Biomécanicien au Stade Français, Sébastien Davidovici, explique ce samedi 14 juin au salon VivaTech, à Paris, comment l’intelligence artificielle est utilisée dans le rugby professionnel.
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00:00Je fais une thèse sur la rupture des croisés antérieures, qui est une blessure qu'on connaît bien,
00:10et plus particulièrement lors du changement de direction, puisque c'est à ce moment-là que cela intervient,
00:15et encore plus précisément lors du changement de direction non planifié.
00:19C'est-à-dire quand vous avez un élément extérieur qui arrive, qui vous surprend un petit peu, vous devez changer de direction rapidement,
00:24et souvent il y a un manque de vigilance qui fait qu'on réagit mal, qu'on se blesse et qu'on se rompt le croisé.
00:28D'accord. Et donc, tu le disais, monter une cellule de recherche au stade français pour essayer de lutter contre les blessures.
00:36Donc tu as proposé ça à Thomas Lombard, le directeur général du stade français. Raconte-nous un peu.
00:42Oui, tout à fait. Donc en fait, ça remonte, on va remonter un peu dans le temps.
00:47Quand j'ai commencé mon Master 2 en biomécanique, on avait un ancien joueur du stade,
00:52un grand joueur qui s'appelait Sergio Parisset, qui avait des blessures très régulières sur un segment jambier,
00:57au niveau du mollet droit, et on n'arrivait pas à comprendre pourquoi.
01:01J'avais la chance d'être mis en relation avec Philippe Rouch, qui nous a accueillis dans son laboratoire,
01:05avec lequel on a fait toute une batterie de tests, de la modélisation 3D,
01:12des tests avec des plateformes de force, ce genre de choses.
01:15Et j'ai vu ça, j'ai trouvé ça passionnant, j'ai dit que je voulais absolument faire ça quand je serais grand.
01:18Et à partir de là, on a proposé avec Pascal Pappé, le directeur du centre de formation,
01:25la création d'un pilier médical pour les jeunes axé sur la recherche et sur ces technos-là.
01:30On a proposé à Thomas, il a trouvé que c'était une idée intéressante, on a commencé comme ça.
01:34On a eu ensuite Julien Delbouy, qui était un de nos joueurs,
01:38qui s'est rompu le croisé deux fois de suite,
01:40puisque malheureusement c'est une blessure qui est assez récidivante.
01:42Et sur la deuxième, le médecin du club nous a dit que ce serait bien qu'on lui fasse faire plus d'examens en laboratoire,
01:50de manière à voir si on pouvait avoir des éléments supplémentaires de décision pour favoriser son deuxième retour au jeu.
01:57Et quand on a fait toute cette batterie de tests de changement en direction dans le labo,
02:01l'idée est née ensuite de dire qu'il faudrait qu'on puisse créer cette même capacité d'analyse in situ dans le stade.
02:08Proposer cette option-là à Thomas, qui l'a trouvé aussi intéressante,
02:12et qui l'a validée, à partir de là on est lancé sur cette cellule recherche.
02:15D'accord, donc concrètement, cette cellule recherche, dans le stade, in situ, elle fonctionne comment ?
02:21Alors pour le moment, cette cellule recherche, elle est basée,
02:25on est dans le stade Jambouin, on a un outil assez incroyable dans le stade Jambouin,
02:28c'est un gymnase au sous-sol avec une partie de terrain synthétique qui fait 20 mètres par 20 mètres,
02:33dans des conditions d'environnement très stables,
02:35qui permettent vraiment de faire de l'analyse du mouvement,
02:38et donc on fait nos tests là-bas.
02:40On a aujourd'hui, en ressources humaines, on est, donc moi, qui n'est doctorant en biomécanique,
02:49on a une ingénieure aussi, qui est doctorante en biomécanique,
02:51qui a été embauchée en tassif pendant 3 ans,
02:54parce qu'avoir une ingénieure avec soi pour faire tourner sur des plateformes,
02:56c'est quand même assez utile.
02:58Et un jeune médecin, une demi-journée par semaine,
03:00donc ça c'est vraiment le cœur de la cellule.
03:01Et on travaille aussi de concert avec le médecin du club sur des projets plus,
03:07des réflexions sur la commotion cérébrale,
03:10et on a aussi d'autres sujets avec la préparation physique,
03:13l'épidémiologie, les valeurs de recherche.
03:16Donc c'est une cellule qui pour le moment est constituée comme ceci,
03:18mais qui est amenée aussi à grandir et à se développer.
03:23Et donc concrètement, vous faites quoi ?
03:25Alors voilà, concrètement, on va réaliser des tests,
03:28des tests bilans, en fait, des tests sur nos joueurs,
03:31à qui on va demander de réaliser une tâche,
03:33qu'on va filmer avec notre caméra d'analyse du mouvement.
03:35Donc ce sont des tests qu'on a essayé de designer
03:38au plus proche des conditions réelles.
03:40En fait, l'idée c'est d'essayer de recréer des conditions
03:41au plus proche des conditions de jeu.
03:44Pour faire simple, ces tests-là, c'est un bilan personnalisé
03:49qui va permettre de savoir si vous avez des facteurs de risque
03:51quand vous pratiquez ce geste-là.
03:53Si on en a identifié, on va essayer de les régler en amont
03:55pour éviter que la personne se blesse.
03:57Et un des points très importants de tout ça,
03:59c'est qu'il y a deux points importants.
04:01Le premier, c'est d'essayer d'être au plus proche des conditions réelles,
04:04comme je l'ai dit, parce que lorsqu'un joueur de rugby
04:06fait un changement de direction à pleine vitesse,
04:08il y a sept fois le poids du corps sur sa jambe.
04:10Donc ça veut dire que lorsqu'on fait des tests un peu plus basiques,
04:13comme on peut voir, qui sont déjà très bien,
04:15en musculation ou en mouvement fonctionnel,
04:17on est très éloigné des contraintes rencontrées dans les situations.
04:21Et donc nous, concrètement, on essaye d'identifier ces facteurs de risque
04:26chez les joueurs par des bilans personnalisés
04:28et quantifier les contraintes qu'ils rencontrent lors de leur pratique
04:33et essayer de mettre les deux en phase,
04:34de manière à ce que le joueur soit en mesure de faire sa pratique
04:36sans se blesser,
04:37et aussi dans le cadre des validations de retour au jour post-blessure.
04:41Et comment vous faites alors ?
04:42Des caméras ?
04:44Voilà, donc au niveau matériel,
04:46c'est là où l'IA prend tout son intérêt.
04:49Jusqu'à présent, ces technologies-là,
04:50je pense que vous avez déjà tous vu
04:52les personnes qui mettent des petits marqueurs réfléchissants
04:54et qui sont filmées par des caméras infrarouges
04:56qui permettent de modéliser en 3D la gestuelle,
04:59très utilisées dans les films,
05:00très utilisées dans les jeux vidéo.
05:02Des jeux comme FIFA ou F7-5 sont caractérisés avec ça.
05:07L'idée, c'est que pour rendre le jeu le plus réaliste possible,
05:11on sert de ces technologies-là
05:12pour faire une mimique de la gestuelle du sujet.
05:15Nous, on va réutiliser cette technologies-là
05:17de manière à pouvoir avoir la plus proche approximation
05:21de la gestuelle du sujet et pouvoir l'étudier.
05:23Donc on a aujourd'hui l'avantage d'avoir des caméras d'analyse du mouvement
05:26qui n'ont plus besoin de marqueurs
05:28et qui doivent être utilisées sur le terrain.
05:30Ce sont des caméras qui fonctionnent
05:33avec justement un algorithme de machine learning
05:35qui a été développé sur 500 000 individus
05:38qui sont passés dans les caméras
05:39auxquelles on a fait fiter un modèle générique.
05:42Et ensuite, quand vous passez des nouveaux joueurs,
05:44vous allez pouvoir avoir un modèle,
05:46une modélisation 3D de la personne
05:48qui est la meilleure approximation de la personne
05:50que vous êtes en train d'étudier.
05:51Et avec ça, on va être en capacité de voir
05:52si cette personne-là a des faiblesses
05:54qui la prédisposent à se blesser.
05:56D'accord.
05:56La population sur laquelle vous travaillez,
05:58c'est le groupe pro ?
06:00Alors, pour le moment, on développe
06:03dans le cadre des thèses nos tests.
06:06Déjà, la finalité, c'est de vraiment réussir
06:08à avoir des tests valides
06:09qui scientifiquement apportent des choses
06:12qui sont prouvées.
06:13On va le développer avec les jeunes joueurs
06:15du centre de formation
06:16et aussi avec les filles de l'équipe première féminine
06:20qui sont des pink roquettes.
06:23À horizon des deux thèses,
06:25l'idée, c'est qu'on ait tous nos tests
06:26qui soient validés, qui fonctionnent.
06:29On va pouvoir ensuite les faire passer
06:30à tous nos joueurs en test baseline,
06:33en pré-saison.
06:35Et on va faire, par la suite,
06:37des études prospectives.
06:38Donc on va voir, on va essayer d'identifier,
06:39c'est permis ces tests-là.
06:40Là, en fait, on avait des signes annonciateurs
06:42qui auraient pu nous indiquer
06:45que le joueur allait vivre une blessure,
06:48la blessure qui lui a eu a postériori.
06:50C'est la manière la plus efficace aujourd'hui
06:52de démontrer l'efficacité d'une épreuve préventive.
06:55On fait des tests, on pose des hypothèses,
06:58on va regarder ensuite, avec les années,
07:00comment ça se passe.
07:01Et une fois que tous ces tests-là sont validés
07:03et avec des vraies sorties scientifiquement significatives,
07:07elles seront déclinées aux joueurs professionnels.
07:08Quand vous notez qu'il y a des risques de blessures,
07:16vous faites quoi pour éviter ces blessures, justement ?
07:19Après, il y a plein de façons de changer les choses.
07:23Déjà, il y a toute une approche
07:26qui consiste à corriger la technique gestuelle.
07:29On sait qu'on a des techniques
07:30qui sont beaucoup plus dangereuses que d'autres.
07:32On a des attitudes lors du changement de direction,
07:34par exemple,
07:34qui met le corps dans une situation beaucoup plus contraignante.
07:41Comme vous imaginez,
07:42avec cette fois le poids du corps sur la jambe,
07:44il suffit que vous ayez un élément,
07:45un tronc qui soit trop incliné,
07:46ça va majorer ces facteurs de risque.
07:48Donc on a déjà une première approche
07:50qui est de donner des conseils techniques
07:52de changement de direction
07:53en discutant avec les coachs
07:55qui peuvent déjà décliner auprès des plus jeunes joueurs
07:57pour un apprentissage de la meilleure des techniques.
08:01Et ensuite, pour tous ceux
08:04pour lesquels on va identifier des facteurs de risque
08:06grâce à nos petits capteurs.
08:10J'ai oublié de vous dire,
08:10il y a des capteurs qui mesurent l'activation musculaire
08:12pour voir si on a des muscles
08:13qui se contractent suffisamment rapidement
08:15pour protéger le joueur.
08:16Si on identifie des choses,
08:17on va proposer des stratégies rééducatives
08:19qui vont améliorer ce genre de choses.
08:20Comment les coachs appréhendent ou vivent
08:26le fait que vous les sollicitiez
08:28pour donner des conseils sur la gestuelle
08:30et sur faire évoluer les choses ?
08:33C'est un point très important.
08:35Là, ce qu'on a décidé pour la cellule recherche,
08:37c'est d'aller vers le meilleur compromis
08:39performance-prévention.
08:41Comme dans beaucoup de domaines de la vie,
08:43les techniques qui potentiellement rapportent le plus
08:44sont aussi les plus risquées.
08:45C'est exactement pareil pour un sprint
08:47ou un changement de direction.
08:48Plus vous allez faire un geste risqué,
08:50plus potentiellement il va être gagnant,
08:51mais plus potentiellement il va aussi être délétère.
08:53Donc nous, l'idée d'embarquer les coachs avec nous,
08:55c'est déjà de les associer en amont
08:56sur le design des tests,
08:58sur les conseils qu'ils pourraient nous donner
09:01et en sortie, leur faire des recommandations
09:03qu'ils prennent ou qu'ils ne prennent pas,
09:04mais juste à titre d'expertise.
09:07Et en essayant de leur dire
09:08qu'on pense que prévention et performance
09:13peuvent être un combat commun.
09:15Un exemple très simple,
09:16dans le changement de direction avec incertitude,
09:17il y a quelque chose qui semble très important,
09:22c'est de réussir à avoir suffisamment d'éléments
09:23à l'avance dans son environnement proche
09:25avec la vision périphérique
09:26pour avoir le temps de se protéger.
09:28Je suis convaincu que les très grands joueurs,
09:30c'est la même capacité à laquelle ils font appel
09:32pour voir des choses avant les autres
09:33et voir le trou que d'autres n'auront pas vu
09:35et prendre le pas sur la défense.
09:37Donc pour moi, on peut embarquer les gens grâce à ça.
09:42Et c'est une très bonne remarque
09:43parce que certains modèles, justement, décrit
09:45les modèles dans le sport,
09:46de la prévention dans le sport,
09:48maintenant décrivent le fait que
09:50si on développe des approches préventives
09:52qui ne sont pas dans l'esprit du club,
09:54qui ne sont pas dans l'esprit du sport
09:55et qu'elles ne sont pas mises en place,
09:58vous n'avez aucune chance qu'elles marchent.
09:59Donc c'est primordial d'aller sur cet aspect-là.
10:01Les coachs, c'est une population difficile à convaincre ?
10:05Pas tous.
10:09Certains, oui.
10:09Il n'y a pas de vérité.
10:11On a des anciens coachs qui sont assez ouverts
10:13à ce genre de choses.
10:14On a des anciens coachs qui ne le sont pas du tout.
10:16On en a des nouveaux qui sont à l'inverse.
10:19Voilà.
10:19Donc non, c'est toujours pareil.
10:21Une façon, si on amène les choses bien,
10:23qu'on échange, il faut savoir rester à sa place.
10:25Et nous, on a...
10:26Alors c'est aussi une des carburations
10:27qui a été décidée au Stade français.
10:28C'est que cette cellule recherche,
10:30elle est un peu en parallèle des autres systèmes.
10:32On est au service des départements
10:33pour pouvoir amener de l'analyse biomécanique,
10:37que ce soit sur l'amélioration du buteur, du lanceur,
10:40sur de la prévention pour les blessures,
10:41sur la prépa physique,
10:42mais sans être non plus trop impliqué
10:45dans le running quotidien de suivi équipe.
10:47Et finalement, cette situation-là
10:49nous permet de travailler un peu plus sereinement dans le temps.
10:51C'est des projets qui demandent du temps.
10:53Et en même temps, comme on fonctionne comme ça,
10:56on ne vient pas débarquer un matin en disant
10:57à un coach, ne fais pas jouer ce joueur
10:59parce qu'il a ça.
11:00Et finalement, on a décidé de créer ça sur un temps long
11:04qui, à mon avis, aide aussi
11:05à ce que le jour où on mette les choses en place,
11:07elles soient plus facilement acceptables.
11:09Et comment les joueurs et les joueuses
11:11vivent ce que vous leur faites subir, entre guillemets ?
11:15Alors, ils sont plutôt assez emballés.
11:18Déjà parce que ça fait appel aux technologies modernes,
11:21parce que c'est les mêmes choses, encore une fois,
11:22quand on joue à des jeux vidéo actuels sur certaines consoles
11:26et qu'on sait que la technologie que nous, on utilise pour les tester,
11:29c'est la même qui a servi aux joueurs
11:33qui vont faire les gestuels du jeu auquel ils adorent jouer.
11:37Ça, c'est un gros facilitateur d'intégration de ce genre d'approche.
11:43Et globalement, il n'y a jamais eu de...
11:46Surtout avec la jeune génération, il n'y a jamais eu de réticence.
11:49Au contraire, toujours à part temps.
11:51Et même eux, on essaye aussi, au-delà des coachs,
11:54de les impliquer, de nous aider, d'échanger avec eux.
11:58Moi, par exemple, pour ce qui était de 10 années,
11:59mon test de changement de direction en incertitude,
12:02je les ai beaucoup sollicités.
12:03Alors, pas ceux que j'ai testés, évidemment, mais d'autres.
12:05Sur, par exemple, quand tu changes de direction en situation offensive,
12:08quel est pour toi le signe visuel dans ton environnement
12:11qui va avoir du déterminisme sur le côté de ton changement de direction ?
12:16Et finalement, ils ont déjà une telle connaissance de leur métier
12:20que c'est un input super qualitatif pour nous.
12:23Et encore une fois, le fait de les faire participer,
12:26ça aide aussi à ce que ce soit mieux intégré par la suite.
12:30Et concrètement, l'intelligence artificielle,
12:31elle sert à quoi dans tout ce processus ?
12:33Et quand est-ce qu'elle intervient ?
12:35Alors, l'intelligence artificielle, c'est un énorme accélérateur de tout ça,
12:38puisque ça permet de traiter de la donnée massive.
12:42Déjà, comme je vous le disais,
12:44nous, le système de caméra d'analyse du mouvement qu'on utilise
12:47est basé sur le fonctionnement du machine learning.
12:50Donc, avec les 500 000 individus qui ont été rentrés en amont,
12:52mais avec une machine learning qui va s'entraîner au fur et à mesure.
12:55Plus vous allez passer des joueurs,
12:56plus l'intelligence artificielle va s'entraîner,
12:58va devenir d'autant plus pertinent pour faire coller aux joueurs
13:00que vous regardez la cinématique qui est le plus fidèle
13:03à ce que lui est en train de faire.
13:04Donc déjà, à ce niveau-là, le principe même fonctionne
13:08sur de l'intelligence artificielle et du machine learning.
13:09Ensuite, pour ce qui est d'exploiter nos résultats
13:13et de les tester, là où avant,
13:16on tâtonnait pendant quelques semaines, mois pour tester une version.
13:18Là, on peut tester plusieurs traitements différents en même temps.
13:22D'ailleurs, je précise qu'on est dans le cadre de la cellule recherche.
13:25On est accompagné par des sponsors du club, notamment Talent,
13:29qui est spécialisé justement aussi en IA,
13:31qui nous a dépêché trois jeunes docteurs spécialisés en IA
13:34qui travaillent avec nous sur nos projets.
13:36On se fait des réunions de travail toutes les 3-4 semaines.
13:38On leur donne des données.
13:39On continue à les travailler tel qu'on avait l'habitude de le faire.
13:42On fait les deux en parallèle.
13:43On revient.
13:44On essaie de voir si les conclusions qu'eux ont grâce à l'IA
13:46et à leurs algorithmes sont les mêmes que les nôtres.
13:49Et aujourd'hui, on est sur ce moment où, justement,
13:52on ne va pas aborder ce qu'ils faisaient avant
13:53pour ce qui se fait non plus pour l'IA.
13:56Mais on est obligé de tester aussi
13:57que donne la validité scientifique
14:00de ce que nous donnent les résultats d'IA
14:02comparé aux méthodes classiques.
14:03Donc, on va aborder les deux en même temps.
14:06Et d'un point de vue plus personnel,
14:08et là, c'est une petite anecdote un peu marrante,
14:11moi, je me sers beaucoup de l'IA générative
14:13avec des applis d'IA générative.
14:16Et par exemple, pour designer ma situation de changement de direction,
14:20j'avais besoin de faire une situation
14:21qui reproduise un peu les conditions réelles de jeu.
14:23Donc, en fait, on a fabriqué un petit laser
14:25où quand vous franchissez le laser,
14:27vous avez un écran géant devant vous
14:29avec un vidéoprojecteur qui diffuse une vidéo
14:30et le franchissement du faisceau laser
14:32va permettre de jouer la scène
14:33et la personne va changer de direction
14:35en regard de cette situation-là.
14:37Et nous, avec nos capteurs d'analyse du mouvement
14:38et d'activation musculaire,
14:40on va voir si ces muscles réagissent suffisamment rapidement
14:41pour le protéger.
14:43Tout ce système-là,
14:44ça coûtait très cher dans le commerce.
14:49Et c'était forcément des choses
14:50qui n'étaient pas designées pour nous.
14:52Et en fait, grâce à l'IA générative,
14:54on a pu développer ce système-là
14:56en demandant à l'IA de nous dire
14:59quelle liste de composants électroniques associés,
15:02comment les assembler,
15:04quel script faire,
15:06alors que je vous assure que je ne suis pas du tout compétent
15:08pour la chose.
15:09Et au final, on a réussi à avoir quelque chose qui marchait.
15:11Donc ça peut être à bien des égards
15:12des outils très puissants à utiliser.
15:15On est très très loin de la kiné et de l'ostéopathie.
15:17Oui et non.
15:19Parce qu'il ne faut pas l'oublier,
15:21il faut garder la pratique manuelle en même temps.
15:24Pour tout vous dire,
15:25moi au début,
15:25quand j'ai épousé aussi le projet d'aller sur la biomécanique,
15:29c'était comment ces techniques d'analyse du mouvement
15:31pourraient m'aider dans mon traitement ostéopathique.
15:34Comment je peux démontrer
15:35que parce que je traite quelqu'un d'ostéopathie en amont,
15:37il va mieux bouger ensuite
15:38et être en capacité à mieux vivre ses contraintes.
15:42Au départ, c'était vraiment un peu cette idée-là.
15:44Finalement, ça partit sur un projet plus vaste
15:48qui embarque l'ensemble du club
15:50dans un projet plus conséquent.
15:53Mais je garde toujours dans un coin de ma tête
15:54le fait que le jour où on sera maîtrisé
15:56ces technologies-là et les utiliser,
15:58je m'en servirai aussi pour cette approche-là
16:00et ça peut être super efficace pour ça aussi.
16:03Est-ce que ça a déjà porté ses fruits
16:05en termes de prévention de blessures ?
16:08Aujourd'hui, sur la carburation,
16:11on a lancé les deux thèses en parallèle,
16:12la mienne et celle de ma collègue Marie,
16:14qui est Marie Lemoyne, qui est ingénieure,
16:15qui elle fait une thèse aussi,
16:17mais sur les facteurs de risque,
16:18sur la blessure des ischios jambiers.
16:20En fait, on a fait les pathologies
16:21qui occasionnaient le plus grand nombre
16:23de jours d'absence.
16:24On s'est dit que c'était la priorité à les traiter.
16:27Et les premiers résultats,
16:30on les aura vraiment,
16:31si on veut être sérieux scientifiquement,
16:33à la fin des deux thèses.
16:35Ce qui n'empêche, comme je vous disais tout à l'heure,
16:36on a déjà des inputs qu'on peut donner
16:38sur des améliorations techniques,
16:39sur ce genre de choses,
16:40sur des choses qu'on aura identifiées
16:41comme des vrais comportements à risque
16:43qu'on peut déjà essayer de changer.
16:45On a des pistes de réflexion intéressantes,
16:47notamment le niais du travail avec talent,
16:50sur des choses qu'on imagine.
16:52On a tout le travail de thèse,
16:54ça consiste aussi à faire
16:55une énorme revue bibliographique
16:57pour savoir qu'est-ce qui existe
16:58dans la littérature.
16:58Donc on peut déjà apporter aussi
17:00ces éléments-là.
17:00et donc voilà,
17:04c'est en train de processer.
17:08La fin des thèses,
17:09c'est prévu pour quand ?
17:10Dans un an et demi.
17:10Dans un an et demi.
17:11Mais l'idée, à terme,
17:12c'est d'avoir une cellule de recherche
17:14pérenne au Stade Français
17:15en capacité à mettre en place
17:16n'importe quelle étude scientifique
17:18avec du matériel dédié,
17:19avec des RH dédiés,
17:21et une capacité à le faire
17:23et mener ça en interne.
17:25On parle de prévention de blessures.
17:28Est-ce que l'IA
17:29et cette cellule de recherche,
17:30elle pourra aussi être une aide
17:32à la performance et comment ?
17:34Oui, tout à fait.
17:35Parce que déjà,
17:35la prévention rend des joueurs
17:37plus disponibles
17:37et plus vos joueurs sont disponibles,
17:39plus vous avez des chances
17:40que l'équipe fonctionne correctement.
17:43Comme je vous ai dit tout à l'heure aussi,
17:45on cherche vraiment cet axe
17:46performance-prévention,
17:47parce que je suis convaincu
17:47que les deux sont liés.
17:50Et donc ça, c'est un premier aspect.
17:52Puis un deuxième aspect
17:53qui est plus lié aussi
17:54à tout ce qui va être complémentaire,
17:55sur la gestion de la charge de travail.
17:57Donc là, c'est là
17:58où on essaye d'agrandir
18:00un peu le cercle.
18:01On commence à travailler
18:02avec un préparateur physique
18:04qui est très versé
18:05sur ces sujets-là,
18:07sur le croisement de la donnée.
18:09On croise toutes les données
18:11et elles sont très nombreuses
18:12dans le sport,
18:14monitoring, GPS,
18:16tests, précisions,
18:17ce genre de choses,
18:18pour essayer de voir,
18:19grâce aux algorithmes de croisement,
18:22quelles données donnent
18:23de performance,
18:24qu'elles autres, au contraire,
18:25donnent de la blessure
18:26et nous aider à nous orienter là-dessus.
18:28Et on est en train de développer ça,
18:29justement,
18:30cet axe-là qui serait très complémentaire
18:31au nôtre,
18:32avec cette idée en plus de dire,
18:34je pense que c'est une cellule recherche
18:35qui aurait en son sein
18:37un médecin,
18:39une ingé,
18:40un kiné,
18:41un préparateur physique.
18:42qu'on commence à avoir un peu
18:43tout le spectre
18:44des intervenants nécessaires
18:46à bien travailler
18:48pour faire de la prévention
18:50et de la performance.
18:52Donc, vous êtes au stade français,
18:54il y a une cellule de recherche,
18:55est-ce qu'il y a d'autres clubs
18:56dans le top 14
18:57ou en pro des deux
18:58qui ont aussi mis en place
19:00une cellule de recherche ?
19:01Tout à fait.
19:01Alors, une cellule de recherche,
19:02qui font de la recherche, oui.
19:03Une cellule de recherche, non.
19:05Mais justement,
19:06c'est assez intéressant.
19:08On a nos amis du racing
19:09qui font aussi pas mal de choses.
19:10Vos amis, vous avez dit.
19:11Voilà.
19:12Mais avec qui on s'entend très bien
19:13et qui font aussi beaucoup de choses
19:14avec les arts et métiers,
19:15mais où les sujets sont un peu dissociés.
19:17Donc, c'est très bien.
19:19Et quelque chose qui est assez intéressant,
19:20c'est que dès qu'il s'agit
19:21de prévention et de santé,
19:23ça prime par-delà
19:24la rivalité club.
19:26Ça, je trouve que c'est un vecteur
19:27de communication super intéressant.
19:29De toute façon,
19:29s'il n'y a pas de rugby
19:30parce qu'il est trop contraignant,
19:31il n'y aura plus de derby.
19:32Et collaborer pour ce genre de choses,
19:34je trouve ça vraiment
19:35une super chose.
19:37Le club de Grenoble aussi,
19:38qui a lancé aussi des sujets.
19:39Il y a Toulouse,
19:40qui, si je ne dis pas de bêtises,
19:41a lancé une thèse,
19:42mais plus sur la mêlée,
19:44ce genre de choses,
19:45plus en versant performance.
19:47Et il y a Perpignan,
19:48qui est aussi assez actif,
19:49avec qui on est en train d'échanger
19:51pour faire une possible collaboration
19:53sur des sujets communs.
19:55Et où là, justement,
19:56l'IA aura tout son rôle à jouer,
19:58puisque l'idée,
19:59ce serait de l'utilisation
20:00de la réalité virtuelle
20:00dans le cadre des retours
20:01aux jeux post-commotion.
20:03On a des réunions de travail
20:04sur ce genre de sujets
20:05qui sont aussi assez intéressants.
20:08Très, très gros sujet,
20:09les retours post-commotion.
20:10Voilà, exactement.
20:11Et donc, juste pour conclure
20:12par rapport à ça,
20:14en revanche,
20:14il me semble, en l'état,
20:16on est les seuls
20:17à avoir une cellule dédiée
20:18en interne.
20:19D'autres que nous font
20:19aussi ce genre de choses.
20:21Mais en cellule interne
20:22dédiée à ça,
20:23pour le moment,
20:24à priori,
20:24on est à ma connaissance
20:25les seuls.
20:27On parle de rugby.
20:28Est-ce qu'il y a
20:29d'autres sports
20:29qui travaillent
20:31de la même manière
20:31que vous ?
20:32Et est-ce que vous êtes
20:32en contact avec eux ?
20:34Alors, on est en contact...
20:35Oui.
20:36Déjà, ce qui est
20:37vachement intéressant,
20:37c'est d'avoir une cellule
20:38qui peut se concentrer
20:39à vraiment la vie
20:41de la recherche
20:41au sein d'un club.
20:42C'est qu'on peut développer
20:43des partenariats
20:43aussi à l'étranger.
20:45Donc, on travaille
20:46en collaboration
20:46avec l'Université de Bergam
20:48en Italie,
20:48avec Elena Pergamini
20:49qui fait un énorme...
20:51un super travail
20:51en biomécanique,
20:52aussi avec l'Université de Turin
20:53avec qui on travaille
20:54sur les EMG,
20:55les signes EMG.
20:57Donc, on est amené
20:58comme ça
20:58à pouvoir rencontrer
20:59des gens,
21:00échanger avec eux.
21:01On a fait une présentation
21:01l'autre jour
21:02avec quelqu'un
21:02qui travaillait au Milan RAC
21:04justement sur les EMG,
21:05qui nous a fait
21:05une présentation passionnante.
21:07Et donc là,
21:07on peut avoir des échanges
21:08qui sont super intéressants.
21:10Et ce qui nous fait dire
21:11qu'on a a priori
21:12pris le bon train,
21:14ou en tout cas,
21:14on est dans le sens
21:15de la marche,
21:16c'est que la ligue du NBA
21:18aux Etats-Unis
21:19a décidé de doter
21:20quatre clubs pilotes
21:21de cellules de biomécanique
21:22pour la prévention
21:23des blessures
21:24en utilisant le même matériel
21:25que nous,
21:26ce qui est aussi très bien
21:27puisque, comme je vous ai dit,
21:28comme l'algorithme
21:28est entraîné,
21:29plus vous avez passé de sujet
21:30et plus ça va donner
21:32de la finesse dans le résultat.
21:35D'avoir des choses comme ça,
21:36c'est super pour nous.
21:37Et normalement,
21:37ils sont censés,
21:38si l'expérience est positive,
21:41généraliser à toute la ligue
21:42de l'NBA l'année prochaine.
21:43Donc, on pense
21:45qu'on est sur la bonne voie.
21:46Vous avez inspiré l'NBA ?
21:48Non, mais je pense
21:51que, blague à part,
21:54quand il y a des coïncidences
21:55comme ça,
21:56c'est qu'on est souvent
21:57en fait aspiré
21:59par des communications communes,
22:01des lectures communes
22:02qui fait qu'à un moment donné,
22:03on se retrouve
22:03sur les mêmes sujets.
22:04C'est juste parce qu'en fait,
22:05on a été lire les mêmes choses
22:06qui nous ont amené
22:07à avoir les mêmes réflexions
22:08et qu'on se retrouve
22:09au même endroit.
22:10au même endroit.
22:11Sous-titrage Société Radio-Canada
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