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  • 06/03/2025
Auteur d’un rapport sur l’économie de guerre, le député Horizons Christophe Plassard estime qu'une augmentation des budgets militaires entraînerait "un retour immédiat dans l'économie."

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Transcription
00:00Et on s'arrête maintenant sur le volet économique des annonces d'Emmanuel Macron hier soir.
00:05Nous aurons à faire de nouveaux choix budgétaires et des investissements supplémentaires
00:10qui exigent de mobiliser des financements privés mais aussi des financements publics
00:15sans que les impôts ne soient augmentés.
00:17Et avec nous ici en studio Christophe Plassart, rapporteur du budget de la Défense et des Armées à l'Assemblée Nationale,
00:23député du groupe Horizons et Indépendants et Louise Baudet en ligne de Bruxelles, bonjour à tous les deux.
00:29Christophe Plassart, je commence par vous.
00:32On est sur un rythme de 3 milliards d'euros de plus chaque année actuellement, ça ne suffit pas, dit Emmanuel Macron.
00:39Il faut des investissements, une augmentation de quel ordre de grandeur dans les cinq prochaines années ?
00:44Je pense que ce n'est pas tellement le sujet, le volume de l'augmentation.
00:47Le sujet c'est comment il faut qu'on s'adapte à la nouvelle donne aujourd'hui.
00:50Si c'est 3%, c'est 3% du PIB, si c'est 3,5%, c'est 3,5%.
00:54Le sujet c'est la loi de programmation militaire telle qu'elle a été faite et bien qu'elle soit respectée 2017,
00:59elle était environ 10 milliards en dessous de ce qu'on a voté, de ce qui a été présenté en début de discussion budgétaire au Parlement.
01:07Aujourd'hui, ce n'est pas suffisant, il faut faire plus.
01:09Pardon, mais quand vous dites que ce n'est pas le sujet, pour les Français qui nous écoutent, c'est un sujet,
01:11parce que c'est savoir ce qu'on va faire de leurs impôts, et puis où est-ce qu'on va couper pour trouver l'argent ?
01:17Oui, sauf que le bon calibrage, aujourd'hui, il est en cours de discussion.
01:22La revue nationale stratégique, l'ensemble des éléments, aujourd'hui, on constate une accélération de ce qui se passe dans le monde.
01:28Les décisions vont être à prendre rapidement, mais ce n'est pas pour autant qu'il faut se précipiter sur un chiffre,
01:32même si, effectivement, le calibrage autour de 3, 3,5% veut dire que comme on est à 2% aujourd'hui,
01:36ça sous-entend presque 50% de plus par rapport à ce qu'on dépense aujourd'hui, ce qui est massif et j'en suis d'accord.
01:41Ce qui fait qu'on voit des chiffres de l'ordre de 30 milliards d'euros chaque année à trouver, c'est ça ?
01:46Aujourd'hui, on est à 50,5 milliards, 2%, vous allez à 3, c'est 25 milliards de plus, on est autour des 75,
01:52et la loi de programmation militaire avait prévu en 2030 d'être à 68 milliards, ce qui voudrait dire qu'on serait autour des 100 milliards.
01:57Et tout ça pose la question, parce qu'on entendait Emmanuel Macron dire tout ça sans impôts supplémentaires,
02:01ça veut dire qu'il faut bien couper quelque part, où est-ce qu'il faut couper ?
02:04On a posé la question avant-hier au ministre de l'Économie et des Finances, Eric Lombard, écoutez.
02:08Nous voyons l'urgence de nous adapter, nous voyons la nécessité d'avoir un plan au niveau européen
02:14et qui, encore une fois, va inclure nos amis britanniques pour dépenser plus.
02:19Mais ce n'est pas plus de dépenses militaires, donc moins de dépenses sociales, c'est ça ma question ?
02:22Non, ça ce n'est pas possible.
02:24C'est possible de faire cette augmentation sans couper, notamment dans les dépenses sociales, Christophe Plassart ?
02:31Il y a un facteur qui a été annoncé, c'est le fait d'avoir un regard différent sur le déficit
02:37et que les dépenses de défense ne soient plus intégrées dans les critères de déficit européens.
02:41Donc c'est aussi d'avoir, j'irais, une enveloppe globale qui sera plus grande.
02:44Ce n'est pas forcément réduire, ce n'est pas que réduire sur des dépenses actuelles.
02:48Ça va nous donner de l'air, ça notamment.
02:50D'ailleurs, c'est une des questions qui sera examinée à Bruxelles, où on rejoint Louise Baudet.
02:55Louise, vous suivez donc ce sommet aujourd'hui, le Sommet des 27, auquel va participer Volodymyr Zelensky.
03:00On parle de cet investissement de 800 milliards d'euros, chiffre absolument énorme,
03:06qui ne va pas sortir comme ça, comme par magie, des caisses européennes ?
03:10Non, l'idée en fait, c'est de permettre aux pays européens de financer leur défense par l'emprunt,
03:15en desserrant les taux du pacte de stabilité, les fameux 3% de déficit.
03:20La commission de Bruxelles va elle-même emprunter 150 milliards d'euros,
03:23au meilleur taux qu'elle pourra ensuite prêter aux États membres.
03:27Il y a aussi les fonds de cohésion, qui sont destinés en principe aux régions les moins développées d'Europe,
03:32qui pourront financer les équipements militaires.
03:34Et puis, les investissements communs dans l'industrie de défense européenne vont être favorisés.
03:39Alors, au total, 800 milliards d'euros sur la table, vous le disiez, c'est massif.
03:44Mais ça ne fait pas encore une politique vraiment européenne,
03:46puisque c'est chaque État qui va être incité à renforcer sa défense.
03:50Pas de grand emprunt commun, à l'image de ce qui s'est fait pour sortir de la crise Covid, en tout cas pas encore.
03:56Ça va quand même nous donner de l'air, ça, Christophe Plassart ?
03:59Déjà, si aujourd'hui, nos partenaires européens, dans leur choix budgétaire,
04:05et donc dans leur choix d'achat, orientent leurs achats, qui sont aujourd'hui massivement des achats américains,
04:09vers l'industrie européenne, on va avoir deux effets.
04:12D'abord, on va avoir un retour sur investissement, puisqu'il ne s'agira pas de dépense à fond perdu, mais bien d'investissement.
04:17Et quand on fait un sous-marin à Cherbourg, quand on fait les canons César à Bourges,
04:22ou quand on fait les rafales à Mérignac,
04:24l'investissement que le pays fait dans la défense, et que nos partenaires qui deviendraient clients feraient dans l'industrie,
04:30a un retour immédiat dans l'économie, donc...
04:33C'est de l'emploi, c'est du chômage en moins, ce sont des cotisations sociales en plus.
04:39Cela dit, le financement c'est pas tout, encore faut-il pouvoir le faire,
04:42est-ce que l'industrie est capable de délivrer comme ça, très vite,
04:46même si on devait débloquer des dizaines de milliards du jour au lendemain ?
04:49Alors, l'avantage de la France aujourd'hui, c'est que cette démarche, cette accélération, elle a déjà été entamée.
04:54Est-ce qu'aujourd'hui on va assez vite ? Peut-être pas.
04:56Est-ce qu'on a accéléré ? Oui, certainement.
04:58Aujourd'hui la production des rafales que j'évoquais a plus que doublé,
05:02la production des canons César également, donc aujourd'hui on est déjà dans une accélération.
05:06Ce qui n'a pas encore été le cas, et je ne sais pas si on a encore mûr pour le dire aujourd'hui ou pour l'affirmer,
05:12c'est ce qu'on a appelé dans l'économie de guerre, la mobilisation,
05:15c'est-à-dire d'utiliser des outils industriels civils pour produire des outils de défense.
05:20On en parlait à votre place, avant-hier, avec l'un des responsables de l'industrie automobile,
05:25ici, et il disait, nous on est prêt éventuellement, il faut passer à ça ?
05:28Alors, je ne sais pas s'il faut passer à ça, mais effectivement l'accélération peut passer,
05:31non pas par uniquement des investissements qui vont être des investissements de moyens ou long terme,
05:35mais éventuellement d'utiliser des outils industriels déjà existants, pourquoi pas si c'est nécessaire.
05:38Le patriotisme européen, je vous cite, le patron de Dassault qui tenait hier une conférence de presse,
05:42il dit, je me réjouis que l'Allemagne veuille investir massivement,
05:44mais la première réaction il y a quelques mois, ça a été d'acheter des F-35 américains.
05:47Le vrai changement, dit-il, ce serait que le futur chancelier annule cette commande de F-35 américains, il rêve ?
05:53Il rêve, je n'en sais rien, mais en tout cas ce n'est pas à moi, parlementaire français,
05:56de donner des injonctions de commande à un pays partenaire.
06:00Ce qui est évident, c'est qu'aujourd'hui, la masse des achats d'objets de défense,
06:04on va dire, d'équipements de défense qui alimentent l'industrie américaine,
06:08si elle venait alimenter l'industrie européenne, ce serait un vrai changement.
06:11Avec un autre effet positif, c'est que si on massifie les productions, on diminue les coûts unitaires,
06:15et donc à iso-budget, on peut aussi produire plus de choses.
06:18Ça va être compliqué, en tout cas, ça va faire partie sans doute des discussions aujourd'hui à Bruxelles,
06:22la question de l'autonomisation de l'Europe vis-à-vis des Etats-Unis,
06:27pour continuer notamment à soutenir l'Ukraine, Louise Baudet, à Bruxelles, les 27 ne sont pas unanimes.
06:33Ben non, évidemment, il y a d'abord les hésitations de l'italienne Giorgia Meloni,
06:38historiquement atlantiste, idéologiquement alignée sur l'Amérique Trumpiste,
06:42et hostile à l'envoi de troupes européennes en Ukraine,
06:45même si elle a jusqu'ici fortement soutenu Kiev.
06:48Alors va-t-elle basculer ? La dirigeante italienne semble au milieu du guet.
06:52Pas d'hésitation, en revanche, chez le Hongrois, Victor Orban soutient, revendiqué de Trump et de Poutine,
06:57opposé à toute aide militaire à Kiev.
06:59L'éternel fauteur de troubles menace une nouvelle fois de briser l'unité du club européen,
07:04possiblement suivi par le Slovaque Robert Fitzhaug.
07:06Mais si les ultimes tractations menées par Emmanuel Macron, qui recevait hier soir Orban à l'Elysée, échouent,
07:12eh bien il n'est pas sûr cette fois que les Européens s'en émeuvent.
07:14Un accord à 25 ou 26 n'est pas totalement écarté.
07:17On n'est pas obligé d'être 27, on sort des critères de Maastricht,
07:20en fait on sort de tous les cadres, Christophe Plassart, en ce moment.
07:23Il y a un changement de paradigme, il faut s'adapter.
07:25La Suisse est aussi un pays qui commande AF35,
07:27donc le champ est large et les mouvements vont être encore très nombreux à mon avis.
07:31Merci beaucoup en tout cas d'avoir été avec nous ce matin,
07:33Christophe Plassart, député horizon et indépendant,
07:36et rapporteur du budget de la Défense à l'Assemblée Nationale.
07:39Merci aussi à Louise Baudet, en direct de Bruxelles, grâce au moyen technique de Johanna Gabryk.

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