Quel regard portent les politiques français sur l'élection de Donald Trump ? Écoutrez Roland Lescure, vice-président de l'Assemblée nationale, député des Français de l'étranger en Amérique du Nord et ancien ministre de l'Industrie et de l'énergie, et Thierry Mariani, député Rassemblement National au Parlement Européen.
Regardez L'invité pour tout comprendre avec Yves Calvi du 06 novembre 2024.
Regardez L'invité pour tout comprendre avec Yves Calvi du 06 novembre 2024.
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00:00Yves Calvi, Agnès Bonfillon, RTL Soir, spécial élections américaines.
00:05Bonsoir Thierry Mariani.
00:07Bonsoir.
00:08Vous êtes député Rassemblement National au Parlement Européen.
00:10Merci beaucoup d'être avec nous ce soir sur RTL.
00:12Comment accueillez-vous la réélection de Donald Trump ?
00:15Comme une information.
00:17Vous savez, moi je suis français, donc je salue d'abord la démocratie américaine.
00:22Et puis, je n'ai pas d'avis à avoir sur une élection à l'étranger.
00:28Moi, ce qui m'intéresse, c'est l'intérêt des Français.
00:30Donc, on aura un nouveau président.
00:31On sait que par moments, il a été un peu imprévisible.
00:34Et puis, quand je vois un peu son programme USA First ou Make America Great Again,
00:40je me dis que finalement, Marine Le Pen qui, depuis des années, défend la France d'abord
00:46et le rayonnement de la France, eh bien, peut-être qu'elle a été un peu copiée.
00:50Il ne vous a pas échappé, Thierry Mariani, que le futur président des États-Unis
00:54soulève beaucoup d'inquiétudes.
00:56Pas pour vous ?
00:57Non.
00:58Vous savez, il soulève beaucoup d'inquiétudes au premier mandat.
01:02Regardez le résultat de son premier mandat.
01:04C'est la seule fois où les États-Unis n'ont pas commencé de guerre.
01:07Alors, c'est vrai qu'il est imprévisible.
01:08C'est vrai qu'il n'est pas conventionnel.
01:10C'est vrai qu'il n'est pas, entre guillemets, comme on voudrait.
01:14Mais, je pense qu'au contraire, pour faire peut-être bouger certains dossiers
01:19qui, aujourd'hui, regardez ce qui se passe au Moyen-Orient,
01:21regardez ce qui se passe en Ukraine,
01:24et bien, peut-être, on peut avoir une bonne surprise.
01:27Mais, voilà, c'est aussi, je le répète, le président des États-Unis.
01:31Sa première pensée, c'est les États-Unis.
01:33Nous, c'est la France.
01:34Et donc, on risque par moments d'être concurrents.
01:37Je reviens quand même sur votre dernière réponse, parce qu'elle m'a surpris.
01:40Vous venez quand même de nous suggérer, je voudrais savoir si c'était un trait d'humour,
01:43si vous le pensez vraiment, que Marine Le Pen avait inspiré Donald Trump.
01:46Mais, d'habitude, on nous dit toujours l'inverse.
01:49Je pense que le point commun entre Marine Le Pen et Donald Trump,
01:54il y en a un seul point commun, c'est les patriotes.
01:57L'un pense d'abord aux États-Unis, l'autre pense d'abord à la France.
02:01Voilà, c'est ça. C'est le seul point commun.
02:03Ensuite, je le répète, on est par moments des concurrents.
02:07Et donc, moi, je n'oublie pas, par exemple, que Trump, à un moment,
02:11a mis des sanctions contre l'acier français.
02:14Donc, il faudra aussi se battre.
02:16Ça va être, je le répète, un concurrent.
02:18Mais c'est un concurrent que je respecte.
02:20On a vu les résultats, ce grand chelem dans les États-clés, au Congrès.
02:26Comment expliquez-vous qu'autant d'Américains aient voté Donald Trump en 2024 ?
02:32Parce que je pense que beaucoup d'Américains en ont assez,
02:35d'abord d'une idéologie woke qui ne cesse de gagner.
02:38On en a assez d'entendre dire qu'ils doivent financer une grande partie de la planète.
02:45Et puis, je pense aussi que, comme en France d'ailleurs, on a une partie des…
02:49et chez moi, ce mot-là n'est pas péjoratif, des Américains de base
02:53qui souffrent beaucoup à cause de l'augmentation du niveau de vie.
02:57Voilà, et donc, vous savez, ceux qui remplissent les colonnes des journaux
03:02en expliquant que Trump est un danger public ou un nazi ou un fasciste
03:07et qui diabolisent le rassemblement national en France un peu de la même manière,
03:11eh bien, souvent, ne représentent pas le peuple.
03:13L'équilibre géopolitique de la planète n'est pas menacé
03:16parce que parfois, ça fait partie des caricatures qu'on utilise pour évoquer ces projets.
03:21Et Donald Trump, par ailleurs, affirmait disposer d'un plan précis
03:24pour mettre fin à la guerre en Ukraine en 24 heures.
03:26Vous avez compris de quoi il s'agissait, vous ?
03:28Absolument pas, mais je constate déjà qu'il y a des résultats, je vous rassure.
03:32La semaine dernière, si ma mémoire est bonne,
03:35M. Zelensky était à Bruxelles et il parlait d'un plan pour la victoire.
03:40Je constate que dans son communiqué, désormais, il parle d'un plan pour une paix juste.
03:44Donc, vous voyez déjà, visiblement, certains réalisent qu'il est peut-être temps de finir la guerre.
03:49Donc, on verra. Il y a la guerre en Ukraine, il y a aussi la guerre au Moyen-Orient
03:54qu'on ne peut pas continuer éternellement.
03:56Vous savez, tout le monde s'inquiète, je le répète, de ce que va faire Trump,
04:00mais je le répète, Trump n'a, pendant ces quatre années de mandat, commencé aucune guerre.
04:04Le bilan de M. Biden, quand même, c'est depuis une guerre qui s'éternise en Europe,
04:09de l'Est, et des combats qui s'éternisent au Moyen-Orient.
04:12Donc, je ne vois pas en quoi M. Trump serait plus dangereux.
04:16Le bilan catastrophique, c'était Biden.
04:18Alors, ce que vous dites là est parfaitement factuellement vrai,
04:21mais en même temps, on ne peut pas dire qu'il ait vraiment apaisé la planète.
04:23Et quand il menace de renvoyer chez eux des quantités de Mexicains
04:26qui font tourner notamment l'économie américaine,
04:29je pense que ça peut relever d'une forme de violence, non ?
04:33Renvoyer des gens qui sont dans un pays en situation irrégulière,
04:38c'est une forme de demande de respect de la loi.
04:41Je suis désolé.
04:42Je veux dire, on a aussi des centaines de milliers de sans-papiers.
04:46Personne ne connaît le chiffre en France.
04:48Je pense que leur vocation, c'est de rentrer dans leur pays.
04:50Ce n'est pas de la violence, c'est le respect de la loi.
04:54Vous savez, l'Europe, où je suis en ce moment à Bruxelles,
04:56passe son temps à dire qu'il faut respecter l'état de droit.
04:59L'état de droit, ce n'est pas que dans un pays, on reste sans visa.
05:01Merci beaucoup Thierry Mariani, député Rassemblement national au Parlement européen.
05:06Lui remporte le vote populaire tous les soirs.
05:08On le retrouvera tout à l'heure.
05:10Mais on va maintenant donner la parole à un autre élu,
05:13puisqu'il s'agit de Roland Lescure.
05:15Merci d'être en direct avec nous, Roland Lescure.
05:18Depuis New York, je le rappelle,
05:20vous êtes ancien ministre chargé de l'industrie et de l'énergie.
05:22Vous connaissez très bien les Etats-Unis,
05:24puisque vous êtes aussi député macroniste des Français de l'étranger
05:27et vice-président de l'Assemblée nationale.
05:29Alors, Roland Lescure, tout d'abord, on a envie de vous demander
05:33une réaction après cette large victoire de Donald Trump.
05:36Une victoire sans appel, impressionnante.
05:39Je dois le reconnaître, impressionné par l'ampleur de la victoire,
05:43le vote populaire à plus de 5 millions d'électeurs,
05:46plus de 300 grands électeurs, le Sénat qui bascule,
05:49le Congrès qui bascule sans doute.
05:51On sait que la Cour suprême l'est aussi.
05:53C'est une victoire sans appel qui lui donne les mains libres,
05:56les rênes de l'Amérique,
05:58et évidemment des électeurs qui se sont portés,
06:03mais j'allais dire sans couper rire et sans hésiter,
06:05sur un homme qui pourtant a mené une campagne extrêmement trash,
06:09très populiste, insultante,
06:12mais qui finalement a parlé à une Amérique qui aujourd'hui se sent abandonnée,
06:17notamment par le Parti démocrate, évidemment.
06:20Alors, vous reconnaissez votre surprise et en même temps,
06:22vous analysez la situation, on vient bien de l'entendre.
06:24L'Europe et la France ont-elles des raisons de s'inquiéter
06:27de son retour à la Maison-Blanche ?
06:29Oui.
06:31Alors bon, peut-être qu'une inquiétude ne suffit pas
06:34et que ça va nous réveiller tous pour aller plus avant
06:37dans une Europe rassemblée, une Europe qui investit dans son avenir,
06:40une Europe qui au fond se comporte comme une grande personne autonome
06:45et pas un allié, mais toujours un peu dépendant du grand frère.
06:50Mais aujourd'hui l'inquiétude est forte.
06:52D'abord parce que mécaniquement,
06:54on a une inquiétude très forte sur l'Ukraine.
06:56Il a indiqué qu'il résolverait la guerre en Ukraine en 24 heures.
07:00Oui.
07:01Ça sera évidemment plus compliqué que ça,
07:03mais ça veut dire quand même que l'Ukraine sera fragilisée,
07:06que le soutien américain budgétaire sera sans doute diminué
07:09et qu'il faudra que l'Europe,
07:11si elle souhaite soutenir l'Ukraine jusqu'au bout,
07:13et j'espère que ce sera le cas, soit au rendez-vous.
07:15Le deuxième sujet est économique, avec des tarifs douaniers
07:17qui sont déjà annoncés à 20% au moins sur les produits européens.
07:21Ça veut dire que les exportateurs français de vin,
07:24de pièces détachées d'avions qui rentrent dans les Boeing,
07:27de machines outilles, de matières premières agricoles et autres,
07:32évidemment, seront taxés d'autant et donc perdront en compétitivité.
07:35Donc c'est un choc économique, c'est un choc géopolitique.
07:37Il faut reconnaître que c'est une leçon aussi pour nous tous et nous toutes,
07:41parce que les fureurs, les colères, les angoisses
07:45qui se sont exprimées aux États-Unis s'expriment aussi chez nous.
07:48Et pourtant des millions d'Américains ont choisi Donald Trump,
07:51l'ont préféré à Kamala Harris.
07:53Kamala Harris, qu'est-ce qui lui a manqué selon vous ?
07:56Sans doute du temps d'abord.
07:59Il ne faut pas oublier que Joe Biden a été débranché de la campagne
08:03très tardivement, début juillet.
08:05Elle a eu deux mois pour faire campagne,
08:06là où en général le processus américain dure quasiment un an.
08:09Vous avez les primaires qui vous permettent de vous installer dans votre camp,
08:12vous avez ensuite une campagne très longue.
08:14Ce qui lui a manqué aussi sans doute, c'est d'arriver à se détacher
08:18de son étiquette de sortante.
08:20Au fond, Donald Trump est apparu comme un outsider
08:24qui venait de l'extérieur, même si évidemment il avait été aux manettes
08:27et tout le monde le sait pendant quatre ans, il n'y a pas très longtemps.
08:30Et puis une campagne peut-être trop élitiste.
08:32On a vu beaucoup de vedettes autour d'elle
08:35et au fond dans une Amérique en tout cas qui a envie de voter contre l'élite.
08:40Alors à l'instant, on apprend par l'agence Reuters
08:42que visiblement le président Macron et Donald Trump
08:45ont d'ores et déjà échangé par téléphone.
08:48La victoire de Donald Trump augmente les risques pour l'économie mondiale.
08:52Ses propos sont ceux du gouverneur de la Banque de France.
08:55Est-ce que vous les partagez ?
08:57Un monde plus protectionniste, un monde plus imprévisible,
09:02un monde dans lequel les frontières ont plutôt tendance à se fermer.
09:06Évidemment, c'est un monde plus risqué économiquement,
09:08c'est sans doute des taux d'intérêt plus élevés.
09:10On a vu les bourses en pleine euphorie aujourd'hui,
09:12mais ça c'est traditionnel.
09:14Quand l'incertitude diminue, les bourses saluent le vainqueur,
09:17j'allais dire quel qu'il soit.
09:18Mais à moyen terme, c'est sans doute un risque important.
09:22Et là encore, je le répète, il faut que l'Europe soit au rendez-vous de l'histoire.
09:24Il faut que, notamment sur le développement de l'industrie européenne,
09:27de l'innovation, de l'autonomie économique et sociale européenne,
09:31on soit au rendez-vous.
09:32Et ça, ça va supposer qu'on se rassemble plus encore qu'on ne l'a fait récemment
09:36et qu'on investisse massivement dans l'industrie européenne.
09:39Et puisqu'on parlait économie, il faut s'inquiéter ce soir pour l'exportation
09:42par exemple de nos fromages, de nos vins, car on le rappelle,
09:44Donald Trump veut renforcer les taxes sur ses produits ?
09:47Il suffit de regarder ce qu'il a fait il y a quatre ans.
09:50Il avait augmenté de manière unilatérale les tarifs douaniers
09:54sur le vin français et le vin espagnol,
09:56en raison d'une dispute qui concernait Airbus et Boeing.
09:59Donc il est évidemment capable de tout.
10:02Et à l'époque, je peux vous dire que les Français qui sont ici,
10:04qui sont aussi mes électeurs et qui pour beaucoup d'entre eux
10:06travaillent dans le domaine de l'agroalimentaire,
10:08ont beaucoup souffert.
10:09Quand vous devez vendre du vin français 20 ou 25% plus cher,
10:12évidemment, vous souffrez d'une concurrence face au vin américain.
10:15C'est pour ça qu'il l'a fait.
10:17On ne gagne pas contre les populistes en les diabolisant.
10:19Ces propos sont les vôtres, Roland Lescure,
10:21donc je pense que vous êtes en accord avec vous-même.
10:23Mais est-ce que c'est une leçon pour nous en France aussi, cette élection ?
10:26Mais bien sûr, bien sûr.
10:28Joe Biden avait gagné en diabolisant Donald Trump,
10:31qui à l'époque était président des États-Unis.
10:35Et donc, on avait pu effectivement, je dirais,
10:37toucher du doigt l'inefficience de sa politique.
10:41Mais voilà, Kamala Harris l'a diabolisée.
10:45Barack Obama l'a fait avec un certain talent, en le moquant.
10:48Mais au fond, quand vous diabolisez Donald Trump,
10:51quand vous vous moquez de Donald Trump,
10:53c'est aussi de ces électeurs que vous vous moquez,
10:55ils le perçoivent comme tel, ils le perçoivent comme du mépris.
10:58Il faut les comprendre, il faut les entendre.
11:00Ça ne veut pas dire qu'il faut répondre à leurs interrogations
11:03comme les populistes le font, avec des solutions simplistes.
11:06Mais il faut les entendre, les préoccupations évidemment
11:09qui sont à l'origine de ce vote massif pour Donald Trump.
11:12Merci beaucoup, Roland Lescure, vice-président de l'Assemblée nationale,
11:15député macroniste des Français de l'étranger.
11:17Et une nouvelle dépêche reterre indique qu'Emmanuel Macron,
11:19et le président Trump, ont eu un très bon échange,
11:23mis entre parenthèses, un téléphonique de 25 minutes
11:26qui ont porté sur plusieurs sujets.
11:28Les deux dirigeants ont notamment évoqué l'Europe,
11:30la guerre en Ukraine et les conflits au Proche-Orient.
11:32Dans un instant, on va retrouver le Breaking News avec Marc-Antoine Lebret.