Camélia Jordana renoue avec son histoire familiale dans "Reine mère" : "C'est l'histoire du sacrifice pour la génération d'après"

franceinfo

18/03/2025

Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Mardi 18 mars 2025 : la chanteuse et comédienne Hélène Vincent. Elle est à l'affiche du film, "Reine mère", de Manèle Labidi depuis mercredi dernier.

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00:00Bonjour Kévalia Jordanin, vous êtes une artiste pluridisciplinaire, d'abord découverte en tant

00:05qu'auteur, compositrice, interprète, musicienne. On parle évidemment de l'émission Nouvelle

00:09Star sur M6. Puis en tant qu'actrice, avec votre rôle d'une étudiante en droit, décidée justement

00:13à sortir de sa condition, à réaliser ses rêves, de devenir avocate et de déjouer les cartes du

00:19destin. Tracée depuis son quartier de Créteil, Nela Salah, ce rôle vous a permis d'obtenir le

00:24César de la révélation féminine en 2018, cinq ans après vos débuts en tant qu'actrice. Depuis

00:29le film Les choses qu'on dit et qu'on fait d'Emmanuel Mouret, vous avez su vous imposer dans un

00:33registre autre que celui de vos origines. Quand on parle de vous, on évoque immédiatement votre

00:38capacité à dire à voix haute ce que beaucoup n'osent pas dire ou ne peuvent pas dire. Aujourd'hui,

00:42vous êtes à l'affiche du film Reine-mère qui raconte le quotidien des familles d'immigrés à

00:46la double culture et la vie de maman courage, parce qu'il s'agit de ça. Vous incarnez la

00:51maman de Mouna qui est en CM2 et à la suite d'un cours d'histoire sur la bataille de Poitiers en

00:55732, elle développe une crainte. Elle est persuadée que le roi Charles Martel lui court après,

01:01qu'il la poursuit. Finalement, il va devenir un ami. Il l'aide à se donner de la force, à se

01:08construire, à s'affirmer, à affronter ses peurs, à explorer son identité. Ça vous parle, ça,

01:13Camélia Jordana ? Oui, énormément. C'était assez bouleversant à la lecture du film, d'ailleurs à

01:18la lecture du scénario, parce qu'à la fois je me suis énormément identifiée au personnage de Mouna,

01:26parce que je me suis rendue compte, je me suis dit mais oui, mais cette phrase, en fait, je n'ai

01:31jamais repensé depuis le jour où je l'ai entendue à l'école, mais cette phrase « Charles Martel

01:34arrêta les Arabes à Poitiers en 732 », elle a eu le même effet sur moi que ce qu'elle a eu comme

01:40effet en effet sur Mouna. Et en même temps, je ne pouvais pas m'empêcher de penser à ma mère en

01:46lisant ce film et en rencontrant Amel, mon personnage. Donc, il y avait plein de choses

01:53qui étaient liées et qui se sont réveillées comme ça. C'était bouleversant. Amel, votre personnage,

01:58ne s'affranchit pas du passé. Elle est en combat, elle est en révolte. Elle n'accepte pas,

02:05finalement, le pays dans lequel elle vit parce qu'elle se sent totalement rejetée. Elle essaye

02:10de survivre à une vie qui est très compliquée. Elle ne trouve pas de boulot parce qu'elle n'a pas

02:13les diplômes. Elle ne trouve pas de logement parce qu'elle n'a pas, justement, le salaire

02:16et donc le travail qui lui permet d'avoir des fiches de paie nécessaires. C'est ce combat-là

02:22aussi que raconte ce film. Je ne dirais pas qu'elle n'accepte pas la France parce que,

02:25par exemple, elle est très contente de vivre à Vincennes, ce qui lui permet de pouvoir avoir

02:32ses filles dans une école privée juste à côté, qui est une école catholique. Et elle, elle s'en

02:37fout que ça ne soit pas importe le genre d'école que c'est, tant que c'est une école de bonne

02:41qualité pour sa fille. Et c'est ça aussi que j'aime beaucoup dans le film, c'est-à-dire que

02:44oui, il y a la question de l'identité. Il y a Charles Martel, on va y revenir, mais il y a quand

02:48même... C'est un film social, c'est-à-dire qu'on parle du déclassement social. C'est une famille

02:52qui était, elle... D'ailleurs, son mari, brillamment joué par Sofiane Zermany, lui dit

02:58« t'es la fille d'un fermier qui se prend pour la reine d'Angleterre ». Et en effet, elle se prend

03:00pour la reine d'Angleterre. Elle veut le meilleur pour elle, pour sa famille, pour ses enfants. Et

03:06en fait, quand elle était en Tunisie, sa condition sociale n'était pas celle qu'elle rencontre quand

03:11elle arrive en France. C'est l'histoire de l'exil, l'histoire du sacrifice pour la génération

03:15d'après. Mais c'est aussi quand même un film qui parle donc en effet du déclassement social,

03:20de discrimination, mais de problèmes de logement, de problèmes du rapport à l'éducation. Enfin

03:27voilà, c'est quand même un peu plus large. Et surtout, il y a un sujet qui est universel,

03:30qui est celui de la famille, quand même, qui est au centre du film.

03:34Je dirais qu'on parle justement de cette famille. Dans le film, vous êtes Amel et franco-tunisienne.

03:41Vous, vos grands-parents sont algériens, enfin étaient algériens.

03:46Comme le personnage de Sophia Noéamor, qui lui est algérien dans le film.

03:48Voilà, ce qui est très fort, parce qu'ils vous ont transmis aussi cette envie de s'en sortir,

03:55d'intégration. Ils ont tout fait dans leur vie. Ce sont des travailleurs très respectueux. Et c'est

04:03vrai qu'on a le sentiment qu'ils vous ont transmis un témoin, Camélia.

04:07J'ai la chance de venir d'une lignée dont je suis très fière, en effet. J'ai des grands-parents

04:13des deux côtés qui sont des gens extraordinaires, qui sont des personnages, en fait. C'est-à-dire

04:21qu'il y a à la fois, un peu comme dans ce film, c'est-à-dire que ce sont des personnages mythiques

04:27de cinéma, avec des chemins fous, avec des traversées extraordinaires, qui mériteraient

04:32chacun et chacune un film. Et en même temps, ce qui est assez fou et ce qui est bouleversant dans

04:38Reine-mère, c'est-à-dire que ce couple-là, qui est plutôt le couple qui correspondrait à la

04:41génération de mes parents, quand on jouait au couple avec Sofiane, en préparation, quand on

04:48faisait les essayages costumes, maquillage, qu'on était main dans la main comme ça, qu'on faisait

04:51des photos pour avoir l'air, tout ça. En fait, on regardait les photos et on était extrêmement

04:55troublés. Manel, Sofiane, moi, Touria, la mère de nos deux filles. Chacun reconnaissait ses parents,

05:02dans ce couple. Et on se disait, mais c'est magnifique, on est en train de créer ce couple-là et

05:05d'en faire un personnage mythique de cinéma. Et en même temps, encore une fois, ce couple est

05:10tellement universel. C'est un couple d'immigrés méditerranéens, peu importe d'où, d'Afrique du

05:14Nord ou d'ailleurs, qui arrive en France dans ces années-là et qui est présenté pour la première

05:19fois de la même manière que nous, on a de voir nos couples de parents, c'est-à-dire avec une femme

05:27au tempérament de feu, qui est pleine de fantaisie, qui est drôle, qui a la joie pour discipline,

05:33qui ne rend pas les armes, qui veut le meilleur pour sa famille et avec un père qui a une force

05:39tranquille, qui est calme, qui est passion, qui est léger, qui se bat pour subvenir aux besoins

05:44de sa famille, dans le calme, dans l'amour, dans la passion de sa femme et de sa famille. Et c'est

05:50vrai que ces deux archétypes-là, toutes les personnes qui ont ces gens-là pour parents l'ont

05:56reconnu quand on a créé ce film, quand on l'a vu et pour autant, on s'est dit mais c'est la première

06:01fois qu'on les voit représentés de cette manière-là. Donc c'est vrai qu'il y a comme un

06:05comme un hommage, un famage, un honneur comme ça, qui est rendu à ces lignées-là. Donc il y a à la

06:12fois une chose très singulière et à la fois une chose finalement presque de l'héritage commun.

06:19Pour terminer, c'est quoi la suite pour vous Camélia ?

06:22Écoutez, j'ai la chance d'avoir deux tournages de prévue à l'automne et surtout en ce moment, je suis

06:27énormément en studio. Je fais plein de chansons pour moi et pour d'autres artistes d'ailleurs et

06:33ça me fait beaucoup de bien. Ça me fait vraiment beaucoup de bien. Je viens de sortir une chanson

06:36qui s'appelle Winrak. Maintenant, je suis complètement indépendante dans mon travail de

06:40musicienne. Je suis ma propre productrice. Donc j'ai la chance et le privilège de pouvoir choisir

06:46les équipes avec lesquelles je travaille d'un bout à l'autre. Donc chaque personne qui est à bord de

06:50l'équipe, c'est une personne qui est qui est contente d'être là et c'est pas comme c'est

06:55ça a souvent été le cas. Mais enfin, c'est vrai qu'en maison de disque, souvent on se retrouve avec

06:59des équipes qui se retrouvent avec des montagnes de projets, qui doivent traiter plein de choses en

07:03même temps. Et là, voilà, c'est un travail qui est un petit peu plus artisanal, mais dans lequel

07:08moi, je prends énormément de plaisir et donc je me suis amusée aussi à produire et réaliser le clip

07:13de cette chanson Winrak dans lequel Sofiane Zermani fait une apparition aussi d'ailleurs. Et voilà,

07:19j'ai adoré faire ça et donc je continue en musique à créer, à inventer la suite. Et pour

07:24la première fois d'ailleurs, dès le studio, je pense à la création de ces chansons en pensant

07:30aussi à la création du spectacle parce que j'ai envie que ce soit une grande célébration,

07:33une grande fête cette tournée là. Donc voilà, j'ai encore plein de travail, plein de belles

07:38choses à raconter.

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