Bernard-Henri Lévy : «La Shoah ne ressemble pas aux autres génocides»

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Le philosophe Bernard-Henri Lévy, était l’invité du Grand Rendez-Vous ce dimanche 26 janvier sur CNEWS. Il s’est exprimé au sujet des 80 ans de la libération d'Auschwitz : «La Shoah ne ressemble pas aux autres génocides»

Transcript

00:00dans le recueillement

00:04et j'espère dans la mémoire active.

00:10Parce que demain, il faudra essayer, je crois,

00:14tous ceux qui le veulent bien,

00:17de se souvenir de ce que la Shoah eut d'absolument singulier,

00:22d'absolument irréductible à tout autre crime.

00:26Il faudra essayer, souvent, de s'en souvenir.

00:30Mais s'il y a bien un jour où il faut essayer d'y penser, c'est demain.

00:33Est-ce que cette mémoire s'estompe, la mémoire de la Shoah,

00:36parmi les jeunes générations, notamment ?

00:38Oui et non. C'est une chose assez compliquée.

00:41Si vous lisez, vous savez, c'est un sujet dont je parlais parfois avec Simone Veil.

00:46Simone Veil disait que la mémoire de la Shoah,

00:49elle était presque plus fragile dans sa jeunesse que dans son âge tardif.

00:54Dans sa jeunesse, c'était une mémoire en lambeaux, on n'osait pas en parler.

00:58Et puis, à mesure que les décennies ont avancé,

01:01grâce à elle, grâce à Claude Lanzmann, grâce à d'autres plus jeunes,

01:06la mémoire s'est construite.

01:08Une mémoire, ce n'est pas un stock qui s'effiloche.

01:12C'est aussi un monument qui se construit pas à pas.

01:15Donc, elle est fragile parce que les derniers témoins directs partent,

01:21mais elle est solide parce qu'il y a eu des grands travailleurs de la mémoire qui ont œuvré.

01:29Et ce que je vous disais, par exemple, la singularité, c'est capital.

01:32Sur la Shoah, il faut savoir et il faut dire et répéter

01:36que ça ne ressemble pas aux autres génocides pour trois raisons.

01:39C'est le seul génocide qui a été sans reste.

01:44On n'épargne personne, ni les vieillards, ni les enfants.

01:49C'est le seul génocide qui a été sans lieu.

01:53Il n'y avait pas un lieu au monde où les Juifs pouvaient se réfugier,

01:57où ils pouvaient échapper à la curée, à la battue, à l'Allahi mondial.

02:03Ça, ça n'est jamais arrivé.

02:04Les autres génocides, il y a toujours, en théorie, un moyen de trouver un lieu du monde.

02:11Les Juifs, le plan nazi, c'était où que vous soyez, vous serez éliminés.

02:15Et puis, troisièmement, c'était un génocide,

02:18et ça, c'est ce qu'il a eu sans doute de plus singulier,

02:22qui se voulait sans trace.

02:24Il ne devait rester aucun humain,

02:26mais il ne devait pas rester non plus la trace et le souvenir de la chose.

02:31C'était un crime blanc.

02:33C'était un crime sans mémoire.

02:36Donc, ça, c'est les trois choses, les trois éléments

02:41qui rendent cet événement absolument irréductible à tout autre.

02:46Alors, construire une mémoire, ça a voulu dire,

02:50et nous sommes quelques-uns à avoir travaillé à ça.

02:53Moi, j'ai passé des années de ma vie à réfléchir, à écrire sur ça,

02:58ce que je viens de vous dire là.

03:00C'est toute une œuvre, construire une mémoire,

03:04et c'est une œuvre qu'il faut solidifier.

03:11Sous-titrage Société Radio-Canada

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