Héroïne, VIH, prison... Laurent Gay se livre

Le Point

14/03/2025

« J'ai commencé l'héroïne à 14 ans pour oublier cette vie que je n’aimais pas. » Laurent Gay raconte son parcours marqué par la toxicomanie, la prison et la séropositivité. Après des années de lutte, il a trouvé un nouveau sens à sa vie et consacre aujourd’hui son temps à la prévention contre les drogues. À travers son livre « Arraché à l’enfer », il partage un message d’espoir et de résilience.

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00:00Résultat des courses, je me suis retrouvé en prison pour un homicide.

00:04Je m'appelle Laurent Guay, j'ai 60 ans et je vais vous raconter

00:08comment à partir de 14 ans, j'ai sombré dans l'héroïne.

00:11J'ai grandi au nord de Paris, à la Porte de la Chapelle.

00:14Très tôt, j'étais un enfant un peu introverti, avec beaucoup de peur.

00:19J'ai subi beaucoup de moqueries, beaucoup de harcèlement.

00:22C'était un ressenti qui a pris beaucoup de place.

00:24J'ai fait partie d'une petite bande de petits voyous.

00:28Avec ces garçons, j'ai commencé à fumer d'abord le tabac.

00:32Et puis, vers 12 ans, j'ai commencé à fumer du shit.

00:36Comme le shit, ça valait un peu plus cher,

00:38on a commencé à prendre des produits, ce qu'on appelle le trichlor.

00:42On prenait des cotons, on sniffait ce genre de produits.

00:45Jusqu'au jour où la même bande a commencé à goûter à ce qu'on appelle l'héroïne.

00:50Il y avait la consommation en injection, donc c'était un peu compliqué

00:53parce que ça faisait toujours flipper.

00:55Puis moi, j'ai commencé à 14 ans pour trouver de l'argent.

00:59On faisait des petits larcins, des vols, des cambriolages pour payer notre consommation.

01:05Et un jour, je me suis fait attraper dans un entrepôt, on m'a mis en garde à vue.

01:10Et là, j'ai fait cette expérience que je n'avais jamais faite physiquement,

01:15de la douleur physique du manque.

01:16J'anticipais même le soir pour avoir d'un produit le matin.

01:21Ensuite, je passais deux ans à peu près dans une ferme, dans l'Aveyron.

01:25Et après ces deux ans, je me suis ressenti vraiment beaucoup mieux.

01:29J'ai rencontré ma première amour, Florence,

01:33avec qui on a commencé à vivre ensemble sur Paris.

01:36Voilà, elle a commencé à basculer dans la drogue.

01:39Après avoir essayé plusieurs fois à deux d'arrêter la drogue,

01:44on a compensé avec du shit, de l'alcool.

01:46On commençait à aller mieux, on a même décidé d'avoir un enfant.

01:49Donc ma compagne avait tombé enceinte à 20 ans.

01:52Donc c'était plutôt positif, puisque j'étais fier d'être papa.

01:56On n'a jamais su le sexe de l'enfant à l'échographie,

01:59puisqu'il n'y a pas eu d'échographie.

02:01On a juste dit à ma compagne qu'elle avait le sida.

02:03Donc il y a eu une interruption thérapeutique de grossesse.

02:06Quand l'enfant, il est mort, mentalement, on est mort.

02:08Donc on a fait le choix d'en finir.

02:12J'ai fait plusieurs fois des overdose.

02:14Et à chaque fois, je retombais dans la drogue.

02:17Et puis là, à un moment donné,

02:19on a cherché de la calme avec un de mes potes.

02:21Mon pote s'est fait agresser violemment.

02:23C'était comme un frère pour moi, j'étais le défendre.

02:25On appelle ça une rixe, bagarre au couteau.

02:28Mon pote, il l'a percuté, il a percuté le dealer.

02:31Donc, résultat des courses, je me suis retrouvé en prison pour un homicide.

02:36En prison, on m'apprend que j'ai la maladie du sida.

02:40Donc à cette époque, il n'y avait aucun traitement.

02:42Et donc ma compagne, elle est morte cinq ans après du sida.

02:46Et donc moi, j'étais convaincu que j'allais mourir en prison.

02:49J'ai vrillé vraiment, je me suis préparé un objet tranchant.

02:52Moi, je n'étais pas croyant du tout, je ne croyais en rien.

02:55Par contre, je n'avais pas peur de mourir.

02:57Je me suis adressé à Dieu juste pour qu'il m'ouvre la porte de son paradis.

03:02Et j'ai commencé à croire qu'il y avait peut-être quelqu'un,

03:06quelqu'un qui était là pour moi.

03:09Je suis sorti au bout d'un an, il y a eu une reconnaissance de non-lieu.

03:12Je pensais essayer de repartir du bon pied.

03:16Et là, j'ai pété un câble.

03:17On appelle ça une crise de démence.

03:19On m'a mis en hôpital psychiatrique.

03:21Ils m'ont mis ce qu'on appelle la camisole chimique.

03:23Et là, à ce moment-là,

03:24je n'aime pas cette expression pour un être humain,

03:26mais j'étais devenu un légume.

03:28Dans cet hôpital psychiatrique, en fait, je suis tombé grave malade.

03:32La maladie du VIH, du sida, s'est déclarée.

03:35Et donc j'ai été hospitalisé dans un service de malade en fin de vie.

03:39Et donc les médecins m'ont dit qu'il me restait peu de temps à vivre.

03:43Et dans cet hôpital, c'est vrai qu'il y a une personne

03:45qui a fait la différence sur ma vie.

03:48Lui, il s'appelle Paul-Emmanuel.

03:49C'est la première personne qui m'a dit que j'étais quelqu'un de bien, en fait.

03:52Il m'a permis de rencontrer une communauté religieuse

03:55qui accueillait des malades en fin de vie.

03:57Quand je suis arrivé dans cette communauté,

03:59je suis arrivé pour y mourir.

04:02Il a fallu ce temps où j'étais un peu en rémission

04:05jusqu'au jour où on trouve des traitements.

04:07Donc j'ai été traité contre le virus du sida avec des protocoles.

04:11À partir du moment où on m'a dit que je pouvais avoir une espérance

04:14sur ma vie avec des traitements

04:16et que j'avais complètement arrêté la drogue, c'était terminé.

04:20J'ai passé neuf ans dans ce monastère.

04:22J'ai rencontré la femme de ma vie, j'ai appris à aimer.

04:25On s'est mariés, c'était 25 ans qu'on est mariés.

04:28On a quitté la communauté au un an de ma fille.

04:30Les médecins disaient que je ne pouvais pas avoir d'enfant.

04:32Aujourd'hui, j'ai deux enfants et nos enfants sont adultes.

04:35On m'a demandé de partager cette histoire dans les écoles.

04:39Donc j'ai témoigné pendant pas mal d'années

04:41et aujourd'hui, je me sers de ce témoignage

04:43comme une expertise pour aider les autres.

04:46J'ai même monté une association Aidons les à grandir.

04:48Au-delà de la prévention, c'est permettre à un jeune

04:51de découvrir peut-être son rêve et puis rentrer pleinement dans sa vie.

04:56La vie, c'est une aventure et il faut la vivre.

04:58Quand on n'a plus la liberté de pouvoir s'abstenir d'un produit,

05:01d'un écran ou je ne sais quoi, on n'est plus libre en fait.

05:05Sous-titrage Société Radio-Canada

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