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Bénin – Restitution des trésors royaux : Mati Diop raconte Dahomey, Ours d’or à Berlin
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09/05/2025
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00:00
On passe à la culture dans ce journal et notre invitée de ce soir est une réalisatrice audacieuse.
00:06
A la fois poétesse des images, passeuse de mémoire, après Atlantique Grand Prix à Cannes,
00:12
Matidiop revient avec Daomé, un documentaire salué dans le monde entier qui raconte le rapatriement des 26 trésors du royaume de Daomé,
00:20
pillé par la France et restitué au Bénin 130 ans plus tard.
00:24
Un film où la voix des œuvres résonne, où la jeunesse africaine s'interroge et où le cinéma devient un acte de réparation.
00:33
Matidiop, bonsoir et bienvenue dans votre journal de l'Afrique.
00:37
Bonsoir.
00:38
C'est un plaisir de vous recevoir. On vous reçoit pour la sortie en Afrique francophone de votre film
00:43
qui grâce à Soudou Connexion sera diffusé au Burkina, Cameroun, Congo, Côte d'Ivoire, Gabon, Guinée, Togo ce 9 mai.
00:51
Et déjà sur les écrans au Kenya depuis le 2 mai, on montre les images à l'antenne.
00:56
Matidiop, dites-nous comment est née cette histoire, cette idée de Daomé après Atlantique que vous avez fait,
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qui était un film très différent.
01:05
En réalité, le film est né dans mon esprit en 2017, au moment où le sujet de la restitution refait surface
01:12
dans le champ politico-médiatique. Et ce mot, restitution, a une très forte résonance en moi.
01:22
Non seulement je me rends compte à quel point le tabou est enfoui, pas seulement dans la société française,
01:29
mais en moi aussi. Et je me rends compte que ce mot incarne assez précisément la démarche de cinéaste
01:39
que j'entreprends depuis 2008, où j'ai choisi d'engager mon cinéma en Afrique.
01:46
Et où à travers mon cinéma, quelque part, à ma façon, je restitue un certain nombre de réalités
01:53
dans leur complexité, sous des dimensions sensibles, existentielles.
02:00
Et du coup, ce mot s'est mis à évoquer beaucoup de choses à la fois pour moi.
02:06
J'étais en écriture d'Atlantique au moment où j'ai senti que j'allais consacrer sans doute
02:11
un deuxième long-métrage à cette question. Et en 2021, beaucoup plus tôt que ce que j'aurais imaginé,
02:19
j'apprends dans la presse que 26 trésors royaux sont sur le point d'être apatriés.
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Et au lieu d'écrire une fiction, ce que j'envisageais à l'origine, ça se transforme en film
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qu'il faut mettre en place dans l'urgence. Et ce documentaire commence.
02:32
Et alors, la forme est aussi très singulière. Le film mêle des silences, des plans méditatifs,
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la voix vibrante des œuvres, écrite par Mackenzie Orsel, écrivain haïtien.
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Comment est venue cette idée, justement ?
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Pour moi, c'était déjà une évidence de confier cette voix des trésors à une écrivaine
02:56
ou à un écrivain haïtien. C'est finalement Mackenzie Orsel que j'ai choisi.
03:02
Et vous parlez de la dimension très singulière de la forme, des silences, des plans méditatifs,
03:09
mais qui mènent tous vers un débat extrêmement frontal qui représente le cœur du film.
03:16
D'ailleurs, je propose qu'on écoute un extrait du film et on va voir qu'il y a ce débat-là
03:21
qui est très fort aussi dans le film. On écoute.
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Notre propre culture n'a pas été apprise dans notre nom.
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Ce qui a été pillé il y a plus d'un siècle, c'est l'âme des peuples.
03:32
On va permettre aux historiens, aux artistes, de se réapproprier cette histoire-là.
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C'est un fait pour moi politique. En rien, ce n'est historique.
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– Extrait du film Daomé, Matti Diop, on a vu, alors les séquences sont évidemment plus longues,
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mais certains jeunes disent que cette restitution, on entend dans le film,
03:50
aurait servi des agendas politiques, aussi bien de Partes Estallon que d'Emmanuel Macron.
03:56
Diriez-vous que Daomé est néanmoins un film politique ?
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– Daomé, avant même d'être un film et un geste politique,
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qui rend une histoire, une voix, une subjectivité au trésor royau
04:10
et qui permet à la jeunesse qu'on entend dans ce film
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de reprendre possession du débat, d'en faire sa propre histoire
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et surtout de revitaliser le sujet de la restitution du point de vue africain
04:25
et de décentrer cette question de l'Europe,
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puisque ça fait quand même très très longtemps
04:30
que les débats qui sont entendus et partagés viennent plutôt d'Europe,
04:35
est-ce que c'est important de proposer un contrepoint radical ?
04:38
– Radical et très intéressant.
04:41
Dans le film, il y a une question qui hante littéralement tout le récit,
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c'est 26, c'est un chiffre, 26 œuvres.
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Au début d'ailleurs, on entend, c'est ni plus ni moins,
04:51
c'est pas 24, c'est pas 25, c'est pas 29 ni 30, c'est 26.
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Certains y voient un geste symbolique, d'autres, dans le film d'ailleurs,
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c'est dit, une forme d'humiliation.
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Mais qu'est-ce que vous en pensez ?
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Est-ce que ce chiffre est devenu un personnage à part entière
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avec lequel vous avez pu jouer ?
05:09
– Là, vous tirez vraiment l'un des fils.
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En fait, il y a tellement de questions, en fait,
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qui sont soulevées à travers cette restitution.
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26 est l'une des énigmes de cette restitution.
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Au début du film, lorsque cette voix nous parle du noir,
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du sous-sol des quai Branly, de l'oubli, du silence,
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cette voix, elle parle au nom de tous les œuvres pillées sur le continent africain,
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mais elle commence par dire qu'on l'a appelée 26.
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Or, il s'agit du nombre d'œuvres qui ont été rendues.
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C'est une manière d'ironiser sur la dimension arbitraire et aléatoire de 26.
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Ça aurait pu être 24, ça aurait pu être 350, ça aurait pu être 1 000.
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– Sachant qu'il y en a 7 000 en tout.
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– C'est 26, finalement, une 27e a été rapatriée.
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Mais ça révèle surtout l'ampleur, en fait, de toutes les œuvres qui ont été pillées,
06:07
la dimension vertigineuse du chiffre, à quel point ce pillage est massif.
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En arrivée à 26, c'est presque vertigineux, parce que ça raconte aussi l'ampleur du pillage,
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mais aussi la dimension paradoxalement immatérielle et l'impossibilité d'une réparation aussi,
06:32
puisque c'est avant tout irréparable.
06:34
Ce crime contre l'humanité que représente la colonisation et le pillage qui s'en est suivi est avant tout irréparable.
06:41
Mais à partir de 26, peut-être qu'un débat se pose,
06:49
peut-être qu'un débat a le mérite de soulever toutes les questions qui n'ont pas été soulevées
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depuis des décennies, depuis des siècles, de rompre un silence
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et de permettre, en tout cas à travers ce film, à une jeunesse de poser toutes les questions
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qui sont légitimes à être posées.
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– À être posées, absolument.
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Alors, rapidement, Mathilde, vous avez fait le premier long-métrage de fiction sur l'immigration atlantique.
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Ça, ce film documentaire magnifique, très fort sur les restitutions.
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C'est quoi, les projets en cours ?
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Qu'est-ce que vous pouvez nous en dire ?
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– Je ne révèle jamais la suite, mais c'est toujours cette frontière
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entre le documentaire et la fiction et entre l'intime et le politique.
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– Eh bien, on sera là pour le voir et j'espère que vous viendrez nous en parler ici, au Journal de l'Afrique.
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Merci infiniment d'être venus.
07:40
– Merci de m'avoir reçu.
07:41
– Merci beaucoup, Mathilde, c'est ainsi que nous refermons ce Journal de l'Afrique.
07:44
Merci à tous ceux qui nous ont suivis partout dans le monde,
07:46
et ce soir en particulier, évidemment, de Dakar à Paris,
07:50
en passant par Cotonou, à Beaumet, et toutes les villes du Bénin,
07:55
et bien d'autres sur le continent africain.
07:58
Merci.
07:58
Restez avec nous, car l'actualité continue sur France 24,
08:00
il paraît que ça ne s'arrête jamais d'ailleurs.
08:01
– Sous-titrage Société Radio-Canada
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