La gauche n’a le monopole ni du coeur, ni des manifs

Europe 1

04/04/2025

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00:00Allez, bonne émission Pascal, place à Eugénie Bastie avec nous ce matin sur Rorotan, bonjour Eugénie.

00:05Bonjour à tous.

00:06Vous voulez parler ce matin de la manifestation qui est programmée dimanche par le RN à Paris en soutien à Marine Le Pen.

00:11Le parti évoque une mobilisation populaire et pacifique, mais alors certains y voient déjà un risque séditieux.

00:18Oui, Marine Le Pen et Jordane Bardella ont beau nier toute tentative de coup de force appelée à une mobilisation pacifique,

00:24certains médias et hommes politiques veulent voir dans cette manifestation de dimanche un nouveau 6 février 34

00:30ou une dangereuse sédition antidémocratique.

00:33Ainsi, Xavier Bertrand s'est dit très inquiet, évoquant un mauvais remake du Capitol

00:38en faisant référence à la prise du siège du Congrès par les partisans déchaînés de Donald Trump.

00:42Il rejoint là, et ce n'est pas la première fois, le leader des Insoumis Jean-Luc Mélenchon

00:47qui évoque lui un risque séditieux, un risque de violence.

00:51Alors franchement, voir Mélenchon dénoncer un risque séditieux, c'est un peu comme si Vladimir Poutine s'inquiétait pour la démocratie.

00:57Mélenchon, lui, dans le parti appelé à marcher sur Matignon en juillet dernier

01:01pour forcer Emmanuel Macron à nommer Lucie Castex première ministre,

01:06lui qui en octobre 2022, au moment des manifestations violentes contre la réforme des retraites,

01:10tweetait, le 5 et 6 octobre 1789, les femmes marchent sur Versailles contre la vie chère,

01:15elles ramènent le roi, la reine et le dauphin de force à Paris sous contrôle populaire,

01:19faites mieux le 16 octobre.

01:21Ce n'est pas la première fois que les grandes manifestations de droite sont comparées à des volontés de sédition.

01:25Est-ce qu'il n'y aurait que la gauche qui aurait le droit de manifester dans la rue, Eugénie Bastier ?

01:29Oui, tout à fait. Certains voyaient derrière les poussettes de la manif pour tous,

01:32la résurgence des ligues des années 30,

01:35d'autres voyaient dans la manifestation de François Fillon au Trocadéro en 2017

01:39qui dénonçait le coup d'état des juges, une révolte de dangereux factieux,

01:43un drapeau tricolore dans une manif de droite, fascisme,

01:46une pancarte pro Hamas dans une manifestation de gauche ?

01:49Broutilles.

01:50Dénoncer une décision judiciaire, c'est le retour des ors les plus sombres de notre histoire.

01:55Mais crier Israël assassin ou appeler Aline Kifada, c'est tout au plus une dérive regrettable.

02:00L'obsession pour le fascisme des années 30 rend une partie des observateurs aveugles à une réalité indubitable.

02:06Ces dernières années, c'est d'abord dans les manifestations d'extrême gauche qu'on casse, qu'on brûle,

02:11qu'on blesse des policiers, qu'on crie des slogans haineux, violents, sédicieux.

02:15Ce n'est pas un député du RN, mais un député insoumis, Thomas Porte,

02:19qui s'est photographié en train de jouer au ballon avec la tête d'un ministre, Olivier Dussopt.

02:23Ce n'est pas le RN qui a mis sur des affiches des portraits de journalistes,

02:28désignés comme des ennemis à abattre.

02:30Alors oui, Cyril Hanouna n'est pas magistrat comme Madame de Pertuis,

02:33mais mérite-t-il pour autant qu'on lui mette une cible dans le dos ?

02:35Alors certes, Eugénie, en France, la droite et l'extrême droite

02:38n'ont pas produit de manifestations violentes ces dernières années,

02:41mais le précédent du Capitole aux États-Unis en 2021 a de quoi inquiéter malgré tout.

02:45On y est. Bien sûr, l'analogie avec les années 30 est en bancale.

02:48La nouvelle diabolisation n'est plus temporelle, mais géographique.

02:52Elle passe par l'Amérique.

02:53Réduction ad trumpum.

02:55Toute remise en cause d'une décision du système judiciaire ou médiatique

02:59est désormais assimilée à la tentative de coup d'État des magas en colère.

03:03C'est comme si on cherchait à tout prix à trumpiser Marine Le Pen.

03:07Mais là où Donald Trump a nommément ciblé des magistrats qui lui étaient hostiles,

03:11là où il a gracié les émeutiers du Capitole,

03:14l'ERN, jusqu'à présent, condamne toute violence ou harcèlement des juges

03:19et fustige régulièrement les violences d'ultra droite.

03:22Le risque, c'est qu'à nier tout droit une expression pacifique et légitime de la colère,

03:27on transforme cette colère en violence véritable.

03:30La gauche n'a pas le monopole du cœur.

03:32Elle n'a pas non plus celui de la rue.

03:34Signature Europe 1, Eugénie Bastier. Merci beaucoup Eugénie.

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