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Elles ont toutes un même destin tragique, mais aucune identité. Elles sont mortes il y a 10, 20 voire 30 ans, mais elles n’ont jamais été identifiées. Pour mettre un nom et un prénom sur les corps de ces femmes retrouvées en Europe, Interpol a lancé en octobre 2024 son opération “Identify me”. Et ce n’est pas une première. Déjà en mai 2023, Interpol a lancé une première édition "d’Identify me", permettant à la Britannique Rita Roberts d'être identifiée plus de 31 ans après sa mort.
Ronald Guintrange et Florine Silvant reçoivent le docteur François-Xavier Laurent, responsable des bases de données ADN d'Interpol, dans un nouvel épisode d'Affaire Suivante. Production et rédaction: Charlotte Lesage, journaliste police-justice de BFMTV.com.

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Transcription
00:00Elles sont mortes il y a 10, 20, voire 30 ans, mais elles n'ont jamais été identifiées.
00:05Pour mettre un nom et un prénom sur les corps de ces femmes retrouvées en Europe, Interpol
00:09a lancé en octobre 2024 son opération Identify Me.
00:13L'idée est de rendre publiques des éléments personnels sur ces victimes, photos de vêtements,
00:18portraits robots, bijoux, pour recueillir un maximum d'informations.
00:22Le but est d'identifier les victimes et de déterminer les circonstances de leur mort.
00:26Interpol a ainsi diffusé les fiches de 46 femmes retrouvées mortes en Europe.
00:30Parmi elles, 7 ont été découvertes en France.
00:33Et ce n'est pas une première.
00:35Déjà en mai 2023, Interpol a lancé une première édition d'Identify Me et elle a porté ses fruits.
00:41La Britannique Rita Roberts a ainsi été identifiée plus de 31 ans après sa mort.
00:46Je suis René Alguintrange et vous écoutez un nouvel épisode d'Affaires Suivantes, le podcast inédit.
00:56Bonjour Florine Sylvain.
00:57Bonjour.
00:58Vous êtes journaliste chez BFM Radio. Bonjour docteur François-Xavier Laurent.
01:01Bonjour.
01:02Vous êtes responsable des bases de données ADN d'Interpol.
01:05Avec vous nous reviendrons sur cette nouvelle opération Identify Me lancée en octobre 2024 par Interpol.
01:11Mais d'abord avec vous Florine Sylvain sur le cas de Rita Roberts, la citoyenne britannique identifiée 31 ans après sa mort.
01:18C'était donc en 2023.
01:20Rita Roberts a longtemps été appelée la femme à la fleur tatouée.
01:24Car en juin 1992, son corps est retrouvé contre une grille dans les eaux d'une rivière en Belgique.
01:30Et à ce moment-là, les enquêteurs belges n'ont aucune information.
01:33Si ce n'est que la victime aurait été tuée de manière violente et qu'elle a un tatouage à l'avant-bras gauche.
01:39Ce tatouage, c'est une fleur noire aux contours jaunes.
01:42Il y a aussi un feuillage vert autour.
01:44Et sous cette fleur, il est écrit « ERNIC ».
01:47Au fil de l'enquête, pour connaître les circonstances de la mort, les pistes explorées par la police se referment une à une.
01:53Reste alors une hypothèse. La jeune femme vient peut-être d'un autre pays.
01:57Et c'est donc à ce moment-là que les autorités belges transmettent le dossier à Interpol.
02:01Tout à fait.
02:02Interpol, c'est une organisation internationale qui promeut la coopération policière entre les pays.
02:07Le siège est basé à Lyon.
02:09Et Identify Me, c'est une sorte d'appel à témoins international.
02:13En 2023, la première opération concernait 22 femmes retrouvées mortes en Allemagne, en Belgique et aux Pays-Bas.
02:19Et en fait, pour alerter les proches, Interpol diffuse certains éléments dans l'espoir que les familles des victimes les reconnaissent.
02:26Comme par exemple des portraits robots, la description de leurs tenues ou encore un signe distinctif comme un bijou ou un tatouage.
02:33Et c'est grâce à ce fameux tatouage de fleurs que Rita Roberts va être reconnue par un membre de cette famille de l'autre côté de la Manche.
02:39C'est ça. Interpol, dans son appel à témoins, a diffusé la photo de ce tatouage.
02:44Ça a été relayé dans la presse et un membre de la famille de Rita Roberts, qui habite lui au Royaume-Uni, l'a reconnu.
02:50Finalement, c'est en novembre 2023 que la femme à la fleur tatouée est identifiée, donc 31 ans après sa mort.
02:57Elle s'appelait Rita Roberts, elle était britannique et elle avait 31 ans.
03:00Et que sait-on de la vie de cette Rita Roberts ?
03:03Assez peu de choses finalement. On sait qu'elle était britannique, qu'elle a quitté Cardiff pour Anvers en Belgique en février 1992.
03:10Son dernier contact avec sa famille, c'est une carte postale envoyée en mai 1992, donc un mois avant la découverte de son corps.
03:18On a aussi une description physique de la jeune femme.
03:21Elle mesurait 1m70 et elle avait la peau claire avec des cheveux bruns mi-longs.
03:26Le jour de sa mort, elle portait un t-shirt bleu foncé, violet et vert clair, un pantalon de sport foncé et des chaussures de marche.
03:33Et d'après ses proches, Rita était une belle personne qui adorait voyager, sa famille et surtout ses neveux et nièces.
03:39D'ailleurs, ils disent qu'elle avait la capacité d'illuminer une pièce et partout où elle allait, elle était la vie et l'âme de la fête.
03:47Et au sujet de la découverte de son corps, sa famille explique que même s'il a été difficile d'apprendre la nouvelle,
03:53ils sont extrêmement reconnaissants de savoir ce qui est arrivé à Rita.
03:57Une fois qu'elle a été identifiée, que s'est-il passé ?
04:00Le tribunal des affaires familiales d'Anvers a alors modifié le certificat de décès.
04:05Il a fait enfin apparaître le nom de Rita Roberts.
04:08Et de leur côté, les autorités belges ont sollicité l'aide du grand public pour éclaircir les circonstances de sa mort.
04:14Car l'idée est simple, plus l'appel à témoins est large, plus les chances de récolter des informations sont grandes.
04:20Et en fait, maintenant que l'identité de Rita Roberts est révélée, les enquêteurs espèrent recueillir les témoignages de personnes
04:26qui auraient pu la croiser avant sa mort ou ceux d'anciens collègues par exemple.
04:30Et là, c'est la deuxième phase de l'enquête criminelle qui est donc toujours en cours.
04:35Docteur François-Xavier Laurent, vous êtes responsable des bases de données ADN d'Interpol.
04:40Comme Florine nous l'a expliqué, la campagne Identify Me a permis en 2023 d'identifier cette femme morte depuis 31 ans.
04:47Pourquoi Interpol fait appel au public ?
04:50Parce qu'on estime que dans ces affaires-là, toutes les pistes d'enquête ont pu être exploitées.
04:56Que tous les éléments que possédaient sur elles ces victimes, que ce soit des bijoux, des vêtements, d'autres types d'affaires personnelles,
05:04n'ont pas permis de pouvoir formellement identifier cette personne.
05:08Et donc, la seule solution dans ces cas-là d'affaires, on va dire, un peu clôturées, un peu en attente,
05:14c'est d'utiliser un peu la piste de la dernière chance qui est l'appel au public.
05:18Et savoir si parmi les personnes qui vont voir ces photos, ces informations sur le site Interpol,
05:24un ex-collègue, une ex-amie, quelqu'un de la famille, se souvient effectivement que ce tatouage,
05:30ce bijou, ces vêtements, cette reconstruction faciale des victimes, leur appellent un souvenir.
05:36Et ensuite, en contactant Interpol, on peut mettre ces informations à disposition des enquêteurs dans chaque pays
05:41pour espérer suivre cette nouvelle piste et arriver à identifier ces femmes.
05:46Et concrètement, comment le public aide physiquement ?
05:49Donc physiquement, en fait, on peut aller sur le site d'Interpol, regarder toutes ces informations
05:53et remplir un formulaire de contact.
05:55Et ce message va nous arriver à Interpol, mais également au niveau de la police du pays en charge de l'affaire.
06:01Et donc, après, le système va être de pouvoir vérifier les informations pertinentes qu'il y a dans ces messages.
06:07Si elles sont pertinentes, effectivement, on les transmet aux enquêteurs,
06:10qui vont pouvoir ensuite après vérifier, selon les informations qui sont fournies,
06:14s'il s'agit d'une personne effectivement portée disparue.
06:17Est-ce qu'au niveau biométrie, donc ADN, empreinte digitale, empreinte dentaire,
06:21on peut confirmer qu'il s'agit bien de cette femme ?
06:23Et ensuite, alerter la famille et divulguer ces informations au public.
06:28Combien de signalements ont été effectués depuis le lançant de la nouvelle campagne en octobre 2024 ?
06:32Donc depuis la nouvelle campagne, qui s'est lancée il y a un peu plus de dix jours maintenant,
06:35nous avons reçu plus de 250 messages du public.
06:38Donc des messages qui sont soit des messages de proches potentiels qui ont reconnu l'un des leurs,
06:44ça peut être des messages de policiers en herbe qui s'intéressent aux affaires criminelles en ligne notamment,
06:49et qui vont essayer de voir sur d'autres sites internet,
06:53est-ce qu'il y a un lien potentiel avec une personne portée disparue ?
06:56On va avoir des réponses un peu plus techniques parfois,
06:58en nous disant « j'ai exactement le même bracelet, j'ai exactement la même boucle d'oreille,
07:02donc je l'ai acheté dans ce magasin-là, dans ce pays-là, peut-être que ça peut aider les enquêteurs ».
07:06Et on a quelques messages parfois un peu farfelus qu'il faut trier,
07:10mais tous les messages sont lus, tous les messages sont analysés,
07:13et effectivement tous les enquêteurs vont poursuivre toutes ces pistes.
07:16Et justement, les messages qui vous aident vraiment, que vous recevez, ça ressemble à quoi ?
07:21Alors ça peut être un message très long.
07:25On a quelques messages en fait avec énormément d'informations.
07:28Que ce soit des informations qui sont très pertinentes,
07:31dans le sens où seule la famille peut connaître ces choses-là.
07:35Ça peut être aussi des photos qui nous sont transmises par des familles,
07:38donc ensuite on va utiliser ces photos pour voir s'il y a une ressemblance ou pas,
07:42et si les circonstances de la disparition de la personne sont compatibles avec la découverte du corps.
07:47On a des personnes qui vont nous envoyer des informations sur une personne disparue,
07:51mais parfois, on va dire que la vérification de leur côté n'est pas complètement faite,
07:55et on voit que la personne a disparu après la découverte du corps.
07:59Donc dans ce cas-là, on sait que ce n'est pas possible,
08:01mais on a vraiment des gens qui sont très passionnés pour aider la police,
08:05et dans le cadre de cette campagne, on peut vraiment le faire,
08:08on peut être acteur et aider concrètement les policiers sur des vraies affaires criminelles.
08:12Comment je contacte Interpol ?
08:14Comment une fois que j'ai contacté Interpol, les équipes d'Interpol traitent mon signalement ?
08:17Est-ce qu'il y en a beaucoup ?
08:19Oui, alors dès que le message arrive, on va le lire premièrement,
08:22on va voir les informations qui sont disponibles.
08:24Si le membre du public nous donne un nom,
08:26on va vérifier si cette personne a été reportée comme étant disparue dans son pays.
08:30On va pouvoir mettre en contact les polices des deux pays
08:33pour qu'ils échangent des informations pour voir si effectivement c'est pertinent ou pas.
08:37Et on va dire qu'ultimement, pour identifier une personne,
08:40il va falloir comparer le profil ADN de cette personne
08:43avec le profil de l'époque ou le profil des proches biologiques.
08:46On va pouvoir comparer les empreintes digitales,
08:48avoir d'autres informations si la biométrie n'est pas disponible,
08:51comme pour le cas de Rita sur le tatouage.
08:53Et en fait, on espère qu'au final, on va pouvoir avoir des informations si uniques
08:58qu'on va pouvoir ne pas avoir de doute sur l'identité de la femme.
09:01Justement dans le cas de Rita, au moment où la famille vous envoie les messages,
09:05après ça prend combien de temps et qu'est-ce qui se passe ?
09:08Alors le processus va être assez long parce que la première phase va être
09:11de mettre un ordre de priorité sur les messages qu'on reçoit.
09:14Effectivement, toutes ces affaires pour nous sont toutes importantes,
09:16mais suivant la qualité du message et la qualité des informations qui sont données,
09:20on va essayer de se focaliser premièrement sur les messages qui ont le plus d'informations.
09:24Et ensuite, ça va passer par des vérifications d'identité dans les différents pays,
09:28du contact et de la coopération internationale.
09:31Et au final, quand on arrive à une identification formelle
09:34qui est permise par les méthodes de police scientifique,
09:36la première chose qu'on va faire, c'est d'alerter la famille forcément.
09:40Ensuite, après, vous avez l'enquête qui peut changer un peu de type,
09:43c'est-à-dire qu'on va passer d'une étape d'identification d'une personne inconnue
09:47à l'ouverture potentiellement d'une enquête criminelle contre cette personne.
09:51Et donc, ça va ouvrir un nouveau volet.
09:53Donc, c'est vrai que d'après les séries et les films,
09:55on a l'impression que ça se fait très rapidement,
09:57mais il y a quand même beaucoup d'étapes importantes à vérifier.
10:00Et on se prononce que quand l'identification est sûre, on va dire à 100%.
10:04Une dernière question peut-être, est-ce que c'est une initiative qui a vocation à être pérenne ?
10:08On l'espère, on voit qu'en fait, le public a vraiment une appétence pour ce type de campagne.
10:12On a reçu plus d'un million de visites sur le site depuis le lancement de cette nouvelle campagne.
10:16Donc, on a le sentiment que le public veut vraiment aider.
10:19Et quand on sait qu'il y a énormément de familles dans le monde entier,
10:22pas qu'en France, qui recherchent l'un des leurs,
10:24on pense que cette coopération internationale est vraiment très importante
10:28à la lumière des voyages de tout le monde, du travail qui peut être fait dans un autre pays.
10:33On a besoin de pouvoir avoir une plateforme, comme à Interpol,
10:36qui permette de mettre en commun les pièces du puzzle,
10:39qui peuvent être parfois internationales.
10:41Merci beaucoup, Dr François-Xavier Larond.
10:43Merci beaucoup, Florine Sylvan.
10:45C'était Affaires suivantes, le podcast inédit.

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