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  • il y a 3 jours
8ème édition du Concours d'éloquence de la double licence Droit Philosophie de l'université Lyon 3 Jean Moulin : "Faut-il renoncer aux péchés capitaux ?" - 4 avril 2025 – "Faut-il renoncer à l’avarice ?" par Camille Laure (2ème prix)

Catégorie

📚
Éducation
Transcription
00:00Ne faites pas comme la barre qui perd beaucoup pour ne vouloir rien perdre.
00:05Voici le conseil que donnait Rousseau à Émile,
00:08telle une mise en garde face aux richesses aveuglantes de notre monde
00:11qui, vous appelant en leur lumière, vous plonge dans les ténèbres.
00:15Le rêve de fortune peut alors se transformer en cauchemar,
00:18une situation bien importune où ne nous importe que cet amadeu bien
00:22qui nous exporte loin du bien.
00:25La barre, c'est donc celui qui, en cherchant le plus, perd le tout,
00:28qui, en courant après la fortune, court à sa perte.
00:32La barre, c'est celui qui vit dans l'illusion que ne manquer de rien, c'est posséder tout,
00:37que l'inique richesse est matérielle alors qu'il n'y a pas plus pauvre que l'absence d'immatériel.
00:42L'absence de ces sentiments qui nous habitent, de ces émotions qui nous traversent,
00:45c'est l'absence de vie, tout simplement.
00:48Ne dit-on pas de celui qui n'exprime pas ce qu'il ressent, qu'il est avare de sentiments,
00:52de celui qui ne félicite pas qu'il est avare de compliments ?
00:56L'avarice, c'est être retenu égoïste, égocentrique de ce que l'on veut posséder,
01:00sans le dépenser, comme si notre vie en dépendait.
01:05L'avarice, c'est tout ce que l'on retient pour soi,
01:07à en oublier l'essentiel, à en oublier joie et bonheur, et sens de vie.
01:11Or, une vie sans essence, c'est une vie à l'arrêt, car sans essence, difficile de garder.
01:17L'avarice, c'est la plus grande des pauvretés, car il n'est pas plus pauvre que de vivre
01:23en comptant sans cesse, en comptant les biens que l'on possède,
01:26en comptant ceux qui ne nous appartiennent pas, pas encore.
01:29Comptez à en oublier le reste, ceux qui comptent vraiment,
01:33ceux que l'on pourra leur compter.
01:35Comptez nos souvenirs remplis de vie, ces souvenirs aux reflets dorés,
01:39véritables trésors, véritables ors de nos cœurs,
01:42qui valent bien plus que l'argent, qui se comptent, mais ne se racontent pas.
01:45La retenue de l'avarice lui fait amasser quantité de ce qu'il conserve.
01:50Il est riche de ce qu'il garde, mais pauvre de ce qu'il ne donne pas.
01:54Pauvre de lui qui croit tout avoir, pauvre de lui qui, comme tout avare,
01:58compte son bonheur en billet, alors que l'argent ne fait pas l'or.
02:03Il n'y a pas plus pauvre qu'une richesse retenue, qu'une richesse égoïste,
02:06qu'une richesse protégée, cachée, dérobée au regard des autres,
02:10par cette peur maladive qui nous la dérobe.
02:12L'avarice, c'est la maladie de ceux qui perdent beaucoup par peur de perdre tout,
02:17celle de ceux qui manquent leur vie par peur de la rater.
02:20L'avarice, c'est le vice de l'économe qui, tournant sur lui-même,
02:24tournant pour lui-même, se retrouve prisonnier, vissé en son propre péché.
02:29Car, une fois que l'on a touché à la richesse,
02:31une fois que l'on a goûté à cette ville compagne de vie,
02:34une fois qu'il nous tient impossible de s'en défaire,
02:36pour elle, on ne peut que s'en faire.
02:38Rien n'est plus capital que de l'étendre, à part, peut-être, le péché qui a mis la source.
02:45En partenaire vicieuse, l'avarice nous emprisonne en un désir toxique.
02:49Une fois qu'elle s'offre un peu à nous, on en veut toujours plus.
02:51On ne peut plus s'en passer, on pourrait en mourir et aller de sa perte.
02:55On en crierait presque.
02:56Mon port argent, mon cher ami, on m'a privé de toi.
02:59Et puisque tu m'es enlevé, j'ai perdu mon support, ma consolation, ma joie, tout est fini pour moi.
03:04Et je n'ai plus que faire au monde.
03:05Sans toi, il m'est impossible de le vivre.
03:08Je suis enterrée et mort.
03:10Peut-être est-ce là quelque peu excessif.
03:13Mais, en cette tirade, Arpagon illustre en tout point cette attache maladive,
03:18la folie, le faux lien qui nous lie à cette fortune.
03:21L'avarice ronge chaque jour un peu plus celui qu'elle tient en ses mains,
03:26devenu si petit, si renfermé sur lui, qu'il y ressemblerait presque.
03:30Un rongeur, en tout cas c'est comme ça qu'on l'appelle.
03:33Un rat.
03:34Un rat apeuré, un rat anxieux, qui vit dans la peur perçante d'être volé,
03:39dans l'angoisse permanente de manquer.
03:43Il n'y a pas de vie plus pauvre que celle qui par la richesse vous pousse à ne pas vivre.
03:47La vie de l'avarice est une vie à varier, la vie de l'avarice est une vie invariée,
03:53une vie qui tourne en boucle autour de lui-même, autour de sa richesse.
03:58Alors, à cette vie à varier, à cette vie à varier,
04:01préférons les mille et une variations que nous offre le partage,
04:04les mille et une variations que nous offre le don, le don de soi.
04:08Car ce n'est que par le don, que par son utilisation pour soi,
04:12mais aussi et surtout pour l'autre,
04:13qu'une fortune est une richesse pleine et entière,
04:16une richesse non seulement matérielle, mais aussi immatérielle.
04:20Une fortune qui dort dans un coffre ne vaut pas une fortune qui redore les cœurs.
04:25Une fortune endormie, c'est un amas de richesse silencieux.
04:28Alors, faisons de l'amas silencieux, de l'amas avare, un amas bavard.
04:33Métamorphosons nos cœurs avariés, en cœurs généreux,
04:37nos cœurs malheureux, en cœurs bienheureux,
04:40nos cœurs pauvres d'argent, en cœurs riches d'or.
04:44Faisons contre mauvaise fortune, bon cœur.
04:46Merci.
04:47Merci.
04:48Merci.
04:49Merci.
04:50Merci.

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