"On naît femme, on naît avec un boulet au pied", Typhaine, témoigne contre le harcèlement de rue

Nice Matin

25/11/2024

"On naît femme, on naît avec un boulet au pied". Typhaine, 24 ans, témoigne contre le harcèlement de rue. Ce 25 novembre, à l'occasion de la journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes, nous avons décidé de partager le témoignage de celles qui subissent du harcèlement de rue.

En France, 9 femmes sur 10 ont déjà renoncé à des actions ou modifié leur comportement pour ne pas être victimes de sexisme. C’est même de pire en pire.

Pendant un mois, Aurélie Selvi, journaliste de Nice-Matin, a enquêté sur les solutions pour mieux les sécuriser dans l’espace public. Retrouvez tous ses articles sur les sites du groupe Nice-Matin.

Vidéo : Franck Fernandes

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00:00En fait, on est femme, on est avec un boulet aux pieds.

00:07Le harcèlement de rue, j'y ai déjà été confrontée à de nombreuses reprises.

00:12Ça peut être par un regard insistant, par des paroles déplacées, offensantes,

00:19ou par des gestes carrément qui vont jusqu'à m'attraper dans la rue.

00:26Ça arrive tout le temps et je me suis déjà fait attraper le bras dans la rue.

00:31J'ai beau dire que ce n'est pas comme ça qu'on fait, même si tu veux draguer quelqu'un,

00:35les gens ne comprennent pas.

00:37On a beau dire non, on a beau faire tout ce qu'on veut,

00:39c'est toujours dans l'insistance, c'est vivre avec un boulet.

00:42En fait, on est femme, on est avec un boulet aux pieds.

00:46Il y a une situation qui m'a particulièrement marquée.

00:49J'étais à peu près 20 mètres de chez moi et une voiture s'arrête à ma hauteur.

00:56Un homme me demande s'il peut me raccompagner chez moi.

01:00Je refuse une première fois et il insiste.

01:03Pendant qu'il insiste, je cherche à foler les clés dans mon sac

01:07et je lui dis « vas-y, trace ta route » et il n'a pas apprécié cette réflexion.

01:13J'ai senti son agressivité et j'ai eu la peur de ma vie en me disant

01:19« je ne sais pas ce qui va se passer, il va sortir de sa voiture, il va m'agresser,

01:23je vais mourir alors que je suis à 20 mètres de chez moi. »

01:27Je me suis dit que ma vie va s'arrêter là

01:29parce que j'ai refusé d'être en voiture avec un inconnu.

01:33Je suis rentrée tétanisée, je n'en ai parlé à personne.

01:37C'est quelque chose qui est malheureusement commun aujourd'hui.

01:42Ma technique personnelle quand je suis dans la rue,

01:44c'est de sortir avec mes écouteurs en permanence

01:47pour que les remarques orales ou les regards me soient limités.

01:54Aujourd'hui, avec notre génération, j'ai l'impression qu'on est beaucoup avec des écouteurs

01:58pour s'isoler complètement des dangers qu'on peut rencontrer.

02:03Et j'ai la chance de jamais avoir vécu un traumatisme aussi énorme

02:06que de me faire frapper ou de me faire violer ou que ça aille plus loin que ce que j'ai vécu.

02:10Je pense que pour améliorer la sécurité des femmes dans l'espace public,

02:15il y aurait déjà une base dans l'éducation qu'on donne aux enfants.

02:23Ce que je pourrais dire, c'est qu'il ne faut pas avoir peur

02:27parce que je sais que ça m'est arrivé énormément de fois

02:29d'être face à un regard insistant ou un sourire malsain, ce genre de choses.

02:35Et mon réflexe a été de baisser les yeux.

02:38Et c'est quelque chose qui me ronge et je m'en veux d'avoir réagi comme ça.

02:42Et je me dis que je n'ai pas à moi de me sentir mal

02:45et à moi d'avoir honte d'être une femme parce qu'un homme ne sait pas se comporter.

02:50Donc peut-être que ce serait qu'on apprenne à être plus forte que ça

02:55et que cet élan de solidarité nous permette de nous sentir en sécurité quand on sort.

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