Un jour avec Perrine Laffont, championne olympique de ski de bosses

Brut

"Aux Jeux olympiques, tu as 30 secondes. Si tu te loupes, tu reviens dans 4 ans."  À quelques semaines des JO d'hiver, Brut a passé la journée avec la championne olympique de ski de bosses Perrine Laffont.

Transcript

00:00Salut à tous, c'est Périne Lapomont pour Brut, je vous emmène avec moi aujourd'hui pour les coulisses de mon entraînement.

00:15Je suis pinéto-cuito là.

00:17Ça veut dire quoi ?

00:19Je suis cuite, ça m'a fumé les cuisses.

00:22Typiquement, là, on travaille tout simplement des détails.

00:25Qu'est-ce qui va faire la différence comparée aux autres filles, par exemple.

00:29C'est des tout petits réglages. Au lieu de mettre un bras là, il faut le mettre plus là.

00:33C'est des trucs hyper fins.

00:35En fait, quand tu es dans le champ de bosse, au milieu, et que tu arrives à te placer,

00:39tu as vraiment l'impression de survoler un champ de mine, si on peut dire.

00:43Et c'est tellement satisfaisant.

00:45Tu survoles ce champ de mine, puis après tu arrives au saut,

00:48et t'as cette sensation de liberté pendant une à deux secondes.

00:52Puis après tu reposes, tu survoles un champ de mine, puis tu refais un saut.

00:56Et ça, c'est juste le kiff quand tu arrives en bas.

01:01Qu'est-ce que c'est bon de savoir qu'il y a un risque,

01:04mais de se surpasser et de réussir à faire ce qu'on a envie de faire,

01:08ce petit coup d'adrénaline, c'est juste trop bien.

01:12Aux Jeux Olympiques, tu as 30 secondes, et si tu loupes cette 30 secondes,

01:16tu reviens dans quatre ans.

01:18C'est 30 secondes qui changent une vie, j'imagine.

01:20Là, c'est vraiment les 30 secondes qui ont changé ma vie, mais complètement.

01:24J'avais 19 ans, donc il faut être bien entourée.

01:28Surtout, je dirais, parce que oui, tu peux avoir les épaules,

01:31mais nous, à la base, on est sportifs de haut niveau.

01:33Moi, mon taf, c'est d'être bonne sur les skis.

01:35C'est pas de gérer des médias ou de gérer des sollicitations.

01:39On a une note sur 100, en fait.

01:4160% de la note, c'est sur la manière dont on skie les bosses.

01:4520% la vitesse, donc le temps qu'on met à descendre la piste.

01:48Et 20% les sauts.

01:51C'est spécial, toi.

01:52Moi, je suis meilleure en ski, ouais.

01:55Et un peu moins en saut.

01:57Je sais que potentiellement, je peux avoir les capacités

01:59d'avoir une autre médaille olympique,

02:01d'avoir peut-être une autre médaille en or,

02:04mais ça reste du sport,

02:06et j'ai pas envie de mettre la charrue avant les bœufs,

02:09de me dire, ouais, de toute façon, il faut que tu gagnes les Jeux,

02:11il faut que tu gagnes les Jeux, parce que c'est loin.

02:13Et puis, comme on l'a dit, c'est que 30 secondes.

02:15Il peut se passer plein de choses.

02:17Je peux être malade le jour de la course.

02:19C'est vraiment à cause de toute cette pression

02:21qu'il y avait autour de moi,

02:23de tout le temps qu'il fallait gagner, gagner, encore gagner.

02:25J'arrivais plus à la supporter, cette pression.

02:27J'étais plus heureuse dans ce que je faisais, dans le ski.

02:30La compétition, ça ne m'intéressait plus.

02:32C'était même une boulot-vente de faire des compétitions.

02:35Depuis que j'ai eu ce mini burn-out disportif,

02:38j'ai compris qu'il fallait arrêter

02:40de se mettre la pression avec les résultats,

02:43même si je suis une grande compétitrice

02:45et je n'oublie pas dans ma tête,

02:48penser aux résultats, ça ne s'oublie pas comme ça.

02:51Mais j'essaye de le penser différemment,

02:53de le réfléchir différemment

02:55et de prendre les choses beaucoup plus à la légère.

02:59On va faire du sport pour préparer le summer body.

03:02Le winter body, du coup.

03:06Désolée, l'interview a duré un peu.

03:09Du coup, les trucs, ce n'est pas pour elle, c'est pour...

03:11Je vais fumer.

03:17Je prépare le Tour de France 2036.

03:20Vu qu'il y a un Tour de France féminin,

03:22maintenant, je me prépare.

03:23Limite, on passe presque plus de temps en salle,

03:26tellement qu'il faut une préparation pour le corps,

03:28pour les jambes, le dos, tout.

03:31Ce n'est pas ce qui est le plus agréable.

03:35Ça, c'est clair.

03:37Mais on sait qu'il faut passer là

03:39pour être en forme l'hiver

03:40et surtout pour ne pas se blesser aussi.

03:43J'ai fait ce sport parce que

03:46c'est tellement une ambiance cool, détendue.

03:49C'est une petite famille.

03:51C'est l'ambiance freestyle, typiquement.

03:54Et c'est quelque chose que je n'ai pas du tout

03:56retrouvé dans le ski alpin.

03:57Un sport qui était un peu plus strict, carré

04:00et qui collait moins à mon caractère, je dirais.

04:03Et donc, c'est pour ça que j'ai continué les bosses.

04:05C'est sûr qu'il y en a des sacrifices.

04:07Après, c'est surtout un choix que j'ai fait

04:09de faire cette vie parce que

04:11j'aurais pu prendre le cursus école

04:14et une vie un peu plus normale.

04:16Mais je ne le regrette pas.

04:18Le sacrifice est plutôt sur le fait de

04:21moins voir ses proches, moins voir sa famille.

04:23Là, c'est plus dur parce qu'on est typiquement

04:25tout le temps en déplacement pour des entraînements

04:27ou les compétitions.

04:28C'est juste ça qui est le plus dur.

04:30Tu penses que ton corps est prêt à le supporter jusqu'à quel âge ?

04:35Franchement, je me dis j'espère au moins jusqu'à 30 ans.

04:38Après, je touche du bois.

04:42Je ne me suis jamais blessée.

04:44Du coup, ça va, je n'ai pas trop de séquelles,

04:47on va dire, de blessures.

04:49Et ça, c'est un réel avantage pour moi.

04:51Et je me dis j'espère qu'il va tenir au moins jusqu'à 30 ans,

04:55mes petits genoux.

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