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  • 18/11/2023
"Je ne voudrais pas que l'on enterre le dossier d'Abdelali Mchiouer avant de l'avoir enterré lui-même."

Le 29 août dernier, Abdelali Mchiouer, Marocain et Bilal Kissi, Franco-Marocain, ont été tués par des gardes-frontières algériens alors qu'ils étaient en mer sur un jet-ski. Les autorités marocaines ont depuis récupéré le corps de Bilal, mais celui d'Abdelali est toujours retenu à Tlemcen.

Pour l'avocat de la famille Mchiouer, Me Hakim Chergui, tout doit être tenté pour obtenir le rapatriement de sa dépouille.

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Transcription
00:00Le plus pressant aujourd'hui, c'est le dossier du rapatriement du corps d'Abd el-Ali Meshwar
00:06qui gît dans un frigo, dans une morgue, à Clemsen, depuis presque trois mois maintenant,
00:14sans raison, et sans qu'on puisse nous donner la possibilité de le rapatrier.
00:20Ce qu'il faut bien comprendre, c'est qu'aujourd'hui, notre premier ennemi,
00:24ce n'est pas tellement le mutisme des autorités, c'est certainement l'oubli.
00:28Moi, je voudrais qu'on n'enterre pas le dossier d'Abd el-Ali Meshwar avant de l'avoir enterré lui-même.
00:32Le 29 août, vous avez quatre vacanciers franco-marocains et marocains qui ont décidé de faire du jet-ski
00:39et qui, par un concours de circonstances fâcheux, par un problème d'essence en fait,
00:45ont dérivé dans les eaux territoriales algériennes.
00:47Ils ont vu arriver à eux un canot, un canot des garde-côtes algériens.
00:52Et après quelques phrases échangées en arabe, les militaires leur ont tiré dessus à l'arme automatique,
00:58tuant deux individus, deux pères de famille qui étaient sur le même jet-ski.
01:03Ils ont récupéré le cadavre d'Abd el-Ali Meshwar.
01:06Ils ont récupéré et interpellé l'un des deux autres individus qui s'appelle M. Snaby
01:11et qu'ils ont condamné à une peine de six mois d'emprisonnement pour entrée illégale sur le territoire,
01:17tordant d'ailleurs le coup à toutes les théories conspirationnistes qu'on a entendues partout
01:22et qui consistaient à dire que c'était des trafiquants de drogue, des trafiquants d'armes, des trafiquants d'êtres humains,
01:26ce qui n'était absolument pas le cas puisque les Algériens eux-mêmes l'ont condamné uniquement pour entrée illégale.
01:33Très simplement, il y avait deux options qui s'ouvraient aux militaires.
01:36Les garde-côtes, vous savez, ils sont faits pour sauver les gens en mer.
01:40Quand ils ont vu ces jeunes-là, ils avaient la possibilité de les raccompagner de l'autre côté de la frontière
01:45où ils avaient la possibilité de les interpeller tous et de les juger en Algérie.
01:50Depuis le début, on a mis en œuvre tous les moyens possibles et imaginables pour pouvoir poser une vérité officielle.
01:59D'abord, lutter contre la propagande qui provient de tous les pays
02:04parce que vous imaginez bien que cette affaire-là, dès le départ,
02:07elle a été récupérée par tous les nationalistes et les extrémistes de tous bords
02:12qui voulaient en faire un casus belli, une cause de guerre.
02:16Après, il a fallu, avec les familles, mettre en place une stratégie judiciaire.
02:19On a ouvert immédiatement une enquête en France dans l'optique de forcer les Algériens à sortir de leur mutisme
02:26parce que si certes le Maroc et l'Algérie n'entretiennent plus de relations diplomatiques,
02:32il faut absolument arriver à obtenir une coopération entre les différents systèmes judiciaires.
02:37Donc on est passé par la France pour ça.
02:39Ça a été efficace, ça l'est encore.
02:42Et la deuxième stratégie, ça a été d'internationaliser.
02:45Le combat que nous menons est de l'internationaliser en recourant à l'ONU.
02:49Alors toujours dans l'optique d'une quête de vérité,
02:51c'est-à-dire on a demandé au rapporteur spécial en charge des exécutions extrajudiciaires
02:57d'ouvrir une enquête internationale. Il en a le pouvoir.
03:00Donc à défaut d'une enquête judiciaire ouverte par les autorités algériennes
03:05puisque c'est le seul pays dans lequel il n'y a pas d'enquête, officiellement,
03:08il y en a une au Maroc, il y en a une en France, mais il n'y en a pas en Algérie,
03:12nous on n'a pas eu d'autre choix que de recourir finalement à l'ONU
03:17et aux dispositifs qui existent là-bas.
03:19En clair, la porte était fermée, on a essayé et on essaie encore de passer par la fenêtre.
03:23La loi algérienne dit que la compétence appartient au Wali, le préfet local.
03:28Mais comme c'est une affaire qui est gérée par le pouvoir militaire,
03:32on a contacté les autorités au niveau local avec un avocat algérien,
03:36le ministère de l'Intérieur, de la Justice, le parquet militaire de Tlemcen,
03:42le parquet civil, le consulat marocain de Sidi Bélabès qui a fait beaucoup de choses aussi
03:47et à qui on n'a jamais répondu.
03:50J'ai également sollicité très officiellement à ma entreprise et sous différentes formes
03:56un entretien avec l'ambassadeur algérien pour essayer de voir.
04:00On ne m'a jamais répondu.
04:02Hier encore, j'étais au consulat général algérien à Casablanca.
04:06On me demande d'écrire.
04:09Pour l'instant, je suis comme on dit dans un tunnel avec quatre murs.
04:14On a des orphelins, on a une veuve éplorée, on a une famille en souffrance
04:19qui n'a toujours pas pu mettre en terre leur fils, leur père ou leur mari
04:24pour des raisons qu'on ne connaît pas.
04:26On ne nous oppose que le mur du silence.
04:28Je suis même obligé de passer par des autorités religieuses
04:32qui essayent de faire jouer leurs bons offices pour servir d'intermédiaires
04:37et éventuellement nous permettre d'accéder aux personnes qui pourraient nous donner les bonnes réponses.
04:42Et on n'a pour l'instant aucun retour.
04:44Ça n'avance pas.
04:45La famille Chewer en particulier, la famille Kissier également, sont d'une dignité sans pareil.
04:54Ils font face à un drame qui les brûle au quotidien, qui les calcine au quotidien.
05:01Et vous les trouvez dignes, vous les trouvez endurants, vous les trouvez patients.
05:05Ils ne sont pas dans la haine, ils sont vraiment dans la justice.
05:09Ce qu'ils veulent et ce qu'ils demandent, c'est qu'après avoir supprimé la vie de leur fils,
05:16on ne vienne pas non plus supprimer la vie de la famille, parce que c'est un peu ça l'idée.
05:20À défaut d'enterrer leur fils, ils ne peuvent pas passer à autre chose.
05:24Donc vous imaginez qu'ils sont en permanence, que ce soit le bébé ou le grand-père, ils sont en permanence dans le drame.

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