Parcours : Emilie Meunier, autrice de J'ai perdu mon bébé, journal d'une mère cabossée

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Dans ce nouvel épisode de Parcours, Emilie Meunier nous raconte comment elle a du faire face aux conséquences tragiques d'un placenta praevia pendant sa grossesse. Elle revient sur les saignements quotidiens pendant six mois, jusqu'à ce jour où une césarienne en urgence lui sauve la vie, mais pas celle de son bébé. Un récit à retrouver dans son livre "J'ai perdu mon bébé, journal d'une mère cabossée", publié aux éditions de l'Archipel.

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00:00Bonjour, je m'appelle Émilie Meunier, je suis la maman d'un adorable petit garçon, j'ai 38 ans.
00:05Je suis également journaliste et auteur du livre « J'ai perdu mon bébé » journal du Maire Cabossé.
00:10Je suis tombée enceinte en mai 2022, mais malheureusement j'ai perdu le bébé à 6 mois de grossesse en octobre 2022.
00:16Pour ma première grossesse, tout s'est très bien passé, j'ai eu des petits maux de grossesse, mais rien de bien catastrophique.
00:22Par contre, pour la deuxième grossesse, ça s'est compliqué très très vite.
00:26Dès le deuxième mois, j'ai ressenti comme une pesanteur dans mon bas-ventre en fait, j'avais très mal au ventre.
00:31Vers deux mois et demi, trois mois, lorsqu'on était en vacances en Italie avec mon conjoint et mon fils,
00:37j'ai commencé à avoir des premiers saignements.
00:39Et là évidemment, c'est la panique à bord, donc je suis allée tout de suite aux urgences d'une ville d'Italie.
00:45Quand on rentre à Paris, je passe des examens dans un cabinet parisien,
00:50et là on pose le premier mot sur la pathologie qui a vraiment envenimé toute cette deuxième grossesse.
00:57On me dit que j'ai un placenta ben inséré, alors au début, moi je ne comprends pas ce que ça veut dire.
01:02Et ensuite, sur les prochains rapports des médecins, ça s'est transformé en placenta prévia.
01:07Donc en fait, tout ça, un placenta mal positionné, au final, c'est un placenta qui se loge dans la partie basse de l'utérus
01:14et non dans la partie haute, comme ça devrait être le cas.
01:17Ça peut créer des saignements à cause du frottement avec le col de l'utérus.
01:22Du troisième mois au sixième mois de la grossesse, j'ai passé quasiment tous les jours à saigner.
01:28Alors ça pouvait être des petites gouttes de sang, comme de grands flux hémorragiques.
01:33J'ai fait une très grosse hémorragie un dimanche chez moi, dans mes toilettes.
01:38J'ai perdu connaissance, je me vidais vraiment, c'était comme un robinet ouvert.
01:42Et heureusement que c'était un dimanche, que mon conjoint était là.
01:45Il y avait aussi mon fils, mais mon fils n'a rien vu.
01:47Et mon conjoint a tout de suite très, très bien réagi, il a appelé les urgences.
01:52Les médecins autour de nous, quand on est à l'hôpital, nous expliquent très clairement la situation.
01:56Saigner autant à ce stade-là de la grossesse, c'est quand même pas forcément de bon augure.
02:02S'il y a une personne à sauver, ils nous expliquent que ce sera moi.
02:06Pour l'instant, je suis la seule personne viable et vivante en phase 2.
02:10La réanimation néonatale, elle est possible qu'à partir de 24 semaines d'aménorée.
02:16Et pour un bébé qui aurait un poids au-dessus de 500 grammes.
02:20Un enfant qui sort aussitôt et si petit, c'est des séquelles extrêmement lourdes.
02:25Et c'est une mort à retardement.
02:27D'hospitalisation en hospitalisation, je suis finalement transférée dans un service à haut risque,
02:33dans un autre hôpital à Montreuil.
02:35Et puis là, à 25 semaines, dans cette nouvelle chambre d'hôpital,
02:40je sens comme un crac dans mon corps et je sens que je m'urine dessus.
02:47Le verdict est tombé assez vite.
02:49On a fait une échographie et on a vu que la poche s'était rompue.
02:52Les saignements répétitifs ont fait qu'il n'y avait plus de liquide amniotique.
02:56On est quelques jours après que la poche des os se soit rompue.
02:59On se dit que finalement ça tient bon, malgré l'infortune.
03:03Et puis non, je vais aux toilettes et là, je découvre horrifié, vraiment horrifié,
03:09un bout de cordon ombilical qui pend, qui sort en fait de mon intimité.
03:15Je comprends immédiatement que si un bout du cordon est passé,
03:19c'est que mon placenta ne bloque plus le passage et qu'il s'est décroché.
03:23Et si mon placenta s'est décroché, là je risque une très très très lourde hémorragie
03:29et je risque vraiment d'y passer aussi.
03:31Là, évidemment, il y a tout le personnel médical qui débarque dans la chambre,
03:35regarde ce qui se passe, qui me dit « bon là, on est dans une situation d'extrême urgence,
03:39on va partir pour une césarienne code rouge ».
03:42Donc code rouge, ça veut dire qu'on incise mon ventre dans les 10-15 minutes.
03:47Ils ont sorti le bébé aussi, ils se sont aperçus que le bébé ne pesait que 480 grammes,
03:51donc à 20 grammes près, ils ne pouvaient pas le réanimer.
03:55Ce bébé n'est vivant, mais non viable.
03:58J'étais endormie, donc je n'ai pas pu le voir.
04:01La seule personne qui aurait pu voir le bébé sur le moment,
04:07la seule personne qui n'était pas endormie, c'était mon conjoint.
04:10Donc on lui a proposé d'accompagner le bébé dans son dernier souffle.
04:17Et il s'est protégé, donc il a refusé.
04:20Et ça, il s'en est terriblement voulu.
04:22Et c'est, je pense, les premiers mots qu'il m'a dit quand il m'a rejoint en salle de réveil.
04:26Voilà, moi je me suis réveillée presque soulagée d'être en vie
04:29parce que j'avais mon fils à la maison aussi qui m'attendait
04:33et que je venais vraiment de vivre des mois et des mois d'enfer.
04:36Donc ce soulagement, aujourd'hui je le comprends,
04:39même si sur le moment, je m'en suis un peu voulu.
04:41Le lendemain, on a aussi le corps qui se réveille.
04:44On a cette douleur immense dans le bas-ventre
04:46parce qu'on a l'incision qui a été faite à la vavite
04:49et qui fait extrêmement mal.
04:51Le corps qui se met tout de suite en postpartum.
04:55J'ai eu les seins qui ont gonflé immédiatement.
04:57Il voulait nourrir un bébé, mais voilà, il n'y avait rien à nourrir.
05:01Donc c'était vraiment très très compliqué de gérer ce corps
05:05qui ne comprenait pas ce qui se passait non plus.
05:07J'ai voulu très rapidement partir de l'hôpital
05:10parce que je ne voyais plus d'intérêt à être hospitalisée.
05:13Le plus dur, ça a été de parler à mon fils,
05:15de lui expliquer le dénouement de cette grossesse.
05:19Avec des mots d'enfant, on lui a dit qu'il fallait sauver sa maman,
05:23qu'on m'avait opéré et que le bébé était parti dans les étoiles
05:29parce qu'il n'était pas assez fort pour vivre sur cette terre.
05:31Lui me dit « Mais moi je suis très fort et t'inquiète pas maman,
05:35on va en avoir un autre, deux bébés, il sera encore plus fort. »

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