Émilie Jeannin : « Le transport et l’abattage gâchent le travail de l'éleveur »

Terre-net

09/07/2024

Abattoir mobile à la ferme

Catégorie

🗞

News

Transcription

Afficher la transcription complète de la vidéo

00:00Donc on est à la ferme de Linière où on élève 80 vaches à l'étante plutôt de race charolaise

00:11avec une orientation vente directe qui est très marquée depuis 96 on fait de la vente

00:17directe à la ferme de Linière.

00:18Et alors depuis quelques temps vous êtes animé par un sacré projet, l'abattage à

00:23la ferme.

00:24Alors expliquez-moi un peu ça consiste en quoi ?

00:25Alors c'est l'abattage à la ferme avec un abattoir mobile.

00:29C'est vrai que quand on essaie de faire la meilleure vente possible on essaie d'avoir

00:36une maîtrise sur pas mal de facteurs, la race des animaux, le fait qu'elle mange de

00:39l'herbe, le fait qu'elle soit docile, ça rend la viande quand même un peu plus tendre

00:45et puis la qualité de l'abattage intervient aussi sur la limitation du stress parce que

00:48le stress a une mauvaise influence sur la qualité de la viande.

00:51Et donc l'idée c'est après avoir visité un modèle qui existe en Suède et qui tourne

00:55depuis 2014 de faire en sorte de faire venir cet abattoir mobile suédois en France pour

01:01valoriser la viande que j'estime qu'on travaille très très bien nous au niveau des élevages

01:05mais qui peut être saccagée par du transport long d'animaux vivants vers des abattoirs

01:08avec des mélanges d'animaux, du stress et compagnie.

01:11Alors justement là ça a été acté donc vous rentrez dans une phase d'expérimentation,

01:16ça va se passer comment ?

01:17Ça va se passer qu'on est en train de finir le calendrier de démarrage de notre projet

01:21mais effectivement le fait que ça soit acté dans la loi ça donne quand même un peu plus

01:24d'aile et de légèreté.

01:26Voilà on est en train de préparer la mise en place de cela et que ça arrive on va dire

01:31dans les mois à venir.

01:32Alors ce qui est prévu c'est effectivement d'acheter les animaux vivants aux éleveurs,

01:37venir avec le camion abattoir mobile sur les fermes, abattre les animaux sur leurs fermes

01:41et puis ensuite de les faire maturer, les découper et de vendre la viande directement

01:45sous une marque qui s'appelle le bœuf éthique.

01:47Les éleveurs n'ont qu'à élever les animaux, nous proposer les animaux à la vente et nous

01:51on se chargera de vendre la viande.

01:53Alors par contre il faudra un nombre d'animaux minimum pour que le camion se déplace c'est ça ?

01:57C'est clair que l'investissement du camion ne permet pas de déplacer pour tuer une vache

02:00dans chaque ferme.

02:01On va être obligé de se déplacer au départ pour 5 ou 6 animaux par jour et ensuite on

02:05va tourner autour de 12 animaux par jour.

02:07Alors pour les éleveurs qui font de la vente directe ça va être possible du coup ou va

02:11falloir s'organiser ?

02:12Voilà pour les éleveurs qui font de la vente directe, nous on en fait sur la ferme de Linière,

02:15ça veut dire que je tue tous les mois à peu près et c'est moi qui emmène mes animaux

02:19assez loin.

02:20Depuis 2 ans que je travaille sur cette histoire d'abattoir mobile, dès qu'il est en place

02:24je m'arrange pour qu'ils viennent faire une tuerie à Linière mais ça va nécessiter

02:27une réorganisation c'est à dire que le camion passera 4 fois par an à Linière au lieu

02:31de moi j'emmène mes animaux tous les mois à l'abattoir donc mes clients sont un peu

02:36prévenus que dès que le camion va être prêt, il va falloir qu'ils s'anticipent parce qu'on

02:40aura de la viande à Linière que 4 fois dans l'année.

02:43Alors par contre c'est un investissement quand même conséquent, on est sur combien à peu

02:48près pour le camion ?

02:49Le camion coûte un peu plus d'un million d'euros, après pour démarrer le projet on

02:53a chiffré un peu plus large parce qu'il faut démarrer avec recruter du personnel,

02:57un besoin de fonds de roulement etc donc effectivement c'est un investissement un peu lourd pour

03:02démarrer ce qui a nécessité de mettre en place un modèle économique où on a chiffré

03:06tout prix en compte et on a pris en compte une montée progressive etc mais où l'abattoir

03:11est une activité rentable qui permet de dégager de l'argent et surtout qui va permettre de

03:15mieux rémunérer les éleveurs parce que c'est aussi l'objectif de cette marque et

03:19de cette nouvelle filière c'est que les éleveurs puissent être mieux rémunérés.

03:21Par contre ça va coûter plus cher aux éleveurs pour faire abattre dans ce camion ?

03:25Non alors ça ne leur coûte rien puisqu'en fait c'est nous qui assumons ce coût d'abattage

03:30qui est plus cher et les éleveurs en fait ils n'ont qu'à nous vendre leurs animaux,

03:34l'objectif pour eux c'est que ça leur apporte plus d'argent.

03:36Et en plus de ce projet vous êtes quand même hyper active puisque vous êtes lancée dans

03:41un film alors expliquez-moi le film La ferme des milices c'est quoi ?

03:45Alors La ferme des milices c'est en fait le projet de Nathalie Lay qui est réalisatrice

03:49de films en dans l'un, elle est basée dans l'un, qui m'a rencontrée grâce à un article dans la

03:54presse et qui s'est dit c'est super de voir ce type d'élevage et de voir ce combat pour mettre

04:00en place un abattoir plus digne des animaux. Voilà et c'est comme ça qu'elle est venue

04:06me rencontrer, qu'on a fait connaissance et qui m'a engagée dans cette voie de faire ce nouveau

04:11film. C'est un court métrage qui sera à priori diffusé de façon gratuite et dans des festivals

04:17et sur les réseaux sociaux, sur internet etc. dans les écoles si les gens le veulent. L'idée

04:22c'est que ce soit accessible et l'idée c'est à travers ce film pouvoir expliquer qu'on peut

04:27avoir des élevages vertueux envers les animaux, envers l'environnement, envers les consommateurs,

04:31envers ceux qui y travaillent aussi parce que c'est bien beau de vouloir respecter les animaux

04:37etc. mais pas respecter les hommes qui travaillent dans l'élevage. Voilà c'est une première offense

04:42à laquelle nous devons répondre il me semble. Donc voilà l'idée c'est de pouvoir discuter de ça,

04:48de montrer que c'est possible de faire autrement et en tout cas de montrer les combats que je mène

04:53pour que ça puisse se faire autrement. Donc il va quand même y avoir un focus du coup sur le

04:57transport, l'abattage, le côté un peu plus sombre de l'élevage. Vous avez pas peur que

05:01ça mette un peu de l'huile sur le feu par rapport à tous ces activistes vegan ? C'est vrai que c'est

05:07un des risques, on va pas le nier, ça va être un des risques mais dans un certain sens l'organisation

05:13de la filière on va dire, puisque moi je suis plutôt sur la filière viande bovine, mais

05:17l'organisation de la filière viande bovine et de l'élevage, c'est-à-dire qu'il a été mis en place

05:20depuis 40 ans, a donné énormément de grains à moudre à ces gens-là, à ces activistes. Le fait

05:26de produire en France des animaux dont on ne mangera pas la viande et donc de les exporter

05:30vivants dans des pays très loin, le fait de déplacer les animaux du bassin à l'étang vers

05:37le grand ouest dans les abattoirs là où ils sont tous concentrés, là aussi ça fait du transport

05:40d'animaux vivants qui est inconcevable. Mais qui est inconcevable pas que pour les vegans, les

05:44consommateurs ne le conçoivent pas, les éleveurs ont du mal à l'accepter aussi. Surtout quand ils

05:49habitent à 30 km d'un abattoir et qu'on leur dit non non ça va être abattu à l'enson, à vitrées

05:55Ok, on espère que tous ces projets aboutiront et ça montre encore une fois l'importance de

06:02communiquer auprès du grand public pour les rapprocher de l'élevage. Je pense que les

06:07éleveurs, moi-même j'ai vécu des attaques de vegans, c'est très très douloureux, c'est très

06:12culpabilisant. Je pense qu'il ne faut pas hésiter à parler de notre métier, à parler d'élevage etc,

06:18à parler de ce que c'est que l'élevage. En fait dans la vie, et c'est ce qu'on se rend compte quand

06:22on est éleveur, c'est jamais tout noir ou tout blanc, c'est tout le temps des nuances de gris et on

06:26doit s'en accommoder, c'est comme ça. Il n'y a rien qui est franchement mal ou franchement bien.

06:31Et l'élevage, on est tout le temps en train de naviguer là-dedans et donc peut-être qu'on

06:34est habitué à ça et qu'on n'a pas été habitué à parler de cela et c'est ce que nous oblige la

06:38société en ce moment. Et je vous ai pas demandé, le camion, il devrait arriver quand le camion

06:43d'abattage ? On espère 2019, on n'a pas de date mais dès qu'on est au courant, on vous met un mail.

Recommandations