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Yannick Alléno, chef cuisinier qui a perdu son fils, tué par un chauffard, était l'invité du Live Switek ce jeudi.

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00:00Mais d'abord on accueille notre invité, bonjour Yannick Allénaud, merci beaucoup d'être avec nous ce matin.
00:05Chef multi-étoilé, vous êtes là parce que votre fils Antoine a perdu la vie le 8 mai 2022,
00:10percuté par un chauffard, ivre, sans permis, au volant d'une voiture volée et récidiviste.
00:15On est deux ans après, cet homme va être jugé, une première audience de fixation aujourd'hui
00:20et le procès démarra le 31, enfin, enfin pour vous.
00:23Oui, je crois que c'est une étape importante, ne serait-ce que pour commencer notre deuil, voilà.
00:28Tant que ce n'est pas passé, je crois qu'on ne peut pas commencer réellement ce travail.
00:32Donc il est important que, enfin, ça fait deux ans plus tard que cette affaire soit enfin traitée.
00:37Le procès dont parlait Roselyne, la confrontation avec le chauffard,
00:42est-ce que c'est un moment que vous l'attendez ou que vous redoutez ?
00:46Écoutez, moi j'ai vécu déjà, j'ai accompagné une maman qui a perdu sa fille trois semaines après Antoine.
00:53Elle avait 23 ans, percutée par un chauffard également, qui avait fait quatre refus d'obtempérer,
00:58qui a percuté cette pauvre enfant à plus de 100 km au Pont-Neuf.
01:02Donc, ce n'est pas un moment facile, ça c'est évident.
01:06Mais je pense que c'est un moment nécessaire, déjà pour que la justice se fasse,
01:10et je pense qu'à partir du moment où elle est faite, on peut, je pense, passer à autre chose,
01:14en tout cas reprendre, tant se faire se peu, une vie normale.
01:17Vous disiez que vous aviez beaucoup de colère, c'est encore le cas aujourd'hui ?
01:20On ne peut pas ne pas être en colère vis-à-vis de quelqu'un qui a enlevé la vie de votre fils, ce n'est pas possible.
01:25Surtout avec cette litanie, ivre, sans permis, récidiviste ?
01:29Voiture volée ?
01:29Oui, c'est vraiment du banditisme.
01:32C'est pour ça que je pense que la notion d'homicide involontaire est insupportable pour une victime.
01:37Moi, c'est ce que la juge de l'instruction m'a dit quand j'étais présenté devant elle.
01:40Elle m'a dit, écoutez, on a inculpé la personne qui a tué votre enfant de domicile involontaire.
01:45Cette personne-là a tout mis en œuvre, en fait, pour que la finalité soit celle qu'on connaît.
01:51Voler une voiture, rouler à plus de 160 dans les routes de Paris, refuser d'autant pérer par la BAC,
01:57taper mon enfant dans le dos à nuit bosquée, enfin, je veux dire, il n'y a rien d'involontaire.
02:03Pour vous, ce ne sont que des gestes et des choix volontaires de sa part ?
02:06Ce sont des choix volontaires, oui, dans la plupart des homicides routiers,
02:09puisque nous, on aimerait que cette loi arrive enfin.
02:12C'est distinguer l'accidentologie, parce que c'est comme ça, je pense,
02:16qu'ils vont être traités d'un crime routier, on va dire.
02:22En Europe, il y a, en Italie d'ailleurs, ça existe, l'homicide routier existe.
02:25En Suisse, le meurtre par doigt involontaire existe, on parle bien de meurtre.
02:31Ok, je n'ai pas voulu tuer, mais j'ai tout fait pour y arriver.
02:34Donc, je crois qu'il est temps que le système français se dote d'outils modernes.
02:38Oui, parce que chez nous, ça a failli exister.
02:40Le texte a été voté au Sénat, allait revenir à l'Assemblée et puis il y a eu la dissolution.
02:46Donc, retour à la case départ ?
02:47Non, pas retour à la case départ, parce qu'effectivement, il y a eu l'adoption du texte
02:52portée par le député Pogé et Anne Bruguera.
02:57Et c'était assez beau, parce qu'il y a eu finalement une acceptation consensuelle transpartenate du texte.
03:03Pour une fois qu'ils ne se sont pas mis dessus, pour des idées différentes,
03:07c'était quand même assez intéressant.
03:08C'est passé au Sénat, et là, le Sénat a évidemment abondé de ce qui est normal,
03:14de choses et d'autres, notamment le refus d'obtempérer,
03:18qui n'était pas, jusqu'à présent, considéré comme une circonstance aggravante.
03:22Il y en a, je vous le rappelle, 27 000 en France.
03:24On refuse de s'arrêter pour la police.
03:27Et puis, ça devait effectivement revenir en deuxième lecture à l'Assemblée,
03:30et puis il y a eu la dissolution.
03:31Mais on ne repart pas à zéro, puisque le texte, je l'espère, et j'en appelle aux responsables politiques,
03:36de le présenter très rapidement.
03:38C'est important, pourquoi ?
03:40Vous voyez, l'autre fois, j'avais des clients qui me disaient
03:41« Ecoutez, on vous entend à la télé depuis deux ans,
03:43on vous entend sur les radios et on lit les journaux, vous parlez de ça.
03:47On était à la maison, en famille, en amie,
03:51et on a fait un déjeuner en Normandie, tous ensemble.
03:53Évidemment, je pense que le seuil alcoolique était trop élevé,
03:56mais on s'est rappelé de ce que tu as dit.
03:58Donc, on n'a pas pris nos véhicules,
04:00on est rentrés en taxi et revenus chercher les voitures le lendemain.
04:02Donc, je pense qu'aujourd'hui, ce n'est plus excusable.
04:04Les informations, nous les avons.
04:06Quand on se drogue, on sait ce que ça peut procurer quand on prend un véhicule à moteur.
04:10On sait que la conscience n'est pas là et qu'on se drogue sciemment,
04:15on prend le véhicule sciemment et on peut tuer quelqu'un au bout du chemin.
04:19On est loin de l'accident de quelqu'un qui a pris le soleil dans l'œil.
04:22Ça veut dire que passer d'un homicide involontaire comme c'est le cas aujourd'hui
04:24à un homicide routier, ce n'est pas qu'une question de mots, en réalité, derrière.
04:28C'est aussi, dans certaines circonstances, alourdir les peines.
04:32C'est ça qu'il y a dans la loi aussi.
04:34Alourdir, non, parce que le quantum des peines sera le même
04:36que ce qui a déjà marqué dans le code pénal.
04:37Il est suffisamment fourni, je crois.
04:39Il change beaucoup de choses. Pour qui, en fait ?
04:41Pour les victimes.
04:42On pense souvent à ceux qui font les méfaits, mais pas aux victimes.
04:45De mettre un mot sur le mal, je pense que c'est déjà le traiter mieux.
04:50Ensuite, nous, ce qu'on a besoin, c'est effectivement que ça passe.
04:53Pourquoi ? Pour aller en aide aux co-victimes, c'est-à-dire ceux qui restent.
04:57Parce qu'aujourd'hui, rien n'est fait puisque c'est un accident.
04:59On donne ça à la responsabilité des assurances.
05:03Et depuis qu'on a monté l'association,
05:04on a monté l'association le jour de l'enterrement d'Antoine,
05:08on s'est aperçu du dégât que ça procurait.
05:12Donc, avec sa mère et son frère, on a décidé de monter cette association
05:16parce qu'on a vécu ça.
05:17Et que si je ne mettais pas, finalement,
05:19ce que la vie m'a donné de notoriété au service de ça,
05:22et en tout cas, essayer de sauver des gamins,
05:25ça n'aurait servi à rien.
05:27Voilà, ça n'aurait servi à rien.
05:29Donc, il faut bien prendre conscience un truc.
05:31C'est que quand ça arrive, il faut tout de suite aller voir les familles,
05:33leur demander ce qu'ils ont besoin.
05:35Je vais vous raconter deux, trois trucs.
05:38Quand l'instruction n'est pas terminée, les assurances ne se déclenchent pas.
05:40On a eu des cas, un cas notamment, d'une famille
05:43qui n'avait pas les moyens d'enterrer son enfant.
05:46On parle de 2000 euros.
05:48Qu'est-ce qui se passe dans ces cas-là ?
05:49Eh bien, on enterre la jeune enfant dans du sable
05:52et puis on attend que les assurances se débloquent
05:55pour avoir les moyens d'acheter une pierre tombale.
05:58Moi, je veux remettre de l'humanité dans tout ça.
05:59On prenne conscience que c'est un fléau national.
06:02C'est 700 enfants qui sont partis l'année dernière et ça ne décroît pas.
06:06Donc, il est temps de regarder ça avec courage
06:08et d'arrêter de mettre la vie de ces enfants dans trois lignes de l'APQR,
06:13la presse régionale.
06:14Tout enfant mérite considération.
06:16Surtout, voilà.
06:18Et je suis très en colère à chaque fois qu'il y en a un qui part, en fait.
06:22Parce qu'on n'a rien fait encore.
06:23Donc, c'est ça qui me met en colère.
06:25Il y avait un autre point également qui vous mettait en colère.
06:28Je sais que votre association avait communiqué à ce moment-là.
06:30C'est que, dans votre cas, le chauffard est placé en détention provisoire
06:34et ensuite, il est libéré au bout d'un an.
06:36Et vous dites, comment est-ce qu'on peut le libérer avant même que le procès ait eu lieu ?
06:39Pourquoi est-ce qu'il n'y a pas un maintien en détention jusqu'au procès ?
06:43Alors déjà, c'est ce qu'on appelle la présomption d'innocence.
06:46Bien sûr.
06:47Je crois que c'est un pilier fondamental de notre Constitution.
06:51Ça fait rager, c'est sûr.
06:52Ça fait rager.
06:53Alors après, il n'a pas fait un an, il a fait deux mois de préventive.
06:56Ensuite, il a fait les six mois qu'il devait purger
06:58parce que le jour où il a tué Antoine, il devait être en taule.
07:00Il devait être en prison, donc il ne l'a pas fait.
07:02Donc il a fait à ce moment-là ces six mois de prison qu'il devait faire
07:04le jour où il a tué mon enfant.
07:05Donc voilà, évidemment, ça vous met en rogne.
07:09Je ne vois pas qui serait...
07:12Voilà, ce n'est pas possible.
07:14Donc la loi est comme ça, encore une fois.
07:15Je pense qu'il ne faut pas non plus remettre tout en question.
07:17Simplement, on a eu à vivre des choses, le féminicide par exemple.
07:25On parlait de crime passionnel dans le temps.
07:26Aujourd'hui, on qualifie les choses.
07:28Et donc, je crois, je ne sais pas, j'espère en tout cas,
07:30que le mal est mieux traité aujourd'hui
07:32parce que la prise de conscience de la justice est plus affinée.
07:38Voilà, quelqu'un qui va se présenter parce qu'il a fait du mal à son épouse,
07:42il n'a pas le même regard.
07:44Et là, ça sera pareil.
07:44Je crois que le regard va changer radicalement
07:48par rapport aux gens qui font n'importe quoi,
07:51au mépris de toutes les lois.
07:53Merci beaucoup, Yannick Allénaud, d'être venu en plateau.
07:56On rappelle le nom de l'association,
07:57l'association Antoine Allénaud pour les familles qui en auraient besoin
07:59et pour tous ceux qui veulent aider.
08:01Merci encore.

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