Gabriel Attal s’exprime lors de la passation de pouvoir avec Michel Barnier à Matignon, qui a vu le plus vieux chef de gouvernement de la Ve République succéder au plus jeune
Category
🗞
NewsTranscription
00:00Mes chers compatriotes, la France a un nouveau Premier ministre, et au moment où je quitte mes fonctions à Matignon, je tiens à vous féliciter chaleureusement, cher Michel Barnier.
00:14Nous nous connaissons depuis plusieurs années maintenant. Les Français vous connaissent. Ils savent que vous êtes un grand élu local, que vous connaissez nos territoires,
00:27que vous avez une expérience quasiment inégalée du service de l'État dans différentes fonctions, de l'international et de l'Europe aussi.
00:38Évidemment, quelqu'un qui a mené à bon port des négociations aussi dures que celles sur le Brexit doit savoir manœuvrer dans le paysage politique français que nous connaissons aujourd'hui.
00:51Au moment de quitter mes fonctions à Matignon, je veux aussi évidemment remercier chaleureusement le président de la République pour la confiance qu'il m'a faite quand il m'a nommé il y a huit mois comme Premier ministre.
01:05Être Premier ministre, c'est l'honneur d'une vie, parce que c'est un honneur de servir son pays. Et servir son pays, on ne le fait jamais seul.
01:26Les visages qui sont ici rassemblés dans cette cour, Monsieur le Premier ministre, ce sont les visages de femmes et d'hommes qui travaillent ici à Matignon, des femmes et des hommes qui se lèvent tous les matins avec un objectif, être utiles à notre pays.
01:42Ils sont à l'image de ces millions de serviteurs de l'État partout sur le territoire national. La France a un État durable, un État solide, un État qui, je le crois très profondément, est le ciment de notre pays et de notre nation.
02:01Être Premier ministre et servir son pays, on ne le fait jamais seul, parce qu'on le fait avec les Français. Et je veux remercier tous les Français rencontrés ces derniers mois, rencontrés par milliers, parfois quelques instants, parfois quelques heures.
02:18J'emporte avec moi vos visages, vos vies, vos doutes. J'emporte avec moi votre force de caractère, votre sens du devoir, votre aspiration à l'unité et à la concorde.
02:34Je veux dire aux Français combien je les aime, parce que les Français sont un grand peuple, viscéralement indomptable et profondément attaché aux valeurs de la République.
02:48Applaudissements
02:56Être Premier ministre, c'est un honneur, parce que c'est une immense responsabilité. Il y a ici 50 décisions à prendre chaque jour, bien souvent des décisions qui ne font pas la une de l'actualité, mais qui pourtant sont tout à fait structurantes pour les Français.
03:13Être Premier ministre, c'est être confronté tout à la fois au meilleur et au pire. C'est être confronté au pire quand vous êtes auprès de nos compatriotes qui ont vécu un drame, qui souffrent, qui ont vécu l'innommable.
03:31Mais c'est aussi la chance, je le crois profondément, de voir toujours le meilleur y compris dans le pire.
03:39De mes échanges avec les Français victimes des terribles inondations dans les Hauts-de-France, je retiens l'immense courage, l'extraordinaire résilience de ces Français qui refusent d'abandonner leur terre et leur maison.
03:54L'immense courage et l'immense résilience de ces élus locaux, qui dans les Hauts-de-France comme partout sur le territoire national, tous les jours, sont au contact de nos concitoyens, prennent des décisions majeures pour l'intérêt des Français dans des circonstances difficiles.
04:08Du travail avec les agriculteurs, les agriculteurs en colère, les agriculteurs en plein doute, je retiens leur extraordinaire attachement à la terre, à notre terre et à la perpétuation de la culture française.
04:27Des hommages que nous avons rendus aux gendarmes tués en Nouvelle-Calédonie, aux agents de l'administration pénitentiaire assassinés, je retiens l'honneur dans la souffrance, je retiens l'exemple exceptionnel de ces femmes, de ces hommes, forces de l'ordre, policiers, gendarmes, douaniers, agents de la pénitentiaire,
04:51qui se lèvent tous les matins et vont travailler au péril de leur vie pour protéger les Français.
04:56Applaudissements
05:07Être Premier ministre, c'est un honneur parce que cela permet d'agir.
05:11Mesdames et Messieurs, huit mois, c'est court, c'est trop court.
05:18Et je ne le cache pas, il y a évidemment une frustration à quitter mes fonctions au bout de huit mois seulement.
05:25Mais il y a aussi le sentiment du devoir accompli dans le temps qui m'a été imparti.
05:33Avec mon équipe, avec le gouvernement, pendant huit mois, nous avons agi, nous avons travaillé d'arrache-pied, avec une ambition, respecter nos promesses.
05:44Je suis convaincu que dans d'autres circonstances, nous aurions mené ce travail à mon port.
05:50Nous aurions permis à des Français de vivre au mieux, aux classes moyennes de retrouver leur place pleinement dans la société, et à la France d'être plus forte encore.
06:01Nous avons engagé des chantiers structurants pour mettre notre pays en mouvement et répondre aux attentes profondes, les plus profondes des Français.
06:11Répondre à l'urgence que le travail paye mieux, avec ce chantier de la désmicardisation que j'ai lancé quand je suis arrivé ici à Matignon.
06:19Nous avons beaucoup travaillé ces huit derniers mois avec les membres du gouvernement, les parlementaires, avec des économistes.
06:25Des mesures devaient être présentées cet été, elles sont sur votre bureau, Monsieur le Premier ministre.
06:30Répondre aux besoins vitals de services publics et au premier rang desquels l'école de la République, qui, je le redis ici, est la mère des batailles.
06:41Et si je ne devais vous faire qu'une demande, Monsieur le Premier ministre, ce serait de continuer à faire de l'école de la République une priorité absolue.
06:50Parce que l'école, c'est l'assurance-vie de la République.
06:53Applaudissements
07:03Et évidemment, quelques jours après la rentrée scolaire, je veux dire ma reconnaissance à nos professeurs, aux équipes pédagogiques qui sont chaque jour aux côtés de nos élèves.
07:14Je veux dire aussi que nous n'oublions pas et que nous pensons chaque jour à Samuel Paty et Dominique Bernard, assassinés par le terrorisme islamiste.
07:25Applaudissements
07:30Oui, l'école est la mère des batailles et avec la revalorisation inédite du salaire de nos enseignants, en avril dernier encore, des infirmières scolaires,
07:38avec le choc des savoirs, avec la lutte implacable contre le harcèlement qui est un véritable fléau, nous affirmons une chose claire.
07:46Nous préférons toujours, toujours l'exigence au nivellement par le bas.
07:51Nous préférons toujours l'autorité au laxisme.
07:55Nous préférons toujours la fraternité et la bienveillance au chacun pour soi.
08:00Nous préférons toujours les savoirs fondamentaux à la dilution des savoirs.
08:05Les services publics, c'est évidemment aussi la santé et l'enjeu de l'accès aux soins qui est majeur dont nous parlent tous nos concitoyens sur le terrain.
08:12Là aussi, nous avons engagé des choses, pris des décisions et notamment un train de simplification inédit pour des procédures médicales du quotidien,
08:19pour libérer du temps médical aux médecins, renforcer l'accès aux soins dans les territoires, d'autres mesures sont nécessaires.
08:25Nous avons travaillé ces derniers mois pour doubler le nombre d'étudiants en médecine d'ici à 2027.
08:31Ce travail devait être présenté cet été, il est sur votre bureau, Monsieur le Premier ministre.
08:37Répondre à l'aspiration d'autorité à tous les étages des Français et notamment au constat que j'ai fait moi-même lorsque j'ai été nommé à Matignon,
08:47d'une forme de délitement, de violence débridée chez des jeunes, parfois de plus en plus jeunes.
08:54Nous avons beaucoup travaillé avec, là aussi, le gouvernement, les parlementaires, les femmes et des hommes de la société civile ces derniers mois,
09:01et nous avons élaboré un projet de loi qui, je le crois, répond profondément à ce besoin d'autorité.
09:08Ce projet de loi devait être présenté cet été, il est sur votre bureau, Monsieur le Premier ministre.
09:14Répondre à l'attente des Français et notamment de nos jeunes pour la transition écologique.
09:20Nous avons investi massivement dans les énergies renouvelables, dans le nucléaire.
09:23Nous avons ces derniers mois élaboré un plan national d'adaptation au changement climatique.
09:28Ce plan national devait être présenté cet été, il est sur votre bureau, Monsieur le Premier ministre.
09:34Enfin, il y a les enjeux pour lesquels nous avons engagé des textes au Parlement.
09:38Nos agriculteurs, j'en parlais, avec un texte pour simplifier leur vie et avec des travaux qui ont été engagés pour améliorer leur rémunération.
09:44La question du logement, qui est centrale pour les Français aussi, pour permettre aux classes moyennes de pouvoir se loger, mieux se loger.
09:50Ces textes sont en discussion, étaient en discussion avant la dissolution au Parlement.
09:54Évidemment, il faudra les faire prospérer.
09:58Notre pays connaît une situation politique tout à fait inédite.
10:05La politique française est malade.
10:08La politique française est malade, mais je crois que la guérison est possible.
10:13À condition que nous acceptions tous de nous placer à la hauteur de cette responsabilité historique.
10:19À condition que nous acceptions tous de sortir du sectarisme.
10:23À condition que nous acceptions tous de sortir des coups politiques.
10:28À condition que nous acceptions tous d'arrêter de tout voir en noir.
10:33Et je le dis, cette année 2024 est pleine de paradoxes.
10:38Oui, il y a de l'inquiétude et de la colère dans notre pays.
10:42Et il y a un pays qui connaît son taux de chômage le plus bas depuis 40 ans et dont le taux d'inflation est revenu à son niveau de 2021.
10:50Oui, il y a du défaitisme dans notre pays.
10:53Et notre pays, toujours en 2024, organise l'événement du siècle avec les Jeux olympiques et paralympiques.
10:59Incroyable performance en matière de sécurité, d'organisation, de performance sportive qui fait rayonner la France dans le monde.
11:12Oui, il y a du pessimisme dans notre pays.
11:19Et pourtant, toujours en 2024, dans quelques mois, les portes de Notre-Dame de Paris rouvriront 5 ans seulement après le terrible incendie qui a bouleversé les Français, alors que beaucoup pensaient que c'était impossible.
11:30Oui, il y a du fatalisme dans notre pays.
11:34Alors qu'en 2024, nous commémorons les 80 ans du débarquement et de la libération.
11:39Quel plus formidable témoignage, quel plus formidable exemple de ce que la France est capable de faire, y compris dans les heures les plus terribles et les plus sombres de son histoire.
11:49Alors je le dis, y compris en cette année 2024, je crois qu'il y a au moins autant de raisons de douter que d'espérer.
11:59Plutôt d'espérer que de douter.
12:02Il y a même plus de raisons d'espérer que de douter.
12:05Et vous l'avez compris, vous me trouverez toujours du côté de celles et ceux qui choisissent d'espérer, qui choisissent d'apaiser, qui choisissent de construire.
12:15Avant de terminer, vous me le permettrez sur un plan plus personnel, je tiens à remercier mon gouvernement, une équipe de femmes et d'hommes exceptionnelles,
12:28avec des parcours différents, des expériences différentes, des convictions parfois différentes,
12:34mais qui se sont toujours retrouvées autour de la volonté d'abord de travailler, d'être utiles, et qui ont, je crois, forgé une véritable amitié.
12:43Et votre présence nombreuse aujourd'hui, je le dis, me touche particulièrement.
12:48Applaudissements
13:02Je veux remercier les parlementaires, et évidemment les parlementaires de la majorité, pour leur travail.
13:08Remercier aussi les candidats qui se sont présentés pour l'ancienne majorité à l'occasion des dernières élections législatives,
13:16dans un moment évidemment très compliqué, avec beaucoup de vent contraire.
13:20Je veux remercier mon équipe, et notamment mon cabinet, parce que je crois qu'être bien entouré, c'est plus qu'un trésor.
13:29C'est ce qui vous permet véritablement d'agir, parce que vous êtes en confiance, parce que vous avez autour de vous des femmes et des hommes
13:35qui sont engagés, et avec qui vous tissez des liens qui vont bien au-delà de la politique.
13:41Enfin, je veux remercier ma famille, on vient tous de quelque part, on a tous des racines,
14:02et je crois que les défis que nous affrontons dans nos vies, nous les relevons notamment à travers ce que nos parents nous ont transmis.
14:11Mon père, hélas, n'est plus là, il n'aura pas pu fouler les pavés de cette cour.
14:18Parmi les choses qu'il m'a transmises, parmi les valeurs qu'il m'a transmises, il y a notamment, je crois, la droiture.
14:29Et je peux dire que cette valeur m'a été particulièrement utile ici à Matignon,
14:33notamment dans les toutes dernières semaines où les épreuves ont été nombreuses.
14:40Ma mère, qui est là, quand on lui demandait, quand on était petits avec mes soeurs,
14:50qu'est-ce que tu aimerais qu'on fasse plus tard, elle me disait, elle nous disait, tout me va,
14:57je vous suivrai toujours, à condition que vous soyez libres.
15:01La liberté, quelle plus belle valeur que la liberté ?
15:06Et je veux vous dire qu'au moment où je quitte Matignon, et peut-être plus encore qu'auparavant,
15:11la liberté sera au cœur des valeurs qui m'animeront dans les mois et les années à venir.
15:17Applaudissements.
15:30Monsieur le Premier ministre, la France, la République sont ce que nous avons de plus précieux.
15:35Je crois dans notre pays, je crois en nous.
15:38Nous avons en nous ce génie français qui fait que toujours, toujours,
15:43la France sait se réunir lorsque l'essentiel est en jeu.
15:46L'avenir nous appartient, je le sais.
15:49La France est belle, la France est forte, la France est grande.
15:53La France n'est pas n'importe quel pays.
15:56Françaises, Français, n'abandonnez jamais vos rêves de concorde.
16:01Ne renoncez jamais à votre désir d'unité.
16:05N'oubliez jamais votre vocation de grandeur.
16:08Tout est possible parce que nous sommes la France et que rien ne résiste au peuple français.
16:13Je vous remercie.
16:14Applaudissements.