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Transcription
00:00Le réchauffement climatique est une urgence, à plus forte raison, en Afrique. Un enjeu sur
00:10lequel ne cessent de sensibiliser les acteurs de la société civile, les institutions,
00:15les gouvernements, mais aussi, comme l'invité de ce nouveau numéro de C'est à dire, les auteurs.
00:20C'est d'ailleurs avec son essai Changement climatique, la lourde menace sur l'Afrique,
00:24Kumbay Hadj, a raflé le prix du Meeting international du livre et des arts associés.
00:30Monsieur Hadj, bienvenue. Merci, franchement, déjà, merci pour l'invitation et je suis très
00:38content d'être dans votre studio et on va espérer qu'on va faire une belle émission ensemble.
00:42On va faire une belle émission. Alors, comme je le disais, vous avez remporté le Mila 2024 avec
00:45un essai sur le changement climatique. Vous en êtes d'ailleurs à votre second essai,
00:49si on rentre dans les détails. Qu'est-ce que vous avez ressenti à l'annonce de votre nom ?
00:54Fierté, fierté, franchement, parce qu'effectivement, il faut le savoir,
00:58le Sénégal, c'est la première fois qu'il remporte le Mila, qui est une compétition
01:02internationale. Et si je me déplace de Dakar à Bijan pour, en tout cas, enlever ce trophée,
01:09ce que je ressens, c'est une fierté. Vous avez enlevé le trophée du livre,
01:13mais pas celui de la canne. D'accord. Qu'est-ce qui vous a poussé à écrire sur le changement
01:19climatique ? Le changement climatique, effectivement, c'est un domaine assez particulier. Dans la
01:26revue littéraire que j'ai faite, il n'y a pas beaucoup d'Africains qui écrivent dans ce domaine.
01:30Ce qu'on trouve dans ce domaine, c'est plutôt des Européens, des Occidentaux, etc. Mais
01:37effectivement, l'Afrique a un besoin de sensibilisation. Et quand je dis sensibilisation,
01:45je me dis que ce ne sont pas les autres qui vont le faire. Du coup, il faut vraiment des
01:50Africains qui écrivent dans ce sens. Et c'est là où je me suis mis dans ce domaine pour produire
01:55cet ouvrage. Mais il me semble que ce n'est pas votre profession à la base. En fait,
02:00moi je suis ingénieur en génie électrique. J'ai beaucoup d'expérience dans l'énergie. Et vous
02:06savez, en fait, quand on dit changement climatique, qui dit changement climatique,
02:10dit environnement. Et environnement, c'est intimement lié à l'énergie, en fait. Donc du
02:17coup, il y a une passerelle, en fait, entre ma profession et justement ce domaine. Pourquoi
02:23vous pensez que l'Afrique est particulièrement vulnérable face au changement du réchauffement
02:27climatique? Vulnérable, c'est vraiment le terme. Parce que vous savez, en fait, dans ce domaine
02:34du changement climatique, les pays, j'allais dire les plus, enfin les mal préparés, les pays
02:40vraiment qui souffrent le plus sont les pays qui ne sont pas préparés. Et justement, c'est là où
02:46on catégorise vraiment l'Afrique. L'Afrique n'est pas préparée. Selon vous, vous confirmez? On n'est
02:51pas préparé au changement climatique? Clairement, clairement, clairement. Clairement, c'est le cas.
02:54On n'est pas préparé, en fait, à subir ces impacts. On va en débattre. On pollue moins,
03:00le moins, on pollue presque Epsilon et on reçoit toute cette misère. Donc, du coup, voyez-vous,
03:08en fait, les Asiatiques, les Européens, etc., bon, il y a des gens qui sont à niveau, en tout cas,
03:14en termes de vulnérabilité, en termes de préparation, en termes de riposte. Mais ce n'est
03:18pas le cas de l'Afrique. D'ailleurs, citez-nous quelques exemples concrets qui sont dans votre
03:22livre de ce réchauffement climatique en Afrique. En fait, vous savez, le livre, disons que je l'ai
03:28segmenté en quatre parties, en quatre parties. Je parle des menaces, en fait. Oui. Il y a la
03:35menace existentielle et ça, c'est la plus dangereuse. C'est-à-dire? Parce qu'elle va toucher
03:39directement, en fait, notre nutrition. Parce qu'à un moment donné, la population africaine va
03:45augmenter, ça c'est sûr. Oui. La démographie, la démographie va exploser. Il faudra nourrir
03:50cette population. Et le premier impact du changement climatique va être l'agriculture.
03:55Ça c'est vraiment, il y a un autre aspect, la Côte d'Ivoire et Poisson a fait. Et dans une
04:05zone côtière, les ressources halitiques vont se rarifier. Et l'érosion va augmenter. L'érosion,
04:12en fait, ça va créer des déplacements de population, etc. Vous savez, en fait,
04:18le changement climatique, je parlais en fait des quatre menaces. Il y a la menace existentielle,
04:22c'est la plus sournoise et c'est la plus difficile. Il y a la menace, comme on dit,
04:28économique, parce que l'Afrique est fortement dépendante des aides et elle risque de continuer
04:34à tendre la main. Et c'est ce qui est dommage. Il y a la menace, comme on dit, sécuritaire,
04:39sécuritaire parce que les déplacements de population, les migrations, les migrants
04:43climatiques, ça va augmenter. On le voit actuellement au Tchèque. On le voit partout.
04:47J'ai un exemple, j'ai un exemple précis de chez moi au Sénégal. Il y a une localité qu'on appelle,
04:56excusez-moi, on l'appelle, ça va me revenir, il y a une localité qui est près de Dakar,
05:04près de Kayar. Voilà, Kayar, c'est pas loin de Dakar en fait. Qu'est-ce qui s'est passé? C'est
05:11une zone de pêche, c'est une zone de pêcheurs. C'est pas loin de Thies, etc. Donc vraiment proche
05:17Dakar. Exactement. Et qu'est-ce qui s'est passé dans cette zone? Il y a deux communautés de pêcheurs
05:22qui se sont battues pour un contrôle de ressources aléatiques. Mais figurez-vous, ça c'est, ça sont
05:29des prémices en fait. Ça sont des prémices et ce sont des signaux, en tout cas d'alerte très
05:34sérieuse qui nous guettent. Après, comme j'ai dit, les migrants climatiques, on va en parler,
05:39forcément, parce qu'il y a des gens qui vont perdre des terres, il y a des gens qui vont être
05:42impactés, qui vont se déplacer. Après, la dernière menace pour moi que j'ai identifié, c'est par
05:47rapport à nos valeurs. Parce que vous savez, moi j'ai dit que souvent, un homme sans valeurs, il n'a
05:53pas de repère. Et ça, c'est dangereux. Mais comment le réchauffement climatique peut-il
05:58impliquer, peut-il impacter, pardon, nos valeurs? Dans quel sens? Dans quel sens? En fait, typiquement,
06:04voyez-vous, en fait, prenons le cas du Sénégal. Quand je dis qu'effectivement il y a des gens qui
06:11ont encore des repères, c'est parce que on a, en fait, disons, actuellement on a une boussole en
06:19fait. On a une boussole. La culture. La culture. Mais si on ne prend pas garde, ça va être tellement
06:27difficile qu'on risque d'oublier tout ça. Et c'est là où je dis qu'effectivement. Parce qu'on va rentrer dans
06:32une culture de survie. Exactement. Exactement. Je vois, je vois. Et quels sont, selon vous, plutôt
06:40les principales responsabilités des pays africains face au changement climatique? Compte tenu, et vous
06:45l'avez cité, d'un paradoxe. On est le continent qui produit le moins de gaz à effet de serre. Mais
06:51c'est nous qui prenons le plus de taxes liées à l'environnement. Clairement, clairement, c'est ça
06:58le paradoxe. Effectivement, en termes de responsabilité, on nous parle de 3%. C'est un
07:05chiffre qu'on entend, qu'on entend souvent. Mais quand on va jusqu'au fond, l'Afrique est
07:11composée de 54 pays. Quand on enlève le Maghreb, quand on enlève l'Afrique du Sud, il va nous
07:16rester 47 pays. Figurez-vous, ces 47 pays ne pèsent pas 1% de responsabilité. 1% dans ce qui se passe
07:24dans ce monde. Et pourtant, c'est là où ça fait très mal en termes d'impact du changement climatique.
07:29Est-ce que vous proposez... Enfin, je vais reprendre plutôt. Vous proposez plusieurs
07:37solutions dans votre livre. Quelles seraient, selon vous, les plus urgentes à mettre en oeuvre?
07:42En fait, disons, c'est vrai que quand on fait un essai, on s'attend à proposer des
07:50solutions. Mais en tant qu'Africain, en tant qu'Africain, en tant que Sénégalais, ce serait
07:57prétentieux pour ma personne de proposer des solutions par rapport au changement climatique.
08:01Ceux qui doivent, en tout cas, faire des efforts pour que ce changement climatique s'arrête, ce
08:08sont ceux qui ont gâté cette nature, comme disait Ivorien. C'est eux qui ont gâté la nature. C'est ceux qui ont gâté la nature.
08:14Exactement. Moi, la solution africaine que je propose, c'est que les Africains doivent parler
08:21d'une seule voix. Les Africains doivent aller en unité pour défendre leurs intérêts. Parce que,
08:28je l'aborde dans le livre, on a ces histoires de COP où se prennent en tout cas certaines
08:37décisions, où se réunissent certains chefs d'État. Mais l'Afrique ne pèse pas dans ces rencontres.
08:43Ce qu'il faut dire à cette Afrique, c'est qu'elle comprenne vraiment les véritables enjeux et qu'elle
08:48se prépare en conséquence pour aller en COP. Il faut qu'on soit unis. Mais M. Hadj, dans cette
08:54vision qui est ce qu'elle est, on a des pays comme l'Afrique du Sud qui sont extrêmement
09:03industrialisés. Et à contrario, des pays, je n'ai pas envie de citer un pays pour le froisser,
09:09mais on a des pays qui ne connaissent que très peu, voire pas du tout d'industrialisation.
09:14Donc, comment on peut parler d'une voix unique quand on a de telles disparités ? On a des géants
09:19comme le Nigeria, les cités, l'Afrique du Sud. On peut aussi parler même de l'île Maurice,
09:25les Seychelles, le Maghreb, la Côte d'Ivoire, le Sénégal. Mais derrière, il y en a d'autres où
09:31les conditions ne sont pas les mêmes. Et donc, comment on unifie la vision ? Vous avez parfaitement
09:36raison. Il faut juste, pour répondre à cette question, mettre à table la configuration de
09:45cette Afrique. Vous avez parlé de l'Afrique du Sud. C'est le pays le plus économiquement abouti.
09:5150% de l'économie subsahara va à l'Afrique du Sud. Mais quand on sort de l'Afrique du Sud,
09:58quand on sort de l'Afrique du Sud, on parle de l'Afrique subsahara, on parle de l'Afrique noire.
10:03Oui, l'Afrique noire. Mais quand on sort de l'Afrique du Sud, croyez-moi, on a les mêmes
10:08problèmes, on a les mêmes particularités un peu partout. Je vais vous donner juste un exemple.
10:13Vous voyez la carte mondiale là ? Oui. Voyez-vous l'Espagne, vous la situez quelque part en Europe,
10:21avec sa petite superficie, avec sa petite population. Voyez-vous, quand on prend l'Espagne,
10:27l'Espagne produit plus d'électricité que les 47 pays africains réunis hors Afrique du Sud.
10:33Ça vous choque ? C'est choquant, mais c'est la réalité. Ça veut simplement dire qu'on a
10:41une pauvreté énergétique en Afrique. Et cette pauvreté énergétique, c'est ça qui nous conduit
10:47à notre pauvreté économique. Parce que l'énergie et le développement sont intimement liés.
10:52Vous pensez ? Les pays riches, en tout cas les pays industrialisés qui ont compris,
10:59qui ont compris en tout cas la place de l'énergie, qui est liée à l'environnement,
11:03ben ils ont fait des efforts pour en tout cas être avancés dans ce domaine. Et moi j'aime bien en
11:09fait la citation d'un ministre congolais, parce que moi je ne suis pas un africaniste,
11:15moi je suis... Je vois ça. Je suis engagé en fait, il n'y a même pas un changement de
11:19carte d'ordre. J'aime bien en fait une citation qu'il a annoncée quand il dit qu'effectivement
11:25vous avez entendu parler de cette transition énergétique, souvent on n'en parle pas tout
11:30Côte d'Ivoire, Sénégal, etc. Mais lui il dit que la transition énergétique qui est imposée
11:36à l'Afrique n'aura de sens que si elle sort l'Afrique de sa pauvreté. Je pense que moi en
11:45l'écoutant, voilà, quand j'entends ça, j'applaudis. Et ce sont des propos comme ça qu'il faut
11:52défendre en fait dans cette Afrique. Et croyez-moi, tant qu'on y a un corps en or dispersé,
12:00le Sénégal ira seul, la Côte d'Ivoire ira seule, etc., on va rien gagner en fait encore.
12:06Est-ce que vous pensez que les actions locales et communautaires peuvent avoir un impact réel
12:10face à ce défi qui reste global et comment encourager ces prises d'initiatives? Vous avez
12:17parlé des communautés rurales, des communautés en général. Effectivement, les communautés sont au
12:22coeur de la lutte contre le changement climatique en Afrique. Et ces communautés ont intérêt,
12:28comme on dit, à ne pas se faire oublier. Parce que simplement, c'est eux qui subissent vraiment
12:34en fait ces impacts et il faudrait, vous savez en fait, dans ce qui est sensibilisation au changement
12:40climatique, il y a, pour moi, il y a deux niveaux. C'est-à-dire? Il y a les intellectuels comme moi,
12:44il faut qu'ils parlent, les sachants en fait, il faut qu'ils parlent, il faut qu'on s'exprime. Mais
12:51les communautés rurales, enfin les communautés dont on parle. Les communautés, dont les communautés
12:55rurales, oui. Exactement. Elles sont importantes. Il faudrait qu'ils fassent entendre leur, en tout
13:01cas, leur voix doit être entendue. Mais excusez-moi, je prends, je prends un exemple local. La grand-mère
13:10qui est à qui qui est en ville en Côte d'Ivoire. D'accord. On va même aller localement. La grand-mère
13:19qui a voilà. Elle, elle cherche son riz. Elle cherche son repas de midi. Comment vont faire ses
13:27petits-enfants? Bien sûr. Sa petite communauté, sa petite famille. Absolument. Comment euh la,
13:31comment l'engager dans cette lutte contre le réchauffement climatique selon vous? Mais c'est,
13:38c'est vraiment sensibiliser, sensibiliser parce que c'est un problème de génération en fait. Vous
13:47avez parlé de d'une grand-mère qui a même nous, notre cas, on n'est pas encore grand-père,
13:53on n'est pas encore grand-mère. Non. Mais mais clairement, c'est-à-dire que cette lutte contre
13:58le réchauffement climatique va plus préoccuper nos enfants et nos petits-enfants. Oui. C'est eux
14:05qui vont être les plus impactés. Donc, pour moi, la sensibilisation en tant que telle, c'est à ce
14:11niveau. Il faudrait que les Africains prennent conscience des graves menaces qui pèsent sur eux.
14:16Avant justement que ça n'arrive. Et c'est sur ces mots que nous allons conclure notre
14:23interview. Merci d'avoir répondu à nos questions. Je rappelle que vous êtes l'auteur lauréat du
14:29prix Mila 2024 avec votre oeuvre Changement climatique, la lourde menace sur l'Afrique.
14:34Merci à vous, chers téléspectateurs, d'avoir suivi ce nouveau numéro de C'est à dire.
14:39L'actualité se poursuit sur cette info et sur cette info point si.

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