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  • 26/05/2025

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Transcription
00:00Bienvenue au Cœur du Crime, un podcast issu des archives d'Europe 1.
00:11Savez-vous que plus d'un tiers des crimes et délits commis en France sont traités par la Gendarmerie nationale ?
00:20Je m'appelle Yann Kermadek, je suis commandant de gendarmerie.
00:25Je dirige une section de recherche dont la mission essentielle est une mission de police judiciaire.
00:41L'histoire que je vais vous raconter est une histoire vraie.
00:46Tous les faits sont réels et se sont déroulés en France.
00:50Seuls les noms des personnes et des lieux ont été changés.
00:55Les sirènes de la prison lancent dans la nuit leurs plaintes aiguës et interminables.
01:07De puissants projecteurs balaient la cour en vagues successives.
01:12George Barnett court comme un fou le long des hautes murailles,
01:15s'obligeant à ne pas se retourner, à ne pas entendre les hurlements des sirènes.
01:19Une seule chose l'obsède, trouver cette échelle de corde qu'il attend pour lui offrir la liberté.
01:27Et soudain, il pousse un soupir de soulagement.
01:30À l'endroit prévu, ses doigts fébriles viennent d'entrer en contact avec l'échelle de chanvre.
01:35Oui, elle est bien là, bien réelle.
01:38Une seconde plus tard, il grimpe comme un forcené le long du mur de pierre,
01:42se prodiguant des encouragements entrecoupés de jurons.
01:46Ses mains sont douloureuses, sa respiration haletante, mais qu'importe,
01:51il hisse sa carcasse jusqu'au sommet du mur.
01:56Pendant un instant, il semble planer dans la clarté aveuglante,
02:00puis disparaît et les projecteurs n'éclairent plus qu'une muraille nue.
02:04La nuit vient de l'engloutir.
02:08Son corps plonge vers les broussailles.
02:11Il atterrit dans un fracas de branches brisées
02:13et bientôt se retrouve sur la route qui longe le pénitencier
02:16entre les mains avides de Tommy Metzson.
02:20« Tu les as eus, mon vieux ! » s'exclame Tommy.
02:22« Allez, amène-toi maintenant ! »
02:25Il entraîne un George encore admis hébété vers la voiture qui les attend.
02:29L'évadé se laisse tomber sur la banquette
02:31tandis que Tommy s'installe au volant.
02:34Une seconde plus tard, la voiture démarre en trombe.
02:38Elle rejoint la grande route
02:38tandis que les sirènes continuent de s'égosiller derrière eux.
02:43« Pour être franc, mon vieux Tommy, » dit George,
02:46« je ne pensais pas que tu réussirais à placer
02:48cette bon Dieu d'échelle de cordes. »
02:51Son complice lui jette un regard surpris.
02:53« Dans ces conditions, George,
02:55pourquoi est-ce que tu as risqué le coup ?
02:57T'imagines la tête que tu aurais faite si tu ne l'avais pas trouvée ?
03:00Tu aurais été dans un sacré pétrin. »
03:03« Exact. »
03:04confirme l'évadé.
03:05« Et toi, Tommy,
03:07t'aurais dépensé tout seul notre cher Mago.
03:10Au fait,
03:11t'as pas pioché dedans depuis tout ce temps ? »
03:14« Non, » répond le conducteur.
03:17« Pas un dollar. »
03:18« J'attendais ton retour.
03:19C'est ce que nous avions convenu, non ? »
03:22« Nous avons gagné ce fric ensemble,
03:24nous devons en profiter ensemble. »
03:26« Et puis,
03:26comme les numéros des billets avaient été relevés,
03:28j'aurais été idiot de les remettre sitôt sur le marché. »
03:33« T'as eu raison. »
03:34« Approuve George. »
03:36« Et t'as trouvé une bonne cachette ? »
03:39« Ah ouais. »
03:41« J'ai planqué les cent mille dollars dans le nord de l'État. »
03:44« Explique Tommy. »
03:45« Dans le comté de Northfall,
03:46près d'une petite ferme qui appartient à des gens qui s'appellent Dudley. »
03:50« J'ai enterré le coffre pas loin de leur maison. »
03:53« J'oublierai jamais la nuit où tu t'es fait poisser par les flics, George. »
03:56« Aussitôt que j'ai su que ça s'était gâté pour toi,
03:58j'ai mis le fric dans le coffre de la bagnole
04:00et j'ai roulé comme un dératé pendant deux jours,
04:02sans trop savoir où j'allais. »
04:04« Et puis, je me suis décidé à enterrer le Mago. »
04:07« C'était ce qu'il y avait de plus sage, non ? »
04:10« Ouais, ouais. »
04:11« Approuve George. »
04:12« Mais t'en fais pas, Tommy. »
04:14« Tout va s'arranger maintenant. »
04:18Tommy va répondre quand, soudain,
04:20l'intérieur de la voiture est inondé par la clarté aveuglante de deux phares,
04:24tandis que des lueurs bleues et oranges jaillissent de tous côtés.
04:27« Les flics ! » hurle Tommy en écrasant l'accélérateur.
04:30« Ils nous ont pris en chasse ! »
04:32George se retourne.
04:34Les gyrophares de la voiture qui l'étalonnent
04:36la font ressembler à un sapin de Noël.
04:38Les sirènes se sont mises à gîmes
04:40étrangement semblables à celles du pénitencier.
04:42L'évadé sent une rage froide s'emparer de lui.
04:46« Les salauds ! Ils m'auront pas !
04:48Passe-moi ton flingue ! »
04:50La main de Tommy plonge sous sa veste
04:52et en ressort avec un revolver.
04:55George saisit l'arme
04:56et enjambe le dossier pour gagner le siège arrière.
04:59D'un coup de crosse,
05:00il brise la lunette et,
05:01sans hésiter, fait feu sur les poursuivants.
05:05Mais la voiture qui les traque
05:06ne ralentit pas d'un pouce pour autant.
05:08Les deux véhicules roulent maintenant
05:10à une anneur folle sur la grande route.
05:12George tire de nouveau visant les pneus.
05:14Les policiers ripostent.
05:15On entend l'impact de leur balle
05:17dans la paroi du coffre.
05:18Les chocs font vibrer la carrosserie.
05:21« Appuie, Tommy ! Accélère, bon sang ! »
05:23« Mais c'est bien ce que je fais, George ! »
05:25« Mais pas moyen d'aller plus vite ! »
05:28Les policiers gagnent du terrain,
05:29offrant en même temps une meilleure cible.
05:31George ajuste posément son tir
05:33et presse deux fois la détente.
05:37La voiture de police se met soudain à zizagué,
05:39agité de secousses effroyables,
05:41comme si elle était prise dans la tempête.
05:43L'œil luisant d'espoir,
05:45l'évadé observe les policiers
05:47qui, en proie à la panique,
05:48s'agitent dans leur véhicule frappé à mort.
05:51Les phares balaient la route
05:52d'un bord à l'autre,
05:53et soudain, la voiture percute un mur.
05:56Une immense lueur jaune et rouge
05:58jaillit instantanément,
06:00illuminant d'un éclair sinistre
06:02les arbres et les buissons avoisinants.
06:05Sous l'effet de la vitesse acquise,
06:06le brasier semble se projeter en avant,
06:09puis le véhicule franchit un talus
06:11et bascule dans le fossé.
06:13« On les a eus ! » exulte George.
06:15« On les a eus, les salauds ! »
06:18Il se tourne vers Tommy
06:19pour lui faire partager sa joie,
06:21mais les mots meurent sur ses lèvres.
06:24Son compagnon est plié sur le volant
06:26qu'il manie avec difficulté.
06:29Sa tête dodeline,
06:31comme s'il sombrait dans les douceurs
06:33d'un rêve langoureux.
06:35Un filet de sang descend de son front
06:38et coule sur sa joue.
06:40« Tommy ! Tommy ! »
06:43George lâche son revolver
06:45et en jambe en sens inverse,
06:46le siège au moment même
06:47où les mains de son compagnon
06:48commencent à lâcher le volant,
06:49le corps frêle de Tommy
06:51s'affaisse lentement sur le côté,
06:53coincé contre la portière.
06:54La voiture commence à errer
06:56d'un bord à l'autre de la route.
06:58George parvient in extremis
06:59à saisir le volant,
07:01d'une main d'abord,
07:02puis des deux,
07:02s'appuyant au corps inanimé
07:03de son compagnon.
07:05Heureusement,
07:06le pied de Tommy
07:07a abandonné l'accélérateur.
07:09Pendant quelque temps,
07:10le véhicule roule
07:11avec l'élan qu'il a reçu,
07:13puis finit par s'immobiliser
07:15sur le bas-côté.
07:16Les voitures passent
07:19et nul ne s'intéresse à eux.
07:21Tout le monde a les yeux
07:22fixés sur la gerbe de feu
07:24qui continue d'illuminer la nuit.
07:28George examine son complice.
07:31Pas besoin d'être médecin
07:32pour comprendre
07:33que Tommy a eu son compte.
07:35Déjà,
07:36l'éclat de ses yeux
07:37s'éternit.
07:39Un sang noir coule à présent
07:41par saccade
07:42de sa bouche grande ouverte.
07:45George descend de voiture,
07:47pousse le corps,
07:48le fait tomber
07:49sur le tapis de sol
07:50face à la place du passager
07:52et s'installe au volant.
07:54Il démarre,
07:55roule à vitesse modérée
07:56et emprunte
07:57une petite route
07:58qu'il vient d'apercevoir
07:59sur la droite.
08:01Celle-ci s'enfonce
08:02dans une forêt.
08:03Au bout de quelques minutes,
08:05George immobilise
08:06le véhicule,
08:07éteint les phares
08:08et attend.
08:09Il essaie de recouvrir
08:12tout son sang-froid
08:13en scrutant les ténèbres,
08:15l'oreille tendue.
08:18Quelques grillons
08:19chantent paisiblement
08:20dans les sous-bois.
08:22Tout est calme.
08:25Son regard se pose
08:26une dernière fois
08:26sur Tommy.
08:28Dommage de mourir ainsi
08:30au moment où on va enfin
08:32pouvoir profiter
08:33de son fric.
08:35Ah,
08:36tant pis pour lui.
08:38Au fond de la voiture,
08:40George découvre
08:41le costume
08:42que son associé
08:42avait préparé pour lui.
08:45Il se change
08:45à la hâte,
08:46jetant rageusement
08:47dans la nuit
08:48ses treillis de prisonniers,
08:50puis rafle l'argent
08:51que Tommy avait
08:52dans ses poches
08:53et descend du véhicule.
08:56Pas la peine
08:57de se servir
08:57de la voiture.
08:59Le numéro
09:00a dû être noté
09:00par les flics.
09:02Mieux vaut
09:02voyager à pied.
09:05Il part alors
09:06d'un pas rapide
09:07et s'enfonce
09:08dans l'épaisseur
09:09de la forêt.
09:11Quatre mots
09:12reviennent sans cesse
09:13à son esprit
09:14comme un leitmotiv.
09:16La ferme
09:17des Dudley.
09:19La ferme
09:20des Dudley.
09:20Assis à son bureau,
09:27le lieutenant Piazza
09:28se gratte la tête
09:30d'un air pensif.
09:32Le sergent
09:33Bruce
09:34l'observe.
09:36Le soleil
09:37inonde
09:37le bureau
09:38du poste
09:38de police.
09:41Il semble
09:42qu'il est
09:42complètement disparu,
09:45dit Piazza.
09:45C'est un grand
09:48homme maigre
09:49au geste cassant
09:50au regard
09:50d'oiseau de proie.
09:52Il a
09:52la manie
09:53de vivre
09:54pratiquement
09:54la pipe au bec
09:55et il la conserve
09:57même quand il parle,
09:58ce qui oblige
09:59ses auditeurs
09:59à lui accorder
10:00une grande attention
10:01pour saisir
10:02toutes ses paroles.
10:05Heureusement,
10:06depuis qu'il fait
10:06équipe avec lui,
10:08le sergent
10:08Bruce
10:09s'est parfaitement
10:10entraîné
10:10à cet exercice
10:11de décryptage.
10:12« À mon avis,
10:14il se plante
10:15quelque part
10:15en attendant
10:16que les choses
10:16s'arrangent,
10:17dit-il.
10:18Ce George
10:19Barnett
10:20est un pro,
10:21il connaît
10:22la chanson.
10:24Peut-être,
10:25laisse tomber
10:26Piazza,
10:27peut-être,
10:29mais je serais
10:30plutôt enclin
10:30à penser
10:31qu'il est parti
10:31à la recherche
10:32de son magot.
10:34On n'a jamais
10:35trouvé trace
10:35de ce butin
10:36qu'il avait raflé
10:37dans une banque
10:37avec son copain
10:38Tommy.
10:40Celui-ci
10:40avait dû le planquer
10:41en attendant
10:42que George
10:42sortent de prison.
10:44Maintenant
10:44qu'il est libre,
10:46Barnett
10:46va sûrement
10:47tenter
10:47de le récupérer.
10:49Nous n'avons
10:49plus qu'à
10:50attendre
10:50maintenant.
10:52« Attendre ? »
10:54soupire Bruce.
10:56Le lieutenant
10:57sourit.
10:58« Eh oui,
10:59mon vieux,
11:00quand j'étais
11:00plus jeune,
11:01j'étais comme vous,
11:02tout feu,
11:03tout flamme.
11:04Et puis,
11:05j'ai appris
11:06avec le temps
11:07que le métier
11:07de flic
11:08ressemble
11:08à celui
11:09du chasseur
11:10qui doit
11:10surtout
11:11savoir choisir
11:12l'emplacement
11:13où il posera
11:15l'appât.
11:17Et l'appât,
11:19dit Bruce,
11:20c'est le fric.
11:23Exactement,
11:24confirme Piazza.
11:27Il fait pivoter
11:28son rocking chair
11:29et se retrouve
11:29face au soleil.
11:32Eh oui,
11:34dit-il
11:34en fermant les yeux,
11:36c'est le fric.
11:37« Et le jour
11:38n'est pas loin,
11:39je vous le garantis,
11:40où ces billets
11:41de banque
11:41vont réapparaître.
11:43Alors,
11:44notre gibier
11:45viendra
11:45tranquillement
11:47se livrer
11:47à nous. »
11:50Le lieutenant
11:51Piazza
11:51ne fait-il pas
11:52preuve
11:52d'un optimisme
11:54exagéré ?
11:55Georges est
11:56un malfaiteur
11:57habile
11:58et rusé
11:58qui a plus
11:59d'un tour
12:00dans son sac.
12:02Et les gens
12:02de la ferme
12:03Dudley
12:03ferait bien
12:05de se méfier
12:06de sa prochaine visite.
12:16George Barnett
12:18s'évade
12:19de prison
12:19et s'enfuit
12:20en compagnie
12:21de Tommy,
12:22son vieux complice.
12:24Celui-ci
12:25a caché
12:26le magot
12:27constitué
12:27par le fruit
12:28d'un ancien
12:29hold-up
12:30dont ils devaient
12:31profiter ensemble.
12:32Mais au cours
12:33de la poursuite,
12:35Tommy est tué.
12:37Georges,
12:37à qui son compagnon
12:38a révélé
12:39l'endroit
12:39où est caché
12:40l'argent,
12:41se met alors
12:42en route
12:42pour le récupérer.
12:44Mais le lieutenant
12:45Piazza
12:45et le sergent
12:46Bruce
12:47sont également
12:48sur la piste.
12:51Qui
12:51arrivera
12:52le premier
12:52dans cette
12:54course au dollar ?
12:58Georges
12:58chemine
12:59après le coucher
13:00du soleil
13:00à travers les bois
13:01et le long
13:02des routes
13:02désertes
13:03en direction
13:04du comté
13:05de Northfall.
13:06Au bout
13:07de deux jours,
13:08estimant qu'il
13:09s'est suffisamment
13:10éloigné
13:11de la zone
13:11dangereuse,
13:13il décide
13:13de retrouver
13:14la société
13:14de ses semblables
13:15et entre
13:16dans un petit
13:17restaurant
13:17au bord
13:18d'une route
13:18désolée.
13:19Là,
13:20il s'offre
13:20un bon repas
13:21avec une partie
13:22de l'argent
13:23trouvé dans
13:23les poches
13:24de ce pauvre Tommy.
13:26C'est loin
13:27d'ici,
13:27le comté
13:27de Northfall ?
13:29demande-t-il
13:30à la servante
13:30dont la principale
13:32occupation
13:33est de se faire
13:33les ongles,
13:35sans doute
13:35dans l'attente
13:36d'un prince
13:37charmant
13:38de passage.
13:39Non,
13:40pas tellement.
13:41Une cinquantaine
13:42de kilomètres
13:43à l'est ?
13:44lui répond-elle
13:45sans relever les yeux.
13:47Mais c'est vraiment
13:47un pays de bouseux
13:48là-bas, hein ?
13:49Pire qu'ici,
13:50et c'est pas peu dire.
13:52Tant mieux,
13:53répond Georges.
13:55Moi,
13:55j'aime la nature
13:56et la solitude.
14:00Il repart
14:00et s'achète
14:02en chemin
14:02du savon à barbe,
14:04un rasoir
14:04et divers accessoires
14:06de toilette.
14:07Ainsi donc,
14:09il ne va pas tarder
14:11à toucher au but.
14:14La serveuse
14:15n'avait pas tort.
14:17Le comté
14:17de Northfall
14:18semble vivre
14:18en marge
14:19de la civilisation
14:20et du monde moderne.
14:22Tout paraît
14:22vieux,
14:23suranné,
14:24presque fantomatique,
14:26qu'il s'agisse
14:26des fermes
14:27ou des villages.
14:29Tant mieux.
14:30Ici,
14:31les nouvelles
14:32ne doivent pas
14:33aller vite
14:33et il est bien
14:34possible
14:34qu'il n'ait même
14:35pas entendu
14:36parler de son évasion
14:37du pénitencier.
14:40Au bout
14:40de deux mois
14:41de périples,
14:42de marches
14:43dans la campagne
14:44ou le long
14:44des routes,
14:45de travaux épuisants,
14:47généralement mal payés,
14:49Georges Barnett
14:50obtient enfin
14:51la réponse
14:51d'un vieux paysan
14:52au visage raviné.
14:54La ferme
14:55des Dudley,
14:55quand il met
14:56tout droit
14:57sur cette route,
14:57mon gars,
14:58vous la trouverez
14:58facilement.
15:01Enfin,
15:02songe
15:03l'évader.
15:05Enfin,
15:06me voici
15:07au bout
15:07de mes peines.
15:09Enfin,
15:10presque.
15:11Reste
15:12à récupérer
15:12le fric.
15:15Il s'avance
15:16vers la petite
15:17ferme isolée.
15:19Un homme
15:19l'a vu
15:20et l'observe,
15:21les mains
15:22sur les hanches.
15:23c'est un
15:24vigoureux
15:24gaillard
15:25vêtu
15:25d'une combinaison
15:26usée
15:27et d'un
15:28vieux
15:28chapeau
15:28de pêcheur
15:29qui le protège
15:30du soleil.
15:32Salut !
15:33dit George
15:34en le rejoignant.
15:35Je m'appelle
15:36George
15:36Stuart.
15:38Salut !
15:40répond l'autre
15:40avec méfiance.
15:42Moi,
15:42c'est
15:42Marc
15:43Dudley.
15:45Qu'est-ce qu'il y a
15:45pour votre service ?
15:47L'évader
15:48passe sa main
15:49sur son front
15:49en sueur.
15:50Le soleil
15:51tape dur
15:51en cet après-midi
15:53d'été.
15:54On m'a dit
15:55en ville
15:55que vous auriez
15:56peut-être besoin
15:57d'un ouvrier.
15:59Le fermier
16:00fixe
16:01sur cet étranger
16:02un regard
16:03inquisitaire.
16:06Possible,
16:06mon gars,
16:08mais j'ai besoin
16:09d'un homme
16:09robuste.
16:11Je ne suis pas
16:11une mauviette,
16:13assure George.
16:14J'ai déjà
16:15travaillé dans une ferme,
16:16vous savez,
16:16et le boulot
16:16ne me fait pas peur.
16:17D'accord
16:20qu'on s'en marque
16:22Dudley,
16:23si ça vous dit.
16:25Mais je vous préviens
16:26que c'est dur
16:26et mal payé.
16:29George
16:30sourit.
16:31Oh,
16:31je ne suis pas
16:32exigeant.
16:34Du moment
16:34que j'ai de quoi
16:35manger,
16:35M. Dudley,
16:36ça suffit
16:37pour faire
16:37mon bonheur.
16:40C'est ainsi
16:40que George Barnett
16:42devient
16:43ouvrier
16:43agricole.
16:44Les Dudley
16:47viennent d'acheter
16:47une parcelle
16:48jouxtant
16:49leur ferme
16:49et l'évader
16:50à pour tâche
16:51de la débarrasser
16:52de toute la pierraille
16:53qui l'encombre.
16:55Il s'acquitte
16:56consciencieusement
16:57de ce travail
16:58ardu,
16:59sans rate excessive,
17:00tout en s'efforçant
17:01de scruter
17:02chaque mètre
17:03carré de terrain.
17:05Sans cesse,
17:06il se demande
17:07s'il n'est pas
17:08en train
17:08de fouler au pied
17:09son trésor.
17:11Tous les soirs,
17:12George prend une bêche
17:14et une pioche
17:14dans le hangar
17:15et va creuser
17:16dans le bois
17:17qui s'étend
17:17jusqu'à la route.
17:19C'est par cette
17:20unique route
17:21que Tommy a pu arriver.
17:22Sans aucun doute,
17:23il a dû se hâter
17:24de creuser le trou
17:25pour ne pas se faire repérer
17:26et il ne s'est donc
17:27pas éloigné
17:28beaucoup de son véhicule.
17:29Il a sûrement
17:30planqué le magot
17:31à un endroit repérable,
17:32une grosse pierre
17:34ou un arbre
17:35bien particulier
17:36par exemple.
17:37Le fric
17:38était sans doute
17:39dans le petit coffre
17:40métallique
17:41qu'ils utilisaient
17:42pour ranger
17:42leurs butins.
17:44Hélas,
17:47cette recherche
17:48ne donne rien
17:48et le premier dimanche
17:50où il reçoit sa paye,
17:52George,
17:52pour se remonter le moral,
17:54se rend en ville.
17:56Ce n'est guère
17:56qu'une petite bourgade
17:58avec un supermarché,
17:59un cinéma
18:00et deux cafés.
18:02George entre
18:02dans celui
18:03qui lui semble
18:04le moins minable,
18:05s'installe au comptoir
18:06et commande
18:08de la bière.
18:09Oui,
18:09bien sûr,
18:09il aurait préféré
18:10boire un bon scotch,
18:11mais le salaire
18:12que lui attribue
18:13de lait
18:14ne lui permet pas
18:15de telle extravagance.
18:18Il déguste lentement
18:19le breuvage,
18:20le regard perdu
18:21dans la fumée
18:22de sa cigarette.
18:25Où diable
18:26ce satané Tommy
18:27a-t-il bien pu planquer
18:29le magot ?
18:31Il faut continuer
18:33de chercher
18:34inlassablement.
18:37Et c'est ce qu'il fait,
18:39méthodiquement,
18:40opiniâtrement,
18:42ça dure
18:42plusieurs semaines,
18:45toujours rien.
18:47George commence
18:48à désespérer
18:49quand un soir,
18:51un soir,
18:53après le repas,
18:55alors qu'il vient
18:55de se lever de table,
18:56il aperçoit soudain
18:59le magot.
19:01Il est là,
19:03entre les mains
19:04du fermier.
19:07Il vient de voir
19:07passer Dudley,
19:09le fameux coffre
19:11sous le bras.
19:14Bon sang,
19:15pense George.
19:18C'est lui
19:18qui l'a récupéré.
19:21Le métal du coffre
19:22est bien propre,
19:23signe qu'il l'a nettoyé.
19:26Si ça se trouve,
19:27il l'a récupéré
19:28bien avant mon arrivée.
19:31Dire que j'ai
19:31trimé comme un forçat
19:33et retourné
19:33une bonne partie
19:34du sol de la forêt
19:35pendant que ce type
19:36dépensait mon fric.
19:39Il doit le planquer
19:40quelque part dans la maison,
19:41mais ça,
19:41ça ne pose pas de problème.
19:44Au fond,
19:45à bien y réfléchir,
19:48c'est une véritable
19:49providence.
19:52Sans ce Dudley,
19:54peut-être,
19:54n'aurai-je jamais
19:55réussi à retrouver
19:56le magot.
19:56le fermier
19:59me rend
19:59un sacré service,
20:01finalement.
20:04Pour la première fois
20:05depuis des semaines,
20:07George gagne
20:07directement sa chambre
20:09après le souper
20:10et marche
20:11fiévreusement
20:12de long en large
20:13en guettant
20:13les bruits
20:14de la maison.
20:16Il faut attendre
20:16pour agir
20:17que toute la famille
20:17soit endormie,
20:19ce qui ne saurait tarder.
20:21Bientôt,
20:22en effet,
20:23la ferme
20:23est silencieuse.
20:24George descend
20:26alors l'escalier
20:27à pas de loup
20:28et entreprend
20:29de fouiller la maison.
20:31Naturellement,
20:32il doit se contenter
20:33de recherches
20:33superficielles
20:35qui ne laisseront
20:35aucune trace.
20:36Ce n'est que
20:37le prochain dimanche,
20:38quand tout le monde
20:39sera parti en ville,
20:40qu'il pourra
20:41forcer tranquillement
20:43serrures et tiroirs.
20:45comme il le craignait,
20:48la fouille
20:48s'avère infructueuse.
20:50Bah,
20:51tant pis.
20:52Attendons dimanche
20:53et si dimanche soir
20:55il n'a rien trouvé,
20:57alors il brandira
20:58son revolver
20:59sous le nez
20:59de Dudley
21:00et l'obligera
21:01à lui dire
21:01où elle frique.
21:04Ensuite,
21:05ensuite,
21:06il s'enfuira
21:07tranquillement
21:07à bord de sa voiture.
21:10Simple comme bonjour.
21:11Le lendemain soir,
21:14pourtant,
21:15Georges fouille
21:16de nouveau la maison.
21:18Il n'y tient plus.
21:19L'idée
21:19de cette masse
21:20de billets verts
21:21toute proche
21:21l'excite
21:22au plus haut point.
21:24Mais là encore,
21:26la recherche
21:27est infructueuse.
21:29Où diable
21:30ce fermier
21:31a-t-il pu
21:32planquer le magot ?
21:35Pendant deux soirs
21:36encore,
21:37il fouille la maison
21:38de plus en plus
21:39nerveusement.
21:41Et le samedi matin,
21:41sa patience
21:42est soudain à bout.
21:43Pourquoi attendre encore
21:45alors qu'il a un flingue
21:46et sait s'en servir ?
21:49À quoi bon
21:49tergiverser ?
21:52En rentrant des champs,
21:53sa décision est prise.
21:55Plus question
21:56d'attendre dimanche.
21:57Ce soir,
21:57après le repas,
21:58il fera cracher
21:59le morceau
21:59à Dudley.
22:02Quand il ouvre
22:03la porte de la cuisine,
22:04la première chose
22:05qu'il voit
22:06est le coffre
22:08trônant sur la table
22:09le couvercle levé.
22:11on aperçoit
22:12à l'intérieur
22:13la masse verte
22:15des billets de banque.
22:18Mais ce qu'il découvre
22:20aussi,
22:21c'est la présence
22:22de deux policiers
22:23qui braquent
22:24leur revolver
22:25sur lui.
22:26« Salut, Georges ! »
22:31dit le lieutenant Piazza.
22:32« Je m'attendais
22:34à te cueillir
22:35d'un moment à l'autre.
22:37C'est gentil
22:38d'être venu
22:38spontanément
22:39te livrer à la police. »
22:43L'évadé
22:43sent sa gorge
22:44se serrer,
22:46ses yeux
22:46fixent
22:47les billets
22:48si proches
22:49et si lointains
22:50à la fois,
22:52puis il se tourne
22:52vers le lieutenant.
22:53« Comment avez-vous
22:56fait pour me retrouver ? »
22:59« C'est simple,
23:00Georges ! »
23:02répond le policier
23:03en tirant
23:03tranquillement
23:04sur sa pipe.
23:06« C'est tout simple.
23:09La charrue
23:09de M. Dudley
23:10a déterré
23:11le coffre
23:11il y a quelques mois.
23:13Bien sûr,
23:14il ne savait pas
23:14qu'il s'agissait
23:15du produit
23:16d'un vol.
23:17De toute façon,
23:18il n'a pris
23:18que quelques dollars.
23:19malheureusement
23:21pour toi,
23:22ces quelques dollars
23:23ont servi
23:24à te payer
23:25ton salaire.
23:27Et c'est toi,
23:28en dépensant
23:29ces billets
23:30dans un bar
23:30de la ville,
23:32qui a causé
23:32ta propre perte.
23:35Les numéros
23:35des billets
23:36étaient notés
23:37comme tu peux
23:37t'en douter,
23:38Georges.
23:40Le shérif
23:40du coin
23:41nous a alertés
23:41et on est venus
23:42tranquillement
23:43te cueillir.
23:45Au fond,
23:45tu vois,
23:47il n'y a vraiment
23:47pas de justice.
23:49« Pourquoi dites-vous
23:51ça ? »
23:53articule péniblement
23:54l'évadé.
23:56Piazza
23:57ôte sa pipe
23:58de ses lèvres.
24:01« Je dis ça
24:02parce que
24:03pour une fois
24:04dans ta vie
24:05que tu faisais
24:06un travail honnête,
24:08c'est justement
24:09ce travail
24:09qui t'a perdu.
24:12T'auras tout le temps
24:13de méditer
24:14sur cette histoire
24:14pendant les longues
24:16années que tu vas
24:16maintenant passer
24:17en prison.
24:19Mon pauvre Georges ! »
24:26Vous venez d'écouter
24:28Au cœur du crime,
24:29un podcast
24:30issu des archives
24:31d'Europe 1.
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24:33Julien Tarot.
24:34Production
24:35Romy Azoulay.
24:37Patrimoine sonore
24:38Sylvaine Denis,
24:39Laetitia Casanova
24:40et Antoine Reclus.
24:42Promotion
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