L'écoute, l'entraide et la sociabilité pour apaiser et redonner des repaires. C'est la formule magique du "Lieu de répit", porté par l'association Just https://just.earth/. Dans un bâtiment du centre de Marseille, cet espace non médicalisé accueille des personnes en crise psychotique ou en post-crise, faisant d'eux des colocataires temporaires entourés d'intervenants en santé mentale. Ce projet expérimental, unique en France, permet d'éviter à certains patients des hospitalisations récurrentes en psychiatrie, parfois très mal vécues.
Un reportage d'Adrien Serrière, journaliste à France Inter
00:00Je pense pas que je serais la personne que je suis aujourd'hui si j'étais pas passée par le réseau.
00:06En HP, en fin de compte, c'est vous ouvrez le matin, vous donnez les médicaments, vous réveillez, vous mangez, vous réveillez, voilà.
00:13Finito.
00:14Bravo.
00:16Quand on a une maladie mentale et qu'on vit une crise aiguë, il n'y a pas beaucoup d'autres solutions que l'hospitalisation.
00:26Mais à Marseille, il existe une alternative à l'hôpital psychiatrique, le lieu de répit, et c'est le seul de ce type en France.
00:36Ici, ça coupe un petit peu moins de la vie ordinaire que l'hôpital, dans le sens où les personnes perdent pas leur autonomie,
00:44puisqu'ici elles doivent participer aux courses, aux ménages, cuisiner, faire le repas, planifier leurs semaines, être un soutien pour d'autres personnes.
00:53Et donc, c'est un outil mobilisable qui évite de tout couper et de se sortir complètement de la vie quotidienne et du reste de la ville aussi,
01:03parce qu'en fait, c'est un lieu ouvert, le lieu de répit, où elles décident d'entrer et sortir comme elles veulent.
01:08Voilà.
01:09Donc, je dirais qu'on est un outil de plus qui est un peu plus doux.
01:14Je pense qu'il y a des gens à qui ça va très bien, les hôpitalisations en HP, mais moi, non.
01:23Personnellement, c'est trop lourd pour moi et je suis isolée et je fais rien.
01:27Et puis, je suis shootée aux médocs et puis en plus, les médocs qui donnent, c'est une dinguerie.
01:33Vraiment, c'est très fort ce qu'ils donnent.
01:35Donc, ouais, c'est moi, c'est un truc qui me convient.
01:40Ça faisait genre peut-être deux ans ou trois ans que je faisais beaucoup d'hospitalisations.
01:45Parce que...
01:46Parce que, parce que, parce que je pense que quand j'étais gamine, j'ai vécu trop de choses, trop denses.
01:54Et c'est ressorti à mon adolescence.
01:56Je me détestais, mais à un point, c'était horrible.
01:59Du coup, j'avais des comportements autodestructeurs, etc.
02:03Je mangeais pas, je me scarifiais et tout, le tralala.
02:07Enfin, genre, c'était une dinguerie.
02:09Vraiment, quand je suis arrivée, c'était...
02:12J'étais dans un état genre très compliqué.
02:15J'étais en mode...
02:16Enfin, on m'avait expliqué le truc.
02:18J'étais en mode, mais qu'est-ce que c'est que ça ?
02:20Genre, qu'est-ce que c'est ?
02:22Et puis, au final, c'est vraiment le truc qui m'a sauvé la vie.
02:25Genre, venir ici, ça m'a sauvé la vie.
02:27Et je pense pas que je serais là, la personne que je suis aujourd'hui,
02:30parce que je suis très fière de ce que je suis devenue.
02:32Je pense pas que je serais la personne que je suis aujourd'hui
02:35si j'étais pas passée par le réseau.
02:38Tu sais, là, pendant les deux semaines de crise que j'ai eues,
02:40il y a une semaine à peu près,
02:44je venais ici, j'étais en crise totale.
02:46J'étais en crise d'angoisse, etc.
02:48J'arrivais quasiment plus à parler et tout.
02:50Et j'ai réussi à libérer un petit peu ma crise.
02:54Après, je suis rentrée chez moi
02:55et j'ai fait comme si une raine n'était.
02:58Ah, mais là, bon, c'est bon, quand ça va, la mamie ?
03:01C'est toi qui as fait ça ?
03:04Oui.
03:05Ah, vous le ferez ?
03:06Ouais.
03:11Merci.
03:13Trop contente.
03:14Il est magnifique.
03:15Il est trop magnifique, non ?
03:18En HP, en fin de compte, c'est...
03:20Vous ouvrez le matin, il vous donne les médicaments.
03:22C'était que ça, médicaments, vous réveillez, vous mangez, vous réveillez.
03:26Voilà.
03:27J'en ai eu marre, je suis partie, je suis rentrée chez moi.
03:29Et puis, je me suis installée ici sans y croire, en fait.
03:35Et parce que pour moi, j'étais une âme perdue, je pensais que c'était fini.
03:41Et au final, au début, c'était dans les trois premiers jours, c'était un peu dur.
03:44Et puis, je me suis sentie vite fait à l'aise parce que toutes les personnes qui travaillent ici
03:50ont un cœur énorme, sont à l'écoute.
03:57C'est comme une sorte de petite famille, une thérapie.
04:01On apprend à revivre.
04:03Et je remercie le lieu de répit parce que...
04:05Et il devrait en avoir beaucoup plus.
04:12C'est vraiment beau, les frères.
04:16Tu peux commencer ?
04:17Vas-y.
04:18Arrête-moi, déjà ?
04:18Ah oui, c'est...
04:20Taré.
04:20En combien ?
04:22En deux.
04:23Taré, en deux ?
04:24Ouais.
04:26J'adore.
04:27Ok, en un maladie ?
04:29Ouais.
04:30C'est horrible.
04:33Grins.
04:33Bah ouais.
04:34Ah, aujourd'hui.
04:36Putain, Laetitia, vraiment ?
04:37Trop forte.
04:38Là, c'est de la connexion parce que...
04:40Ouais.
04:42C'est rien qui peut en...
04:44Ouais, c'est bon.
04:46Musique.
04:49On danse ?
04:50Exact.
04:51Finito.
04:52Bravo !
04:52Bravo !
04:53On en a ici.
04:54Voilà.
04:55On a ici.
04:55On a ici.
04:55On a ici.
04:56Donc on a ici.
04:56On a ici.
04:56Voilà.
04:56On a ici.
04:57On a ici.
04:58On a ici.
04:58Voilà.
04:58Et on a ici.
04:59Ça va.
05:01Ouais.
05:01Ouais.
05:01C'est un bon ?
05:02Est-ce que tu as tout ?
05:02Ici, les personnes sont libres d'aller et venir comme elles le veulent et de participer ou non aux activités.
05:17Leur séjour dure un mois en moyenne dans cet espace non médicalisé.
05:21Pour les apaiser, il n'y a donc pas de soignants à proprement parler,
05:24mais une équipe d'intervenants en santé mentale communautaire présente du matin au soir.
05:28L'idée de l'intervenants en santé mentale, c'est qu'on est vraiment sur deux axes.
05:34On est vraiment sur, un, le soutien à la crise psychique,
05:37mais on est aussi sur la deuxième partie qui est la gestion du quotidien et l'aide au rétablissement par le quotidien.
05:43Dans le premier cas où on est vraiment sur le soutien à la crise psychique,
05:47c'est d'aider les personnes dans leur parcours de rétablissement.
05:49Il y a des personnes qui viennent et qui sont soit en crise, soit en post-crise
05:54et qui ont des troubles très différents, des symptômes très différents
05:57et des états très différents.
05:59L'idée, c'est vraiment de les accompagner dans ce qui traverse.
06:02Donc, ça peut être des choses très simples, comme juste offrir une écoute
06:07et juste être présent quand ça ne va pas ou quand ça va aussi.
06:12Mais ça peut être beaucoup plus concret ou quand des personnes ne vont vraiment pas bien,
06:18si une personne a des assignations très fortes, tout ce genre de choses.
06:21C'est de l'aider à redescendre, de reprendre contact avec la réalité.
06:23Donc, il y a vraiment des outils très concrets qu'on met en place pour ces personnes.
06:28Il y a plein de petites techniques.
06:29Il n'y a pas de recette miracle.
06:30Après, il y a aussi des fois où on n'y arrive pas.
06:32Et où en fait, une personne qui est trop en crise, qui a un état peut-être un peu trop délirant,
06:38malheureusement, des fois, on ne peut aussi rien faire.
06:41Mais globalement, c'est ça.
06:42Et ensuite, collectivement, nous, on a une des réunions tous les lundis,
06:46un peu comme des réunions cliniques.
06:47Mais ce n'est pas des réunions cliniques, c'est juste des réunions entre nous.
06:50On réfléchit à chaque personne, quels sont les objectifs qu'on va mettre en place avec elle.
06:55Qu'est-ce qui a fonctionné, qu'est-ce qui n'a pas fonctionné.
06:57Donc, on va passer à la phase de liste d'attente.
07:01Donc, la première personne sur la liste d'attente que je vois, c'est...
07:05Évidemment qu'il a un danger psychique, mais autre personne, il est surtout d'abord et avant tout en danger physique.
07:10C'est lui qui a dit qu'il pense que ça peut le sécuriser et lui permettre d'avoir une pause.
07:13Ça peut avoir du sens pour son état psychique.
07:16Mais la question, c'est est-ce qu'on peut assurer la sécurité face à une situation qui a l'air d'être vraiment...
07:21Parce que si ce n'est pas le cas, il vaut mieux qu'il soit réellement en sécurité ailleurs.
07:26Le lieu de répit est un projet expérimental porté par une association, financée par l'Agence régionale de santé.
07:32Son exemple devrait ouvrir la voie dans les prochaines années à la création d'autres lieux similaires en France.
07:37Donc, il y a tout un savoir-faire qui se construit depuis 2016 et voilà, on est en train de modéliser quelque chose.
07:46Le lieu de répit, c'est aussi quand même un modèle qu'on dit orienté autour du rétablissement,
07:50où on part du principe que les personnes, elles ont des compétences et on va travailler à la fois sur leurs forces
07:55et sur ce qu'on appelle les déterminants sociaux de santé, c'est-à-dire leurs projets de vie, le travail, l'éducation.
08:03Et du coup, ces approches-là, elles sont beaucoup moins chères parce qu'on travaille sur l'autonomie.
08:10Le lieu de répit, pour vous donner un exemple, c'est 6 à 10 fois moins cher que l'hôpital.
08:16Une nuit au lieu de répit, c'est 100 euros.
08:18À l'hôpital, c'est entre 600 et aux urgences, 1200 euros.
08:22Et donc, il y a aussi un intérêt économique à avoir une approche orientée sur les forces et sur les compétences des gens.