Une enquête est ouverte après qu'un homme de nationalité tunisienne a été tué samedi soir à Puget-sur-Argens, dans le Var. Une autre personne, turque, a été blessée. Le Parquet national anti-terroriste s'est saisi de l'affaire. Ecoutez le sentiment de Dominique Sopo, président de SOS Racisme.
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00:00Yves Calvi, Aude Vernuccio, RTL Soir.
00:04Il est 18h44, bonsoir Dominique Sopo.
00:07Bonsoir.
00:08Vous présidez SOS Racisme, merci beaucoup de prendre la parole sur RTL.
00:11Une enquête est donc ouverte après qu'un homme de nationalité tunisienne a été tué samedi soir,
00:17appuyé sur Argence dans le Var.
00:18Une autre personne turque a été blessée.
00:20Le parquet national antiterroriste s'est saisi de l'affaire.
00:23C'est une bonne chose ?
00:25Oui, c'est une bonne chose parce que nous sommes face à un homme
00:28qui a revendiqué une volonté de s'en prendre à des immigrés,
00:33notamment, qui a tenu des propos racistes.
00:35Donc il y a une dimension revendicative qui justifie que le parquet antiterroriste soit saisi,
00:41ce qui n'est pas négligeable puisqu'on sait que le parti antiterroriste
00:44a notamment des moyens d'investigation qui sont plus puissants en général qu'un parquet classique,
00:48ce qui permettra d'aller au fond des motivations de cet individu
00:52et éventuellement des connexions qui sont les siennes
00:55et qui pourraient éclairer ce passage à l'acte raciste,
01:00signé, revendiqué à travers ces publications de vidéos sur les réseaux sociaux.
01:05Deux vidéos, en avaient circulé sur les réseaux sociaux, Dominique Sopo,
01:09dont une dans laquelle le suspect appelle clairement à tuer des Maghrébins en France.
01:15C'est très grave.
01:16Oui, c'est très grave, d'autant plus qu'on dit que cette personne était alcoolisée au moment des faits,
01:23mais comme je le rappelle souvent, l'alcool n'a jamais rendu raciste.
01:27Il y a beaucoup d'effets secondaires, mais ça ne rend pas raciste.
01:30Et donc, on est là sur le passage à l'acte et finalement, ça rappelle ce qu'est le racisme.
01:36Le racisme porte toujours en lui une promesse de crime,
01:40parce que le racisme, c'est la haine de l'autre.
01:42Et quand on haï l'autre, qu'on en a peur, que l'on projette sur lui toute une série de fantasmes,
01:48eh bien, à un moment donné, il y aura nécessairement des passages à l'acte.
01:51Et c'est en cela que lorsque l'on lutte contre le racisme,
01:54lorsque l'on lutte contre les propos racistes,
01:57c'est parce qu'on sait très bien ce que cela suscite,
02:00quelle mécanique ça met en dynamique,
02:02et on le voit là, avec un homme qui était un homme manifestement tout à fait paisible,
02:07qui a été abattu de cinq balles,
02:10et un deuxième homme qui a failli être abattu dans cette exécution,
02:16dans cet assassinat, même, on pourrait dire, à caractère raciste.
02:20Ce soir, le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau,
02:23affirme que le racisme est un poison qui tue.
02:25Chaque crime raciste est un crime anti-français.
02:28Comment réagissez-vous à ces propos ?
02:30Et est-ce qu'ils sont à la hauteur de la situation ?
02:32Écoutez, je suis tout à fait d'accord avec les propos de Bruno Retailleau.
02:36En écoutant tout à l'heure en direct ses propos,
02:39je me disais que c'était un peu pour lui une séance de rattrapage,
02:42suite, on va dire, au sous-dimensionnement de sa réaction
02:46à la suite de l'assassinat d'Abou Bakar Sissé
02:49dans la mosquée de la Grande Combe, il y a quelques semaines.
02:52C'était fin avril, effectivement.
02:54C'était fin avril, et je pense qu'en tout cas,
02:59ce crime doit rappeler l'ensemble des responsables politiques
03:03à la responsabilité de leurs paroles.
03:06On voit bien comment dans le débat public, depuis plusieurs mois,
03:09il y a même plusieurs années,
03:10il y a une excitation raciste absolument incroyable
03:13des débats à n'en plus finir sur les immigrés,
03:17on pourrait dire contre les immigrés,
03:19sur la question des musulmans,
03:20de façon quasiment obsessionnelle,
03:22sur la question des enfants d'immigrés.
03:24Il y a quand même quelque chose dont on voit bien
03:27qu'il y a un climat, un terreau,
03:29qui, à un moment donné, va entraîner des passages à l'acte.
03:33Et il faut quand même bien avoir en tête que,
03:36ces derniers mois, ce à quoi on assiste,
03:38c'est un retour des crimes racistes.
03:40Il y a eu le crime de Jamel Benjabala,
03:42à côté de Dunkerque, le 31 août de l'année dernière.
03:46Il y a le crime d'Abou Bakar Sissé,
03:48que nous venons d'évoquer.
03:49Il y a aujourd'hui le crime, ces dernières heures,
03:54de ce Tunisien appugé sur argent.
03:57Il y a un retour des crimes racistes
03:59au milieu d'une augmentation très nette
04:02des faits de racisme dans notre société.
04:04Et cela n'est pas sans rapport
04:06avec la dégradation assez spectaculaire
04:09du débat public que nous avons vu ces dernières années,
04:13sur fond aussi de montée de l'extrême droite
04:16et d'une banalisation de la parole
04:18de cette famille politique
04:20qui a fait que, par exemple, l'an dernier,
04:23pendant la campagne des élections législatives,
04:25les appels à notre permanence juridique nationale
04:28ont doublé au mois de juin
04:31avec des personnes qui nous appelaient en disant
04:33« En fait, voici ce qui m'est arrivé. »
04:35Et très souvent, il y avait la mention
04:37de l'arrivée prochaine de l'extrême droite au pouvoir
04:41et on allait voir ce qu'on allait voir
04:43et on serait autorisé, finalement,
04:45à aller frapper l'autre.
04:47Et donc, je pense qu'on est dans ce climat aujourd'hui en France
04:50et pour les citoyennes et les citoyens,
04:52au-delà de l'appel à la responsabilité
04:55de la parole politique,
04:56je pense qu'il faut collectivement refuser
04:58cette dégradation du débat public
05:00à laquelle nous assistons
05:02et dont nul ne doit ignorer
05:04ou ne doit sous-estimer
05:06le fait qu'un débat public dégradé,
05:09ça veut dire, à un moment donné,
05:10qu'il y a des crimes de sang à la clé
05:12et c'est sans doute ce que nous venons de vivre
05:14à Puget sur Argent, il y a quelques heures.
05:17On le disait, c'est la première fois
05:19que le parquet national antiterroriste
05:21se saisit de l'enquête
05:22sur un tel type de crime,
05:26semble-t-il, par un membre de l'ultra-droite
05:28qui a tué un homme parce que tunisien
05:31sur le sol français.
05:32Vous le disiez, ça veut dire plus de moyens,
05:34le fait que le PNAT soit saisi,
05:36ça veut dire aussi que c'est un symbole.
05:37Bien sûr, c'est un symbole
05:40qui me semble d'ailleurs aussi très utile
05:43parce que ça vient aussi solaniser ce moment.
05:47C'est-à-dire qu'en fait,
05:49nous ne sommes pas sur un fait divers.
05:51Quand on tue une personne à raison de son origine,
05:53ça n'est pas un fait divers.
05:54Comme lorsque l'on tue une femme,
05:57c'est un féminicide si elle est tuée
05:58parce qu'elle est une femme.
06:00Ça vient dire quelque chose de la société
06:02et de l'autorisation
06:03que certains s'attribuent à eux-mêmes
06:06d'un passage à l'acte
06:08qui, dans le cas présent,
06:09est non seulement un passage à l'acte,
06:11mais qui est un passage à l'acte
06:13fièrement revendiqué à travers des vidéos.
06:16C'est ça aussi qui est assez spectaculaire,
06:18si je puis dire,
06:20dans ce crime raciste.
06:23On a parfois des crimes racistes
06:25où la personne dit
06:25« Mais non, vous comprenez,
06:27ce n'est pas parce qu'il était ceci ou cela
06:28que je l'ai tué,
06:29c'était un accident,
06:30c'est quelque chose qui a mal tourné,
06:33mais ce n'est pas ce que je voulais. »
06:34Là, on est manifestement,
06:35si on en croit,
06:36ce qui fuite du contenu de ces vidéos
06:38sur une personne
06:40qui revendique avoir
06:42perpétré cet acte,
06:43qu'il le signe idéologiquement
06:45et qui veut le faire savoir
06:48Urbi et Torbi
06:49en le mettant en ligne
06:51sur ses réseaux sociaux
06:53après avoir perpétré son forfait,
06:56qu'il avait précédé aussi
06:58d'une charge idéologique
06:59en faisant une vidéo raciste
07:00avant justement
07:02de le perpétrer.
07:03Merci Dominique Sopo,
07:04président des SOS Racisme,
07:05d'avoir pris la parole
07:06sur l'antenne d'RTL.
07:07Dans un instant,
07:08nous allons retrouver
07:08Marc-Antoine Lebray
07:09pour le Breaking News.