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Clique, c'est présenté par Mouloud Achour, tous les jours pour les abonnés, en deuxième partie de soirée sur CANAL+
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00:00Et on se rappelle de ce geste qui est devenu lui aussi un symbole,
00:03ses mains pour symboliser l'omerta.
00:05Aussi votre discours marquant au César, on s'en souvient quelques mois plus tôt,
00:09dans lequel vous disiez « je parle, je parle, mais je ne vous entends pas ».
00:13Nous on vous a entendues, en tout cas beaucoup d'actrices vous ont entendues,
00:18et certaines d'entre elles sont venues le dire sur ce plateau,
00:21je voulais qu'on regarde et qu'on s'en parle après.
00:22J'étais heureuse qu'elle parle, très heureuse.
00:25On a besoin de ces paroles-là, c'est important, c'est très important.
00:28L'idée ce n'est pas de faire peur, l'idée c'est de reconnaître la douleur
00:33qui a été traversée, c'est important d'être entendu et de l'exprimer.
00:39J'espère qu'on est à un moment différent, parce qu'il y a déjà eu Adèle Haenel,
00:44il y a déjà eu Camille Kouchner, c'est des moments où tout d'un coup on a l'impression que ça bouge
00:48et puis en fait ça restagne assez vite, il faut que ça change quoi,
00:51et que peut-être il faudrait un peu moins de com' et un peu plus de politique.
00:54Tout n'est pas dans le ressort des artistes, ni des gens qui ont des Instagram.
01:00La réponse, elle doit enfin être politique.
01:02Elle est d'un courage dingue et elle a fait avancer en quelques mois les choses.
01:08J'ai l'impression que quand même ce milieu du cinéma, il grince, il a du mal quand même.
01:14En tout cas pour la France, il a du mal à faire vraiment son MeToo.
01:17Donc ça pète maintenant, c'est très bien que ça pète maintenant.
01:20Et si c'est grâce en grande partie à Judith et toutes les femmes qui l'accompagnent, c'est fantastique.
01:24Et c'est beau ce qui se passe.
01:26Et d'y participer, de faire partie de ce mouvement-là, c'est tellement noble.
01:32Ça me donne beaucoup d'espoir à moi.
01:35Vous avez été entendue un peu.
01:38Ouais, ouais.
01:40Ça vous émeut quand vous voyez ça ?
01:42Ouais, ouais, de toute façon, le danger de la solitude forcément est, comment dire, anéantie, est anéantissante.
02:03Échec, je ne sais pas si ça se dit, c'est une drôle de phrase, mais échec, prise de parole.
02:08Et forcément, me donne ce sentiment de l'existence d'un collectif.
02:14Et c'est vrai qu'on n'a pas toujours l'occasion et on ne parle pas tous les jours.
02:20On n'est pas tout en train constamment de se parler.
02:23Et forcément que je me retrouve aussi très souvent face à allongée sur le lit,
02:29en train de regarder le plafond avec des idées noires.
02:31Et pourtant, Dieu sait que je suis privilégiée et que je n'ai pas à me plaindre comparé à beaucoup de personnes.
02:39Mais j'imagine que vous avez reçu des messages quand même, de soutien.
02:43Écoutez, j'ai reçu des messages de soutien, mais vraiment pas du tout de soutien du monde du cinéma, de mon passé,
02:56c'est-à-dire de ma jeunesse, c'est-à-dire du tout, du tout, en fait, juste à part Claire Denis.
03:06Et je la cite parce que ça m'a beaucoup touchée et que voilà, c'était une des adultes qui entourait,
03:13qui faisait partie de cet entourage-là à l'époque.
03:15Mais non, je ne peux pas vous dire que j'ai reçu beaucoup de soutien.
03:17Et en même temps, j'ai du mal à en vouloir à qui que ce soit parce que je comprends,
03:26je sais que la déconstruction dure longtemps.
03:29Moi-même, je ne suis pas parfaite et ne l'ai jamais été.
03:33Mais c'est vrai qu'il y a quelque chose de l'ordre de, comment dire,
03:40presque de la reconnaissance de son existence propre.
03:43que les autres viennent dire « tu existais ».
03:47C'est-à-dire que, vous voyez, c'est presque comme…
03:49Parfois, ça vous plonge dans ce trouble-là, à ce point ?
03:52Oui, c'est-à-dire que l'enfance perdue est l'endroit où on rentre dans ce tunnel
03:56dans lequel moi je suis rentrée.
03:58C'est comme si j'avais retenu mon souffle à un endroit où j'avais incarné
04:02cet enfant-femme dans la vie d'un homme réalisateur
04:10et ce parcours dans le monde du cinéma français
04:14où j'ai pris la pause et cette pause a duré une éternité, a duré des années.
04:19Et dans le fond, je n'ai pas pu sortir de cette pause-là,
04:22cette pause avec ce grand sourire et cette espèce de manière de toujours tourner tout
04:26en dérision, cette légèreté.
04:28Et dans le fond, les personnes qui m'écrivent sont souvent des personnes
04:33qui viennent de l'autre monde, le monde de l'école,
04:37les profs de mon lycée, des élèves qui étaient avec moi à l'école
04:41et qui disent « mais moi, je me souviens de toi, je me souviens de ta tristesse,
04:45je me souviens de ce que tu m'as écrit, des lettres que tu m'as envoyées, je les ai ».
04:50Et en fait, les personnes du cinéma français, les adultes de quand j'étais petite,
04:55c'est cet endroit-là qui me manque, c'est-à-dire de dire
04:58« j'ai vu en face de moi cet enfant, j'ai vu ces moments de silence,
05:04je t'ai vu dans un mutisme lors de dîner avec que des adultes
05:07et je m'en souviens, j'ai rien fait et je n'en veux à personne,
05:11mais je m'en souviens, tu as existé ».
05:13Merci.
05:14Merci.
05:15Merci.
05:16Merci.
05:17Merci.
05:18Merci.