François Bayrou savait-il ? Depuis le début de l’affaire Bétharram, le Premier ministre est accusé d’avoir été au courant des violences infligées aux élèves de l’établissement catholique du Béarn, et de n’avoir rien fait. Et depuis le début, François Bayrou, ancien président du conseil général des Pyrénées-Atlantiques et ex-ministre de l’Éducation nationale, nie.
Comme vous pouvez le voir dans la vidéo en tête d’article, Le HuffPost a décortiqué la ligne de défense du Premier ministre, dans cette affaire pédocriminelle, la plus terrible dans l’histoire de l’éducation en France.
Comme vous pouvez le voir dans la vidéo en tête d’article, Le HuffPost a décortiqué la ligne de défense du Premier ministre, dans cette affaire pédocriminelle, la plus terrible dans l’histoire de l’éducation en France.
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00:00Est-ce que vous pourriez nous promettre que vous n'étiez pas au courant ?
00:03Qu'est-ce que vous voulez dire, promettre que je n'étais pas au courant ?
00:06Vous voulez que je vous le jure, quoi de brogue, quoi de fer ?
00:09François Bayrou, savait-il.
00:11Depuis le début de l'affaire Bétharam,
00:13le Premier ministre est accusé d'avoir été au courant des violences
00:15infligées aux élèves de l'établissement catholique du Béarn et de n'avoir rien fait.
00:20Et depuis le début, François Bayrou,
00:22qui est aussi ancien président du Conseil général des Pyrénées-Atlantiques
00:25et ex-ministre de l'Éducation nationale, nie.
00:28Évidemment, je n'ai jamais été informé de quoi que ce soit.
00:35J'ai dit que je ne savais pas.
00:36Le HuffPost a décortiqué la ligne de défense du Premier ministre
00:39dans cette affaire pédocriminelle la plus terrible dans l'histoire de l'éducation en France.
00:45D'abord, le flou.
00:48Depuis les premiers articles de presse sur l'affaire,
00:50après la constitution du collectif des victimes de Bétharam,
00:53François Bayrou, qui n'est pas encore Premier ministre,
00:55est interrogé sur ce scandale et impose un récit qui fluctue,
00:59des réponses vagues où il est difficile de comprendre ce qu'il a su et ce qu'il n'a pas su.
01:03C'est vrai que la rumeur, il y a 25 ans, laissait entendre qu'il y avait eu des claques à l'internat.
01:10Mais de risque sexuel, je n'avais jamais entendu parler.
01:13Seule l'une de mes filles se souvient d'une affaire de claques donnée par un surveillant.
01:17Jamais personne ne m'a alerté sur ce sujet, du moins dans mon souvenir.
01:20Celui qui se disait d'abord au courant de rien, se dit finalement au courant de violences physiques,
01:25notamment lors du dépôt d'une plainte en 1996, qui le conduit à demander une inspection.
01:30Je n'en avais aucune trace, et même pour ainsi dire, aucune mémoire.
01:35Cette évolution du récit le pousse à certaines contradictions,
01:38et notamment sur un point en particulier,
01:41sa rencontre avec le juge Miranda, chargé de l'enquête ouverte en 1998,
01:44visant le père Caricard, ex-directeur de l'établissement catholique,
01:49visé par une plainte pour viol sur mineurs.
01:51Dans un premier temps, le Premier ministre jure n'avoir jamais rencontré le juge Miranda.
01:55Puis François Bayrou explique finalement que les deux hommes sont voisins,
01:58et se sont donc bien croisés à ce moment-là.
02:01Est-ce que nous avons pu parler avec le juge Christian Miranda de cette affaire ?
02:05Sans doute oui.
02:06On a pu parler de l'ambiance, on a pu parler de l'établissement, jamais du dossier.
02:10Alors que cette rencontre reste toujours nébuleuse dans la bouche du Premier ministre,
02:15les autres témoignages affluent et vont dans un même sens.
02:18François Bayrou a bien rencontré le juge Miranda,
02:20avec qui il a bien discuté du dossier judiciaire,
02:23violant ainsi le secret de l'instruction.
02:25Un gendarme l'affirme, ainsi que sa propre fille.
02:29Sa fille justement, ainsi que deux autres de ses enfants,
02:32ont été scolarisés à Béterran.
02:34Et c'est là l'argument principal du Premier ministre,
02:36qu'il répète et répète encore, pour prouver son ignorance sur le sujet.
02:41Est-ce que vous croyez que nous aurions scolarisé nos enfants
02:44dans des établissements dont il aurait été soupçonné ou affirmé
02:50qu'il se passe des choses de cet ordre ?
02:52Vous imaginez pas que nous aurions mis nos enfants dans une école
02:56dans laquelle il y avait ce genre de soupçons ?
02:58J'aurais jamais de ma vie scolarisé mes enfants dans un établissement comme celui-là
03:03s'il y avait eu le moindre doute.
03:06Mais le 23 avril dernier, François Bayrou prend une nouvelle casquette,
03:09celle de famille de victimes, lorsque sa fille explique à la presse
03:12avoir elle-même été victime de violences physiques dans l'établissement,
03:15sans ne l'avoir jamais dit à son père.
03:17En tant que père de famille, ça me poignarde le cœur.
03:21C'est aussi à ce moment-là, sur le plateau de Mediapart,
03:24qu'elle assure que François Bayrou a bien rencontré le juge Mirand en 1998
03:27pour évoquer la mise en détention du père Caricard.
03:31Pour François Bayrou, sa famille n'est peut-être plus tant son bouclier que sa faille.
03:35S'il adopte une position défensive les premiers jours suivant les révélations,
03:39à partir du 18 février, François Bayrou change de tactique et choisit la contre-attaque.
03:44Si je ne savais pas, d'autres savaient.
03:47Il maintient toujours qu'il n'était pas au courant des sévices sexuels dans l'établissement
03:50et de la plainte pour viol visant le père Caricard en 1998
03:53et assure que le procureur général, mais aussi trois ministres du gouvernement Jospin,
03:58savaient renvoyer la faute aux autres.
04:00Bayrou ne le fait pas qu'une fois.
04:01Le 10 avril, le gendarme Alain Ontan remet en cause l'ignorance supposée de François Bayrou
04:05dans l'affaire du père Caricard et fait cette révélation sous serment à l'Assemblée nationale.
04:10M. Mirand m'attendait à la porte de son bureau et il m'a dit
04:14« M. Ontan, la présentation est retardée, le procureur général demande à voir le dossier,
04:24il y a eu une intervention de M. Bayrou. Point. »
04:30Ce à quoi le Premier ministre répond le lendemain
04:32« Je ne sais pas s'il mente, les juges et les gendarmes, vous savez, ça se trompe comme les autres. »
04:37Toujours dans cette optique de pointer du doigt d'autres responsables,
04:40François Bayrou qualifie les attaques le concernant de complots politiques
04:43et va jusqu'à s'ériger en martyr en comparant la polémique à
04:47« Les mécaniques de l'affaire Baudis. »
04:49Dans cette affaire, le maire de Toulouse, Dominique Baudis, avait été mis en cause,
04:53à tort, dans une affaire de proxénétisme liée au tueur en série Patrice Allègre en 2003.
04:59Qu'il choisisse la défense ou l'attaque,
05:01François Bayrou devra en tout cas dire toute la vérité
05:03devant la commission d'enquête à l'Assemblée nationale le 14 mai.