Avec Julien Dray, ancien député socialiste et auteur de "Qui est Mélenchon?" (à paraitre chez Plon)
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##L_INVITE_POLITIQUE-2024-10-07##
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NewsTranscription
00:00Soudradio, l'invité politique, Jean-Jacques Bourdin.
00:07Il est 8h35, vous êtes sur Soudradio, merci, notre invité ce matin, Julie André. Julie André, bonjour.
00:12Bonjour.
00:13Merci d'être avec nous. Alors, vous publiez dans quelques jours, je crois que c'est début novembre.
00:187 novembre.
00:19Précipitez-vous dans les librairies, c'est le 7 novembre.
00:22Dans un mois, donc.
00:23Un mois, jour pour jour. Qui est Mélenchon ? Intéressant, hein ?
00:28Vaste question.
00:29Oui, c'est une question. Tiens, je vais y revenir.
00:32C'est une question, parce qu'il faut préciser, c'est chez Plon, le livre,
00:36il faut préciser que vous avez très bien connu Jean-Luc Mélenchon.
00:39Pendant une vingtaine d'années.
00:41Une vingtaine d'années, très proche, très ami.
00:44Donc, on va revenir évidemment sur Jean-Luc Mélenchon et ses derniers propos.
00:49D'ailleurs, ses derniers propos.
00:53Il y a un an, massacre commis par le Hamas, 1205 morts,
01:00des hommes, des femmes, enceintes parfois, des enfants,
01:04des mutilations, des viols, des prises d'otages,
01:09il y a encore 64 otages vivants, dit-on.
01:14Les chiffres, évidemment, ne sont pas véritablement connus,
01:17on ne sait pas réellement.
01:19La guerre fait rage contre le Hezbollah, contre le Hamas.
01:23Est-ce que les otages sont oubliés aujourd'hui, Julien Dray ?
01:27Ils ne sont pas en Israël, puisque vous savez bien qu'il y a un débat
01:31récurrent, d'ailleurs, sur les choix qu'il faut faire.
01:34Mais dans le monde entier, on est déjà passés à autre chose.
01:37Je note que, par exemple, il y a encore deux otages français
01:40et qu'il y a très peu de gens qui en parlent.
01:42Quelques personnalités dans les médias, mais pour le reste,
01:45les autorités françaises n'ont pas l'impression qu'il s'agit de beaucoup
01:48pour essayer d'obtenir la libération des otages.
01:50Pourtant, les relations sont tellement bonnes avec le Qatar,
01:53qu'on pourrait penser qu'on fasse pression sur le Qatar
01:57pour qu'il fasse pression lui-même sur le Hamas,
01:59puisque c'est le Qatar qui a financé pendant des années le Hamas,
02:03pour que les otages français, au moins, soient libérés.
02:05Pourquoi dites-vous que les relations sont tellement bonnes avec le Hamas ?
02:09Je vais raconter une anecdote.
02:11Quand j'étais parlementaire, je me suis battu pendant des années
02:14pour qu'il y ait une commission d'enquête
02:16sur les investissements du Qatar en France.
02:18Pour qu'on comprenne où il avait investi,
02:20pourquoi il bénéficiait d'un statut fiscal très particulier
02:23qui avait été mis en place par Sarkozy
02:25et qui a été prolongé par François Hollande et par Emmanuel Macron,
02:28puisque les bénéfices ne sont pas taxés, ils sont repatriés.
02:31Et je n'ai jamais pu obtenir cela.
02:33Il y a toujours une bonne raison qu'il ne fallait pas en parler.
02:36Donc il y a des bonnes relations, le Qatar est très présent,
02:39et il n'est pas très présent qu'économiquement,
02:41c'est une force de pression, avec un jeu trouble du Qatar,
02:45ça se voit, il est avec les uns, il est avec les autres,
02:48c'est une diplomatie très particulière du Qatar.
02:51Est-ce que vous pensez qu'Emmanuel Macron,
02:53lorsqu'il dit ce qu'il a dit samedi,
02:57le fait, pas sous l'ordre du Qatar,
03:01mais inspiré par le Qatar ?
03:03Oui.
03:04Oui ?
03:05Oui, je réponds oui.
03:06Inspiré pour faire plaisir à tout ce qu'il représente,
03:09ce lobby financier, ce lobby politique aussi.
03:13Voilà, donc il est sous la pression de cela,
03:17et puis aussi des contraintes qu'il imagine,
03:21parce que je pense qu'elles sont fictives,
03:23de la société française.
03:25Il devrait avoir honte ?
03:28Ecoutez, j'ai employé une expression très dure hier,
03:30j'ai dit que c'est pire que ce qu'a fait Daladier.
03:33Et donc l'interlocuteur de face de moi
03:36a été abattu en silence comme vous.
03:39Oui, parce qu'au moins Daladier,
03:41il savait qu'il avait fait une connerie.
03:43Alors qu'Emmanuel Macron,
03:45il a mis quand même 24 heures à se rendre compte
03:47qu'il avait fait une énorme bêtise.
03:49Non pas parce que la France livre beaucoup d'armes à Israël,
03:51de toute manière ça compte très très peu,
03:53ça ne compte pas.
03:54Elle livre beaucoup plus d'armes au Qatar,
03:56qui est le troisième acheteur d'armes en France.
04:00Ce n'est pas essentiel,
04:02mais parce que c'est une posture, en fait.
04:04C'est une posture politique.
04:06Je lis dans la presse que la relation
04:08entre M. Netanyahou et M. Macron sont dégradées,
04:10que M. Macron, semble-t-il,
04:12a été humilié par le voyage aux Etats-Unis,
04:16qui a servi de prétexte pour faire l'élimination de Nasrallah.
04:19Bon, on ne sait rien de tout ça, c'est secondaire.
04:21Mais la France n'est pas là où elle doit être.
04:24La France, elle doit être aujourd'hui dans le combat
04:26pour permettre par exemple que le Liban
04:28redevienne une nation souveraine,
04:30et se battre, parce que c'est une opportunité comme jamais,
04:32pour qu'enfin le Liban se libère du Hezbollah.
04:34Alors justement, je vais parler de ces opportunités.
04:38Aujourd'hui, Julien Dray,
04:40mais je reste sur la déclaration d'Emmanuel Macron,
04:43qui a appelé, ou Benjamin Netanyahou a appelé,
04:46Emmanuel Macron ne sait pas trop.
04:48Hier, les deux hommes se sont parlés.
04:50Le temps du cessez-le-feu est désormais venu
04:53à répéter Emmanuel Macron à Benjamin Netanyahou,
04:57qui lui réplique,
04:59j'attends un soutien de la France,
05:01et non des restrictions.
05:03Voilà, les deux positions sont...
05:05Le cessez-le-feu, il a toujours été là depuis le début.
05:07Il suffit simplement que, je veux dire,
05:10on libère les otages, qu'on dépose les armes,
05:12et qu'on arrête de tirer des milliers et des milliers
05:15de missiles pour le Hezbollah sur Israël,
05:17alors qu'au point de départ, il n'y a pas de conflit
05:19entre le Liban et Israël.
05:21Il n'y a pas de conflit territorial, à part une ferme de Sheba,
05:23mais qui est vraiment mineure.
05:25Voilà, et c'est pareil pour le Hamas.
05:27Alors, vous savez, j'ai toujours posé cette question-là,
05:30et je continue à la poser.
05:31Ils ont construit des souterrains
05:33qui sont plus grands encore en superficie
05:36que la ville de Gaza elle-même.
05:38Combien de Gazaouis ont pu accéder à ces souterrains
05:41pour se protéger des bombardements ?
05:43Vous vous rendez compte l'argent qu'il a fallu dépenser
05:45pour construire ce qui est une énorme infrastructure
05:48qu'il faudra étudier, puisqu'il y a des souterrains
05:50entre Gaza et l'Égypte,
05:52où des camions entiers peuvent passer.
05:54Vous vous rendez compte si tout cet argent
05:56avait été consacré au développement de Gaza,
05:58qui par ailleurs avait un énorme potentiel.
06:00Quand il y a les accords de Slot
06:02et la possibilité peut-être de faire naître
06:04un État israélien, je me rappelle toujours
06:06de cette phrase des autorités israéliennes,
06:09de M. Pérez notamment,
06:11qui me disait, qui nous a dit, dans une délégation
06:13dans laquelle j'étais,
06:15Gaza peut devenir la perle du Moyen-Orient.
06:17C'est pas ça qu'ils ont dit ?
06:19– Julien Dray,
06:21si on appelle à un cessez-le-feu,
06:24la cohérence c'est de ne pas fournir des armes de guerre,
06:27c'est ce que dit Emmanuel Macron.
06:30– Il a appelé un cessez-le-feu avec les Etats-Unis.
06:33– Non mais la question c'est pas le cessez-le-feu,
06:35c'est qu'est-ce qui se passe après le cessez-le-feu.
06:37– Justement, c'est-il, connaissez-vous,
06:39quelle est la stratégie de Benjamin Netanyahou
06:41après le cessez-le-feu, s'il y a un cessez-le-feu ?
06:43– Je ne suis pas le porte-parole
06:45de Benjamin Netanyahou, je le dis tout de suite.
06:47Je ne suis même pas citoyen israélien,
06:49donc je n'ai pas à m'initier là-dedans.
06:52Je ne suis pas sûr qu'il y ait une solution politique,
06:55mais d'un certain point de vue,
06:57le 7 octobre dans la journée,
06:59c'est une question nouvelle qui est posée pour Israël.
07:02C'est plus simplement la question d'un État palestinien.
07:05La question qui est posée, c'est la survie de l'État d'Israël.
07:08La forme qu'a prise le 7 octobre,
07:10la forme, le déroulement des événements le 7 octobre,
07:13ceux qui l'ont conçu,
07:16ils savaient très bien le choc que ça allait créer.
07:18Or, vous savez, ça fait 20 ans que ça dure,
07:20parce que j'étais là au moment où la possibilité de la naissance
07:23d'un État palestinien...
07:25J'ai eu Yasser Arafat en face de moi,
07:27qui m'a dit « J'ai le temps, je ne suis pas pressé ».
07:29Or, tout était prêt.
07:30Tous les accords, ce qu'on appelle les accords de tabac,
07:32donnaient la naissance d'un État palestinien.
07:34Ils ont refusé.
07:35Et à partir de là, la radicalisation a entraîné la radicalisation.
07:38C'est-à-dire que la société israélienne,
07:40qui était prête à faire ce pas,
07:42quand elle a subi les attentats aveugles, etc.,
07:44elle s'est radicalisée,
07:46d'où les victoires de M. Netanyahou à répétition,
07:48et d'où en face, puisque c'est Netanyahou,
07:51c'est l'engrenage qui s'est enclenché.
07:55Donc le rôle de la France,
07:57ce serait plutôt de proposer des solutions,
07:59d'être à l'initiative.
08:01Par exemple, aujourd'hui, je prends un exemple au Liban,
08:03le Hezbollah doit déposer des armes,
08:05l'armée libanaise doit se déployer à la frontière
08:08entre Israël et le Liban,
08:10l'armée libanaise,
08:12et il doit y avoir, peut-être pas la paix tout de suite,
08:14mais au moins un traité de non-agression.
08:16Et le Hezbollah doit être mis hors-jeu de la vie politique libanaise.
08:19C'est ça la France, c'est exactement l'inverse
08:21qu'est en train de faire la diplomatie française.
08:23Elle est en train d'essayer de sauver le Hezbollah.
08:25Tous les émissaires français
08:27passent leur temps à discuter avec le Hezbollah
08:29pour le remettre en selle, alors qu'il est marginalisé
08:31dans la société libanaise d'aujourd'hui,
08:33et très affaibli, et qu'il a pris en otage.
08:35Moi j'ai des milliers de Libanais
08:37qui me disent, des amis, pas que chrétiens,
08:39des amis sunnites, etc.,
08:41qui me disent, ou druses,
08:43qui me disent, on n'en peut plus.
08:45C'est la même chose en Iran, je vous signale.
08:47C'est la même chose en Iran.
08:49Tous mes amis iraniens que je connais
08:51me disent qu'une seule chose,
08:53purée, s'ils pouvaient nous aider à faire tomber ce régime.
08:55Et nous, on ne sait pas où on est.
08:57C'est d'ailleurs un des problèmes qui est posé.
08:59C'est que, dans le débat
09:01actuel, et les Américains
09:03ne sont pas les derniers là-dessus,
09:05on se dit, il vaut mieux avoir un équilibre dans le déséquilibre
09:07que ne pas savoir où on va.
09:09Donc, on joue avec le régime
09:11iranien. On joue avec lui.
09:13Pour le maintenir en place.
09:15Est-ce que Benjamin Netanyahou,
09:17il est au pouvoir en Israël,
09:19n'a pas jeté
09:21un doute dans l'esprit
09:23de ceux qui
09:25le soutiennent ? Je pense aux Américains,
09:27je pense aux Français, je pense...
09:29Ils parlent de victoire totale,
09:31mais sans expliquer ce qu'est réellement
09:33la victoire totale, Julien Dray.
09:35Alors, moi je suis...
09:37Je pense que...
09:39La société israélienne,
09:41elle est traumatisée, ne vous trompez pas,
09:43depuis cet octobre. Et ça ne va pas être facile
09:45dans les années à venir, de lui faire
09:47admettre à nouveau qu'il faut créer un État palestinien.
09:49Je vous le dis honnêtement,
09:51je sais qu'en Europe, dans le monde occidental,
09:53on croit que, parce qu'il y a
09:55des manifestations à Tel Aviv,
09:57pour avoir discuté avec beaucoup
09:59d'Israéliens, ça ne va pas être facile, et ça va être un combat
10:01politique. Netanyahou,
10:03il a une vision des choses, qui dit,
10:05ils ne veulent pas. Comme ils ne veulent pas,
10:07moi, je me garantis la sécurité
10:09pendant 10 ans, donc
10:11j'éradique tout ça. Alors,
10:13certains peuvent dire, ça ne marchera pas,
10:15ils vont se reconstruire aussi vite qu'ils ont été
10:17détruits, bon, voilà, mais il faut,
10:19en tous les cas, il faut avancer une solution diplomatique.
10:21Puis il faut faire pression sur un certain nombre d'États.
10:23On a parlé du Qatar. Quelle la pression
10:25que nous exerçons sur le Qatar ? Parce que le Qatar,
10:27il a le contact direct, quasiment
10:29quotidien, avec la direction du Hamas.
10:31D'abord, une grande partie d'entre eux
10:33résidaient dans les Émirats.
10:35Il a le contact quotidien, je vous le dis,
10:37voilà, donc il a les moyens de dire,
10:39voilà, ça suffit. Il ne le fait pas.
10:41Et on ne lui demande pas de le faire.
10:43– Mais est-ce que l'image d'Israël,
10:45État libéral et démocratique,
10:47n'est pas érodée aujourd'hui ?
10:49Quand je vois la Belgique,
10:51les Pays-Bas, l'Italie, la Grande-Bretagne
10:53qui restreignent leurs exportations
10:55d'armes à destination d'Israël,
10:57quand je vois l'Espagne, la Norvège,
10:59l'Irlande qui reconnaissent l'État de Palestine,
11:01est-ce qu'aujourd'hui dans le monde
11:03et quand je vois les États du Sud
11:05qui sont de plus en plus critiques à l'égard d'Israël ?
11:07– Le problème c'est de savoir
11:09est-ce que la sécurité de l'État d'Israël
11:11c'est simplement une image ?
11:13On peut avoir une belle image,
11:15mais si c'est pour se faire détruire
11:17et se faire agresser,
11:19ils vont vous dire eux-mêmes,
11:21l'image vous la gardez,
11:23vos larmes et vos pleurs,
11:25ils arrivent trop tard.
11:27Donc je ne dis pas que tout est bien
11:29et je sais ce qui se passe,
11:31je sais y compris ce que c'est qu'une guerre,
11:33je sais qu'il y a beaucoup d'innocents,
11:35à Gaza, qui meurent sous les bombes,
11:37des enfants,
11:39ça c'est incontestable,
11:41mais il y a un moment donné
11:43où la question qui est posée,
11:45pourquoi la direction du Hamas ne dit pas
11:47stop, on arrête, on libère les otages
11:49et on est prêt à envisager une solution politique ?
11:51Vous savez, personne ne l'a dit par exemple,
11:53mais dans toutes les négociations
11:55pour la trêve,
11:57pour laisser cesser le feu,
11:59la question qui était posée c'est
12:01donnez-nous la liste des otages vivants.
12:03Le Hamas n'a donné la liste des otages vivants.
12:05Jamais. Vous pouvez vérifier.
12:07Mais compte tenu des succès militaires
12:09d'Israël, incontestables
12:11actuellement, Julien Dray,
12:13n'est-il pas temps pour Israël justement
12:15de faire un pas
12:17diplomatique,
12:19de proposer
12:21quelque chose ?
12:23Alors ça c'est tout le débat qui va y avoir, oui je pense, dans les semaines à venir.
12:25Parce que c'est la question
12:27qui est posée y compris à Benjamin Netanyahou,
12:29c'est quelle est la solution politique ?
12:31Il envisage la situation.
12:33Et je pense qu'il y aura des débats très violents
12:35dans la société israélienne.
12:37C'est là que, par exemple,
12:39des gens comme
12:41ceux que je connais, que je fréquente,
12:43ce qu'on appelle les progressistes, vont être amenés
12:45à batailler pour la création d'un véritable
12:47État palestinien.
12:49Il va falloir poser la question de l'autorité
12:51palestinienne, c'est-à-dire la manière dont elle se
12:53repositionne. Vous avez remarqué
12:55quand même qu'elle est discrète l'autorité palestinienne.
12:57Elle proteste, mais pas modérément.
12:59Donc comment
13:01on peut la remettre au centre du jeu ?
13:03En évitant la corruption, qui a été la racine
13:05de la naissance du Hamas.
13:07Et en faisant naître des personnalités nouvelles.
13:09Il y a des personnalités nouvelles qui existent dans la société palestinienne.
13:11La société palestinienne, c'est pas une société
13:13misérable, contrairement à ce qu'on raconte.
13:15Il y a beaucoup. Il y a une diaspora énorme.
13:17C'est très cultivé.
13:19Il y a beaucoup de... Je connais pas mal
13:21des amis palestiniens
13:23qui n'attendent qu'une seule chose, c'est pouvoir aider
13:25la naissance d'un nouveau pays.
13:27Dites-moi, Julie André,
13:29vous connaissez bien
13:31Jean-Luc Mélenchon. Vous publiez ce livre
13:33dans un mois, jour pour jour.
13:35Qui est
13:37Jean-Luc Mélenchon ?
13:39Jean-Luc Mélenchon qui a appelé
13:41à mettre des drapeaux palestiniens partout à l'université.
13:43Demain, mardi 8.
13:45C'est une provocation ?
13:47C'est une volonté de semer le chaos ?
13:49C'est un véritable antisémitisme ?
13:51Qu'est-ce ?
13:53Je vais d'abord vous raconter une anecdote.
13:55J'ai rencontré... Moi, j'avais fondé
13:57SES Racine.
13:59J'avais beaucoup de jeunes qui travaillaient avec moi.
14:01Et il était très jaloux de tout ça.
14:03Il était très jaloux. Il regardait tout ça
14:05avec une envie gourmande.
14:07Cet activisme !
14:09Il était avec une envie gourmande, tous ces jeunes, etc.
14:11Et j'ai l'impression qu'il prend sa revanche quelque part.
14:13Il est content. Il va dans les amphithéâtres.
14:15Il y a des jeunes qui crient.
14:17Qu'il adulte, etc.
14:19Mais là où j'ai un énorme reproche à lui faire,
14:21c'est qu'il emmène tous ces gens-là à l'impasse.
14:23Et il sait pertinemment au fond
14:25lui-même que c'est l'impasse.
14:27Alors en fait, sur le fond, il s'en fout.
14:29Parce que ce qu'il veut, c'est d'être ce grand leader révolutionnaire
14:31qu'il a toujours rêvé d'être.
14:33Même s'il a fait une pause à un moment donné dans sa vie
14:35parce qu'il pensait qu'il allait être grand ministre.
14:37Il y a un énorme égo.
14:39Il y a une frustration.
14:41Bon, vous verrez, je ne vais pas faire la promo de mon lit,
14:43mais il y a des phrases
14:45que j'ai retrouvées de lui que j'avais peut-être pas assez
14:47vues, qu'il prononce.
14:49Y compris dans ses bio, après.
14:51Il a le sentiment qu'il a une revanche
14:53à prendre contre la société
14:55qu'il n'a pas très bien traitée.
14:57Et notamment contre le Parti Socialiste.
14:59Et notamment contre François Hollande.
15:01Est-ce que Jean-Luc Mélenchon représente une menace
15:03pour la paix civile en France ?
15:05Oui, dans la mesure où il emmène
15:07une génération, des jeunes,
15:09qui sont exaltés,
15:11qui sont, et c'est normal,
15:13un peu fascinés par le romantisme
15:15du petit peuple contre le grand Satan.
15:17Parce que c'est ça
15:19la manière dont on présente les choses
15:21qui peuvent être, qui peuvent aller plus loin que lui,
15:23qui peuvent se sentir
15:25d'une nouvelle mission, investir
15:27d'une nouvelle mission, etc. Oui,
15:29de ce point de vue-là, il représente un danger.
15:31Il encourage l'antisémitisme ?
15:33Ah, il a basculé,
15:35oui, je pense qu'il a basculé.
15:37Il considère que désormais, mais
15:39là encore, vous allez voir, j'ai retrouvé les traces
15:41idéologiques de ce basculement.
15:43Résiduel.
15:45Le mot est terrible !
15:47Mais tout ça vient
15:49d'une analyse politique. L'analyse politique,
15:51elle était faite en Angleterre,
15:53et il a puisé à l'intérieur de ça.
15:55C'est à l'intérieur du
15:57Parti travailliste. L'idée, c'est que désormais,
15:59dans l'affrontement contre ce qui est le grand méchant,
16:01et pour Jean-Luc Mélenchon, c'est
16:03très structurant, la lutte contre
16:05les gringos, contre l'impérialisme américain,
16:07etc. On a eu de grandes engueulades
16:09là-dessus, parce que souvent,
16:11on s'engueulait, et je disais, moi,
16:13je vais te dire, du temps de la guerre froide, je préférerais
16:15vivre à New York qu'à Moscou.
16:17Je disais, mais non, pas du tout !
16:19Et donc, pour lui, le grand Satan,
16:21parce qu'il a beaucoup travaillé avec l'Amérique latine,
16:23et c'est vrai que les peuples d'Amérique latine, ils ont
16:25une vision de l'Amérique, et donc pour lui,
16:27c'est le grand Satan, et le grand Satan,
16:29il est aujourd'hui combattu,
16:31la pointe avancée du combat,
16:33contre le grand Satan, c'est
16:35ce qu'ils appellent les masses islamisées.
16:37Et donc, il faut s'allier avec elles, parce qu'elles
16:39seront un instrument pour préparer
16:41le grand soir ou la mutation.
16:43Le communautarisme
16:45a des fins électorales, et pour
16:47conquérir le pouvoir, éventuellement.
16:49Oui, il favorise !
16:51Il a fait, de ce point de vue-là, autour de lui,
16:53ont émergé des figures qui considèrent
16:55qu'ils ont fait la démonstration électorale,
16:57là aussi, vous allez voir le tournant quand ça va,
16:59qu'ils ont fait la démonstration électorale,
17:01que potentiellement, son avenir
17:03n'est plus dans le prolétariat blanc, excusez-moi,
17:05ou dans, par exemple, les gilets jaunes,
17:07mais il est dans les quartiers, la population.
17:09Et d'un certain point de vue, il faut être honnête,
17:11ça n'a pas trop mal marché pendant les élections européennes,
17:13et ça lui permet d'avoir des fiefs.
17:15Donc la France insoumise, aujourd'hui...
17:17Qu'est-ce que dit François Ruffin ?
17:19Oui, mais la France insoumise, aujourd'hui, c'est pas un parti national,
17:21c'est un parti de bastions.
17:23Et dans ces bastions, effectivement,
17:25il y a une culture communautaire.
17:27Oui, c'est un parti qui défend
17:29une communauté,
17:31une idée communautaire.
17:33Pas une communauté, mais une idée communautaire.
17:35Mais je vais vous dire, parce que je discute,
17:37et puis j'ai regardé beaucoup d'amis,
17:39j'ai des amis français,
17:41mais de confession musulmane,
17:43qui, en même temps, souvent, dans les conversations
17:45qu'on voit jusqu'au bout, me disent
17:47« Mais l'islamophobie, arrêtez de vous casser les pieds,
17:49l'islamophobie en France,
17:51vous connaissez un pays qui fabrique, qui permet en 10 ans
17:53qu'il y ait 3000 mosquées qui se construisent,
17:55qu'il y ait des préjugés anti-musulmans, etc. »
17:57On pourrait dire la même chose
17:59sur l'antisémitisme ?
18:01Oui, il y a plus de crimes antisémites
18:03que de crimes islamophobes,
18:05excusez-moi, aujourd'hui.
18:07Je ne dis pas qu'il n'y a pas des préjugés,
18:09qu'il n'y a pas de racisme anti-musulman, etc.
18:11Mais la société française,
18:13elle n'est pas construite dans une lutte,
18:15une guerre contre l'islam.
18:17Mais certains voudraient que ce soit ça.
18:19Et les islamistes poussent à ça.
18:21Ils veulent embrigader.
18:23Et Jean-Luc Mélenchon joue ce jeu-là ?
18:25Il participe de cette division-là.
18:27Oui, il participe, il est un instrument.
18:29Mais je suis certain que si on fouillait,
18:31on va trouver, parce que tous ces gens-là écrivent
18:33des choses, on ne les lit pas beaucoup,
18:35je suis certain qu'on va trouver des tas de textes
18:37des organisations islamistes qui disent
18:39qu'il faut travailler avec la France insoumise,
18:41ce sont nos amis, mais regardez ce qu'on dit
18:43le parti des indigènes de la République.
18:45On l'a gagné à notre cause.
18:47Désormais, c'est le meilleur de nos vecteurs.
18:49Bon, c'est le parti des indigènes de la République,
18:51on sait ce que c'est.
18:53Est-ce qu'il a fait beaucoup de mal à la gauche ?
18:55Oui, et c'est pour ça que je lui en veux beaucoup.
18:57Parce qu'il a impuissanté la gauche.
18:59La gauche, aujourd'hui,
19:01regardez,
19:03vous savez, le sénateur Maluray,
19:05avec qui j'ai peut-être eu beaucoup de divergences,
19:07mais je trouve qu'il a un talent fou
19:09dans son expression au Sénat.
19:11Il a fait une intervention récemment qui a beaucoup circulé,
19:13où il dit, regardez cette gauche
19:15qui s'est tirée une balle dans le pied,
19:17elle pouvait avoir accédé au gouvernement,
19:19mais il y a un homme qui est venu
19:21qui a dit, le programme,
19:23tout le programme, rien que le programme.
19:25À partir de là, il empêchait tout compromis politique.
19:27Olivier Faure s'est couché,
19:29pardonnez-moi l'expression un peu familière.
19:31Elle est même gentille.
19:33Elle est gentille, oui.
19:35Je m'excuse de vous le dire,
19:37mais cet ancien rocardien,
19:39parce qu'au départ, quand je l'ai connu, il était rocardien,
19:41pour des raisons qui ne sont pas forcément
19:43toujours explicitées,
19:45est totalement fasciné par ce que représente
19:47la radicalité de Jean-Luc Mélenchon.
19:49Alors il dit que non, ce n'est pas vrai,
19:51parce qu'un jour il met le pied à droite, un autre jour il met le pied à gauche,
19:53mais la vérité, c'est que le Parti Socialiste,
19:55je ne dis pas qu'à un moment donné, il ne fallait pas en passer
19:57par une forme d'unité,
19:59je veux dire, au soir des élections européennes,
20:01la logique, elle est claire.
20:03Il faut présenter des candidats socialistes
20:05avec M. Glucksmann,
20:07et dire d'ailleurs, comme on l'a fait dans le temps,
20:09les électeurs vont trancher,
20:11et au deuxième tour, la gauche se rassemblera,
20:13mais au premier tour, il fallait offrir cette alternative.
20:15Elle a été refusée. Alors il nous dit,
20:17mais j'ai sauvé, qu'est-ce qu'il a sauvé ? 7 députés ?
20:198 députés ? 10 députés ?
20:21Donc on vend son âme pour 10 députés ?
20:23C'est ça le Parti Socialiste d'aujourd'hui ?
20:25Et d'ailleurs, je pense, et je le dis,
20:27et peut-être que d'ailleurs, je vais y reprendre
20:29un peu de service pour ça, il est temps
20:31de se débarrasser de cette direction du Parti Socialiste actuel.
20:33Reprendre du service pour ça, c'est-à-dire ?
20:35Vous êtes resté un homme de gauche.
20:37Oui, je suis resté profondément un homme de gauche.
20:39Et c'est parce que je suis un homme de gauche que je suis révolté
20:41par ce qui s'est passé dans le monde depuis le 7 octobre.
20:43Parce que je n'ai pas compris
20:45qu'une partie de la gauche ne comprenne pas
20:47que c'était des forces
20:49terribles qui allaient
20:51la détruire, qui étaient en mouvement,
20:53et qu'elle devait au contraire se démarquer
20:55de tout ça.
20:57Donc, vous êtes resté un homme de gauche,
20:59vous allez reprendre du service, c'est-à-dire ?
21:01Oui, c'est-à-dire que je pense que je vais aider, parce que moi j'ai plus l'âge,
21:03je n'ai pas été en première ligne, mais aider des nouvelles générations
21:05et une nouvelle génération à émerger
21:07dans la gauche social-démocrate, comme on dit.
21:09C'est Raphaël Glucksmann, par exemple, qui la représente ?
21:11Ou d'autres ?
21:13Oui, il y en a beaucoup d'autres, finalement.
21:15Quand on regarde, il y a aujourd'hui toute une génération,
21:17je pense au maire de Saint-Ouen,
21:19qui est une jeune pointure montante,
21:21mais qui a des qualités, je pense au maire de Montpellier,
21:23je pense à Carole Delga,
21:25je pense à Mathieu Klein, il y a toute une génération.
21:27Donc il faut leur permettre maintenant
21:29d'émerger, pour que ça soit eux qui prennent le pouvoir.
21:31Et de rompre avec
21:33Jean-Luc Mélenchon.
21:35Vous leur demandez de rompre avec Jean-Luc Mélenchon.
21:37Mais vous savez, je vais vous faire la comparaison,
21:39Mitterrand a construit
21:41l'avenir du Parti Socialiste
21:43sur l'union de la gauche. Il faut aller en passer
21:45par là à l'époque. Je pense que
21:47le nouveau Parti Socialiste
21:49se développera, se construira
21:51dans une rupture nette
21:53avec ce que représente Mélenchon, pas avec les électrices,
21:55les électeurs, mais avec ce qu'il représente.
21:57Et dire nous n'avons rien à voir
21:59avec le bruit qu'il a fait. Moi je déteste
22:01ce que je vois à l'Assemblée Nationale.
22:03J'ai un respect immense, parce que j'ai été 25 ans député.
22:05D'ailleurs, la première erreur qu'ils ont fait,
22:07c'est de laisser le fait
22:09qu'on ne porte plus la cravate dans l'hémicycle.
22:11Parce que ça a donné lieu à des choses qui sont ubuesques,
22:13des députés qui sont mal habillés,
22:15on a l'impression qu'ils sortent d'un café, etc.
22:17Alors les électrices et les électeurs, vous savez, moi j'étais élu de quartier
22:21pour être député avec la cravate dans l'hémicycle
22:23qui les représentait. Et je ne mettais pas
22:25les baskets pour donner une mauvaise image.
22:27Au contraire, ils voulaient que je reste
22:29propre sur moi. Voilà.
22:31Et donc je trouve ça insupportable
22:33cette incapacité à dialoguer,
22:35cette incapacité à nouer
22:37une chose. Ce qui n'était pas le cas
22:39du Jean-Luc Mélenchon que j'ai connu,
22:41qui était adoré dans les seines, parce qu'il discutait avec tout le monde,
22:43il parlait avec tout le monde. Monsieur Dassault,
22:45qui était le maire de Corbeil, il adorait Jean-Luc Mélenchon.
22:47Parce qu'il disait qu'il est l'homme de culture,
22:49etc. Maintenant, c'est devenu quoi ?
22:51Un leader de manif étudiante ?
22:53Merci, Julien Dray, d'être
22:55venu nous voir ce matin. Je rappelle
22:57ce livre, Qui est Mélenchon ?
22:59qui sort le 7, votre livre,
23:01le 7 novembre prochain chez Plon.
23:03Merci d'être venu nous voir.
23:05Patrick Roger, juste après
23:07les infos de 9h.