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Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Vendredi 9 mai 2025 : Brian Bouillon Baker, fils de Joséphine Baker et conseiller artistique et historique du spectacle "Joséphine Baker - Le Musical".

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Transcription
00:00Bonjour Brian Bouillon-Baker.
00:01Bonjour.
00:02Vous êtes l'un des enfants de Joséphine Baker, le numéro 7 sur les 12 qui composait cette famille nombreuse et heureuse, appelée la famille Arc-en-Ciel.
00:09Vous avez, aux côtés de votre mère, rencontré Dalida, Beko, Jackie Kennedy, le pape Jean-Paul VI, la princesse Grasse de Monaco ou encore Fidèle Castro.
00:17Car oui, votre mère était une femme unique, adulée, mariée à 13 ans, issue du ghetto noir de Saint-Louis, Missouri, quand elle a débarqué en France.
00:25Elle est devenue l'icône du tout Paris des années folles, résistante, elle symbolise encore aujourd'hui la grande femme universelle.
00:33D'ailleurs, vous lui avez déjà consacré des biographies, enfin célébrée au Panthéon.
00:37Un centre social a aussi été inauguré il n'y a pas si longtemps que ça.
00:41La veille d'une journée internationale du droit des femmes, il n'y a pas de hasard.
00:44Les 6 et 7 juin prochains et jusqu'au 25 janvier 2025, le spectacle musical Joséphine Baker se jouera sur la scène de Bobineau à Paris,
00:52après partir en tournée, avec comme légende « Sa vie est un roman, ce spectacle, sa lumière ».
00:58Brianne, vous êtes le conseiller artistique et historique de ce spectacle.
01:02Célébrer votre mère est-il une responsabilité finalement ?
01:06Écoutez, en tant que fils, finalement, moi, ma famille, ils m'ont un peu délégué comme ambassadeur, étant comédien et auteur.
01:14Bon, eux-mêmes, sœurs et frères, participent à certains événements, même certaines interviews,
01:20mais le plus souvent, c'est « Vas-y, toi, tu sais faire »,
01:24notamment lorsqu'il y a des inaugurations innombrables de groupes scolaires, de rues, de médiathèques,
01:29d'écoles de danse, de centres sociaux, culturels, un peu partout en France et à l'étranger,
01:35Belgique, Hollande, Allemagne, je reviens d'Autriche, là, grand événement, une grande exposition,
01:40Espagne, Italie, Angleterre, Maroc, États-Unis, enfin bref, Brésil, et j'en passe, donc Japon,
01:46eh bien, j'y vais, j'aime bien voyager, je pourrais parler au nom de ma famille et donc de ma mère,
01:52pas de problème, et puis le contact et donc le témoignage, ça, c'est quand même important.
01:57C'est même une sorte de devoir, quand même, que nous avons, nous, la famille, vis-à-vis de notre maman et de notre papa, Joe Bouillon.
02:05De voir, de mémoire, pour mieux comprendre, il faut justement comprendre cette famille qu'elle a créée,
02:10cette tribu arc-en-ciel, comme elle l'appelait. Vous êtes né, vous êtes cabile, vous êtes né en Algérie,
02:16de parents qui sont malheureusement décédés dans un bombardement.
02:20Comment vous vous êtes retrouvé au sein de cette tribu arc-en-ciel ? Comment vous avez été adopté par Joséphine Becker ?
02:26Eh bien, j'ai été adopté, donc, du coup, l'Algérie était française, c'était un département d'outre-mer,
02:31donc, après ces bombardements et ces tirs entre l'armée française et les indépendantistes algériens,
02:36je m'en retrouve à l'assistance publique d'Alger.
02:39On me donne un autre prénom, un prénom de pupille, donc, de Slimane Saïdani, mon nom d'origine, je reviens Jacques Varande.
02:46Pour quelques... Jacques Varande, pourquoi ? On ne saura jamais.
02:48Et quelques temps plus tard, ma mère fait une soirée de gala pour l'assistance publique à Alger.
02:53Et comme elle adorait voir les bébés, les enfants, elle va, après le concert, de nuit, voir la pouponnière.
02:59Alors, évidemment, tous les bébés dorment. Et sauf un, un couche-tard que j'ai toujours été et qui ne dort pas et qu'elle remarque, celui-là, il me sourit, il est mignon, il est à doigt.
03:11Ah, et puis, il est né le 3 juin, comme moi. C'est un signe. Je le prends. Donc, c'est mon mectub, si je puis dire.
03:18Sinon, je serais resté Alger, orphelin, je ne sais pas ce que je serais devenu.
03:22Et elle me donne deux prénoms. Brahim, d'abord, et Brian, ensuite. Mais comme elle prononçait le plus souvent l'américaine, bon, on m'appelle plus Brian.
03:31Mais, quoique dans la famille, sous certains amis maghrébins orientaux, eux, ils préfèrent m'appeler Brahim.
03:37Elle a été mariée à 13 ans, très jeune.
03:39Presque 14. C'est plus 14 que 13, mais bon.
03:43Plus 14 ans.
03:43Très jeune.
03:44Elle a vécu à Saint-Louis. Elle a connu des moments extrêmement difficiles dans son enfance, avec des descentes de blancs dans, effectivement, les quartiers noirs, où on brûlait les maisons.
03:54Ils brûlaient les maisons. Ils pendaient souvent des hommes et des femmes.
03:59Et en même temps, quand elle arrive à 19 ans en France, elle sait qu'elle a sans doute un destin à accomplir et à suivre.
04:07Elle ne se doute pas de ce qui va lui arriver.
04:09Non.
04:09Mais elle est convaincue, en tout cas, qu'à un moment donné, peut-être que sa parole va pouvoir être entendue.
04:16Là, il est un peu tôt. Quant à la 19 ans, non, non.
04:19Elle, n'oublions pas qu'elle est partie de Saint-Louis, donc à New York.
04:23Là, elle se fait repérer comme danseuse.
04:26Entre-temps, elle est passée de Joséphine McDonald, Fred à McDonald, son nom d'origine.
04:32Mais elle n'a pas fini en cheeseburger à New York.
04:35Elle est devenue baker par mariage.
04:37Bon.
04:37Et elle a ses premiers contrats.
04:39Donc, même si elle divorce de Willie Baker au bout de deux ans, elle gardera son nom d'artiste à vie.
04:44Mais lorsqu'elle doit partir, qu'elle est repérée à New York et qu'on lui propose de la tourner en France d'abord et en Europe ensuite,
04:52elle dit à la productrice, Caroline Dudley-Hagan,
04:56mais moi, je suis très bien de New York, je suis de mieux en mieux payé en tant que danseuse.
05:00J'ai mes repères.
05:01Bon, Paris, la France, c'est oui, tout le monde en rêve.
05:03Aux Etats-Unis, c'est un rêve pour les Américains.
05:06Voilà, la France, c'est le champagne, c'est l'élégance, c'est bon, bref, la cuisine.
05:11Enfin bref, c'est très beau, c'est très chaud.
05:14Mais après, moi, quand je reviendrai de cette tournée, j'aurais peut-être perdu ma place là où je joue en ce moment, au Cotton Club.
05:22Et c'est là, et puis j'adore New York.
05:24Et c'est là que la productrice, Dudley-Hagan, lui dit, pendant qu'elle se changeait derrière son paravent,
05:30lui dit, ok, Joséphine, et si on double votre cachet new-yorkais ?
05:35Et là, ma mère a passé la tête derrière le paravent, elle a fait, ah, dans ces cas-là, je vais adorer Paris.
05:40Donc elle ne pensait pas, et à la fin de sa vie, elle l'a dit dans une de ses dernières interviews au moment de Bobineau,
05:47elle a dit, jamais je n'aurais imaginé qu'il y ait une histoire d'amour à un couteau entre Paris et moi, à ce point-là,
05:54et avoir autant de succès, je pensais revenir avec la troupe, ce qui a été le cas pour tous les autres membres de la troupe.
05:59Au bout de quelques mois, il y a eu du succès à Paris, mais ils sont quand même rentrés.
06:03Il y avait d'ailleurs Sidney Béchet dans la troupe, qui restait très liée avec ma mère.
06:06Et elle, Paris l'a gardée et l'a consacrée, et en a fait une grande, grande vedette de Music Hall et une meneuse de revue.
06:12Elle n'a jamais oublié d'où elle venait, elle n'a jamais oublié de prendre soin des autres.
06:17La seule chose qui lui importait, finalement, c'était de traiter chaque individu dans toute son entièreté,
06:25refusant justement le rejet.
06:27Elle s'est beaucoup occupée des sans-domicile fixe, dès son arrivée.
06:31Elle avait vraiment un regard, elle avait ce besoin d'être aussi à leur côté.
06:39Oui, et ça déjà toute jeune.
06:41Bon, c'est par la suite qu'elle ira, elle s'engagera déjà avec la LICRA avant-guerre,
06:46qui était la LICA, la LIC contre l'antisémitisme, devenue entre-temps la LIC contre le racisme et l'antisémitisme,
06:52créée par Pierre-Pierre Bloch et qu'elle a rejoint très vite,
06:56et dont le fils, Pierre-Pierre Bloch, a créé un festival LICRA au Château-du-Milande depuis trois ans,
07:02qui a lieu le dernier week-end de juin.
07:05Mais avant ça, elle est déjà marraine, effectivement, des clochards de Paris à 20 ans.
07:11Et elle marraine de la soupe populaire et ensuite marraine des poules beaux de Paris.
07:16Donc déjà à 19-20 ans, ça veut dire qu'elle sait d'où elle vient.
07:20Et nous, elle nous a toujours inculqué, on a beaucoup parlé, en parlant de ma mère, de courage, c'est vrai, de générosité, c'est vrai, d'énergie, évidemment.
07:31Mais la simplicité, ça, elle nous doit inculquer de genre être simple, générosité, mais simple avec tout le monde.
07:39Les grandes se montrent comme les plus petits et surtout les moins, les plus défavorisés.
07:43La simplicité, c'est-à-dire dans le rapport avec les gens et si possible, l'aide, la générosité, ça, elle l'a eue.
07:50Après, elle s'est engagée beaucoup plus précisément, LICRA, puis les services secrets français, puis l'armée de l'air française, la résistance, évidemment.
07:57Et puis avec Martin Luther King et les droits civiques.
08:00Ce que ça montre, ce spectacle musical, c'est que les combats qu'elle menait sont encore mis à rue d'épreuve.
08:08Ils ne sont pas terminés. Là, c'est un peu un symbole d'affrontement de l'humanité contre la barbarie.
08:18Il y a tout un symbole aussi dans ce spectacle musical.
08:21Oui, c'est évidemment symbolique. Et puis, ça parle à un public varié. Il y a quand même aussi des jeunes, heureusement.
08:29Mais ça parle. Et beaucoup de gens me disent qu'on découvre, on apprend.
08:32Déjà, avec la panthéonisation, on a appris beaucoup de choses qu'on ne savait pas sur JV Finbaker, notamment dans ses engagements.
08:38La comédie musicale reprend tout cela avec un public qui... La comédie musicale tourne aussi en province et en Ile-de-France.
08:47Donc, beaucoup de gens découvrent et disent que c'est incroyable ce parcours.
08:51Et donc, c'est quand même important de relater tout cela.
08:54Mais je vais aussi, moi, pour les salons de livres, avec mon livre et mon éditeur,
09:00les inaugurations innombrables, rencontrer des publics de régions ou d'Ile-de-France ou de l'étranger.
09:08Et je termine souvent, quand on pose des questions, on me dit, mais votre mère, qu'est-ce qu'elle penserait de la situation actuelle,
09:14qui est parfois donc difficile un peu partout ?
09:17Et je leur réponds, je peux vous dire que ma mère dirait, écoutez, en France, en Europe et dans le monde, il y a toujours des problèmes.
09:25Mais, alors, être inquiet ou avoir peur, c'est humain.
09:27Désespérer l'humanité, sûrement pas.
09:29D'abord parce que c'est une combattante, une énergie.
09:31Et puis, elle dirait, et puis, attendez, en France, en Europe et dans le monde, nous sommes l'immense, l'écrasante majorité à vouloir vivre en paix, en fraternité et en respect.
09:43Et ça ne sont pas les ultra minoritaires, terroristes, intégristes, communautaristes, fauteurs de troubles, vat en guerre, qui prendront le dessus sur nos sociétés.
09:56Et bien là, je peux vous dire que tous les publics que j'encontre vous disent, ah, ça nous donne du baume au cœur, ça donne de l'espoir.
10:02Ce que vous dites, c'est ce qu'elle vous dirait.
10:04Voilà.

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