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  • 18/05/2025
Deux regards croisés sur la précarité : quand le mal-logement rend malade, et quand un centre comme Agora Emmaüs devient un lieu de répit pour les sans-abris. Un double reportage humain et engagé.

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Personnes
Transcription
00:00En France, alors que la loi a fait du logement un droit,
00:05près de 4 millions de personnes seraient toujours mal logées.
00:09Derrière ce chiffre se cachent des réalités très diverses.
00:13Certains vivent à la rue, en squat ou en bidonville.
00:17D'autres ont un logement, mais un logement insalubre
00:21qui ne leur permet pas de vivre avec le confort élémentaire
00:24et dégrade leur santé.
00:31Parmi les habitants de ces logements insalubres,
00:35près de la moitié sont des propriétaires.
00:38En 2015, Grigory s'est installé à une cinquantaine de kilomètres
00:42de Bordeaux, en Gironde.
00:45Réfugié politique, arrivé de Russie il y a 17 ans,
00:49il a mis toutes ses économies dans l'achat de sa propriété.
00:53Avec sa femme, ils ont même planté un potager luxuriant
00:58qui leur fournit des légumes presque toute l'année.
01:02Pour cette vie proche de la nature, Grigory a sacrifié son confort.
01:06S'il dispose d'eau courante dans la maison,
01:09il n'y a pas de salle de bain.
01:12Du coup, c'est la débrouille en toute saison.
01:15C'est mon douche.
01:18L'été, je mets un réservoir à eau.
01:21Comme ça, le soleil chauffe.
01:25Et je douche ici.
01:28L'hiver, je chauffe de l'eau et je me douche.
01:32Et il fait froid ?
01:35Un peu.
01:38En achetant cette maison, Grigory a voulu réaliser son rêve,
01:42vivre dans une maison de campagne.
01:45Mais pour qu'elle soit réellement habitable,
01:48elle a besoin de travaux.
01:52En plus, Zachary est menuisier.
01:55Il n'y a pas d'assainissement, il n'y a pas de chauffage.
01:58Il faut tout recréer, toute l'isolation.
02:01Les fenêtres, les ouvertures.
02:04Tout ça fait partie des choses qu'il faut refaire.
02:07Pour financer les travaux que Zachary ne peut accomplir seul,
02:10la famille est accompagnée par une assistante sociale.
02:13Bonjour.
02:16Vous allez bien ? Je vous fais la bise.
02:19Vous avez commencé les travaux ?
02:22Oui, on a commencé un peu.
02:25Pour demander des fonds, prêts solidaires ou aide financière,
02:28Laurence les a aidés à monter des dossiers.
02:31Car si la maison n'a coûté que 37 000 euros,
02:34les travaux d'assainissement vont coûter beaucoup plus cher.
02:37Ici, on a 60 000 euros de travaux.
02:40Tout ça parce que la famille va faire des choses par elle-même.
02:43Des démolitions, des peintures.
02:46Il y a des postes de travail que la famille sait garder pour baisser le coût.
02:49Sinon, ça aurait été difficile à tout financer.
02:52On va faire une maison très jolie.
02:55Surtout en sécurité car c'est très dangereux chez vous.
02:58Au niveau de l'électricité, la plomberie qui est inutilisable.
03:01Oui.
03:07Vous avez votre personne qui est en danger.
03:10Grigory a eu un travail physique toute sa vie.
03:13Et il souffre aujourd'hui de polyarthrite rhumatoïde.
03:16Ses conditions de vie actuelles amplifient les douleurs.
03:19Et il a de plus en plus de mal à réaliser les travaux
03:22dont sa maison aurait tant besoin.
03:25Voilà, c'est notre cheminée.
03:28Vous êtes intoxiqué avec ça.
03:31Oui, parce que ça fume partout.
03:34Vous voyez les murs, ils ont noir.
03:37Mais j'ouvre la porte.
03:41Je dors ici.
03:44Il y a eu un problème au niveau du plafond.
03:47Le trou aussi.
03:50Je suis monté en haut, il était pourri.
03:53Je suis tombé ici.
03:56C'était très sale.
03:59Il y avait des animaux, des chats, des chiens.
04:02Il a monté pour nettoyer, pour balayer un peu.
04:05Et comme ça, je suis tombé.
04:09Cet hiver-là, c'était dur.
04:12Parfois, il vient pour voir ses enfants à Bordeaux.
04:15Je ne peux plus, parce que c'est très dur.
04:18J'en ai marre pour se doucher à l'extérieur,
04:21pour faire la cuisine à l'extérieur.
04:24Il est très timide pour demander à quelqu'un de faire quelque chose.
04:27Il vient, il se tient tout ça dans sa tête.
04:30Et après, je vois qu'il n'est pas bien.
04:33Il faut faire quelque chose, il faut changer.
04:36C'est pas bien, ça.
04:39Normalement, c'est le dernier hiver qu'il a passé.
04:42Tu veux que je te le mette où ?
04:45Zachary passe beaucoup de temps auprès de son père.
04:48Surtout depuis que sa polyarthrite s'est aggravée
04:51à cause des conditions de vie difficiles.
04:54Quand je fais du travail,
04:57c'est vrai que je suis fatigué,
05:00j'ai mal à la jambe,
05:03j'ai mal à la jambe, j'ai mal au dos, j'ai mal aux bras.
05:06Dans la maison aussi, il y a une immunité.
05:19Qu'il y ait de l'eau chaude, qu'il y ait un chauffage,
05:22que ça soit sain.
05:27Ça le maintient dans la joie.
05:30dans la joie et puis l'envie, l'envie de continuer.
05:35Après deux ans de démarche pour obtenir les financements,
05:38le rêve de Grigory va finalement commencer à se concrétiser.
05:53Aujourd'hui, Laurence rend visite à Marie.
05:56Elle l'accompagne depuis quelques mois
05:58pour l'aider à réhabiliter la maison Vétuste
06:01qu'elle a achetée il y a deux ans
06:02et dans laquelle elle souffre du froid et de l'humidité
06:05une grande partie de l'année.
06:08Disons que quand j'ai dit...
06:25...la maison, alors elle a rajouté un chauffage supplémentaire
06:28dans toutes les pièces.
06:30Là, actuellement, il fait 13 degrés.
06:32Malgré ces radiateurs, la maison s'abîme
06:35et le coup de peinture, ajouté par les anciens propriétaires,
06:37ne fait plus illusion.
06:42Marie découvre presque chaque jour de nouvelles dégradations
06:45causées par l'humidité.
06:48Il y a de nouvelles matières que je n'avais pas vues.
06:50Regardez.
06:51Cette espèce de mousse, ça n'y était pas la dernière fois.
06:53Non, ça n'y était pas, ça.
06:54Ah, mais il y en a plein, là aussi, regardez.
06:57Qu'est-ce que c'est, ce truc ?
06:59De la moisissure, moi, je pense.
07:03Moisissure, courant d'air et humidité.
07:06Des conditions de vie difficiles qui aggravent la bronchite chronique
07:10dont Marie souffre depuis plusieurs années.
07:12Dès que la fraîcheur tombe, de suite,
07:14on a l'impression que l'humidité ressort des murs.
07:16Et c'est vrai que là, depuis que je suis dans cette maison,
07:18je suis tout le temps, tout le temps prise.
07:20Comme si j'étais en permanence enrhumée,
07:22ça me retombe à chaque fois sur les bronches.
07:24Bon, je connais les symptômes, j'ai toujours les médicaments en avance.
07:27Mais là, je tousse beaucoup plus fort.
07:29Je tousse beaucoup la nuit aussi.
07:30Depuis que je suis ici, c'est non-stop, quoi.
07:32J'arrête pas de bronchite sur bronchite sur bronchite.
07:35C'est carrément piqueur de pénicilline.
07:39Quand Marie a acheté sa maison il y a deux ans,
07:41elle venait juste de divorcer.
07:43Seule, travaillant à temps partiel,
07:45elle dispose à l'époque d'un budget très limité.
07:49Il fallait que je trouve quelque chose pour me loger.
07:51J'avais pas un budget énorme.
07:53On me proposait beaucoup des vieilles fermes
07:55avec quatre murs qui tenaient debout,
07:57même pas un WC, rien.
07:59C'est la seule maison que j'ai trouvée
08:01qui était habitable sur le moment.
08:03Je me suis pas précipitée, mais bon, on m'a mis un petit peu la pression.
08:05Il fallait que je me décide rapidement.
08:07Et c'est vrai qu'au mois de juillet, quand je l'ai visitée,
08:09tout était ouvert, la maison était fraîche,
08:11il faisait super chaud dehors, c'était super agréable.
08:13Je me suis doutée qu'il y avait quelques travaux à faire,
08:15mais bon, je pensais pas à cet ordre-là, en fait.
08:20Comme Marie, face à l'urgence de trouver un toit,
08:22de nombreuses personnes sont contraintes
08:24de vivre dans un logement indigne,
08:26avec souvent des conséquences pour leur santé.
08:31Pour lui permettre d'assainir sa maison,
08:33Laurence, son assistante sociale,
08:35a monté un dossier pour obtenir des aides
08:37et des prêts solidaires.
08:39Les travaux devraient coûter près de 50 000 euros.
08:43Donc il est prévu au niveau des travaux
08:45l'isolation des combles,
08:47après on a prévu l'isolation des murs.
08:49Donc pareil au rez-de-chaussée, on va tout isoler.
08:51On va remplacer toutes les menuiseries.
08:53On a prévu aussi la mise aux normes
08:55de toute votre électricité.
08:57On va installer un chauffage adapté,
08:59c'est-à-dire qu'on vous installe un chauffage
09:01qui va chauffer toute votre maison.
09:03Une famille qui n'arrive pas à se chauffer
09:05serait 2 fois plus touchée par des bronchites chroniques
09:07qu'un ménage classique.
09:10A quelques jours de la fin de la trêve hivernale,
09:13plusieurs associations,
09:15regroupées dans le collectif
09:17Un Toit Sans Trêve,
09:19se sont donnés rendez-vous au centre-ville de Bordeaux.
09:21Estelle est juriste
09:23et bénévole à la mission squat
09:25de Médecins du Monde.
09:27Avec d'autres membres du collectif,
09:29ils ont voulu dénoncer la politique de l'État
09:31en matière d'expulsion des squats
09:33et des bidonvilles.
09:35Plusieurs sites risquent là encore
09:37d'être expulsés au début du printemps.
09:39Été comme hiver,
09:41expulser des habitants de leur domicile
09:43sans proposition alternative
09:45de relogement pérenne et adapté
09:47aggrave leur précarité
09:49et ne fait que déplacer le problème.
09:51Dans l'un des territoires les plus riches
09:53de la 6e puissance économique mondiale,
09:55le manque d'action ne s'explique pas
09:57par des raisons budgétaires mais politiques.
09:59Je vous remercie.
10:01Depuis quelques années,
10:03Médecins du Monde a fait du droit au logement
10:05et au combat.
10:07On constate avec les expulsions
10:09des interruptions de parcours de soins.
10:11Par ailleurs, après une expulsion,
10:13on est en situation d'urgence
10:15donc la priorité n'est plus une santé,
10:17on dépriorise sa santé.
10:19Et puis par ailleurs,
10:21on se réinstalle souvent dans des lieux
10:23encore plus précaires avec des conditions
10:25de vie encore plus pathogènes.
10:27Outre le combat dans la rue,
10:29les équipes de Médecins du Monde
10:31interviennent aussi directement
10:33dans les salles logées.
10:35Après la manifestation,
10:37Estelle et un collègue
10:39prennent la route en direction
10:41de Talens, une commune qui jouxte Bordeaux.
10:43Et là, du coup, dans 600 mètres,
10:45ça va à gauche, on est d'accord après.
10:47Après, ça va à gauche.
10:49Après quelques minutes de route,
10:51ils arrivent dans un squad surnommé
10:53L'Ascenseur.
10:55Ces locaux, propriétés de l'université,
10:57sont occupés depuis novembre dernier.
10:59Dans les anciennes salles de cours,
11:01vivent 150 à 200 personnes.
11:05Sur place,
11:07Estelle et Adrien retrouvent Jean-Luc,
11:09infirmier et co-responsable
11:11de la mission.
11:13Pendant qu'Estelle propose une orientation
11:15et des conseils juridiques à des demandeurs d'asile,
11:17les deux autres bénévoles
11:19vont évaluer les besoins de santé
11:21des résidents.
11:23Ce squad héberge de nombreuses familles,
11:25dont cette jeune géorgienne
11:27et sa fille de 7 ans.
11:29Nous venons pour savoir
11:31si tout va bien,
11:33au sujet de votre fille,
11:35les douleurs du ventre de votre fille.
11:37En l'absence de traducteur,
11:39ils communiquent par téléphone
11:41pour prendre des nouvelles de la fillette
11:43qui avait des parasites intestinaux.
11:47Est-ce qu'elle a toujours mal
11:49à l'estomac
11:51et à l'abdomen ?
11:55Est-ce qu'elle prend ce médicament ?
11:59Ah oui.
12:01Donc notre boulot,
12:03c'est de faire la transition
12:05entre leur situation de précarité
12:07et de santé non prise en charge
12:09pour les faire rentrer
12:11dans le droit
12:13et être prise en charge
12:15au même titre que les autres personnes.
12:19Cette jeune femme et sa fille
12:21ont trouvé ici un refuge précaire.
12:23Mais le lieu est menacé d'expulsion
12:25et comme tous les résidents,
12:27elles risquent de se retrouver à la rue.
12:37Depuis l'ouverture du squat,
12:39les habitants se sont organisés
12:41pour vivre dans des conditions sanitaires
12:43les plus correctes possibles.
12:45Des baignes à ordures
12:47ont été installées
12:49et ils ont rétabli l'eau et l'électricité.
12:51Aujourd'hui,
12:53être expulsés les obligerait
12:55à tout recommencer.
12:57Donc là, on est déjà 200 personnes
12:59mais tous les squats réunis,
13:01si on est tous expulsés,
13:03ça va déclencher
13:05un déplacement massif de personnes.
13:07Des ouvertures un peu partout,
13:09de nouveaux squats.
13:11La plus grande problématique,
13:13c'est les enfants qui sont à la rue
13:15du jour au lendemain.
13:17Même pour nous, c'est très dur.
13:19Donc on essaie de se battre au maximum
13:21pour faire en sorte que ça n'arrive pas.
13:23A Bordeaux, de nombreuses personnes
13:25cherchent un toit où s'abriter.
13:27Les bénévoles et les salariés
13:29du Centre de médecins du monde
13:31essaient eux aussi de les aider
13:33à trouver des solutions.
13:35Vous êtes hébergé jusqu'à quand ?
13:37Jusqu'à dimanche.
13:39Le risque qu'il y a, c'est que vous allez sortir
13:41de l'hébergement lundi matin.
13:43Il faudra appeler le 115.
13:45Le 115 dit qu'il n'y a pas de place
13:47et ça veut dire que vous vous retrouvez dehors
13:49avec le bébé.
13:51Le Centre de médecins du monde
13:53a fait un dernier recours.
13:55Lancer une procédure judiciaire d'urgence
13:57pour obtenir un hébergement.
13:59Mais cette démarche n'est possible
14:01que sous certaines conditions.
14:03On ne peut pas faire la démarche
14:05au tribunal aujourd'hui.
14:07Il faut d'abord que l'hébergement
14:09ait pris fin et que vous soyez
14:11à la rue avec le bébé.
14:13À ce moment-là, on peut contacter
14:15l'avocat pour essayer de retourner
14:17au tribunal.
14:19On va essayer de trouver une mise à l'abri
14:21en attendant que la démarche puisse
14:23être faite au niveau du tribunal.
14:25Il faut revenir ici lundi matin.
14:27On peut appeler le 115 ensemble
14:29et à ce moment-là, on verra
14:31ce qu'on peut faire.
14:33C'est clair pour vous ?
14:35Oui.
14:37Le numéro qu'ils vont appeler
14:39dans quelques jours, le 115,
14:41c'est le numéro de téléphone
14:43de l'urgence sociale.
14:45Il permet d'orienter les personnes
14:47à l'hébergement.
14:49Mais faute de place,
14:51beaucoup restent à la rue.
14:53Sans hébergement fixe,
14:55en errance constante,
14:57nombreux sont ceux qui développent
14:59une souffrance psychique.
15:01Au centre de soins,
15:03les patients peuvent consulter
15:05un généraliste, mais aussi
15:07des psychologues et des psychiatres.
15:09Quand on se retrouve en squat,
15:11on sait très bien que c'est transitoire.
15:13À un moment donné, on va être exclu.
15:15Quand on n'a pas cet ancrage fondamental
15:17dans un territoire ou une habitation,
15:19comment vous projetez dans l'avenir ?
15:21C'est la porte ouverte à la dépression.
15:23Comme une maison qui se lézarde,
15:25c'est la porte ouverte aux quatre vents.
15:27C'est les prémices d'un écroulement.
15:29Les problèmes de logement
15:31rencontrés par de nombreux patients
15:33entraînent aussi des insomnies.
15:35Si on empêche les gens de dormir,
15:37c'est une des modalités de la torture,
15:39il y a des décompensations graves.
15:41La première des choses,
15:43on nous demande un traitement pour dormir,
15:45on le donne, mais le meilleur
15:47pour dormir, c'est de loger les gens.
15:49Dans les centres de soins de médecins du monde
15:51en France, un tiers des patients
15:53reçus sont logés en squat,
15:55bidonville ou vivent
15:57à la rue.
16:01À quelques kilomètres
16:03au sud de Bordeaux,
16:05un bidonville est installé depuis 2015
16:07sur la commune de Villeneuve-Dornon.
16:09Une trentaine de familles
16:11vivent ici dans des conditions
16:13précaires.
16:15Pour les 150 habitants du lieu,
16:17il n'y a qu'un seul point d'eau.
16:19Alors pour se doucher ou pour faire la cuisine,
16:21il faut remplir des bidons
16:23et les acheminer jusque chez soi.
16:27Léonard,
16:29président de l'association Eurome,
16:31un partenaire de médecins du monde,
16:33aide ses familles dans leur accès aux droits.
16:35Il intervient notamment
16:37auprès des Moureches,
16:39qui cherchent depuis plusieurs années un appartement.
16:45On va chez le monsieur qui cuisine,
16:47le monsieur qui fait des bons plats.
16:51Le couple vit ici avec leurs
16:53deux grands-enfants.
16:57Léonard vient souvent leur donner des nouvelles
16:59de leur dossier de logement.
17:01En attendant d'avoir un appartement plus confortable,
17:03la vie quotidienne s'organise
17:05à l'intérieur de cette maison de fortune.
17:09Qu'est-ce que tu cuisines ?
17:11C'est mon mari, il fait des tripes.
17:13Ah, des tripes ?
17:15Je vais mettre les patates.
17:17On les met dedans,
17:19on mélange et on met de la crème fraîche.
17:21Et sinon ici, comment tu te sens ?
17:23Tu vis dans de bonnes conditions ?
17:27Ici, c'est la cuisine où on mange.
17:29Et là, c'est le dortoir où on dort.
17:35Voilà comment on dort.
17:39Regarde, mes enfants ici,
17:41ma femme ici et moi ici auprès d'elle.
17:47Mais vous dormez bien la nuit ?
17:49Parce qu'en hiver, il fait froid, non ?
17:51On fait du feu.
17:53Mais il faut se lever tout le temps pour mettre du bois.
17:55Oui, tout le temps.
17:57On fait du feu puis on reste habillé, bien sûr.
17:59Je mets un gros bonnet comme ça
18:01et c'est bon, je suis couvert.
18:05Quand il fait froid dehors,
18:07tu dors habillé ?
18:09Oui, habillé.
18:11Je me couvre d'un gros duvet et puis je dors.
18:15Quand il fait froid et puis qu'il gèle.
18:17Et quand il fait chaud ?
18:19Quand il fait chaud, on se découvre, mon gars.
18:21Et où est-ce que tu te laves, au lac ?
18:23Au lac ?
18:25Non, on a un tonneau.
18:27Et où est-ce que vous vous chauffez l'eau ?
18:29Là-bas.
18:31Mais quand vous l'amenez jusqu'ici,
18:33elle ne refroidit pas ?
18:35Quand il fait chaud.
18:37Oui, il fait chaud, mais l'hiver...
18:39L'hiver, c'est autre chose.
18:41L'eau se glace, mais on se lave moins souvent en hiver.
18:45Pour vivre dans de meilleures conditions
18:47et mettre sa famille à l'abri,
18:49Stanescu rêve d'une maison
18:51ou d'un appartement.
18:55Quel logement voudrais-tu avoir en France, dans tes rêves ?
18:57Tu voudrais qu'il soit comment ?
18:59J'aimerais un logement
19:01avec deux chambres, avec une cuisine.
19:05Une salle de bain, pour qu'on puisse se laver.
19:07Des conditions de vie normales, quoi.
19:11Tu veux que je te montre mes fiches de paye ?
19:15J'ai des fiches de paye de mon travail.
19:17Moi, je suis un bosseur, je travaille beaucoup.
19:19Je fonce, moi.
19:23Comme de nombreux habitants du bidonville,
19:25Stanescu travaille dans la vigne.
19:27Avec ses revenus,
19:29il espérait pouvoir payer un petit loyer
19:31pour loger sa femme et ses enfants,
19:33vite en fauteuil roulant.
19:37On a été visiter des appartements,
19:39on était très contents.
19:41Mais avant de signer le contrat,
19:43le propriétaire nous a dit
19:45que ce n'était pas adapté.
19:47La maison n'était pas adaptée
19:49à son fils
19:51et à sa fille.
19:53Il y avait un escalier,
19:55les chambres étaient en haut.
19:57On s'est dit,
19:59pour l'instant, on fait ça
20:01pour trouver quelque chose
20:03d'adapté, mais au moins
20:05qu'ils vivent dans des conditions dignes.
20:09Comment tu t'es senti quand tu as appris
20:11que le propriétaire ne voulait pas vous donner
20:13l'appartement qu'on avait trouvé ?
20:17Ça m'a fait un mal fou.
20:21J'étais heureux, je me disais
20:23je vais avoir une maison, je vais habiter bien.
20:25Moi et mes enfants, ça sera différent,
20:27plus commode.
20:31À cause de ce refus,
20:33la famille Mouresh risque de passer
20:35le prochain hiver dans le bidonville.
20:41Dans ces conditions de vie,
20:43il n'est pas toujours possible de faire attention
20:45à sa santé.
20:55Ça pèse beaucoup sur la santé
20:57et les problèmes de logement.
20:59Tant que tu es
21:01dans une situation précaire
21:03et que tu n'es pas stable,
21:05tu ne peux pas t'occuper de toi,
21:07de ta santé,
21:09suivre les soins, les rendez-vous médicaux.
21:11C'est difficile
21:13parce que tu n'es pas
21:15concentré vraiment sur ça.
21:19Chaque semaine, les équipes de médecins du monde
21:21rendent visite aux habitants
21:23de ce bidonville.
21:29Avec l'aurale à traductrice,
21:31elles vont examiner ce patient
21:33qui souffre depuis 5 mois
21:35de douleurs au dos qui l'empêchent de dormir.
21:41C'est les douleurs de dos
21:43qui le réveillent la nuit quand il bouge ?
21:49Oui, tout le temps, ça me fait mal.
21:53Quand vous prenez les médicaments
21:55pour la douleur, vous dormez mieux ?
21:59Oui, oui.
22:03C'est à quel niveau du dos que ça fait mal ?
22:05Partout, partout, madame.
22:13Il faut que je bouge comme ça.
22:15Chaque matin, je fais de l'entraînement.
22:21Là, ça ne fait pas mal quand j'appuie.
22:25Pendant que Racha continue l'examen de son patient
22:27et cherche l'origine de ses douleurs,
22:29derrière les habitations,
22:31le reste de l'équipe va examiner
22:33la zone dédiée à la ferraillerie.
22:37Alban, assistant social de la mission
22:39et Thierry, un infirmier puériculteur,
22:41évaluent les risques du lieu
22:43pour la santé des habitants.
22:45Après, il n'y a pas de déchets,
22:47ça reste de la ferraille principalement.
22:49Il y a des zones de travail
22:51où il y a tout un travail de recyclage
22:53et de récupération.
22:55C'est important pour les familles
22:57d'essayer de faire en sorte
22:59que ces zones de travail
23:01ne soient pas disséminées sur tout le camp
23:03et vraiment isolées
23:05puisque les enfants jouent au milieu.
23:07On a des cas de saturnisme
23:09sur ces différents squats
23:11qu'on a identifiés pour certains
23:13mais si on faisait un dépistage massif,
23:15on aurait un chiffre qui serait
23:17beaucoup plus important.
23:19Le saturnisme, c'est une intoxication
23:21au plomb particulièrement grave
23:23et des troubles du comportement.
23:25On a constaté que,
23:27ne serait-ce que sur des changements de squats,
23:29des enfants qu'on a bien identifiés,
23:31de changer de lieu de vie faisait
23:33baisser ce taux de plomb dans le sang.
23:35L'environnement est vraiment important
23:37pour ces familles-là.
23:39L'idée, c'est vraiment d'avoir
23:41une approche globale de la santé
23:43et prendre en compte les conditions
23:45de vie et l'environnement.
23:47Au niveau du médecin du monde,
23:49on travaille aussi là-dessus
23:51pour trouver des maladies
23:53liées aux conditions de vie des personnes.
23:59Alors que les équipes de médecins du monde
24:01continuent d'aller à la rencontre des habitants,
24:03une patrouille de la police municipale
24:05de Villeneuve-Dornon
24:07arrive dans le bidonville.
24:09En ce moment,
24:11les officiers viennent presque tous les jours
24:13pour inspecter le campement.
24:15Récemment, il y a eu de nouvelles arrivées.
24:17Ils passent donc observer l'Etat
24:19et la sécurité des cabanes et des caravanes.
24:25Bonjour.
24:27On est des médecins du monde.
24:29On intervient pour l'accès au droit,
24:31l'accès aux soins.
24:35Après, le problème, c'est que
24:37dès qu'il y a une expulsion,
24:39les personnes se réinstallent ailleurs.
24:41On n'a pas le temps de travailler
24:43des projets de stabilisation,
24:45de relogement.
24:47L'idée, ce n'est pas de se maintenir
24:49dans des conditions comme ça.
24:51On passe souvent parce qu'on veut voir
24:53si il n'y a pas trop de monde qui arrive d'un coup.
24:55Généralement, on y passe quasiment tous les jours
24:57au moins une fois.
24:59Bon. Bonne journée.
25:01Au plaisir. Au revoir.
25:05Alban profite de ce passage
25:07pour sensibiliser les officiers de police
25:09aux problèmes rencontrés par les personnes
25:11vivant en squat ou en bidonville.
25:13Les personnes qui vivent ici,
25:15elles ont fait un, deux ou trois squats,
25:17trois bidonvilles auparavant.
25:19Elles se retrouvent ici,
25:21souvent dans d'autres communes,
25:23et avec toutes les démarches
25:25à reprendre à zéro.
25:27Il y a une vraie difficulté
25:29pour l'accès au logement,
25:31pour se maintenir dans un travail,
25:33et pour les enfants qui vont être déscolarisés,
25:35ne vont plus pouvoir aller à une école
25:37trop éloignée.
25:39On maintient les personnes dans cette précarité-là
25:41grâce à une politique d'expulsion récurrente.
25:43Les équipes de médecins du monde
25:45essaient aussi d'aider les habitants du bidonville
25:47à réintégrer le système de santé.
25:51Un suivi médical
25:53rendu difficile par la précarité,
25:55des dangers liés
25:57aux conditions de vie.
25:59Le mal-logement affecte
26:01directement la vie des habitants
26:03de ce campement.
26:05En France,
26:0716 000 personnes vivraient
26:09dans un bidonville.
26:11Dans une toute petite rue
26:13du quartier des Halles,
26:15en plein centre de Paris,
26:17les habitants
26:19de ce bidonville
26:21se retrouvent
26:23à la recherche
26:25d'une nouvelle vie.
26:27Dans une toute petite rue
26:29du quartier des Halles,
26:31en plein centre de Paris,
26:33les habitants
26:35de ce bidonville
26:37se retrouvent à la recherche
26:39d'une nouvelle vie.
26:41Dans une toute petite rue
26:43du quartier des Halles,
26:45en plein centre de Paris,
26:47l'Agora ouvre ses portes
26:49chaque matin à 8h30.
27:03C'est le plus grand accueil
27:05de jour de l'association Emmaüs en France,
27:07quotidiennement par près de 200 personnes précaires
27:09ou sans domicile fixe.
27:15Parmi les habitués ici,
27:17Gérard et Gérard,
27:19dit les GG.
27:37Permettre l'accès à des services de base
27:39comme un brin de toilette,
27:41un café chaud
27:43ou lancer une lessive,
27:45cela fait partie des missions de l'Agora.
27:47Cela fait partie des missions de l'Agora.
28:17Comment tu t'appelles ?
28:19Gérard.
28:21Moi aussi.
28:23T'es natif d'où ?
28:25Je dis de Lens.
28:27T'as un ch'ti comme moi ? Je viens de Béthune.
28:29Pas de Calais.
28:31Tout simplement.
28:33Depuis, on est
28:35comme frères.
28:37Il y en a beaucoup dans la rue qui nous prennent pour des frères.
28:39Depuis ce temps-là,
28:41on s'occupe plus.
28:43On est assez pareils.
28:45Ils nous appellent les assez pareils.
28:49Ils vont ensemble,
28:51ils vont partout ensemble.
28:53On mange ensemble,
28:55on dort ensemble,
28:57c'est pareil.
28:59Assistante sociale, éducateur spécialisé,
29:01juriste,
29:03ici, une trentaine de travailleurs sociaux
29:05prend soin des gens de la rue.
29:07En particulier en cette période de forte chaleur,
29:09en ce mois de juin.
29:11Une période dangereuse pour les personnes qui vivent dehors.
29:1333, ça prenait bien.
29:15Pensez à profiter de la douche.
29:17Pensez, pensez.
29:19Si vous voulez prendre plusieurs douches par journée,
29:21n'hésitez pas.
29:23Pour la canicule.
29:25Tu veux un filtre avec ?
29:27C'est pour toi ?
29:29Vous avez bu de l'eau ?
29:31Non.
29:33Pensez à boire, les gars.
29:35Je peux prendre la gobelet d'eau ?
29:37Ici, c'est piège.
29:39T'as vite fait de te retrouver déshydraté.
29:41T'as la fontaine, t'as des gobelets,
29:43il y a tout ce qu'il faut.
29:45Et pour la sortie ?
29:49Pour la sortie, vu qu'on va être en mode canicule
29:51même mercredi,
29:53on a reporté la pétanque.
29:57Jimmy est éducateur spécialisé.
29:59Toute la journée,
30:01comme ses collègues,
30:03il répond à des demandes très variées.
30:05Votre domiciliation et la domiciliation
30:07de monsieur.
30:09Tout est prêt, tout est signé.
30:11Elle a compté du 15.
30:13Ça veut dire qu'elle est valide.
30:15Est-ce que vous voulez que je vous en fasse
30:17une photocopie ?
30:19450 personnes bénéficient
30:21du service de domiciliation de l'Agora.
30:23Pour les papiers officiels et tout le courrier,
30:25leur adresse, c'est ici.
30:27C'est la base des démarches administratives.
30:29Au final, les personnes qu'on accueille ici
30:31n'ont pas de lieu d'hébergement, n'ont pas de chez-eux,
30:33n'ont pas de boîte aux lettres.
30:35Dans toutes leurs démarches, elles vont avoir besoin
30:37d'un endroit où elles peuvent recevoir
30:39leur courrier. Donc la domiciliation, c'est ça.
30:41Les femmes représentent un peu moins
30:43de 10% du public accueilli ici.
30:45Anne est une habituée des lieux.
30:47Sous tutelle pour incapacité,
30:49elle vit complètement marginalisée.
30:51Ce matin, elle est venue voir Jimmy
30:53parce qu'elle s'inquiète
30:55de devoir faire un bilan ophtalmologique.
30:57Est-ce que ça veut dire
30:59que c'est remboursé ?
31:01Enfin...
31:05On en a déjà parlé ensemble.
31:07D'accord ?
31:09Anne est comme de nombreuses personnes
31:11en situation de précarité. Elle connaît mal
31:13ses droits en matière d'accès aux soins.
31:15Du coup, elle hésite à entamer des démarches
31:17auprès des médecins ou des hôpitaux.
31:19L'histoire du coût
31:21n'a aucune importance.
31:25Parce que pour qu'il y ait remboursement,
31:27il faut qu'il y ait avance de frais de votre côté.
31:29On est d'accord ?
31:31Mais vous, ce n'est pas le cas.
31:33Vous avez une couverture maladie,
31:35vous avez la mutuelle.
31:39Donc il n'y a pas d'histoire de remboursement.
31:41Vous n'allez pas devoir sortir un seul euro.
31:43Rien.
31:45Même pas 5 centimes d'euro.
31:47Antoinette Salem
31:49est médecin d'élévole à la Bois.
31:51J'avais invité Anne à venir aujourd'hui.
31:53Parce qu'elle est dans une dynamique
31:55où elle se dit qu'à un moment donné,
31:57ça serait bien qu'elle commence
31:59à s'occuper d'elle, de ses yeux,
32:01de ses oreilles, etc.
32:03Oui, elle doit s'occuper de son diabète.
32:05On en a parlé encore la semaine dernière.
32:09Le docteur Salem connaît bien Anne.
32:11Il vient la voir en consultation régulièrement
32:13pour des problèmes très largués.
32:15Avec elle, comme avec ses autres patients de l'Agora,
32:17le médecin sait lire entre les lignes.
32:19Chaque semaine, il y a quelque chose de nouveau.
32:21Une fois, c'est un problème de peau.
32:23Une fois, c'est un problème avec les yeux.
32:25Une fois, c'est un problème avec ses pierres.
32:27Chaque semaine, il trouve quelque chose.
32:29Au fond, je crois que c'est pour être juste.
32:33Pour sortir de la transparence,
32:35se sentir malade,
32:37comme pour se sentir vivant.
32:39Le docteur Antoinette Salem
32:41est à la retraite depuis plusieurs années.
32:43Deux fois par semaine,
32:45elle vient bénévolement assurer
32:47des matinées de consultation pour les personnes de la rue.
32:49Et elle est toujours très attendue.
32:51Ah, vous avez changé de tenue, là !
32:55Martine, vous me rappelez votre nom de famille ?
32:57Je l'ai oublié.
32:59Bon, ils ont tous une fiche.
33:01Quand ils viennent en consultation, on fait une fiche
33:03qu'on met à jour s'ils reviennent en consultation.
33:05Enfin, c'est le dossier médical.
33:07Bon, succinct, mais c'est un dossier médical.
33:11Alors, qu'est-ce qui se passe, Martine ?
33:13Vous avez cassé votre pied.
33:15Allongez-vous, allongez-vous.
33:17J'ai la jambe à portée de main, si je puis dire.
33:19Comme tout généraliste,
33:21le docteur Salem soigne des angines,
33:23des gastros et autres bobos.
33:25Mais ici, elle est souvent confrontée
33:27à des blessures multiples dues à des bagarres de rue.
33:29En tant que bénévole,
33:31j'ai un méfaut étant le pansement de ma vie.
33:33Dans la rue, la violence est si quotidienne
33:35qu'elle en deviendrait presque banale.
33:37Alors, il y a les pansements de bagarres.
33:39Il y a eu aussi un moment
33:41des pansements suite à des brûlures
33:43quand l'hiver, ils dorment sur des bouches de métro.
33:45Ça peut occasionner des brûlures.
33:47Ça peut occasionner des brûlures.
33:49Et là, c'est embêtant quand même.
33:51Brûlures,
33:53gersures, blessures,
33:55malnutrition,
33:57la vie dehors use les corps.
33:59Ça,
34:01il décompresse
34:03et un petit peu de sparadrap pour l'été.
34:05D'accord ?
34:07Ça va ?
34:09Mais les troubles les plus fréquents
34:11sont surtout d'ordre psychologique.
34:13Est-ce que vous êtes déjà venu en consultation ici ?
34:15Non ? Jamais ? D'accord.
34:17Donc, je vais vous faire une fiche.
34:19Et sont souvent liées à des questions d'addiction
34:21de tout genre.
34:23Au début, on m'avait donné 10 Movan.
34:25Tous les soirs. Autrement, je ne dors pas.
34:27Je fais des cauchemars. Avec ça, je dors 5-6 heures.
34:29Autrement, je ne dors pas.
34:31Le problème, c'est que quand on est à la rue,
34:33ce n'est pas bon non plus de prendre des somnifères.
34:35Je ne peux pas vous prescrire des somnifères.
34:37En 12 ans de travail
34:39auprès des personnes marginalisées,
34:41le Dr Salem a appris à reconnaître
34:43les signes d'addiction.
34:45Y compris aux médicaments.
34:47C'est quelque chose qui est quand même dangereux.
34:49Surtout si vous en prenez.
34:51Ça fait combien de temps que vous prenez des Movan ?
34:53Depuis l'accident.
34:55J'ai eu un drame.
34:57Ma fille et ma femme voulaient vivre.
34:59Ça m'a amené à la rue.
35:01Et depuis, je ne dors pas.
35:03Mais il y a d'autres manières
35:05de résoudre le problème
35:07que de prendre des somnifères.
35:09Non, il n'y en a pas.
35:11Il y a des signaux psychologiques,
35:13des trucs qui ne servent à rien.
35:15Si ça ne sert à rien,
35:17le somnifère, non.
35:19Elle sait aussi comment garder son sang froid.
35:21J'ai cru qu'il allait
35:23devenir extrêmement agressif
35:25quand j'ai refusé les somnifères.
35:27Le regard a changé.
35:29Ça avait été des pistolets.
35:31J'en prenais plein la tranchée.
35:33C'est quand même très dur la vie à la rue.
35:35Si il est profondément endormi
35:37et assommé avec son médicament,
35:39avec ses affaires,
35:41ou tabassé,
35:43il va être moins vigilant
35:45et moins capable de se réveiller
35:47aux moindres phénomènes un peu bizarres.
35:49A mon avis, ce n'est pas de somnifères
35:51dont il a besoin.
35:53Je ne dors pas, mais je fais des cauchemars.
35:55Je pense qu'il a développé
35:57une certaine addiction aux médicaments.
35:59J'ai dit non.
36:01Il y a vraiment
36:03une espèce d'agressivité
36:05à peine contenue
36:07Non, parce que je ne sais pas
36:09ce qu'il va en faire.
36:11Difficile d'accompagner des personnes
36:13dans des projets de vie
36:15quand l'emprise de l'alcool ou de drogue dure
36:17se fait sentir.
36:19Alors ici, la lutte contre les addictions
36:21est au cœur de toutes les conversations.
36:23Comme ce matin pour Céline,
36:25assistante sociale,
36:27et Jérôme, éducateur spécialisé.
36:29Qu'est-ce que tu as fait ce week-end ?
36:33Rien.
36:35T'as consommé beaucoup ?
36:37Ouais, j'ai fait ça.
36:39Un peu ?
36:41Un peu.
36:43Ce jeune homme n'a pas encore 30 ans.
36:45Il boit 1 à 2 litres de bière
36:47chaque jour et consomme
36:49également des stupéfiants.
36:51Mais depuis quelques semaines,
36:53il envisage de décrocher.
36:55Tout le travail de l'équipe consiste
36:57à l'encourager subtilement.
36:59Tu manges un peu ou pas ?
37:01Est-ce que tu manges en ce moment ?
37:03J'ai vachement maigri.
37:05C'est important que tu puisses manger un peu
37:07et prendre des forces.
37:09Sinon, ça va être dur
37:11de tenir comme ça.
37:13Je trouve qu'on arrive à discuter avec lui.
37:15Il y a des moments où il ne veut rien entendre
37:17donc c'est plus compliqué.
37:19On l'a repris aussi par rapport à son comportement
37:21parce que de par sa situation,
37:23il y a des accès de violence parfois
37:25dû aussi aux produits qu'il consomme.
37:27Il ne va plus se souvenir.
37:29Il peut avoir un comportement
37:31plus ou moins agressif avec les personnes de l'équipe
37:33ou avec d'autres personnes qui fréquentent la structure.
37:35L'idée, c'est de reprendre ça avec lui,
37:37d'en reparler.
37:39Même s'il ne s'en souvient plus,
37:41il se souvient quand même qu'il a déconné.
37:43L'important, pour continuer
37:45à travailler avec lui sereinement,
37:47c'est de reprendre ces choses-là
37:49et de mettre des mots dessus.
37:51La question de l'addiction va souvent de pair
37:53avec des troubles psychiatriques,
37:55névroses, schizophrénie, troubles de la personnalité.
37:57Bonsoir.
37:59C'est bon, t'as trouvé ?
38:01Un tiers des personnes vivant à la rue seraient concernées.
38:03Il est comment ton sac ?
38:05A quelle couleur ?
38:07Des questions quotidiennes pour les travailleurs sociaux
38:09formés à exercer un accompagnement tout en patience
38:11et en bienveillance.
38:13Putain de merde !
38:17C'est son boulot.
38:19Tu ne veux pas te mettre devant ?
38:21Comme ça, ça va te rapprocher.
38:23C'est un échange.
38:25Nous, on est là pour rendre des services,
38:27pour accompagner les gens dans leur parcours.
38:29Mais à travers ça, il y a la rencontre avec l'autre,
38:31il y a tout ce qu'on peut apprendre de l'autre aussi,
38:33de cultures différentes, de parcours de vie.
38:35Donc tous les jours, c'est un enrichissement aussi personnel.
38:37Mais ce qui est intéressant,
38:39c'est quand les gens reviennent nous dire
38:41aujourd'hui, tout va bien,
38:43j'ai retrouvé un boulot, je me suis marié, j'ai des enfants.
38:45C'était un passage de ma vie, ça a été difficile.
38:47Aujourd'hui, ça va mieux.
38:49Et puis ce retour-là est aussi positif pour nous.
38:51Ça veut dire que notre mission a du sens.
38:53On a été utile à un moment donné
38:55pour les personnes qui sont passées ici.
38:57Il y a du soleil aussi.
38:59Il y a du soleil partout.
39:01On peut se mettre au plan d'eau.
39:03On peut se mettre au plan d'eau.
39:05Impossible de trouver un point de fraîcheur
39:07aujourd'hui pour les Gégés.
39:09Les températures dépassent les 35 degrés.
39:11En plein Paris, l'air est irrespirable.
39:15Ça va Marie ?
39:17Alors c'est à l'Agora qu'ils trouvent un peu d'ombre.
39:19Le plan canicule est activé.
39:21Exceptionnellement,
39:23l'accueil du jour est ouvert plus longtemps que d'habitude.
39:25On ne ferme pas ce midi.
39:27Ah, désolé.
39:29C'est où ?
39:31Parce que c'est très chaud aujourd'hui.
39:33Les équipes d'Emmaüs sont vigilantes.
39:35Les recommandations pour ne pas se déshydrater
39:37doivent être appliquées à la lettre.
39:41Vous avez une petite bouteille d'eau ?
39:43Car ce public est tout aussi vulnérable
39:45que le sont les personnes âgées
39:47ou les bébés en période de forte chaleur.
39:49Bonjour madame le docteur.
39:51Ça va ? Vous allez bien ?
39:53Bonjour.
39:55Enchanté, ça me fait plaisir que vous soyez là.
39:57Et pour le docteur Salem, la médecin bénévole,
39:59chaque consultation est aussi l'occasion
40:01de rappeler les gestes essentiels.
40:03Je sais que c'est le canicule.
40:05Est-ce que vous venez beaucoup d'eau ?
40:07Oui, bien sûr.
40:09Contrairement aux idées reçues,
40:11c'est l'été que l'on compte
40:13le plus de décès parmi les SDF.
40:15Les périodes de grosse chaleur
40:17sont pour les gens qui vivent à la rue
40:19beaucoup plus dangereuses
40:21que les périodes hivernales.
40:23Elles sont plus dangereuses
40:25parce qu'une grande partie
40:27de la population qui vit à la rue
40:29s'alcoolise.
40:31Quand on s'alcoolise en période de canicule,
40:33il y a des déshydratations
40:35qui peuvent être beaucoup plus rapides.
40:37Le conseil que je peux leur donner,
40:39c'est de boire beaucoup d'eau.
40:41Dans l'alcool, il y a de l'eau.
40:43En plus, ça réchauffe.
40:45Ça modifie un peu le métabolisme.
40:47Ça vous fait transpirer davantage.
40:49Ça vous fait déshydrater.
40:51Ça peut amener à des comas,
40:53des malaises et des comas.
40:55Autre point à surveiller de près
40:57pour le médecin, les pieds,
40:59fragilisés par la chaleur.
41:01Alain est venu consulter
41:03parce qu'il a des douleurs
41:05qui l'inquiètent.
41:07Les pieds, c'est fondamental.
41:09Quand vous êtes à la rue,
41:11pourquoi ne pas prendre le métro ?
41:13Quelqu'un qui ne peut pas marcher
41:15à la rue, c'est dramatique.
41:21Et parce que c'est loin d'être un détail,
41:23le Dr Salem n'est pas la seule
41:25à veiller sur les pieds des sans-abri.
41:27Bonjour !
41:29Vous viendrez pour les pieds ?
41:31Toutes les semaines,
41:33Michèle Loquet, socio-esthéticienne,
41:35organise un atelier de soins des pieds
41:37dans le grand hall de l'agora.
41:39Vous marchez beaucoup, hein ?
41:41Je ne sais pas combien
41:43vous faites de kilomètres
41:45et vous avez souvent mal aux pieds.
41:47Vos chaussures, vous n'êtes pas bien dedans
41:49mais ce n'est pas facile d'en avoir d'autres.
41:51Si nous, on était à leur place
41:53avec la chaleur
41:55et des chaussures très vieillissantes,
41:57on serait vraiment contents
41:59de faire des bains de pieds
42:01et de s'en occuper.
42:03Et on y va !
42:05En cette période de canicule,
42:07ces ateliers ne désemplissent pas.
42:09Oui, ça fait du bien.
42:11Ça fait vraiment du bien.
42:13Vous n'imaginez pas.
42:15Ça aide à supporter le choc.
42:17Il faut bien penser
42:19à s'essuyer entre les orteils
42:21pour éviter la mycose.
42:23C'est un petit champignon.
42:25La socio-esthéticienne
42:27est très attentive à la santé des SDF
42:29et n'hésite pas à les orienter,
42:31si nécessaire, vers le podologue
42:33et le médecin de l'agora.
42:35Prendre soin de son corps,
42:37souffler un moment,
42:39retrouver une dignité,
42:41c'est le but des ateliers esthétiques
42:43que propose Michelle.
42:45Au sous-sol, avec Camille,
42:47elle prépare un moment de détente
42:49réservé aux femmes.
42:51Alors, Bougéna...
42:53En fait, elle est en train
42:55de faire sa lessive.
42:57Bougéna est nouvelle
42:59et elle aimerait bien participer.
43:01Mais elle ne peut pas prendre le risque
43:03de laisser son sac d'affaires à l'étage.
43:05Voilà, c'est Lucas qui l'a descendu
43:07pour vous.
43:09Je ne sais pas comment on va le remonter.
43:11Dans ce caddie, il y a toute la vie de Bougéna.
43:13Ses vêtements, mais aussi ses papiers,
43:15ses photos, ses médicaments
43:17et son argent.
43:19Si tu fais un atelier comme ça,
43:21en te disant que ça va être génial,
43:23mais que tu penses à des gens
43:25comme nous qui avons des maisons,
43:27tu te gourres, tu es à côté.
43:29Donc là, si je lui dis
43:31que je ne descends pas votre bagage
43:33c'est impossible.
43:35De même, elles arrivent un peu en retard.
43:37Parfois, elles déjeunent
43:39dans un restaurant social à l'autre bout de Paris.
43:41Si je lui dis qu'il est 14h22
43:43et que je ne vous prends pas,
43:45ce n'est pas faisable.
43:47Au début, j'étais un peu psychologique.
43:49Et puis, je me suis détendue avec le temps.
44:04Alors qu'elle travaillait depuis 10 ans
44:06dans la publicité, Camille Perles
44:08a choisi de diviser son salaire par 4
44:10pour s'investir auprès des gens de la rue.
44:12Et avec Michel,
44:14elles offrent bien plus qu'on pourrait croire.
44:17Quand une personne a été
44:19plus ou moins longtemps à la rue,
44:21elle a perdu son estime.
44:23Elle n'est plus regardée par personne.
44:25Souvent, elle se laisse aller.
44:27Apprendre à se maquiller,
44:29c'est retrouver son estime,
44:31s'aimer,
44:33avoir plaisir à regarder dans le miroir.
44:37Chaque semaine,
44:39quand Bougéna ou Aïssatou se regardent dans le miroir,
44:41elles reprennent confiance en elles
44:43et elles oublient tout.
44:45La brutalité de la rue,
44:47la violence des hommes,
44:49les nuits sans sommeil en recherche d'un toit.
44:51Nous sommes avec nos stress.
44:53Chacun a ses problèmes.
44:55Mais quand on vient
44:57à la tenue,
44:59quand on vient ici,
45:01on se débarrasse.
45:03Moi, j'ai un problème de santé.
45:07Mes enfants sont loin de moi.
45:09Je suis toute seule.
45:13Et grâce à cette belle femme,
45:15on est bien traité.
45:17On arrive à oublier
45:19beaucoup de choses.
45:23C'est grâce à...
45:25C'est tout.
45:27Ce dont je suis fière,
45:29c'est qu'on fasse quelque chose
45:31qu'il n'y a pas ailleurs.
45:33Qu'elles soient traitées comme des reines pendant une heure.
45:35Que ces femmes-là,
45:37que les gens qui regardent pas dans la rue,
45:39qui dorment sur des matelas pourris,
45:41dans des endroits merdiques,
45:43ici, c'est des reines.
45:53Et messieurs, demi-tour !
45:55Demi-tour !
45:57Demi-tour !
45:59On t'attendait !
46:01Tu m'attendais en partant.
46:03Non, mais on allait à la rencontre.
46:05C'est longtemps qu'on s'était pas vus, nous.
46:07Aucun jour.
46:09J'étais pas là la semaine dernière.
46:11J'espère qu'elle n'est pas malade.
46:13Bonjour.
46:15Angeline revient d'un tournage à l'autre bout de la planète
46:17et elle est attendue ce soir
46:19sur les planches d'un théâtre parisien.
46:21Ça va ? Je vais poser mes affaires, j'arrive.
46:23Oui, j'arrive tout de suite.
46:25Bonjour.
46:27Mais elle tient à sa séance hebdomadaire
46:29à l'accueil de jour des maires pour les gens de la rue.
46:31Il y a deux semaines, du coup, elle m'avait demandé du Shakespeare.
46:33Donc j'ai pris des monologues de Shakespeare
46:35et j'ai pris les d'autres monologues sur lesquels on travaillait déjà.
46:37Chaque semaine, cette comédienne metteur en scène
46:39retrouve les GG, Jean-Luc, Marine, Anne
46:41et tous ceux qui ont envie de participer librement
46:43à l'accueiller théâtre
46:45proposé par l'Agora.
46:47Allez, au bout de l'inspire,
46:49au bout de l'inspire, au bout de l'inspire.
46:51Le bloc monte bien les épaules marines.
46:53Expire.
46:55Roule les épaules vers l'extérieur.
46:57Un atelier qui stimule la fibre artistique
46:59mais qui permet d'abord
47:01de se reconnecter avec un corps
47:03souvent délaissé.
47:05Pour moi, le travail physique et technique,
47:07c'est 95% du boulot, quasiment,
47:09dans une préparation, par exemple.
47:11Et je trouve ça hyper important qu'ils en prennent la mesure.
47:13Ils ont aussi, avec ça,
47:15des corps qui sont super abîmés.
47:17Ils ont un rapport au corps qui est quand même
47:19vraiment très particulier.
47:21Ils passent leur journée à marcher.
47:23Ils ont des fonctions vitales
47:25qui sont altérées par le fait qu'ils se nourrissent mal,
47:27qu'ils dorment pas, qu'ils picolent, qu'ils se droguent, etc.
47:29Et je trouve qu'il n'y a aucun moment
47:31où ils essayent de rassembler
47:33et juste un tout petit peu prendre conscience de
47:35on est là, on a deux bras, on a deux jambes.
47:37Est-ce que ça fonctionne aujourd'hui ? Est-ce que ça ne fonctionne pas ?
47:39Et donc, pour moi, ce travail d'échauffement,
47:41il vient en même temps que le travail de l'acteur.
47:43C'est le bassin qui part en premier marine.
47:45Là, ici, vraiment.
47:47Ils insistent sur le travail corporel
47:49comme avec des professionnels.
47:51Transfère le poing du corps à droite, genou gauche.
47:53Il fait une chaleur !
47:55De bête !
47:59Allez, respirez bien.
48:01Et continuez à vous bien respirer.
48:03Ne vous mettez pas en apnée.
48:05Mais Gégé, quel jeu de jambes sublime !
48:07Des exercices pas toujours faciles
48:09à mettre en pratique avec ces comédiens
48:11venus de la rue.
48:13Alors Ambline a dû s'adapter.
48:15Ils ont trois pantalons et quatre manteaux,
48:17l'un sur l'autre, empilés, tous.
48:19Et j'ai mis longtemps avant qu'ils enlèvent
48:21couche par couche aussi.
48:23Là, on a trois mètres à faire entre le public et le plateau.
48:25Il y en a encore qui viennent avec leur sac,
48:27qui font ce trajet-là avec leur sac.
48:29Mais parce que déjà, ils sont tout le temps tirés de toutes leurs affaires.
48:31Donc ils ont souvent tout avec eux tout le temps,
48:33même s'ils se déplacent pour aller à la machine à café.
48:35Et puis il y a aussi le fait que
48:37c'est leur armure, quoi.
48:39Vachement compliqué d'un coup d'enlever
48:41tout ça, toutes ces couches,
48:43pour être dans autre chose.
48:45Ah, tu veux choisir une autre phrase, toi ?
48:47On fait d'abord un peu celle-là et après tu écriras l'autre, ok ?
48:49Choisis-la.
48:51Vas-y, Gégé.
48:53Marcha lâcha son châle, attaque bien.
48:55Marcha lâcha son châle,
48:57et châle, marcha, marcha sur son châle.
48:59C'est mieux. Un peu de volume.
49:01Envoie du son.
49:03Elle est une bonne professeure.
49:05Elle nous aime bien.
49:07Et on travaille bien avec elle.
49:09Et vous voyez, il y a une bonne ambiance.
49:11Toujours en train de rigoler.
49:13Et puis Angeline,
49:15elle nous paye le café.
49:17Ça passe le temps, quand même, hein.
49:19Ça change les idées.
49:21Oh voilà, oh voilà,
49:23un assassin en mot de lire,
49:25justice, justice,
49:27récipature.
49:29Je suis assassiné.
49:31On m'a coupé la gorge.
49:33On m'a dérobé mon argent.
49:35Qui peut c'être ?
49:37Il y a de la joie,
49:39tout le jour.
49:41Mon cœur bat,
49:43chavire et chancelle.
49:45C'est l'amour
49:47qui vient.
49:49Avec un je ne sais quoi.
49:51C'est l'amour.
49:53Et voilà comment chaque semaine,
49:55l'espace d'une matinée,
49:57bien articulée Molière, devient tout aussi important
49:59que de chercher un coin pour dormir
50:01ou de dénicher quelques euros pour déjeuner.
50:05Ça sent bon Paris.
50:07Ça sent bon.
50:13On a tous les jours le petit rituel,
50:15on va dîner, on va boire,
50:17fumer, même draguer.
50:19Depuis plus de 20 ans
50:21à la rue, les GG connaissent
50:23toutes les ficelles du système D, comme ils disent.
50:25Entre associations caritatives
50:27et structures sociales, ils savent toujours
50:29où manger, comme ce soir
50:31dans l'un des restaurants solidaires
50:33de la mairie de Paris.
50:35Le restaurant est ouvert
50:37toute l'année, mais c'est au plus les jours fériés.
50:39C'est fermé.
50:43Et c'est fermé le dimanche.
50:45Et du coup, comment vous faites le dimanche ?
50:47Comme je viens de vous dire, genre,
50:49déjà venu dans la manger,
50:51on ne mange pas.
50:53On attend ce qu'on a dit.
50:57Il n'y a pas de trouble.
50:59Et comme on n'est pas des voleurs,
51:01on ne peut pas aller mouler au magasin.
51:03On n'aura pas de trac.
51:07C'est vrai.
51:11C'est le système des merdes.
51:13Mais c'est très dur.
51:15C'est très dur.
51:17On est ensemble parce que
51:19si vous sortez tout seul, vous craquez.
51:21C'est trop.
51:23C'est ce que je disais ce matin.
51:25Si tu es tout seul dans la rue,
51:27tu converges.
51:29Tu peux faire n'importe quoi.
51:31Tous les soirs,
51:33les Inséparables GG,
51:35comme plus de 110 000 autres personnes
51:37sans abri en France,
51:39cherchent un endroit où passer la nuit.
51:41L'hiver, c'est le métro qu'ils choisissent.
51:43Mais en cette période de chaleur estivale,
51:45ils confient leur sommeil
51:47à Saint-Austache,
51:49en plein coeur du quartier Réal.
51:51Où est la vache ?
51:53Ah oui, ma casquette.
51:55J'avais oublié ce matin.
51:57Il y a quelqu'un qui l'a mis là-dedans.
52:01Ah oui.
52:03C'est la preuve qu'il n'y a pas
52:05que des voleurs en France.
52:07Me voici arrivé
52:09à mon port.
52:11Dernière étape,
52:13c'est s'allonger.
52:19Viens là, mon petit.
52:23Allez, c'est parti.
52:25Hop là.
52:31Et bonne nuit, les petits.
52:33Voilà.

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