon.
04:00En français, nous n'avons pas le son « how », le phonème « how ».
04:04En anglais, oui.
04:05En occitan aussi, c'est le forgeron « how ».
04:07Et donc on a ouvert les enfants à d'autres phonèmes.
04:10Il y a 32, je crois, phonèmes en français, 54 en occitan.
04:13Donc c'est une richesse supplémentaire, il faut l'apprendre, c'est ce que vous défendez.
04:16Alors vous avez écrit à la ministre de l'Éducation nationale, Elisabeth Borne,
04:19est-ce qu'elle vous a répondu ?
04:20Alors pas encore, puisque la lettre date d'une semaine.
04:23Mais en fait, le point de départ, c'est surtout
04:25ce qui est le plus extraordinaire et historique,
04:28c'est notre invitation par Amine Mahalouf,
04:32le secrétaire perpétuel de l'Académie française,
04:34qui a reçu en décembre et au mois de juin notre collectif.
04:39Mais alors ça, c'est un peu étonnant.
04:41On se dit que l'Académie française défend le français,
04:44et on sait que dans l'histoire, défendre le français,
04:46c'était s'opposer aux langues régionales.
04:48Là, effectivement, le numéro un de l'Académie française,
04:50c'est lui, Amine Mahalouf, qui a remplacé Hélène Carrernancos,
04:53il est de votre côté ?
04:55Exactement.
04:56Alors, parfois, l'histoire, vous voyez,
04:59il suffit de pas grand-chose, et puis hop, une étincelle,
05:01et cela fonctionne.
05:03Donc notre collectif date de décembre 2022.
05:06Notre première action a été de lancer une pétition
05:08pour justement l'intégration des littératures en langue régionale
05:11dans les programmes de français.
05:12Et à l'époque, le ministre de l'Éducation nationale
05:14n'était pas d'accord avec vous ?
05:15C'était Papin Diaï.
05:16On lui a écrit, quand on a eu Digny le signataire,
05:18la pétition est toujours en cours.
05:20Elle a atteint aujourd'hui quasiment 20 000
05:21et elle est sur le site mesopinions.com,
05:24on peut toujours la signer.
05:25Et donc, c'est vrai qu'il nous avait dit
05:27« Non, je n'ai pas la main sur les programmes ».
05:29Donc voilà.
05:29Donc on était déçus, on ne savait plus trop quoi faire.
05:32Et finalement, au mois de novembre 2024,
05:34quand Amine Mahalouf,
05:36donc le secrétaire perpétuel de l'Académie française,
05:38a remis à Emmanuel Macron, le président de la République,
05:41le neuvième tome de la langue française de l'Académie,
05:44Emmanuel Macron, aux côtés d'Amine Mahalouf,
05:48a fait un discours qui, pour nous, était terrible,
05:50puisqu'il a renvoyé les langues à des patois,
05:53qui seraient les ferments de la séparation,
05:56de division entre les Français.
05:58Donc on a écrit à Amine Mahalouf
05:59par une lettre ouverte publiée à l'Express,
06:02et notre surprise a été qu'Amine Mahalouf
06:04nous a répondu et nous a reçus.
06:05Et donc vous espérez que ce soutien, évidemment,
06:07engage désormais le gouvernement,
06:09et que François Bayrou, le Premier ministre,
06:10Elisabeth Borne, soit de votre côté.
06:12Un dernier mot, si on veut lire, dès aujourd'hui,
06:14des littératures en Gascon,
06:16qu'est-ce que vous nous conseillez ?
06:17Alors, d'abord, justement, le soutien est très fort,
06:19parce qu'Amine Mahalouf nous a demandé la clé
06:21pour ouvrir, pour rentrer, pour pénétrer les programmes,
06:23c'est de faire un corpus que nous avons publié,
06:26que nous allons publier,
06:26que nous avons intitulé Florilangue,
06:29c'est joli, c'est poétique,
06:31donc ça a été très dur de faire un corpus de 32 textes,
06:34dont toutes les formes littéraires,
06:36toutes les époques, avec des femmes et tout.
06:38Et donc, ça répond à ma question,
06:39à l'intérieur, on trouve effectivement des auteurs.
06:40Et alors, on va trouver Bernard Mansiette pour les Landes,
06:43puisqu'il fallait avoir quelque chose
06:46avec une qualité littéraire très forte,
06:48et le choix était très difficile,
06:50mais on y est arrivé,
06:51et j'espère que les gens pourront avoir accès à Florilangue,
06:54qui sera d'ailleurs traduit en français.
06:55– Qui sera bientôt publié.
06:57– Et qui sera bientôt publié,
06:59nous avons l'éditeur avec une préface d'une académicienne.
07:02– Merci beaucoup Céline Piau d'avoir répondu ce matin à nos questions.
07:04– Merci à vous.
07:04– Merci, bonne journée.

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