Les street medics, soigneurs de manifestants

Brut

"Je me suis dit que j’avais pas envie de rester les bras croisés à juste les regarder s’en prendre plein la gueule."  Aides-soignants, infirmiers, pompiers mais aussi professeurs, les street medics assurent les premiers soins lors des manifestations. Brut les a suivis.

Transcript

00:00Zéro, t'as pas mal. Dix, c'est la plus forte douleur que tu puisses imaginer.

00:02On est à combien ?

00:03Il y a un blessé ! Il y a un blessé !

00:06Je m'appelle Daniel, je suis street-medic.

00:09Ça va bientôt faire deux ans, maintenant.

00:11Là, on est en tête de cortège, du coup,

00:13et on a la police qui s'est déjà casquée.

00:15Si ça dégénère, malheureusement, il va sans doute y avoir quelques blessés.

00:18Et là, c'est là qu'on interviendra pour leur venir en aide.

00:21Je suis professeur, je suis en grève également pour la réforme des retraites.

00:32Je vais à ces manifestations-là.

00:34Et tant qu'à faire, j'y vais en tant que street-medic.

00:36À force de voir de plus en plus de personnes se faire blesser,

00:39c'était juste après la loi travail,

00:41je me suis dit que je n'avais pas envie de rester les bras croisés,

00:43à juste les regarder sans prendre plein la gueule,

00:46et qu'une bonne idée, ce serait de venir avec une trousse de secours en manifestation.

00:51C'est comme ça que j'ai commencé.

00:52C'est un machin qui crame, ça, là-bas.

00:54On réavance un peu.

01:08On va trouver un certain nombre de collègues qui sont chez les pompiers,

01:12qui sont, comme moi, dans une association de sécurité civile.

01:15Également, on va trouver du personnel hospitalier, des infirmiers,

01:18certains médecins aussi, des aides-soignants.

01:20Après, on trouve aussi quelques personnes qui ont peu de formation,

01:23enfin, peu de formation, on va dire officielle, peu de diplôme,

01:26mais voilà, il y a besoin de tout.

01:46Généralement, on travaille en équipe, on ne bosse pas seul,

01:47ne serait-ce que pour sa propre sécurité,

01:49parce qu'une manifestation, ça peut être dangereux.

01:51Ce n'est pas parce qu'on est street-medic

01:53qu'on a un peu plus de protection que les autres,

01:55qu'on ne court pas des dangers.

01:56Il y a régulièrement des copains qui se font blesser,

01:59même en étant street-medic.

02:00On essaye de se répartir dans les cortèges.

02:03Avec les personnes avec qui je tourne, généralement,

02:06on se met à l'avant, là où il y a le plus d'affrontements avec la police,

02:09donc vers le cortège de tête.

02:11Heureusement, 80% des blessures qu'on fait en manifestation,

02:14ça reste de la petite plaie, de la bobologie,

02:16c'est les yeux des personnes qui se sont pris des gaz lacrymogènes,

02:20des personnes qui se sont pris un coup de matraque

02:22et qui ont un bon bleu sur le bras.

02:24Il n'y a pas besoin d'un grand diplôme en secourisme pour s'en sortir.

02:28Pose ta tête tranquille, repose-toi deux minutes.

02:32Évite de toucher les yeux avec les mains.

02:35Est-ce que tu veux que je te re-rince un coup de visage ?

02:37Ça va ?

02:38Donne-moi ta main.

02:40Tu fais attention, il y a un trottoir juste devant toi.

02:42On y va ?

02:43Un, deux, trois.

02:46Tu fais quelques pas avec nous ?

02:48Ensuite, il y a, hélas, on va dire 10-20%,

02:52c'est dû racontifier, de blessures beaucoup plus graves.

02:55Le maintien de l'ordre et les actions policières

02:58peuvent créer un certain nombre de blessures assez graves,

03:02que ce soit notamment les blessures à la tête,

03:04qui sont de plus en plus nombreuses.

03:06Un choc à la tête, ça peut toujours potentiellement être grave.

03:09C'est-à-dire qu'on va systématiquement vérifier

03:10s'il n'y a pas des signes de traumatisme crânien.

03:12S'il y a un signe de traumatisme crânien,

03:14on prévient les pompiers et on fait évacuer.

03:16Quand tu ne bouges pas ton bras,

03:170, tu n'as pas mal,

03:1810, c'est la plus forte douleur que tu puisses imaginer.

03:19On est à combien ?

03:21Sans bouger, là.

03:25Si je ne fais pas attention, je vais partir par derrière.

03:27Et je me suis étalé tout mon long.

03:30Avec le bras en avant.

03:31Je ne sais pas si c'est déboîté.

03:33Je vais palper doucement.

03:35Et tu me dis si je te fais mal.

03:38Honnêtement, tu as une poche de glace.

03:40Il y a une blessure à la tête.

03:41Est-ce que tu as une poche de glace ?

03:42Loïc, il y a une blessure à la tête.

03:44Tu vas avec la dame ?

03:45Vous y allez ensemble ?

03:51On va déjà te mettre du froid.

03:53Je te laisse le glisser sous ton pull là où tu as mal.

04:00On surveille derrière.

04:03J'ai un monsieur qui a sans doute l'épaule déboîtée.

04:05Il y a une déformation au niveau de l'épaule gauche.

04:07On est devant le lycée Arago, place de la Nation à Paris.

04:10Je vous remercie.

04:11Il y a un blessé !

04:15Certains policiers peuvent nous matraquer aussi

04:17quand on essaie d'intervenir sur certaines personnes

04:19ou lors d'une charge.

04:20Après, ça ne se passe pas toujours comme ça.

04:22On tombe parfois sur des policiers qui comprennent

04:25pourquoi on est là, qui comprennent qu'on n'est pas là.

04:28Ce n'est pas nous qui allons leur balancer des pavés dessus.

04:30On n'est pas là pour les attaquer.

04:33On est là pour venir en aide aux manifestants,

04:35pour éviter qu'il y ait des blessés.

04:37Épaule gauche, tu as une déformation.

04:39On lui a mis un peu de glace.

04:40Mais tu as une douleur évaluée à 6 sur 10.

04:43On va mettre sur une chaise.

04:44On va dans l'ambulance.

04:45On va voir le docteur.

04:46OK.

04:47Pas d'hospitalisation récente.

04:48OK, merci.

04:49Ça va, t'es calme.

04:50Si tu tiens, c'est le plus important.

04:51Bon, fais gaffe à toi.

04:52Bon courage les gars.

04:53Merci.

04:54Merci.

04:55Merci.

04:56Merci.

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05:08Merci.

05:09Merci.

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